Article 62 - Adaptation des dispositions relatives aux documents stratégiques de façade à la situation des collectivités territoriales d'outre-mer
Commentaire : cet article habilite le gouvernement à étendre et adapter les dispositions relatives aux documents stratégiques de façade aux collectivités territoriales d'outre-mer.
I. Le dispositif du projet de loi
L'article 60 du projet de loi prévoit la mise en place d'une stratégie nationale pour la mer définissant les principes d'une gestion intégrée des activités liées à la mer et au littoral dans le cadre d'un développement durable des ressources. Les principes et orientations définis dans cette stratégie nationale sont ensuite déclinés, à une échelle adaptée, en prenant en compte les particularités de la façade considérée , dans des documents stratégiques de façade qui précisent les objectifs environnementaux, économiques et sociaux que doivent respecter les activités et les projets en mer et que doivent prendre en compte les activités terrestres ayant des incidences significatives en mer .
Ce dispositif, qui s'applique sur tout le territoire national, présente une importance particulière outre-mer où se situe 97 % de la zone maritime française.
Certaines problématiques ultramarines (atolls, corail, iceberg...) ne concernent pas la métropole, mais ces spécificités sont plus liées à la situation géographique des territoires concernés qu'au statut institutionnel. La stratégie nationale de la mer pourra donc aborder toutes les problématiques maritimes, qu'elles soient métropolitaines ou ultramarines , même si elle devra vraisemblablement traiter explicitement certaines problématiques propres aux régions ultramarines, notamment pour les aspects géopolitiques et les questions liées à la coopération (conventions de mers régionales, partenariats régionaux...).
Il n'en va pas de même des dispositions prévues en matière de documents stratégiques de façade . L'article 60 prévoit en effet l'obligation d'établir des schémas pour toutes les façades maritimes, mais les articles L. 219-3 à L. 219-5 du code de l'environnement créés par l'article précité visent spécifiquement les façades métropolitaines. Une adaptation aux collectivités territoriales d'outre-mer donc est donc nécessaire. Sur le principe, les documents stratégiques de façade pour l'outre-mer ne devraient pas différer des documents stratégiques métropolitains. Cependant, leur processus d'élaboration et d'adoption dépendra du contexte institutionnel et juridique propre à chaque collectivité .
- Pour les départements et régions d'outre-mer : la situation institutionnelle est très proche de la situation métropolitaine, les compétences en matière de mer appartenant pour l'essentiel à l'Etat. Cependant des instruments juridiques spécifiques existent, donnant aux collectivités des responsabilités particulières en mer. Les régions peuvent ainsi développer des schémas d'aménagement régional (SAR) comprenant un volet valant schéma de mise en valeur de la mer, et intervenir en particulier dans le domaine de la gestion des ressources biologiques et non biologiques en zone économique exclusive (ZEE).
- S'agissant des autres collectivités ultramarines, certaines, notamment dans le Pacifique (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française), mais également dans les Caraïbes (Saint-Barthélemy) se sont vues transférer par des lois organiques des compétences étendues en matière d'environnement, et notamment de mer (gestion et exploitation des ressources biologiques et minérales...). Leurs documents stratégiques de façade, qui ont vocation à couvrir une île ou un archipel, devraient donc être établis par la collectivité compétente, seule ou en collaboration avec l'Etat.
Pour l'instant, selon les informations fournies à votre rapporteur, les collectivités disposant de compétences propres en mer n'ont pas développé d'instrument équivalant au document stratégique de façade mais réfléchissent, de façon autonome, à un tel instrument et à son contenu : un cadrage national présente donc, pour elles un intérêt certain, avec ensuite, une mise en oeuvre autonome.
L e présent article vise à habiliter le gouvernement à étendre et adapter les dispositions des articles L. 219-3 à L. 219-5 relevant de la compétence de l'Etat aux collectivités ultramarines .
Selon les informations fournies à votre rapporteur, c ette adaptation sera opérée en « concertation étroite » avec les collectivités concernées . Cette concertation sera en effet nécessaire au moment de l'établissement de la stratégie nationale afin que les collectivités ultramarines adhèrent aux grandes orientations nationales qui intéressent les espaces marins ultramarins, puis au moment de l'établissement des schémas de façade outre-mer, certaines décisions pouvant avoir des conséquences sur d'autres secteurs (aménagement du territoire, gestion du littoral, eau, énergie,...), l'Etat étant en outre chargé de veiller à ce que les orientations décidées par les collectivités au regard de leurs compétences propres soient compatibles avec les orientations nationales.
II. La position de votre commission
Votre rapporteur note au préalable que le champ géographique de cet article comprend les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution.
Or, pour ces collectivités, comme pour la Nouvelle Calédonie, l'article 74-1 de la Constitution habilite, depuis 2003, de façon permanente le Gouvernement à, « dans les matières qui demeurent de la compétence de l'Etat, étendre, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou adapter les dispositions de nature législative en vigueur à l'organisation particulière de la collectivité concernée, sous réserve que la loi n'ait pas expressément exclu, pour les dispositions en cause, le recours à cette procédure » .
Il n'était donc pas nécessaire d'inclure les collectivités d'outre-mer dans le champ de cet article : leur inclusion n'a qu'une portée symbolique en permettant au Gouvernement d'affirmer qu'il procédera aux adaptations nécessaires.
Par ailleurs, votre rapporteur relève que la rédaction de cet article est perfectible et, surtout, qu'il ne vise en l'état que les départements, régions et collectivités d'outre-mer. La Nouvelle-Calédonie, collectivité sui generis régie par un titre spécifique de la Constitution (le titre XIII), n'est pas incluse dans le champ de l'habilitation, sans qu'aucune raison objective ne l'explique.
En conséquence, la commission a adopté un amendement améliorant la rédaction du présent article et réparant cet « oubli » du Gouvernement.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |