AUDITION DE MME RACHIDA DATI, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE
Réunie le mercredi 14 novembre 2007, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'audition de Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi de finances pour 2008.
M. Jean Arthuis, président , a rappelé les travaux conduits par le rapporteur spécial, M. Roland du Luart, sur la question des frais de justice ainsi que, plus récemment, de l'aide juridictionnelle. Il a indiqué que la commission a demandé une enquête de la Cour des comptes, au titre de l'article 58-2° de la LOLF, sur le sujet de l'aide juridictionnelle et de la gestion des caisses autonomes de règlement pécuniaire des avocats (CARPA).
Après avoir repris un certain nombre de ses propos tenus la veille, lors de son audition par la commission des lois, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice , a souligné sa volonté de développer des partenariats innovants au service de la justice. Elle a indiqué que le ministère de la justice avait signé, en juillet 2007, un accord de coopération avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) en vue de la numérisation et de la dématérialisation des procédures judiciaires, et que cette institution participerait également à l'accompagnement social de la réforme de la carte judiciaire.
Elle a ajouté qu'un autre accord de partenariat avait été signé le 15 septembre 2007 avec les représentants des exploitants d'hélicoptères pour lutter contre les évasions. Elle a précisé que ces exploitants vérifieront désormais l'identité de leurs clients et feront preuve d'une vigilance renforcée au moment de l'embarquement.
Un très large débat s'est ensuite instauré.
Après que M. Jean Arthuis, président , eut rappelé l'importance du bon fonctionnement du service de la justice, qui est au coeur du pacte républicain, M. Philippe Marini, rapporteur général , a salué le courage nécessaire dans l'action de réforme de la carte judiciaire. Il s'est étonné de la situation inédite engendrée par les grèves déclenchées par les avocats dans certains barreaux, parfois soutenus par les magistrats, en réaction aux annonces faites par le garde des sceaux en ce domaine. Tout en rappelant son attachement au principe d'indépendance de la magistrature, il a considéré qu'une telle situation appelait une réponse de l'Etat et s'est interrogé sur un tel mode d'expression de la part de magistrats devant assurer la continuité de l'administration de la justice.
Mme Rachida Dati a précisé que peu de magistrats s'étaient prononcés contre la réforme de la carte judiciaire. Elle a regretté les délais supplémentaires provoqués par ces mouvements de grève, notamment dans le cadre des cours d'assises. Elle a, en outre, indiqué que des pistes de travail étaient en cours d'examen à la chancellerie afin d'assurer une compensation aux avocats plus particulièrement touchés par cette réforme.
Elle a précisé qu'une difficulté résidait dans un problème d'organisation de la profession d'avocat et qu'il convenait, par ailleurs, de dissiper une confusion trop longtemps entretenue autour de la notion d'indépendance de la magistrature. Elle a ajouté que le statut des magistrats du parquet ne leur conférait pas l'indépendance, tandis que celui des magistrats du siège leur garantissait uniquement l'indépendance au regard des décisions de justice rendues.
Mme Rachida Dati a souligné qu'il convenait de rappeler chacun à ses obligations et que la réforme de la carte judiciaire avait été largement portée par les chefs de cours.
M. Jean Arthuis, président , a rappelé que depuis la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, l'obligation de reddition de comptes était, pour tout agent public, une obligation à caractère constitutionnel.
M. Roland du Luart, rapporteur spécial , a estimé que la réforme en cours de la carte judiciaire devait permettre une utilisation plus rationnelle des moyens de la justice. Il a toutefois précisé que, si cette réforme pouvait déboucher sur des gains à long terme, elle aurait assurément, à court terme, un coût que n'intégrait pas le projet de loi de finances pour 2008. Il s'est interrogé sur l'estimation de ce coût en 2008 et pour les années suivantes.
Indiquant que le projet de loi de finances pour 2008 prévoyait une enveloppe budgétaire de 318,1 millions d'euros pour l'aide juridictionnelle, soit un montant identique à celui de 2007, il a considéré que les crédits consacrés à cette aide ne pouvaient pas croître indéfiniment, et qu'une réforme en profondeur était nécessaire. Il a insisté sur les pistes dégagées à l'issue de son récent rapport n° 23 (2007-2008) faisant suite à sa mission de contrôle budgétaire : la création d'un ticket modérateur justice, une répartition plus équitable de la charge du service de l'aide juridictionnelle, via un système de participation en temps ou en argent de la part des avocats, inspiré du « pro bono » américain, et la modernisation du barème servant de base pour la rémunération des avocats. Il s'est interrogé sur les orientations que souhaiterait privilégier la chancellerie dans ce domaine, ainsi que sur le calendrier retenu.
Il a ajouté que toute mesure touchant à la justice devait faire l'objet d'une évaluation préalable au regard de son impact budgétaire. A cet égard, il a regretté que, pour avoir trop souvent oublié cette règle, les gouvernements successifs avaient présenté des textes inapplicables ou dégradant gravement l'équilibre budgétaire de la mission « Justice », et que le législateur les avait adoptés. Il a demandé au garde des sceaux de s'engager, en début de législature, à systématiser les études d'impact budgétaire préalables aux prochaines réformes.
Mme Rachida Dati a indiqué qu'une enveloppe budgétaire de 1,5 million d'euros était prévue en 2008 pour des mesures d'accompagnement social de la réforme de la carte judiciaire et que 121 millions d'euros, pour un total de 800 millions d'euros sur six ans, étaient budgétés en matière immobilière.
Revenant sur le déplacement effectué au printemps 2007 par la commission au tribunal de grande instance du Mans, M. Jean Arthuis, président, a insisté sur la nécessité d'assurer la compatibilité entre les systèmes d'information utilisés par les officiers de police judiciaire (OPJ), les greffes des juridictions et les services assurant la comptabilité publique, afin de surmonter l'allongement des délais de traitement des dossiers.
Mme Rachida Dati a rappelé que cette question était au coeur de la réflexion de la chancellerie depuis 1999, mais que peu de progrès avaient été, jusqu'à récemment, accomplis. Elle a indiqué qu'au sein du ressort d'une même cour d'appel, certains tribunaux de grande instance utilisaient des logiciels incompatibles entre eux et que de telles carences étaient particulièrement problématiques pour la consolidation des informations.
Elle a déclaré que certaines juridictions étaient toutefois en pointe sur ces questions, comme par exemple à Angoulême. Elle a considéré que la numérisation des procédures permettait des gains de temps et d'efficacité considérables tout au long de la procédure, et que les avocats étaient d'ailleurs très demandeurs de tels progrès.
Au regard des crédits alloués à l'aide juridictionnelle, elle a remarqué que la consommation pour cette action s'élèverait à 320 millions d'euros en 2007. Précisant qu'elle souhaitait mettre en place un véritable service public de la justice et prévenir les dérives constatées lors de la dramatique « affaire d'Outreau », elle a annoncé qu'elle engagerait la réflexion sur la réforme de l'aide juridictionnelle avant la fin de l'année 2007 et qu'elle s'appuierait sur les conclusions de la mission de contrôle budgétaire conduite par M. Roland du Luart.
Elle a, en outre, approuvé la nécessité de systématiser les études d'impact avant l'adoption d'un texte de loi concernant l'institution judiciaire. Elle s'est d'ailleurs félicitée du renforcement prochain des pôles de l'instruction qui favoriseront une meilleure exécution des courtes peines. Elle a également rappelé la création, par l'Assemblée nationale, d'une mission d'évaluation sur l'exécution des peines et a indiqué qu'elle suivrait attentivement les conclusions de cette mission.
M. Jean Arthuis, président , a indiqué qu'à l'avenir le Parlement pourrait refuser de délibérer sur un texte sans étude d'impact préalable.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, a souligné l'importance accordée par la commission des lois à l'évaluation, a posteriori, des textes votés. Il a souhaité qu'à cet égard les efforts très significatifs réalisés par l'administration pénitentiaire puissent être évalués de manière précise, notamment dans le cas des établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM) et des centres éducatifs fermés (CEF), dont les prix de journée sont particulièrement élevés.
Il a ajouté que l'organisation des établissements pénitentiaires de notre pays était très variable d'un site à un autre, et qu'il convenait donc de procéder à une évaluation précise des conditions de détention et de leur incidence en matière de réinsertion et de récidive.
Mme Rachida Dati a reconnu qu'il était utile de mettre en place un outil statistique plus homogène permettant d'étudier la population carcérale et son taux de réinsertion. Elle a indiqué son intention de conduire une évaluation dans cette perspective sur les EPM et les quartiers pour mineurs.
M. Eric Doligé s'est interrogé sur les compensations pouvant être accordées dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire, et notamment sur l'éventualité de la mise en place de retraites anticipées. Il a regretté, par ailleurs, que les moyens mis à disposition pour répondre à la délinquance des mineurs ne soient pas mieux adaptés à la réalité et que des maisons de l'enfance voient leur fonctionnement perturbé par certains placements.
Il a ajouté, en matière de performances, que le recours à la visioconférence devait être accru et que la question des transfèrements de détenus devait être prise en compte dans la redéfinition de la carte judiciaire. Il s'est enfin interrogé sur la nécessité d'enregistrer tous les interrogatoires.
M. Michel Charasse a jugé nécessaire d'engager la réflexion sur les bâtiments pouvant être libérés dans le cadre de la révision de l'implantation des juridictions. Il a noté que ces bâtiments pouvaient être la propriété de l'Etat, de départements ou de simples locations, et qu'il convenait d'envisager d'éventuelles négociations avec les conseils généraux concernés. Il a en outre relevé que la vente de ces bâtiments serait à l'origine de recettes exceptionnelles à répartir entre les parties prenantes.
Il a estimé, par ailleurs, qu'en matière de sécurisation des palais de justice une clarification des responsabilités s'imposait, et que des inspections régulières devaient être envisagées, dès lors que ces bâtiments accueillaient le public.
Il a demandé au garde des sceaux une liste à jour des condamnations récentes de la France par la Cour de justice des communautés européennes, afin de pouvoir estimer le montant des amendes prononcées contre notre pays.
M. Alain Lambert est tout d'abord revenu, pour les regretter, sur les modalités d'examen en séance publique, en l'état actuel du texte constitutionnel, du budget de la sécurité sociale et du budget de l'Etat.
Il a considéré que si la réforme de la carte judiciaire pouvait être souhaitable, il était difficile de comprendre qu'elle passe par la suppression de juridictions ou de pôles de l'instruction, et qu'on n'ait pas tenté de créer des juridictions de première instance en fusionnant les tribunaux d'instance et les tribunaux de grande instance. Il a, en particulier, regretté la disparition de certains pôles de l'instruction, estimant que la justice s'éloignerait, de ce fait, dangereusement du justiciable. Il a, en outre, déploré que cette révision s'appuie sur une géographie administrative ne tenant pas compte des délais de route.
Il a évoqué le manque de places offertes au sein des établissements pénitentiaires et a estimé que la raison ne pouvait en être cherchée que du côté d'une insuffisance de crédits ou d'une trop grande complexité des montages immobiliers à l'origine des lenteurs.
M. Gérard Longuet s'est interrogé sur les modalités d'amortissement du programme immobilier évoqué par le garde des sceaux et portant sur un montant total de 800 millions d'euros sur six ans.
Il a considéré que l'intention parfois évoquée de créer une indemnité viagère pour les avocats était incompatible avec leur statut libéral. Il a, par ailleurs, souligné le coût très élevé du traitement de la délinquance dans les établissements de l'administration pénitentiaire.
Il a enfin proposé une évaluation de la qualité juridique des décisions prises, appréciée notamment sous l'angle du taux d'appel relatif aux décisions rendues par les cours d'assises.
M. Joël Bourdin a observé que la réforme de la carte judiciaire devait s'accompagner d'une réflexion sur le fonctionnement des tribunaux de commerce et des conseils de prud'hommes.
M. François Marc s'est interrogé sur la notion de performance au sein des juridictions et sur la possibilité de s'inspirer de la réussite de la mise en réseaux des pôles de compétitivité dans le cadre de la reconfiguration de la carte judiciaire. Il s'est, en outre, inquiété de la sécurisation des informations échangées, sur internet, dans le cadre de la procédure judiciaire.
M. Philippe Dallier s'est étonné de ce que certains crédits, gérés par la direction interministérielle à la ville (DIV), et concernant des dispositifs tels que des services d'accès aux victimes ou des points d'accès au droit, relèvent de la mission « Ville et logement ».
Mme Nicole Bricq a estimé que les suppressions de juridictions, dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire, devaient avant tout profiter aux ressorts les plus chargés. Elle s'est par ailleurs interrogée sur une spécialisation accrue des magistrats, ainsi que sur d'éventuelles compensations au profit des départements subissant des suppressions de tribunaux.
M. Jean Arthuis, président , a déclaré que des éléments de clarification devaient être apportés sur l'avenir des pôles de l'instruction, et a rappelé qu'un mouvement de spécialisation des juridictions, notamment en matière financière, semblait être engagé.
M. Michel Charasse a observé que le plan actuel de restructuration de la carte des chambres régionales des comptes pouvait fournir des solutions aux problèmes immobiliers posés par la réforme de la carte judiciaire et qu'une coordination entre ces deux réformes pourrait utilement être mise en oeuvre.
En réponse aux différents intervenants, Mme Rachida Dati a indiqué que cette réforme prenait en considération les regroupements éventuels de services publics. Elle a ajouté que la création des pôles de l'instruction, au plus tard le 1er mars 2008, et d'abord pour les affaires criminelles, visait à éviter l'isolement du juge. Elle a précisé que ces pôles concentraient moins de 5 % du total des affaires pénales et qu'ils ne pouvaient pas être considérés comme un élément moteur de la justice de proximité, mais qu'ils allaient dans le sens d'une spécialisation des juridictions.
M. Jean Arthuis, président , a observé que ces pôles contribuaient à un renforcement du rôle du parquet.
Mme Rachida Dati a précisé qu'un tel renforcement passait surtout par la création de bureaux des enquêtes et que les pôles de l'instruction ne traiterait qu'un nombre marginal d'affaires au pénal.
M. Alain Lambert a souligné que, dans ce contexte, le rôle de la commission serait de vérifier, à un horizon de deux à trois ans, si les choix effectués aujourd'hui étaient les bons, en analysant notamment le coût de l'instruction.
Mme Rachida Dati a affirmé qu'il n'avait jamais été question de proposer une retraite anticipée à certains avocats dans le cadre de l'accompagnement social de la réforme de la carte judiciaire. Elle a en revanche indiqué que la compensation pouvait passer par la création d'un poste de vice-bâtonnier au sein des barreaux, la représentation obligatoire dans le cadre de certains contentieux relativement complexes (comme ceux du droit de la consommation), la multipostulation pour les avocats et la création de passerelles de la profession d'avocat vers les métiers de la magistrature.
Elle a toutefois relevé que l'une des difficultés actuelles résidait dans l'absence de position commune au sein de la profession d'avocat.
Elle a ajouté que la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance établissait une distinction claire entre le mineur en danger et le mineur délinquant. Elle a considéré qu'il s'agissait, dès lors, d'adapter la prise en charge aux situations données et d'intervenir le plus tôt possible auprès du mineur afin d'éviter d'être ensuite contraint de mettre en oeuvre des solutions lourdes et coûteuses, telles que le placement en CEF.
Elle a regretté que les magistrats eux-mêmes nourrissent une certaine ambiguïté entre l'assistance éducative et les mesures s'appliquant à un mineur délinquant.
M. Jean Arthuis, président , a déploré que cette ambiguïté se prolonge dans une confusion des rôles entre, d'un côté, l'Etat et, de l'autre, les départements, qui prennent en charge une part de l'assistance éducative.
Mme Rachida Dati a indiqué qu'elle avait demandé une expérimentation visant à dissocier le juge pénal du juge pouvant prescrire une assistance éducative. Elle s'est en outre prononcée pour la généralisation de la visioconférence, en soulignant son intérêt, par exemple dans le cas de la reconduction d'un mandat de dépôt.
Elle a ajouté que le rapprochement des tribunaux de grande instance et des établissements pénitentiaires faisait partie de l'un des objectifs de la réforme de la carte judiciaire. Elle a toutefois souligné la difficulté de trouver un site pour implanter une prison, mais a également précisé que le programme immobilier pénitentiaire s'accélérerait grâce à un recours plus large aux contrats de partenariat public/privé.
S'agissant des éventuelles recettes provenant de la vente d'immeubles abritant actuellement des tribunaux, Mme Rachida Dati a rappelé que l'Etat n'était que rarement propriétaire de ces bâtiments.
En matière de sécurisation des palais de justice, elle a indiqué que 20 millions d'euros avaient été consacrés à cette question depuis l'agression survenue au tribunal de grande instance de Metz, en juin 2006. Elle a souligné que, d'ici à janvier 2008, tous les tribunaux de France auront fait l'objet de mesures de sécurité supplémentaires, mais qu'un certain nombre de problèmes se posaient du fait du classement de certains sites et de la nécessité de mettre aux normes certains bâtiments.
M. Jean Arthuis, président , a insisté sur le devoir d'exemplarité de la justice en matière de respect des normes de sécurité.
Mme Rachida Dati a rappelé que les questions de sécurité au sein des palais de justice relèvent de la responsabilité du président de la juridiction.
M. Michel Charasse a toutefois souhaité une clarification de ce régime de responsabilité.
Mme Rachida Dati a indiqué qu'elle transmettrait, dans les meilleurs délais, au rapporteur spécial, la liste des condamnations de la France par la Cour de justice des communautés européennes.
M. Jean Arthuis, président , a souligné que, depuis la LOLF, ces condamnations devaient faire l'objet, dans le bilan de l'Etat, de provisions, en application du principe de précaution.
M. Michel Charasse a remarqué que, s'agissant de telles condamnations, il convenait aussi de connaître la suite réservée à ces décisions de justice et leurs éventuelles retombées en droit interne.
Mme Rachida Dati a rappelé que la précédente réforme de structure de l'institution judiciaire remontait à 1958, et que la création d'un tribunal de première instance par département ne faisait pas l'objet d'un consensus, en particulier auprès des élus.
Elle a souligné que, dans le cas des tribunaux de grande instance supprimés, la réforme ne concernait que la matière pénale et pas les affaires civiles. Elle a ajouté que, dans le cas des tribunaux d'instance, les critères retenus avaient été notamment ceux du nombre d'affaires traitées dans les domaines du surendettement, de la consommation et du droit des tutelles. Elle a précisé que ni le contentieux lié au surendettement, ni celui lié au droit de la consommation, ne donnaient lieu à comparution. Elle a également rappelé que, dans le cas des dossiers de tutelle, le juge devait d'ores et déjà fréquemment se déplacer, par exemple dans les maisons de retraite ou les hôpitaux.
Mme Rachida Dati a insisté sur la nécessité de développer des points d'accès au droit, et a souligné qu'aujourd'hui 100 tribunaux d'instance, sur les 475 existants, n'avaient aucun magistrat ni fonctionnaire à temps plein. Elle a également observé qu'actuellement 350 postes de magistrats restaient vacants.
M. Jean Arthuis, président , a estimé que le rôle du juge des tutelles avait vocation à se développer.
Mme Rachida Dati a déclaré que le nombre de places en établissements pénitentiaires allait croître de 13.000 d'ici à 2012, et qu'il convenait de rattraper le retard pris par l'exécution partielle de la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation judiciaire (LOPJ). Elle a précisé que les 800 millions d'euros prévus en six ans pour la mise en oeuvre du programme immobilier dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire ne tenaient pas compte du projet de déplacement du tribunal de grande instance de Paris.
Elle a relevé que l'indemnisation des avocats concernait essentiellement 200 d'entre eux tirant majoritairement leurs ressources de l'aide juridictionnelle.
Concernant le coût des structures dédiées aux jeunes délinquants, elle a indiqué qu'une journée en CEF coûtait 600 euros et qu'une journée en établissement pour mineurs revenait à 85 euros.
Afin de garantir une meilleure stabilité des décisions de justice, Mme Rachida Dati a annoncé la création de pôles spécialisés dans le contentieux de l'amiante, afin d'assurer une plus grande homogénéité des décisions et des niveaux d'indemnisation.
Elle a indiqué que, s'agissant des conseils de prud'hommes, la négociation portait également sur les sections de ces tribunaux, le secteur de l'industrie perdant de son importance relative par rapport au secteur tertiaire.
En matière de performance des juridictions, elle a souligné que le regroupement des moyens et la création de pôles de compétence devaient permettre d'améliorer les délais de traitement des affaires.
En outre, elle a rappelé que, grâce à la loi précitée relative à la prévention de la délinquance, certains crédits de la justice avaient été, en quelque sorte, « sanctuarisés ».
Elle a par ailleurs observé que la réorganisation d'un service dans une commune devait s'accompagner d'une réflexion d'ensemble sur les projets pouvant être menés en relation avec d'autres services publics pour préserver les grands équilibres de la ville concernée.
M. Jean Arthuis, président , a estimé que l'ampleur du « chantier », représenté par la réforme de la carte judiciaire et les nombreux dysfonctionnements de l'institution judiciaire, devaient inciter à se concentrer sur les priorités plutôt qu'à chercher à faire adopter de nouvelles lois.