B. CE N'EST QU'UNE ETAPE DANS LA PROMOTION D'UN MODELE D'EXCELLENCE COMMUNAUTAIRE

Le PIC procède d'une volonté de redémarrage de la stratégie de Lisbonne sur des bases plus pragmatiques. Mais le pragmatisme n'exclut pas l'ambition et il ne faudrait pas qu'après avoir pêché par idéalisme, la stratégie de Lisbonne se limite à un alignement de mesures isolées. Son objectif doit toujours être de permettre à l'Europe de s'insérer par le haut dans la mondialisation, dans le respect de son modèle économique, social et environnemental. Cette synthèse doit se réaliser au travers d'un axe mobilisateur, celui de l'excellence communautaire .

a) L'excellence communautaire, la meilleure des préférences communautaires

Le débat sur le redémarrage de la stratégie de Lisbonne doit donner aux Européens l'occasion de choisir leur place dans la mondialisation et celle qu'ils veulent laisser aux générations qui suivent. Les Etats-Unis misent sur leur avance scientifique et la force de leurs multinationales et la Chine s'impose comme l'atelier du monde. Quant à la vision de la place de l'Europe, elle demeure des plus floues. La stratégie européenne pourrait reposer sur deux piliers : l'arme défensive de la «préférence communautaire» 24 ( * ) relayée par l'arme offensive de l'excellence communautaire . Dans certains domaines, l'Union européenne a su créer des défenses pour éviter d'être une perdante du commerce international. Elle doit aussi savoir être offensive pour être une des grandes gagnantes de la mondialisation.

La préférence communautaire a ses mérites et ils sont connus et défendus dans le domaine agricole. Reste désormais à faire préférer le made in Europe, pour sa qualité et son savoir faire, et non seulement parce qu'ils bénéficie de protections douanières 25 ( * ) . En relais de la préférence communautaire, l'excellence communautaire mérite d'être de plus en plus intégrée dans nos raisonnements. Elle a vocation à occuper progressivement une place centrale dans notre façon de nous situer dans la mondialisation. C'est à cette condition qu'elle pourra ensuite se traduire dans les politiques et les stratégies de négociations internationales que l'Union européenne adoptera pour promouvoir ses intérêts.

L'enjeu fondamental de la stratégie de Lisbonne réside bien dans la question de l'excellence communautaire .

Celle-ci exprime une confiance dans notre capacité à gagner ensemble. Il n'y a aucune fatalité à ce que les succès européens comme l'Airbus, Galileo ou Iter demeurent isolés. Ils doivent constituer un véritable modèle, celui de la mise en relation des meilleurs savoir-faire européens.

Elle rappelle aussi que cette mise en relation suppose l'existence d'un véritable espace européen destiné à la production des innovations (espace européen de la recherche), à leurs financements, à leur diffusion et à leur mise en oeuvre, d'où la nécessité de réformes structurelles en ce sens. Chacun sait qu'un des atouts essentiels des Etats-Unis tient à la taille et au dynamisme de leur marché intérieur, tant du point de vue de l'offre que la demande. La construction européenne nous donne la possibilité d'organiser un espace comparable basé sur nos propres règles. Il ne faut pas s'en priver sinon ce sont d'autres qui imposeront leurs règles à l'Europe.

Sur la proposition de PIC et au-delà, le Gouvernement français doit veiller à inscrire son action dans le cadre de la promotion de l'excellence communautaire.

b) Le PIC n'est qu'une étape car la stratégie européenne de croissance doit demeurer à la fois économique, sociale et environnementale

Le fait que le nombre excessif d'objectifs ait été un des défauts majeurs de la stratégie de Lisbonne ne doit pas pour autant la conduire à se cantonner désormais au seul domaine de l'innovation technologique. Ce serait une grave erreur car il existe une cohérence profonde entre les composantes économique, sociale et environnementale du projet.

En effet, la stratégie européenne doit précisément viser à réaliser la croissance économique par le social 26 ( * ) et pour le social 27 ( * ) .

De même, la croissance durable, spécificité européenne, peut aussi être tirée par les technologies de l'environnement.

C'est parce qu'un pays seul n'est pas en mesure d'imposer ce modèle spécifique, que la stratégie doit être conduite au niveau européen et qu'elle justifie les efforts des gouvernements nationaux.

A ce titre, le PIC appelle plusieurs observations :

1°) En matière économique, le PIC manque d'une référence claire aux mesures de politiques industrielles qui pourraient être menées vis-à-vis des entreprises des secteurs concernés : les banques, les entreprises de télécommunications et d'énergie. Il est en effet important de rappeler que la compétitivité et l'innovation peuvent être renforcées par des politiques publiques volontaristes 28 ( * ) . Cette idée défendue par la France avait fait son apparition dans la décision du Conseil de mars 2005 et elle doit maintenant être mise en oeuvre.

Il serait souhaitable que la France promeuve cette articulation entre la stratégie de Lisbonne et la politique industrielle nationale.

2°) En matière environnementale, on ne peut que se satisfaire de l'importance donnée aux éco-technologies dans le programme « innovation et esprit d'entreprise » ainsi, bien entendu, que dans le programme « énergie intelligente ». Il s'agit en effet de domaines stratégiques dans lesquels l'Europe dispose d'une avance qui doit lui permettre de gagner des parts de marchés et d'assurer la soutenabilité de son propre développement.

3°) Cependant, en matière sociale, malgré les actions en faveur de l'Internet pour tous, le PIC reste en retrait, ce qui est logique pour un programme essentiellement centré sur l'innovation.

Le PIC constitue donc une première étape utile au redémarrage de la stratégie de Lisbonne qui veille à intégrer des aspects environnementaux et sociaux dans des actions d'innovation technologique.

Cette approche globale -à la fois économique, sociale et environnementale- devra être approfondie dans la suite des mesures de Lisbonne, car la stratégie européenne de croissance ne doit pas devenir un succédané du PCRDT 29 ( * ) .

*

* *

Lors de sa réunion du mercredi 9 novembre 2005, après avoir rejeté l'amendement n° 1, adopté les amendements n°s 2 et 3 rectifié puis pris acte du retrait de l'amendement n° 4 30 ( * ) , la commission des affaires économiques a adopté la proposition de résolution dont le texte suit.

* 24 Cette préférence est officiellement reconnue en matière agricole par la déclaration n°14 annexée au Traité du 7 février 1992 signée à Maastricht et instituant l'Union européenne.

* 25 D'ailleurs, ces protections connaissent une tendance à la diminution dans le cadre des négociations multilatérales qui ont connu un nouvel élan depuis l'accord signé à Marrakech le 15 avril 1994.

* 26 Lutte contre l'exclusion sociale, développement des ressources humaines.

* 27 Financement de notre modèle social, face au vieillissement.

* 28 Une des démonstrations en est donnée par le rapport d'information n°374 du groupe de travail sur les délocalisations des industries de main d'oeuvre, déposé le 23 juin 2004 par M. Francis Grignon, rapporteur.

* 29 Programme-cadre de recherche et de développement technologique.

* 30 Ces amendements sont annexés au présent rapport.

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