Accéder au dossier législatif

Rapport n° 139 (2009-2010) de M. Patrice GÉLARD , fait au nom de la commission des lois, déposé le 8 décembre 2009

Synthèse du rapport (167 Koctets)

Disponible au format Acrobat (2 Moctets)

Tableau comparatif au format Acrobat (1,1 Moctet)

N° 139

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 décembre 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , portant réforme de la représentation devant les cours d' appel ,

Par M. Patrice GÉLARD,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest , président ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, M. François Zocchetto , vice-présidents ; MM. Laurent Béteille, Christian Cointat, Charles Gautier, Jacques Mahéas , secrétaires ; M. Alain Anziani, Mmes Éliane Assassi, Nicole Bonnefoy, Alima Boumediene-Thiery, MM. Elie Brun, François-Noël Buffet, Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Yves Détraigne, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Pierre Fauchon, Louis-Constant Fleming, Gaston Flosse, Christophe-André Frassa, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Mmes Jacqueline Gourault, Virginie Klès, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Mézard, Jean-Pierre Michel, François Pillet, Hugues Portelli, Bernard Saugey, Simon Sutour, Richard Tuheiava, Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

1709 , 1931 , et T.A. 347

Sénat :

16 et 140 (2009-2010)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

La commission des lois, réunie le mardi 8 décembre 2009 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président , après avoir entendu, au cours de sa réunion du matin du même jour, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a examiné le rapport de M. Patrice Gélard et établi son texte sur le projet de loi n° 16 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel .

La commission des lois a examiné ce texte avec une double préoccupation : améliorer les conditions d'indemnisation du personnel des avoués, puisque plusieurs centaines de personnes seront contraintes de rechercher un nouvel emploi dans un contexte économique défavorable, et assurer une indemnisation complète et équitable des avoués, en veillant plus particulièrement au sort des plus jeunes d'entre eux. Elle a intégré au texte du projet de loi 24 amendements, dont 20 de son rapporteur, un de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et M. Raymond Couderc, deux de M. Jean-Pierre Michel et des membres du groupe socialiste et un de M. Yves Détraigne.

? Garantir au personnel salarié des avoués une indemnisation juste

Jugeant insuffisant le dispositif prévu par le projet de loi de loi adopté par l'Assemblée nationale en première lecture pour l'indemnisation des salariés des avoués, votre commission a adopté un amendement présenté par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et M. Raymond Couderc, prévoyant que les salariés perçoivent, dès lors qu'ils comptent un an d'ancienneté ininterrompue dans la profession, des indemnités de licenciement calculées à hauteur d'un mois de salaire par année d'ancienneté (article 14).

Votre commission a par ailleurs adopté un amendement de son rapporteur prévoyant le versement direct par le fonds d'indemnisation des sommes dues au titre du licenciement des salariés des avoués (article 14).

? Favoriser la reconversion rapide des salariés des avoués

Considérant que le système proposé par le projet de loi paraissait contreproductif, puisqu'il aurait incité les salariés à attendre leur licenciement pour bénéficier d'une indemnité majorée, se révélant ainsi plus coûteux pour l'Etat et préjudiciable à la reconversion des salariés, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur créant une indemnité exceptionnelle de reconversion (article 14). Le montant de cette indemnité, égal à l'indemnité légale de licenciement, serait inférieur à l'indemnité majorée de licenciement.

En outre, afin d'inciter les anciens avoués devenus avocats et l'ensemble des professions juridiques et judiciaires réglementées à recruter d'anciens salariés d'avoués, votre commission a adopté deux amendements de son rapporteur créant une exonération de charges sociales patronales, pour l'emploi de salariés qui faisaient partie du personnel des avoués (articles 13 et 14 bis ).

Cette exonération porterait sur la part des salaires versés à hauteur d'1,5 SMIC. Elle pourrait s'appliquer pendant deux ans maximum pour le même salarié si l'employeur est un ancien avoué, pendant 18 mois au plus dans les autres cas. Cette distinction vise à accompagner les anciens avoués dans le démarrage de leur nouvelle carrière.

? Assurer l'indemnisation complète des préjudices subis par les avoués, en prenant en compte la situation des plus jeunes

Estimant que la suppression des offices d'avoués et du monopole de la postulation en appel constitue une suppression de l'outil de travail des avoués, votre commission a choisi de fonder l'indemnisation des avoués non sur l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, relatif à l'égalité devant les charges publiques, mais sur l'article 17 de cette Déclaration, relatif au droit de propriété.

S'appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, dont l'arrêt Lallement contre France, a consacré l'obligation pour l'Etat d'indemniser la perte de l'« outil de travail » et les préjudices matériels qui en résultent, elle a adopté un amendement de son rapporteur confiant au juge de l'expropriation la détermination du montant de l'indemnité accordée aux avoués (article 13).

Elle a par ailleurs précisé que le juge devrait déterminer l'indemnité spécifique allouée aux avoués exerçant au sein d'une société dont ils détiennent des parts en industrie, afin d'assurer, en tenant compte de leur âge, la réparation du préjudice qu'ils subissent du fait de la loi.

Considérant que l'indemnité qui sera accordée aux avoués ne doit pas être soumise à l'impôt sur les plus-values, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur prévoyant que les plus values réalisées dans le cadre du versement de l'indemnité sont exonérées de toute imposition (article 13).

Votre commission souligne que le dispositif renvoyant au juge de l'expropriation l'indemnisation des avoués apparaît indispensable à l'indemnisation équitable de ces derniers, aussi longtemps que le Gouvernement ne propose pas de dispositif alternatif susceptible d'assurer la réparation complète des préjudices occasionnés par la loi.

? Aménager la période transitoire préalable à la disparition de la profession d'avoué

Jugeant indispensable la période transitoire pendant laquelle les avoués pourront également exercer la profession d'avocat, dans les mois précédant la disparition de leurs offices, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur reportant le début de cette période du 1er janvier 2010 à la date de la publication de la loi (article 24).

Elle a en effet estimé que, selon toute vraisemblance, le texte ne pourrait être promulgué avant le printemps 2010. La période transitoire devrait donc être réduite de 12 à moins de 9 mois.

Votre commission a par ailleurs adopté un amendement présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues afin de prévoir que, pendant la période transitoire, il appartient à la partie intéressée - et non à l'avocat lui-même - de renoncer à l'assistance de son avocat, pour confier à l'avoué (devenu avocat) la mission de plaider.

? Préciser le régime des transferts financiers entre les caisses de retraite

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur afin de préciser les conditions selon lesquelles les caisses de retraite des avoués et des avocats assumeront leurs obligations à l'égard des anciens avoués. Le dispositif adopté par la commission prévoit que :

- chaque caisse versera les pensions au prorata du temps d'exercice de l'intéressé dans les professions d'avoué et d'avocat ;

- les transferts financiers tiennent compte des réserves constituées par chacune des caisses considérées et sont établis au prorata des effectifs d'anciens avoués rejoignant effectivement la profession d'avocat. Cette précision permettra d'assurer des transferts financiers équitables entre les caisses.

Votre commission a par ailleurs adopté deux amendements présentés par M. Jean-Pierre Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, afin de préciser :

- que les salariés trouvant un emploi auprès d'un avocat conserveront le bénéfice de l'intégralité des avantages individuels acquis en application de leur ancienne convention collective nationale (article 9) ;

- que les salariés des avoués qui relèveront, s'ils deviennent salariés d'un avocat, de la Caisse de retraite du personnel des avocats, conserveront le bénéfice de leurs cotisations (article 10).

La commission des lois a adopté le projet de loi ainsi modifié.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Près de quarante ans après la suppression des avoués près les tribunaux de grande instance, le Gouvernement soumet au Parlement un projet de loi dont l'objet est de faire disparaitre du paysage juridique français la profession d'avoué près la cour d'appel.

Cette disparition constitue un changement historique dans l'organisation de la justice d'appel dans notre pays. Elle semble cependant intervenir dans la discrétion tant les avoués constituent, selon M. Jean-Jacques Fanet, ancien président de la Chambre nationale des avoués, « une profession généralement méconnue, très peu nombreuse et hyperspécialisée » 1 ( * ) . Ces avoués « dont on ne parle jamais » n'interviennent en effet, depuis 1971, qu'au niveau de l'appel en matière civile et commerciale.

De fait, la réforme des professions juridiques et judiciaires entreprise par la loi du 31 décembre 1971 pouvait être considérée comme incomplète, en particulier au regard de la règlementation européenne. Des travaux de réflexion engagés à l'initiative du Président de la République ont toutefois recommandé la fusion des professions d'avoué et d'avocat, afin de simplifier l'accès à la justice d'appel et d'en réduire le coût 2 ( * ) .

Ainsi, le Sénat est appelé à examiner le projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d'appel n° 16 (2009-2010), adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 7 octobre 2009.

Entre trois options possibles, présentées dans l'étude d'impact jointe au projet de loi déposé à l'Assemblée nationale en juin 2009, le Gouvernement a retenu celle de la fusion des professions d'avoué et d'avocat à l'issue d'une période transitoire et avec un accompagnement des salariés. Il a préféré cette solution à la fusion immédiate des professions d'avoué et d'avocat, ainsi qu'à la création d'avocats spécialisés en appel, qui auraient remplacé les avoués près les cours d'appel.

Le projet de loi prévoit en conséquence la disparition de la profession d'avoué près la cour d'appel le 1 er janvier 2011, les avocats exerçant alors la mission de postulation en appel aujourd'hui dévolue aux avoués.

Cette réforme aura donc des conséquences majeures sur la procédure d'appel. Mais elle entraînera avant tout des répercussions directes et déterminantes sur la vie de plus de 2.000 personnes, dont 434 avoués et 1.650 salariés .

Pour la plupart de ces personnes, la réforme constituera un bouleversement. Elle conduira de jeunes avoués à renoncer à la carrière qu'ils avaient choisie et qu'ils venaient de commencer, pour s'engager dans une nouvelle voie.

Elle provoquera le licenciement de nombreux salariés , dans un contexte économique défavorable, qui rend la recherche d'un nouvel emploi plus difficile. Beaucoup, avoués ou salariés, devront se former pour s'adapter à une nouvelle profession, accepter une mobilité géographique et une réduction de leurs revenus.

L'Etat doit donc assurer pleinement la compensation du préjudice subi par ces personnes, en raison de la disparition des offices d'avoués qu'il décide. Telle fut la première préoccupation de votre rapporteur au cours des nombreuses auditions qu'il a conduites depuis le 6 octobre 2009.

Cependant, en ce domaine, la capacité d'action de votre commission, comme de l'ensemble des parlementaires, s'exerce dans les limites de l'article 40 de la Constitution, aux termes duquel les amendements d'origine parlementaire ne sont pas recevables s'ils ont pour conséquence la création ou l'aggravation d'une charge publique.

Aussi votre rapporteur a-t-il défendu auprès du Gouvernement des demandes tendant à assurer un dispositif d'indemnisation et d'accompagnement équilibré des salariés et des avoués.

Enfin, la réforme proposée s'inscrit dans un mouvement de modernisation de la procédure d'appel dont les modalités ne sont pas entièrement définies, la procédure civile relevant du domaine réglementaire. Il appartient néanmoins au Parlement de veiller, dans le cadre de sa mission de contrôle, au bon fonctionnement du service public de la justice.

Le présent rapport examine donc également les conséquences du projet de loi pour les justiciables, afin de garantir la cohérence et l'efficacité de la réforme. Il s'agit de vérifier ainsi que le projet de loi répond bien aux objectifs que le Gouvernement assigne à cette réforme : assurer la transposition de la directive services, simplifier la justice en appel et faciliter l'accès au juge d'appel pour le justiciable.

*

* *

I. LA DISPARITION DE LA PROFESSION D'AVOUÉ, UNE RÉFORME AUX MODALITÉS DISCUTÉES

A. LES AVOUÉS, UNE PROFESSION ANCIENNE ET RECONNUE

1. Une profession créée sous l'Ancien Régime et fondée sur le monopole de la postulation en appel

? Des procureurs royaux aux avoués

Sous l'Ancien Régime, les procureurs royaux, titulaires d'office, dont le ministère est rendu obligatoire en 1620, font profession de la représentation en justice.

Les charges ayant été supprimées sous la Révolution, les décrets du 29 janvier et du 20 mars 1791 instituent les avoués, dont la mission est de représenter les parties à un procès en justice. L'accès à la profession n'est pas encadré. Deux années plus tard, le décret du 3 brumaire an II (24 octobre 1793) supprime cette fonction, ainsi que celle d'avocat.

Cette suppression entraîne une désorganisation de la procédure. Devant les réclamations nées du désordre des débats judiciaires, la loi du 27 ventôse an VIII (18 mars 1800) rétablit des avoués près les juridictions de première instance, d'appel et de cassation. Il appartient désormais à l'Etat de nommer les avoués et de fixer leur nombre et leur rémunération.

La loi du 27 ventôse an VIII leur attribue le monopole de la postulation et du dépôt des conclusions devant tous les degrés de juridiction, tant en matière pénale qu'en matière civile. La loi du 29 pluviôse an IX (18 février 1801) supprime ensuite la spécialité d'avoué près les tribunaux criminels - devenus les cours d'assises en 1810. Jusqu'à l'adoption du code de procédure civile en 1806, les avoués appliquent les règles de procédure qui existaient sous l'Ancien Régime.

La loi du 22 ventôse an XII rétablit la profession d'avocat. L'avoué conserve le monopole de la postulation et du dépôt des conclusions devant la juridiction, tandis que la plaidoirie devient la mission de l'avocat . En outre, la fonction d'avoué se scinde alors en deux professions : avoué au tribunal et avoué à la cour d'appel.

Sous la Restauration, la loi du 28 avril 1816 sur les finances consacre la patrimonialité des offices : les avoués sont autorisés à présenter un successeur au roi, puis au garde des sceaux, « pourvu qu'il réunisse les qualités exigées par les lois ».

Comme l'indique l'étude d'impact jointe au projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, « l es droits attachés à la titulature sont, depuis cette époque, cédés par le titulaire de l'office à son successeur, dans le cadre d'un traité fixant le prix de cession, lequel est essentiellement déterminé au regard de la valeur économique de l'entreprise ainsi transmise. Ce traité de cession est soumis à l'agrément de la chancellerie au moment de l'instruction du dossier de nomination du nouveau titulaire de l'office » 3 ( * ) .

Postulation et plaidoirie : définitions

Si l'avocat peut plaider en appel, il ne peut postuler devant la cour d'appel. Depuis la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, les avocats peuvent plaider dans toute la France, mais ne peuvent postuler que devant les tribunaux de grande instance près desquels leur barreau est constitué.

L'avocat peut ainsi plaider , c'est-à-dire exposer à la barre d'un tribunal ou d'une cour les faits de l'espèce, faire valoir des preuves et des moyens de droit et développer une argumentation.

En revanche, la postulation , c'est-à-dire la représentation territoriale des justiciables devant les juridictions de l'ordre judiciaire, correspond à l'accomplissement des actes de la procédure. Elle incombe au membre d'une profession réglementée, chargé de représenter le plaideur devant les juridictions pour présenter une demande ou la défense à une demande, dans une matière où cette représentation est obligatoire et où la procédure est écrite.

Ainsi, la postulation devant le tribunal de grande instance revient à l'avocat, tandis que la postulation devant la cour d'appel est le monopole des avoués près la cour d'appel.

La postulation ne comprend pas nécessairement la rédaction des conclusions, qui rassemblent les demandes des parties à un procès. Toutefois, le postulant est en général celui qui conclut, soit parce qu'il plaide (cas des avocats devant le tribunal de grande instance près duquel leur barreau est constitué), soit parce qu'il s'agit d'un usage répandu (cas des avoués en appel).

? Les activités des avoués

La loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques supprime les offices d'avoué au tribunal de grande instance, leurs titulaires devenant avocats. Ce texte substitue en effet la profession d'avocat à celle d'avoué près les tribunaux de grande instance et d'agréé près les tribunaux de commerce.

Aux termes du décret n° 88-814 du 12 juillet 1988 relatif à la nomination et à la cessation de fonctions des officiers publics et ministériels, les avoués près la cour sont nommés par arrêté du ministre de la justice.

Les avoués détiennent le monopole de la postulation devant les cours d'appel en matière civile. La loi du 31 décembre 1971 a ainsi maintenu leur intervention en appel, afin qu'ils contribuent à faire en sorte que l'appel, dans le cadre de la réforme du code de procédure civile publiée en 1975 4 ( * ) , devienne une voie d'achèvement du procès.

En revanche, les avoués n'ont pas de monopole de la postulation devant les cours d'appel en matière pénale, ni dans les contentieux civils sans représentation obligatoire, tels que les affaires portées devant la chambre sociale de la cour d'appel (loyers, prud'hommes, sécurité sociale). Aux termes de l'article 931 du code de procédure civile, pour ces procédures sans représentation obligatoire, les parties se défendent elles-mêmes, mais ont la faculté de se faire assister ou représenter selon les règles applicables devant la juridiction dont émane le jugement, ou encore de se faire assister ou représenter par un avoué.

Ainsi, au-delà de leur activité monopolistique, les avoués peuvent avoir une activité concurrentielle, lorsqu'ils :

- plaident dans les affaires pour lesquelles ils sont postulants, si la partie n'a pas pris un avocat ;

- représentent les parties et plaident dans les contentieux pour lesquels la représentation n'est pas obligatoire ;

- représentent les parties devant les tribunaux administratifs ou les cours administratives d'appel ;

- donnent des consultations juridiques et rédigent des actes sous seing privé.

Aux termes de l'article premier de l'ordonnance n° 45-2591 du 2 novembre 1945 relative au statut des avoués, les avoués sont les officiers ministériels qui représentent les parties devant les cours d'appel auprès desquelles ils sont établis.

On dénombrait, au 1 er janvier 2009, 434 avoués, exerçant au sein de 231 offices , dont 177 sociétés civiles professionnelles (SCP), une société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) et 53 offices individuels.

L'article 416 du code de procédure civile définit le mandat de l'avoué comme un mandat ad litem (en vue du procès) qui le dispense de justifier, à chaque acte, qu'il a reçu mandat de représenter ou d'assister une partie devant la cour. Ce mandat de représentation permet à l'avoué d'accomplir au nom du mandant tous les actes de la procédure (art. 411 du code de procédure civile).

La rémunération des avoués

Les émoluments perçus par les avoués sont proportionnels à l'importance du litige. Ils procèdent d'un tarif défini par le décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 fixant le tarif des avoués près les cours d'appel, modifié par les décrets n° 84-815 du 31 août 1984 et n° 2003-429 du 12 mai 2003. Les avoués peuvent en outre percevoir le remboursement des débours, établis à partir d'une tarification forfaitaire (frais de photocopie, de déplacement...).

Les émoluments sont calculés sur le fondement d'un barème de droits proportionnels à taux dégressifs, de 5 % à 0,1 % selon l'intérêt du litige, exprimé en unités de base 5 ( * ) .

Si l'intérêt du litige ne peut faire l'objet d'une évaluation financière, l'émolument est déterminé par le président de chambre de la cour d'appel saisie de l'affaire, en fonction de l'importance et de la difficulté de l'affaire.

Le tarif prévoit en outre l'application de coefficients relatifs à l'Etat d'avancement de la procédure, aux difficultés ou incidents de procédure et au caractère contradictoire ou non de l'instance.

La rémunération fondée sur le tarif s'applique à toute procédure pour laquelle la représentation est obligatoire. Cependant, aux termes de l'article 19 du décret du 30 juillet 1980 modifié, le tarif s'applique également, pour moitié, aux procédures dans lesquelles l'avoué représente ou assiste une partie devant les juridictions criminelles ou correctionnelles, pour lesquelles la représentation n'est pas obligatoire.

Lorsqu'ils assurent la représentation d'une partie en dehors de ces cas, ou lorsqu'ils effectuent des consultations juridiques, les avoués perçoivent des honoraires qu'ils fixent librement.

Selon l'étude d'impact jointe au projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, l'émolument moyen d'un avoué s'élève à 981 euros par affaire.

Les fonctions distinctes des avoués et des avocats

Les professions d'avoué et d'avocat ont de nombreux points communs. Ainsi, la formation nécessaire pour l'accès à ces deux professions est identique et chacune détient un monopole : la postulation devant les tribunaux de grande instance pour les avocats, celle devant les cours d'appel pour les avoués. Les avoués et les avocats peuvent exercer une activité de conseil.

Toutefois, des différences sensibles distinguent ces deux professions. Tout d'abord, les avoués, s'ils peuvent intervenir oralement à l'audience, plaident beaucoup plus rarement que les avocats. Ensuite, à la différence des avocats, les avoués ont une clientèle propre très réduite. Ce sont en réalité les 50.314 avocats qui apportent des clients aux avoués pour engager une procédure d'appel.

En effet, comme l'ont expliqué à votre rapporteur les représentants de la Chambre nationale des avoués, de l'Association syndicale des avoués et de l'Association des jeunes avoués, les avocats sont ceux qui apportent des affaires aux avoués. Les dossiers sont adressés aux avoués par l'avocat de la partie qui souhaite faire appel ou qui est intimée. Selon l'étude d'impact, la saisine directe des avoués par les justiciables ne représenterait que 8 à 10 % des affaires nouvelles enregistrées chaque année par les offices d'avoués.

Enfin, l'accès à la profession d'avoué obéit à un régime de présentation et suppose l'acquisition d'un office, dont le nombre est limité, alors que la profession d'avocat n'est pas soumise à un numerus clausus.

En outre, les 434 avoués traitant plus de 300.000 dossiers de postulation en appel par an, leur activité se concentre essentiellement sur la postulation. Les avoués ont, dès lors, peu développé les activités de conseil et de contentieux en matière sociale ou pénale. Le flux des affaires supposant une postulation en appel les conduit d'ailleurs, en raison de leur effectif réduit, à employer en moyenne cinq fois plus de salariés que les avocats (4,3 salariés par avoué, contre 0,8 salarié par avocat).

Les avoués ne peuvent postuler que devant la cour d'appel auprès de laquelle ils sont établis, l'Etat déterminant le nombre d'offices présents dans le ressort de chaque cour.

Les exceptions au monopole des avoués

Le monopole des avoués ne s'applique pas dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. En effet, la patrimonialité des charges y a été supprimée au cours de la période de l'annexion allemande et n'a pas été rétablie. Un régime de postulation spécifique, défini par les lois des 20 février 1922 et 29 juillet 1928, s'applique donc dans ces départements, où les avocats doivent choisir de postuler soit devant le tribunal de grande instance, soit devant la cour d'appel.

Ainsi, devant les cours d'appel de Metz et de Colmar, il revient aux avocats du barreau de chacune de ces villes inscrits au tableau particulier des avocats postulant devant la cour de représenter les parties.

Les offices d'avoués ont par ailleurs été supprimés dans les quatre départements d'outre-mer par l'article 82 de la loi du 31 décembre 1971. Par conséquent, dans ces départements, les avocats peuvent effectuer les actes de représentation devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle est situé le barreau auquel ils appartiennent.

Enfin, la profession d'avoué n'existe pas dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie. Ainsi, la représentation des parties est-elle assurée par les avocats devant les cours d'appel de Nouméa et de Papeete, et devant les tribunaux supérieurs d'appel de Saint-Pierre et de Mamoudzou.

2. Les modalités d'accès à la profession d'avoué

Les modalités d'accès à la profession d'avoué sont définies aux articles 4-1 et suivants du décret du 19 décembre 1945.

Pour être avoué, il faut être de nationalité française, ne pas avoir commis de faits contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs, ne pas avoir été sanctionné disciplinairement, ni frappé de faillite personnelle ou d'une autre sanction liée au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises.

Il est nécessaire d'être titulaire d'un diplôme en droit du niveau master I ou d'un diplôme équivalent et d'avoir accompli un stage professionnel d'une durée de deux ans. Au moins une année de stage doit être effectuée chez un avoué, l'autre pouvant l'être chez un avocat, un avocat au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation, un notaire, un huissier, une administration, ou auprès d'une personne exerçant une profession juridique règlementée dans un Etat membre de la Communauté européenne.

Un certificat d'aptitude est délivré par la chambre nationale des avoués à l'issue du stage. Les titulaires du diplôme précité ayant accompli le stage ne peuvent se présenter à l'examen d'aptitude professionnelle aux fonctions d'avoué plus de trois fois.

L'examen d'aptitude réussi, le futur avoué doit être admis par l'assemblée des magistrats du siège de la cour d'appel ou par le Premier président, après avis de cette assemblée.

Des dispenses peuvent être obtenues s'agissant des conditions de stage et/ou de l'examen professionnel. Sont dispensés :

- de l'examen d'aptitude professionnelle et du stage, les avoués ayant cessé leurs fonctions depuis moins de 10 ans ;

- de l'examen et d'une partie du stage (6 mois obligatoires), les magistrats de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire, les professeurs de droit, les anciens avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation qui ont exercé deux ans au moins, les anciens avocats ayant exercé huit ans ;

- de l'examen et d'une partie du stage (1 an obligatoire), certaines professions judiciaires et juridiques (notaires, commissaire-priseur, huissiers...), les avoués ayant cessé leur fonction depuis 10 ans d'exercice et, sous réserve de huit ans d'exercice dans leur profession, les conseils juridiques, les anciens greffiers des tribunaux de commerce, les fonctionnaires de catégorie A ayant exercé des activités juridiques, les anciens syndics, les administrateurs judicaires. Ces candidats subissent un contrôle des connaissances.

Les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace Économique Européen peuvent être nommés avoués sous réserve de remplir les conditions de diplôme énumérées à l'article 4-5 du décret du 19 décembre 1945.

Nommé par le garde des sceaux sur présentation du titulaire de l'office, l'avoué peut exercer son activité individuellement ou dans le cadre d'une société titulaire de l'étude.

3. L'organisation de la profession : les chambres de la compagnie des avoués et la chambre nationale des avoués

Les avoués sont représentés au niveau des cours d'appel, par une chambre de la compagnie des avoués et au niveau national par la chambre nationale des avoués.

La chambre de la compagnie des avoués

Les 441 avoués sont répartis en 28 compagnies, soit une compagnie dans chaque ressort de cour d'appel, à l'exception des cours d'appel de Colmar, Metz 6 ( * ) , Basse-Terre, Fort-de-France, Saint-Denis-de-La-Réunion, Papeete et Nouméa auprès desquelles le ministère d'avoué n'existe pas.

La compagnie des avoués près la cour d'appel de Bourges est la plus petite compagnie avec quatre avoués et celle des avoués près la cour d'appel de Paris la plus importante avec 83 avoués. En moyenne, les compagnies comptent quinze avoués.

Chaque compagnie des avoués comprend une chambre de compagnie qui, en application de l'article 2 du décret n° 45-0118 du 19 décembre 1945, a pour fonction :

- en matière disciplinaire, de prononcer ou de proposer après avis du bureau de la chambre nationale, des mesures disciplinaires ;

- de prévenir, concilier, trancher les différends entre avoués de la compagnie ;

- d'examiner les réclamations des tiers contre les avoués ;

- de vérifier la comptabilité des études ;

- de préparer puis de gérer le budget de la compagnie ;

- de rendre des avis, à la demande du garde des sceaux sur la création ou la suppression d'études dans son ressort 7 ( * ) ;

- d'exécuter les décisions prises par la chambre nationale.

Le nombre de membres de la chambre de la compagnie est fonction du nombre d'avoués de la compagnie. La quasi-totalité des chambres de la compagnie comporte quatre membres.

Détermination du nombre de membres de la chambre de la compagnie

Nombre d'avoués de la compagnie

Nombre de membres de la chambre de compagnie

< ou = 20

4

Entre 20 et 30

5

Entre 31 et 50

9

> à 50

11

Chaque année, la chambre de la compagnie se renouvelle par tiers, par un vote des membres à la majorité absolue, deux tiers des membres devant être présents. La moitié au moins des membres de la chambre, ainsi que le président, sont choisis parmi les avoués en exercice figurant dans les deux premiers tiers de la liste des avoués établie par ordre d'ancienneté, ou qui exercent depuis au moins 10 ans. L'élu ne peut en principe refuser la fonction, qui est gratuite.

Chaque chambre comprend un bureau formé d'un président, un syndic qui assure l'exécution des décisions de la chambre, un rapporteur, un trésorier et un secrétaire élus chaque année. Dans les chambres comportant moins de cinq membres, les fonctions de secrétaire et de trésorier peuvent être cumulées avec l'une des trois autres fonctions.

Pour que les décisions de la chambre soient valables, un quorum défini doit être atteint. Les décisions sont prises à la majorité ; en cas de partage des voix, celle du président est prépondérante.

Nombre de membres de la chambre de compagnie

Quorum

4 ou 5

3

9

5

11

7

Siégeant en comité mixte, au moins une fois par an, la chambre de la compagnie, émet des avis ou recommandations sur le recrutement et la formation des clercs et employés, les conditions de travail dans les études, les salaires et les oeuvres sociales intéressant le personnel des études.

Cette formation est composée pour moitié du bureau de la chambre et pour moitié de représentants de clercs et d'employés élus à la représentation proportionnelle pour trois ans. La présidence est confiée, en alternance chaque année, aux représentants des avoués et la fonction de secrétaire aux personnels des études.

Chaque avoué contribue en fonction du produit brut de son étude à la bourse commune de la compagnie, qui permet le fonctionnement des organismes professionnels, des oeuvres sociales professionnelles et qui garantit la responsabilité professionnelle des membres de la compagnie. Le créancier peut s'adresser à la compagnie à la seule condition que l'avoué ne puisse régler sa dette.

La chambre nationale des avoués près les cours d'appel

Placée auprès du ministre de la justice, elle représente la profession d'avoué auprès des pouvoirs publics.

Elle est composée d'un délégué par compagnie, à l'exception de la compagnie de Paris qui compte deux délégués. Chaque délégué est élu par l'assemblée générale de la chambre pour six ans renouvelables une fois immédiatement. La chambre nationale est renouvelée par tiers tous les deux ans. Le bureau est composé de cinq membres élus pour deux ans et rééligibles. Le président sortant n'est rééligible qu'après un délai de carence d'une année.

La chambre nationale donne son avis sur les questions professionnelles à la demande du garde des sceaux. Elle prévient, concilie et tranche les différends entre avoués relevant de cours d'appel différentes. Elle établit le budget et en répartit les charges entre compagnies.

Siégeant en comité mixte, elle est composée pour moitié du bureau de la chambre et pour moitié de représentants de clercs et d'employés élus à la représentation proportionnelle pour six ans, renouvelés par tiers tous les deux ans.

Elle règle dans ce cadre les questions générales relatives au recrutement, à la formation des personnels et les conditions de travail dans les études, les salaires et les oeuvres sociales intéressant le personnel des études.

B. UNE ÉVOLUTION NÉCESSAIRE, AUX RÉPERCUSSIONS INCERTAINES SUR LE COÛT ET LA MODERNISATION DE LA PROCÉDURE D'APPEL

1. Une exigence européenne de réforme de la profession d'avoué

La transposition de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur affecte la réglementation applicable aux avoués près les cours d'appel et à l'activité de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

Les avoués exercent une activité de services entrant dans le champ de la directive. Leur activité ne constitue pas un service d'intérêt économique général et ne relève pas des exclusions mentionnées au point 2 de l'article 2 de la directive services.

En particulier, elle ne peut être regardée comme participant à l'exercice de l'autorité publique conformément à l'article 45 du traité instituant la Communauté européenne.

En effet, la mission des avoués est de représenter les parties devant les cours d'appel, dans les contentieux civils pour lesquels la représentation est obligatoire. La Cour de justice des Communautés européennes a d'ailleurs jugé, dans un arrêt du 21 juin 1974 que l'activité de défense et de représentation en justice ne relevait pas de l'article 45 du traité 8 ( * ) .

Or, la réglementation de la profession d'avoué n'est pas compatible avec les dispositions de la directive services sur la liberté d'établissement des prestataires.

Ainsi, le régime actuel d'autorisation n'est pas compatible avec les exigences de la directive, en particulier parce qu'il limite le nombre des offices. En vertu de l'article 93 de la loi du 27 ventôse an VIII, il est établi près de chaque cour d'appel un nombre fixe d'offices d'avoués. Toute création ou transfert d'office est prononcée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice (articles 12-2 et suivants du décret du 19 décembre 1945).

L'article 9 de la directive services dispose que « Les Etats membres ne peuvent subordonner l'accès à une activité de service et son exercice à un régime d'autorisation que si les conditions suivantes sont réunies :

« a) le régime d'autorisation n'est pas discriminatoire à l'égard du prestataire visé ;

« b) la nécessité d'un régime d'autorisation est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général ;

« c) l'objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante, notamment parce qu'un contrôle a posteriori interviendrait trop tardivement pour avoir une efficacité réelle . ».

Or, le régime appliqué pour les avoués près les cours d'appel ne repose pas sur ces trois conditions.

La directive ne prévoit en outre la possibilité d'un nombre limité d'autorisations disponibles pour une activité donnée, que si cette limitation est due à la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables (article 12). La subordination de l'octroi de l'autorisation à la preuve d'un besoin économique ou d'une demande du marché figure au nombre des exigences interdites par la directive (article 14) 9 ( * ) .

De plus, aux termes de l'article 15 de la directive, les Etats membres doivent examiner si leur système juridique subordonne l'accès à une activité de service ou son exercice au respect d'une exigence non discriminatoire telle que la nécessité pour le prestataire d'être constitué sous une forme juridique particulière, la réservation de l'accès à l'activité de service concernée à des prestataires particuliers en raison de la nature spécifique de l'activité ou le respect de tarifs obligatoires minimum et/ou maximum. Si de telles exigences sont appliquées, elles doivent satisfaire à des conditions de non-discrimination ; de nécessité (les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d'intérêt général), et de proportionnalité 10 ( * ) .

Par ailleurs, le système des offices aboutit à réserver la possibilité d'être autorisé à exercer l'activité d'avoué aux seuls professionnels :

- qui sont présentés à l'agrément du garde des sceaux par les professionnels déjà autorisés, soit qu'ils souhaitent quitter la profession, soit qu'ils souhaitent céder un certain nombre de parts pour trouver un nouvel associé ;

- et qui reversent à leur prédécesseur la valeur du droit de présentation.

Un tel mécanisme est incompatible avec les exigences des articles 12 et 13 de la directive, relatifs à la sélection entre plusieurs candidats et aux procédures d'autorisation.

Les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, dont la mission est de représenter les parties devant les deux cours suprêmes, connaissent un sort différent. Certes, ils bénéficient, comme les avoués, d'un monopole, ils sont nommés par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et leur activité ne constitue pas un service d'intérêt général économique 11 ( * ) .

Cette activité apparaît cependant spécifique, puisqu'elle allie à une grande connaissance du droit national le maniement de la technique de la cassation. Ainsi, plusieurs raisons impérieuses d'intérêt général justifient, au sens de la jurisprudence de la Cour de justice, que l'activité des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation fasse l'objet d'une réglementation particulière. S'agissant de l'ultime voie de recours possible, la protection des consommateurs et des destinataires de services implique que les prestataires offrent un haut niveau de compétence, reposant sur une expérience suffisante de la cassation.

A cet égard, la Cour de justice n'a pas jugé contraire au droit européen que l'agrément auprès du Bundesgerichtshof (la plus haute juridiction en matière civile devant laquelle se déroule une procédure spécifique de révision en Allemagne) s'effectue dans le cadre d'une admission sélective à un barreau spécialisé d'avocats disposant d'une certaine expertise ou de compétences spécifiques 12 ( * ) .

Aussi l'article 1 er de la directive 77/249/CEE du Conseil, du 22 mars 1977, tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de service par les avocats, ne mentionne-t-il pas les avocats aux Conseils dans la liste des professionnels inclus dans le champ de la libre prestation de services.

En outre, la directive 98/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise dispose, en son article 5, que les Etats membres, dans le but d'assurer le bon fonctionnement de la justice, peuvent établir des règles spécifiques d'accès aux cours suprêmes, telles que le recours à des avocats spécialisés 13 ( * ) .

Cette faculté laissée aux Etats membres de réserver l'accès aux plus hautes juridictions à des avocats spécialisés prévaut sur les dispositions de la directive services.

La directive services implique en revanche une réforme de la profession d'avoué. Rend-elle pour autant indispensable une disparition de cette profession ?

La réforme pourrait se limiter à corriger les caractéristiques de la profession d'avoué qui ne sont pas conformes aux prescriptions de la directive services. Dès lors, la profession d'avoué, sans être soumise à l'agrément du garde des sceaux et au versement d'un droit de présentation, pourrait être confiée à des avocats spécialisés dans la procédure d'appel. Il s'agit d'ailleurs du modèle en vigueur en Alsace et en Moselle.

Le Gouvernement a retenu une option différente, visant à simplifier l'accès à la procédure d'appel pour le justiciable, en permettant à l'ensemble des avocats de postuler en appel. Ainsi, le justiciable insatisfait de la décision rendue en première instance pourrait, s'il souhaitait faire appel de cette décision, garder le même avocat.

Cette solution paraît en effet plus simple que le maintien d'une profession juridique spécifique, à laquelle il faudrait obligatoirement recourir en matière d'appel.

2. Les coûts et bénéfices de la réforme pour le justiciable

Selon l'exposé des motifs du projet de loi déposé à l'Assemblée nationale le 3 juin 2009, la réforme proposée vise à achever le mouvement engagé par la loi du 31 décembre 1971, qui a supprimé les offices d'avoués près les tribunaux de grande instance.

Le Gouvernement suit ainsi les recommandations des rapports de la commission pour la libération de la croissance française, présidée par M. Jacques Attali, et de la commission présidée par M. Jean-Michel Darrois sur les professions du droit, qui préconisent une simplification des démarches du justiciable et une réduction du coût des procès en appel.

Le rapport de la commission dite « Darrois » considère en effet que, « sous réserve de veiller dans cette opération à la juste indemnisation des avoués et au devenir de leurs salariés, la disparition de la profession d'avoué près les cours d'appel, par la voie d'une fusion avec celle d'avocat, n'est plus discutable dans son principe » 14 ( * ) .

Le Gouvernement avance l'argument selon lequel le justiciable, à l'issue de la réforme, pourra « s'adresser à un professionnel unique, habilité à le consulter, à le représenter en justice et à plaider son dossier devant les deux degrés de juridiction » 15 ( * ) .

Cet argument paraît fondé, puisqu'il sera en effet plus simple pour le justiciable de garder, s'il souhaite faire appel, un seul auxiliaire de justice et le même qu'en première instance. Il conviendra cependant d'examiner les conséquences de cette simplification sur l'organisation et le fonctionnement des cours d'appel.

L'étude d'impact jointe au projet de loi évoque d'ailleurs l'hypothèse d'une augmentation de 15 % du nombre d'appels en matière civile, soit près de 20.000 affaires de plus par an, comme l'illustre le tableau suivant :

Affaires en appel avec et sans bénéfice de l'aide juridictionnelle

Données 2006

Données 2006 +15 %

Affaires nouvelles

132 717

152 624

Référés

5 724

6 582

Total

138 441

159 206

Source : étude d'impact jointe au projet de loi

Le second motif de la réforme, celui de la réduction du coût de la justice d'appel, paraît en revanche plus discutable. Il n'est pas certain que le justiciable ait à supporter finalement des dépenses plus faibles dans le cadre d'une procédure d'appel sans recours à un avoué. En effet, le financement de la réforme, c'est-à-dire du fonds d'indemnisation qui assurera le versement aux avoués de leurs indemnités et le remboursement des indemnités dues aux salariés licenciés, reposera sur une taxe.

Or, le projet de loi de finances rectificatives pour 2009 prévoit que la taxe, due par les appelants, s'élève à 330 euros. Par ailleurs, la réforme prévoit la suppression du tarif de postulation en appel, qui n'aura plus lieu d'être. Dès lors, la rémunération des avocats postulant en appel s'établira sous la forme d'honoraires.

L'exposé des motifs du projet de loi indique d'ailleurs que, pour garantir la répétibilité partielle des honoraires, une partie de ces sommes, égale à un montant fixé par décret, devrait figurer dans les dépenses définies à l'article 695 du code de procédure civile, qui sont mis à la charge de la partie perdante 16 ( * ) .

A cet égard, le Conseil national des barreaux a émis des propositions le 26 septembre 2009. Le Conseil national des barreaux rappelle tout d'abord que l'avocat et son client devront convenir d'un honoraire couvrant les tâches confiées à l'avocat postulant. Estimant que la part répétible des honoraires « ne peut correspondre qu'à la rémunération moyenne pour un dossier standard de postulation », qui implique « un certain nombre de diligences et une assurance responsabilité spécifique », il propose d'arrêter son montant à 800 euros TTC. Le montant serait majoré de 20 % sur chaque évènement de la procédure nécessitant des diligences supplémentaires.

Il appartiendra au pouvoir réglementaire de fixer par décret le montant de cette part répétible des honoraires correspondant à la rémunération de la postulation en appel. Toutefois, comme l'ont relevé les représentants des avoués et des salariés des études d'avoués entendus par votre rapporteur, si les propositions du Conseil national des barreaux étaient suivies, le montant de base d'une procédure d'appel s'élèverait, pour la seule postulation, à 1.130 euros (330 euros de taxe + 800 euros d'honoraires répétibles), soit 150 euros de plus que le montant moyen des émoluments dus aujourd'hui aux avoués.

Ainsi, votre rapporteur invite-t-il le Gouvernement à être particulièrement vigilant à cet aspect de la réforme, afin de ne pas aboutir à un renchérissement de la procédure d'appel qui serait contraire au droit fondamental de libre accès à la justice et au droit.

Les avocats ont eux-mêmes relevé cette question, lorsqu'ils ont examiné la création de la taxe destinée à financer la réforme. Ainsi, dans une délibération du 27 novembre 2009, la Conférence des bâtonniers demande l'abandon de cette taxe de 330 euros, qui « renchérirait de manière très importante le coût des procédures d'appel, à la seule charge des appelants, alors que la réforme en oeuvre a pour objectif soutenu d'alléger le coût de ces procédures » et qui « conduirait à une indiscutable inégalité de traitement entre les justiciables des cours d'appel d'une part et les requérants en justice d'autre part ».

Votre rapporteur souhaite donc que les préoccupations d'équité et l'esprit de réalisme des parties prenantes conduisent à une solution équilibrée, permettant aux justiciables de faire appel dans des conditions finalement moins coûteuses qu'aujourd'hui. Sans cela, la réforme manquerait l'un de ses deux objectifs majeurs.

3. La difficile articulation de la disparition de la profession d'avoué avec la réforme de la procédure d'appel

Le projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d'appel s'inscrit dans le contexte d'une réforme de la procédure d'appel, qui fait l'objet d'un projet de décret. Il intervient en outre au moment où le ministère de la justice met en oeuvre la dématérialisation et la structuration des procédures.

Ces évolutions reprennent les recommandations du rapport de la mission présidée par M. Jean-Claude Magendie, premier président de la cour d'appel de Paris, sur la célérité et la qualité de la justice devant la cour d'appel 17 ( * ) .

Afin de réduire les délais en appel, ce rapport préconise la définition d'un calendrier de procédure contraignant et de règles de présentation normalisées des conclusions d'appel. Une telle réforme relevant du pouvoir réglementaire, un projet de décret modifiant le code de procédure civile a été élaboré. Ce projet réforme la procédure d'appel avec représentation obligatoire.

Il crée un article 930-2 au sein du code de procédure civile, prévoyant, à peine d'irrecevabilité d'office , la transmission par voie électronique à la cour des actes de procédure. Cette disposition entrerait en vigueur le 1 er janvier 2011 pour les déclarations d'appel et les constitutions d'intimés 18 ( * ) , pour les appels formés à l'encontre des décisions rendues à compter de cette date. Elle entrerait en vigueur le 1 er janvier 2013 pour les autres actes de procédure.

La sanction d'irrecevabilité suppose que les professionnels, avoués et avocats 19 ( * ) , ainsi que les cours d'appel, disposent des équipements informatiques nécessaires et soient en mesure de les utiliser dès le 1 er janvier 2011.

Or, selon les premiers présidents de cour d'appel et les conseillers de la mise en Etat entendus par votre rapporteur, il est peu probable que les 28 cours d'appel de métropole et les avocats soient prêts à respecter, à compter du 1 er janvier 2011, les nouvelles contraintes définies par le décret réformant la procédure civile.

Ainsi, selon les indications de M. Jean-Claude Magendie, seules 12 cours d'appel seraient en mesure de pratiquer la communication électronique, parmi lesquelles sept la pratiquent effectivement et deux seulement, les cours d'appel de Paris et de Versailles, ont véritablement adopté cette dématérialisation.

Les avoués près la cour d'appel de Paris ont ainsi permis, en parfaite collaboration avec la cour, la mise en place d'un système de communication électronique structurée des déclarations d'appel et des constitutions d'avoués (pour l'intimé). Ce succès est le résultat de quatre années de préparation.

Le caractère structuré des échanges électroniques signifie que les dossiers sont saisis par les avoués selon un cadre défini, puis adressés, par voie électronique , au greffe de la cour, qui n'a pas besoin de les saisir à nouveau. Le dossier d'appel est ainsi directement constitué par l'avoué de l'appelant, si bien que, selon M. Jean-Claude Magendie, 11 agents du greffe de la cour d'appel de Paris, qui naguère saisissaient les dossiers, ont été affectés à d'autres missions.

Le greffe civil de la cour d'appel de Paris s'est donc réorganisé de façon à mettre en oeuvre la dématérialisation et la structuration des actes de procédure, soit 20.000 actes d'appel et 50.000 constitutions d'intimés par an, qui représentent 20 % de l'ensemble des déclarations d'appel et constitutions d'avoués effectuées chaque année en France.

Or, les avocats sont beaucoup moins préparés à la mise en oeuvre de la dématérialisation de la procédure que les avoués. Ils sont en outre beaucoup plus nombreux que ces derniers.

Ainsi, alors que les cours d'appel avaient pour interlocuteurs principaux, dans la constitution des dossiers en matière civile et commerciale, 434 avoués, elles ont potentiellement à échanger avec plus de 50.000 avocats à compter du 1 er janvier 2011. Certes, tous les avocats ne pratiqueront pas la procédure d'appel. La situation sera néanmoins bouleversée pour les greffes et pour les conseillers de la mise en Etat.

Deux types de situations susceptibles de rendre difficile le fonctionnement des cours d'appel pourraient se présenter en 2011 :

- pour les quelques cours d'appel ayant adopté la procédure dématérialisée et structurée, comme la cour d'appel de Paris, il n'est pas envisageable de revenir à un système d'échange de documents papier. Ceci aboutirait à une paralysie aux conséquences très négatives pour le justiciable. La cour d'appel de Paris passera de 48 études d'avoué à près de 20.000 avocats, sans disposer aujourd'hui de données précises sur le taux d'équipement de ces derniers ;

- les cours qui ne pratiquent pas encore la procédure dématérialisée et structurée devront en un an s'adapter à cette nouvelle méthode et s'assurer que les avocats, dans le même temps, s'équipent et se forment à la nouvelle procédure.

Dans les deux cas, les conséquences de la sanction par l'irrecevabilité du non respect de la communication dématérialisée apparaissent déterminantes.

En effet, si la cour d'appel ou l'avocat ne sont pas en mesure de mettre en oeuvre cette dématérialisation, la responsabilité de l'Etat au titre d'un dysfonctionnement du service public de la justice, ou la responsabilité professionnelle de l'avocat, pourra être engagée. Le Gouvernement pourrait donc être conduit à définir, dans son décret, une date d'entrée en vigueur prenant en compte la situation réelle des cours et des cabinets d'avocats.

Aussi semble-t-il d'ores et déjà irréaliste de prévoir l'entrée en vigueur au 1 er janvier 2011 de la règle selon laquelle une déclaration d'appel qui ne serait pas adressée au greffe par voie électronique serait irrecevable.

Or, M. Jean-Claude Magendie, premier président de la cour d'appel de Paris, a indiqué à votre rapporteur que la fusion entre les professions d'avoué et d'avocat devait être conduite sans solution de continuité, car la cour ne pourrait mettre en place, à titre transitoire, un système hybride, faisant coexister la communication électronique et la communication papier. En effet, un tel système n'inciterait aucunement les avocats à réaliser les adaptations nécessaires.

Il incombe par conséquent au Gouvernement, initiateur de la réforme, de veiller à ce que les avocats se conforment rapidement à l'utilisation des trames définies pour les actes de procédure dans le cadre de la communication électronique structurée.

Les avocats devront pour leur part se doter du matériel et des compétences techniques nécessaires. Ils devront dans le même temps se familiariser avec la procédure d'appel, puisque ce sont les avoués qui assureront, jusqu'au 1 er janvier 2011, la mise en Etat des affaires portées devant la cour d'appel.

C. LA NÉCESSITÉ D'ACCOMPAGNER LA DISPARITION DE LA PROFESSION D'AVOUÉ DE GARANTIES SUFFISANTES

1. Les dispositifs précédemment adoptés dans des cas semblables

? La suppression des avoués près les tribunaux de grande instance

La loi du 31 décembre 1971 a substitué la nouvelle profession d'avocat à celles d'avocat près les cours et tribunaux, d'avoué près les tribunaux de grande instance et d'agréé près les tribunaux de commerce. Les membres de ces professions ont été intégrés d'office à la nouvelle profession d'avocat.

Cette réforme se distingue fortement du présent projet de loi car les avoués près les tribunaux de grande instance disposaient, à la différence des avoués près les cours d'appel, d'une clientèle propre.

Ainsi, la réforme de 1971 a certes supprimé leurs offices et leur monopole en matière de postulation devant les tribunaux de grande instance, mais elle les a indemnisés et leur a permis de conserver leur clientèle en tant qu'avocats.

L'indemnisation des avoués près les tribunaux de grande instance fut assurée par un fonds d'indemnisation, alimenté par une taxe parafiscale. L'indemnité allouée aux avoués était déterminé selon la méthode dite des « demi-nets » de l'office, le produit demi-net de l'office étant obtenu par déduction, des produits bruts de l'office, du loyer des locaux professionnels, des salaires, des charges sociales et de la taxe professionnelle (art. 28 de la loi du 31 décembre 1971). Cette indemnité a été versée en plusieurs annuités.

S'agissant des salariés licenciés par les avoués, leurs indemnités de licenciement leur ont été versées directement par le fonds d'indemnisation, qui devait ensuite recouvrer sur l'avoué la moitié du montant de ces indemnités.

? La suppression du monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires

La loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, a supprimé le monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires.

Toutefois, cette réforme n'est pas entièrement comparable à la suppression de la profession d'avoué et du monopole correspondant, puisque les commissaires-priseurs, devenus commissaires-priseurs judiciaires, ont conservé le monopole des ventes judiciaires de meubles aux enchères publiques. Leur droit de présentation n'a donc pas disparu, même s'il a été considérablement réduit, puisque les ventes judiciaires représentaient moins de 20 % de leur activité totale. En outre, les commissaires-priseurs judiciaires ont gardé la possibilité de réaliser des ventes volontaires, c'est-à-dire de poursuivre, mais sans en avoir le monopole, leur activité.

Par conséquent, si le rappel des modalités d'indemnisation retenues par le législateur en 2000 peut avoir un intérêt, il ne constitue pas un précédent exactement comparable à la situation des avoués dont les offices, le monopole et l'activité seront supprimés.

Notre regretté collègue Luc Dejoie, rapporteur de la commission des lois, avait tenté de démontrer que la suppression du monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires constituait pour ces derniers un préjudice de valeur patrimonial 20 ( * ) .

Il estimait alors que « la perte du droit de présentation de leur successeur en matière de ventes volontaires qui résultera de la suppression du monopole dans ce domaine constitue une atteinte au droit de propriété reconnu aux officiers ministériels sur la valeur patrimoniale de ce droit de présentation ». Il s'agissait, selon le rapport de deuxième lecture, « d'une atteinte au droit de propriété qui doit donner lieu à une " juste et préalable indemnité " au sens de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 ».

Cette argumentation se fondait notamment sur un arrêt de la Cour de cassation du 11 novembre 1857, affirmant que le droit de présentation constitue pour les officiers ministériels une « propriété de nature spéciale », et précisant « qu'ils ne peuvent disposer de cette propriété que sous les restrictions et aux conditions que comporte la nécessité de maintenir le contrôle qui appartient au Gouvernement sur la transmission des offices, et d'assurer l'indépendance des fonctions publiques attachées aux titres sur lesquels s'exerce le droit de présentation ».

La position de l'Assemblée nationale était fort différente. Mme Nicole Feidt, rapporteur de la commission des lois, estimait en effet que le droit de présentation ne paraissait « pas assimilable au droit de propriété tel qu'il est défini dans l'article 544 du code civil, dans la mesure où son exercice fait l'objet d'un contrôle de la part du garde des Sceaux. Toute autre analyse conduirait à penser que la personne qui a le droit de présentation en aurait la libre disposition, ce qui ne serait pas conciliable avec le fait qu'on ne puisse disposer d'un service public. De surcroît, à supposer que ce droit de présentation soit considéré comme un droit de propriété, ces experts ont fait valoir qu'il ne saurait y avoir expropriation puisque, d'une part, le droit de présentation ne disparaît pas mais est réduit au domaine des ventes judiciaires et que, d'autre part, les commissaires-priseurs pourront, dans un nouveau cadre juridique, poursuivre leur activité » 21 ( * ) .

La position de l'Assemblée nationale l'emporta dans le texte adopté par la commission mixte paritaire. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel ne fut pas saisi du texte définitif, si bien qu'il n'a pas tranché les questions évoquées par les rapporteurs dans leurs travaux respectifs.

La loi du 10 juillet 2000 a prévu pour les commissaires-priseurs une indemnisation à hauteur de 50 % de la valeur de l'office, la somme correspondante pouvant être diminuée ou augmentée de 20 % par la commission chargée d'examiner les demandes d'indemnisation, « en fonction de la situation particulière de chaque office et de son titulaire » 22 ( * ) .

En ce qui concerne les salariés, la loi prévoyait, en cas de licenciement pour motif économique survenant en conséquence directe de la loi, des indemnités de licenciement à raison d'un mois de salaire par année d'ancienneté dans la profession, dans la limite de trente mois. Ces indemnités devaient être versées directement aux bénéficiaires par le fonds d'indemnisation.

Toutefois, si le licenciement économique intervenait alors que le commissaire-priseur poursuivait son activité de ventes volontaires au sein d'une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, les indemnités versées par le fonds devaient être déduites de l'indemnité due à ce commissaire-priseur.

? La suppression du monopole des courtiers interprètes et des conducteurs de navires

La loi n° 2001-43 du 16 janvier 2001 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports supprime, dans son article premier, le monopole des courtiers interprètes et des conducteurs de navires. La situation, là encore, n'est pas totalement similaire à celle des avoués, puisque les courtiers interprètes et les conducteurs de navires, s'ils ont perdu leur monopole, ont pu continuer à exercer leur activité, dans un cadre concurrentiel. Ce précédent peut néanmoins apporter quelques indications.

La loi du 16 janvier 2001 prévoit l'indemnisation des courtiers interprètes et conducteurs de navires du fait de la perte du droit qu'ils tenaient de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, de présenter un successeur à l'agrément du ministre chargé de la marine marchande. Le montant de l'indemnité afférente à la perte du droit de présentation avait été fixé à 65 % de la valeur de chaque office (article 4).

La loi a cette fois fait l'objet d'une saisine du Conseil constitutionnel par plus de soixante sénateurs estimant que le dispositif retenu méconnaissait les exigences issues de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Les requérants faisaient valoir que « l'indemnisation "de ce qui constitue en droit une expropriation "ne serait ni juste ni préalable, contrairement aux exigences de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen » 23 ( * ) .

Dans sa décision du 10 janvier 2001, le Conseil constitutionnel, rappelant qu'aux termes de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » et que l'article 13 de la Déclaration dispose que « pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » a estimé que « la suppression du privilège professionnel dont jouissent les courtiers interprètes et conducteurs de navire ne constitue pas une privation de propriété au sens de l'article 17 précité de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 » .

Il a cependant jugé que, « si l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 n'interdit pas de faire supporter, pour un motif d'intérêt général, à certaines catégories de personnes des charges particulières, il ne doit pas en résulter de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ».

Aussi s'est-il ensuite livré à une analyse des modalités d'indemnisation et des conditions de poursuite d'activité offertes aux courtiers interprètes et conducteurs de navires. Relevant que la suppression du monopole des courtiers interprètes et conducteurs de navires résultait de la volonté du législateur de mettre le droit national en conformité avec un règlement communautaire, il a estimé que l'évaluation de la valeur des offices n'était entachée d'aucune erreur manifeste.

Soulignant « qu'au surplus, l'article 5 de la loi offre aux intéressés la possibilité d'accéder à diverses professions réglementées », il a jugé que « dans ces conditions, les modalités de réparation prévues par la loi déférée n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ».

2. Le régime d'indemnisation des avoués

A l'appui de leurs demandes d'indemnisation, la Chambre nationale des avoués, l'Association syndicale des avoués (ASA), l'Association des jeunes avoués (AJA) et l'ensemble des avoués entendus par votre rapporteur soutiennent que la suppression des offices d'avoués et du droit de présentation d'un successeur constitue pour eux une suppression de leur outil de travail 24 ( * ) . La Chambre nationale des avoués et les organisations représentatives des avoués ont d'ailleurs communiqué à votre rapporteur plusieurs consultations juridiques étayant leurs positions et revendications.

Les représentants de ces organismes ont expliqué à votre rapporteur que, selon eux, l'indemnisation des avoués devait assurer la réparation de trois préjudices distincts :

- un préjudice patrimonial , résultant de la suppression du droit de présenter un successeur. Les positions exprimées à cet égard par les avoués tendent à considérer que le droit de présentation constitue un bien, ou encore un droit patrimonial. Dès lors, la perte du droit de présentation devrait être indemnisée selon les règles applicables en matière d'expropriation, en référence à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme.

A cet égard, dans un arrêt du 23 mars 2005, SCP Machoïr et Bailly , le Conseil d'Etat juge que « la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit de présentation résultant, pour les commissaires-priseurs, de la suppression par la loi du 10 juillet 2000 de leur monopole dans le domaine des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques porte atteinte à un droit patrimonial qui, s'il revêt une nature exceptionnelle, dès lors que la disposition en est restreinte et conditionnée par la nécessité de maintenir le contrôle qui appartient au Gouvernement sur la transmission des offices et d'assurer l'indépendance des fonctions publiques attachées au titre de commissaire-priseur, n'en est pas moins un bien au sens de l'article 1 du premier protocole additionnel » 25 ( * ) .

Le droit de présentation dont les officiers ministériels sont titulaires constitue donc un bien d'une nature exceptionnelle. De ce bien ne découlerait pas, si l'on se réfère à la décision du Conseil constitutionnel du 10 janvier 2001 précitée, un droit de propriété. Dans sa décision du 10 janvier 2001 précitée, le juge constitutionnel a donc fondé son appréciation sur l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, relatif à l'égalité devant les charges publiques, et non sur l'article 17 relatif au droit de propriété.

Selon les représentants des avoués, cette jurisprudence pourrait toutefois évoluer, sous l'influence de la jurisprudence européenne et parce que, en l'espèce, la suppression du droit de présentation et du monopole des avoués devrait entraîner une perte quasi totale de clientèle, alors que les commissaires-priseurs, s'ils ont perdu en 2000 le monopole des ventes volontaires, ont pu poursuivre la même activité, dans un cadre devenu concurrentiel, et conserver une part importante de leur clientèle.

- le préjudice professionnel, ou préjudice de carrière , constitué par une perte de revenus. Les avoués bénéficient en effet d'un monopole qui leur assure, en règle générale, des revenus élevés.

Ainsi, selon le rapport de la commission présidée par M. Jean-Michel Darrois, le bénéfice moyen des avoués s'élevait à 216 190 euros par associé en office collectif sur la période 2003-2006, et à 158 780 euros pour les offices individuels sur la même période.

En devenant avocats, ils pourraient connaître une baisse de leurs revenus, si l'on s'en tient à des moyennes qui ne font que refléter une vision très imprécise de la diversité des situations. Cette baisse serait cependant réduite s'ils parvenaient à rejoindre des avocats exerçant en société. En effet, toujours selon le rapport de la commission sur les professions du droit, le revenu moyen des avocats s'élève en 2006 à 70 616 euros. Il s'établit à cette date à 48 847 euros par an pour les avocats exerçant individuellement et à 233 281 euros par an pour les avocats exerçant au sein d'associations.

Les représentants des avoués fondent leur demande d'indemnisation spécifique du préjudice professionnel sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Cette jurisprudence prend appui sur l'article 1 du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La Cour européenne des Droits de l'Homme, dans ses arrêts Lallement contre France, a consacré l'obligation pour l'Etat d'indemniser la perte de l'outil de travail et les préjudices matériels qui en résultent 26 ( * ) . Dans cette affaire, la Cour dégage successivement deux principes :

- dans l'arrêt principal, rendu le 11 avril 2002, elle constate que l'expropriation litigieuse a eu pour effet d'empêcher le requérant de poursuivre de manière rentable son activité. L'intéressé ayant perdu son « outil de travail » sans indemnisation appropriée, la Cour conclut à la violation de l'article 1 du protocole additionnel n° 1. Au nom de l'effectivité des droits garantis par la Convention, certains biens bénéficient donc d'une protection renforcée, détachée de leur stricte valeur vénale. Ainsi, lorsque le bien exproprié est l'« outil de travail » de l'intéressé, l'indemnisation doit couvrir cette perte spécifique.

- dans l'arrêt en satisfaction équitable, rendu le 12 juin 2003, elle souligne que le préjudice causé spécifiquement par cette violation de la Convention est susceptible de justifier l'allocation d'une somme aux fins de « satisfaction équitable » 27 ( * ) . Elle retient, pour évaluer la somme due par l'Etat français, un total correspondant à 10 ans de pertes de revenus (paragraphes 17 à 19).

Il convient de rappeler que cette affaire portait sur des terrains agricoles. Aussi la Cour a-t-elle relevé que l'expropriation en question s'analysait en une privation de propriété au sens de la seconde phrase du premier paragraphe de l'article 1 du Protocole n° 1, et que cette mesure était légale au regard du droit français et poursuivait un but légitime d'« intérêt public ».

Elle a rappelé qu'une mesure d'ingérence dans le droit au respect des biens, telle l'expropriation litigieuse, doit ménager un « juste équilibre » entre les exigences de l'intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l'individu. En particulier, il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé par toute mesure privant une personne de sa propriété 28 ( * ) . Cet équilibre est rompu « si la personne concernée a eu à subir " une charge spéciale et exorbitante " » 29 ( * ) .

A ce titre, la Cour a précisé que l'individu exproprié doit en principe obtenir une indemnisation « raisonnablement en rapport avec la valeur du bien » dont il a été privé, même si « des objectifs légitimes " d'utilité publique " (...) peuvent militer pour un remboursement inférieur à la pleine valeur marchande ». Elle a ajouté que son contrôle « se borne à rechercher si les modalités choisies excèdent la large marge d'appréciation dont l'Etat jouit en la matière » 30 ( * ) .

S'agissant du préjudice de carrière, l'AJA et les avoués entendus par votre rapporteur ont insisté sur la situation particulière des jeunes avoués et, plus spécifiquement, sur la situation des jeunes avoués associés majoritairement en industrie 31 ( * ) , ou encore largement endettés.

Ainsi, ceux qui ne sont porteurs que de peu de parts en capital et dont la rémunération provient essentiellement de l'industrie, ne percevront qu'une faible part de l'indemnisation fondée sur la valeur de l'office, puisque leurs parts sociales sont réduites.

- un préjudice économique, ou préjudice de liquidation ; en effet, les avoués, qui emploient en général un personnel plus nombreux que les avocats, ne sont guère susceptibles de conserver des structures d'exercice identiques dans le cadre de leur nouvelle activité. Il leur faudra par conséquent liquider les structures d'exercice qui ne pourront survivre à la réforme.

A cet égard, les représentants de l'AJA ont souligné que les jeunes avoués sont non seulement endettés à titre professionnel pour l'acquisition du droit d'exercice, mais également pour les investissements relatifs à l'outil de travail (locaux, matériel, documentation).

Votre rapporteur relève en outre que pour satisfaire à l'exigence de proportionnalité, l'indemnisation doit intervenir dans un délai raisonnable 32 ( * ) .

3. L'avenir professionnel du personnel des études d'avoués

La disparition de la profession d'avoué près les cours d'appel devrait entraîner le licenciement d'une part importante des 1 650 salariés des offices d'avoué. Près de 70 % de ces salariés ont entre 11 et 30 ans d'ancienneté, comme l'illustre le graphique suivant.

Ces salariés devraient bénéficier d'un régime d'indemnités de licenciement plus favorable que le régime légal prévu par le code du travail. Ce régime sera pris en charge par l'Etat.

Par ailleurs, une commission tripartite, composée des organisations représentatives des employeurs, des salariés et de représentants de l'Etat doit aboutir à la signature simultanée d'un accord collectif entre employeurs et salariés, définissant les mesures d'accompagnement applicables aux licenciements intervenus par l'effet de la réforme, et d'une convention entre l'Etat et les employeurs, pour en prévoir le financement par l'Etat.

Une convention de reclassement personnalisé sera ainsi proposée à tout salarié d'un office subissant un licenciement lié à la réforme. Il est prévu qu'elle lui permette notamment de bénéficier des prestations d'une cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi. Une telle cellule sera créée au niveau de chacune des 28 cours d'appel concernées.

Un abondement pris en charge par l'Etat, à hauteur de 1000 euros par salarié, est prévu pour compléter la prise en charge de droit commun par le Fonds national pour l'emploi (FNE), d'un montant de 2000 euros par mois. Cet abondement permettra une prise en charge personnalisée pendant 12 mois, prorogeable pendant 6 mois sous certaines conditions.

Il convient de souligner que les salariés des études d'avoué sont généralement mieux rémunérés que les personnes exerçant des fonctions équivalentes dans le cadre d'entreprises ou de cabinets d'avocat. Ils subiront par conséquent une perte d'emploi et, s'ils se reconvertissent avec succès, une baisse de revenus. Par ailleurs, 90 % de ces salariés sont des femmes. La moyenne d'âge des salariés atteint 43 ans. Ces caractéristiques font que les salariés des avoués sont souvent installés depuis plusieurs années près d'une cour d'appel et sont peu mobiles.

Aussi une convention devrait-elle prévoir le versement d'une allocation temporaire dégressive (ATD) aux salariés reclassés dans un emploi comportant une rémunération inférieure à celle qu'ils recevaient au titre de leur emploi antérieur. Une telle compensation, qui peut être prise en charge par le FNE à hauteur de 300 euros par mois, est de nature à favoriser le reclassement externe des salariés licenciés.

Le projet de loi comporte en outre des dispositions visant à faciliter l'accès des salariés les plus qualifiés, qui ont la qualité de collaborateur juriste, à la profession d'avocat et aux autres professions judiciaires et juridiques. On dénombre parmi les salariés, selon une étude de l'Association nationale des personnels d'avoués non syndiqués (ANPANS) 172 collaborateurs juristes (55 de ces collaborateurs étant titulaires de l'examen d'aptitude à la profession d'avoué soit 32% de l'ensemble de ces collaborateurs).

Par ailleurs, la loi de finances pour 2010 prévoit la création de 190 emplois temps plein au milieu de l'année 2010, afin de permettre le recrutement, parmi les salariés des études d'avoué, de 380 personnes qui seront affectées aux greffes des juridictions. Ces emplois se déclinent de la façon suivante :

- 19 assistants de catégorie A recrutés par voie contractuelle ;

- 139 greffiers de catégorie B recrutés par la voie d'un concours adapté, comportant une reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle ;

- 222 adjoints administratifs de catégorie C, recrutés localement sans concours.

Lors de son audition par la commission des lois le 10 novembre 2009, Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que, si un nombre réduit de salariés était susceptible d'accompagner leur employeur accédant à la profession d'avocat, les emplois de catégorie A qui seraient proposés par le ministère de la justice reposeraient sur des contrats, tandis que les emplois de catégorie B et C constitueraient des intégrations au sein de la fonction publique.

La proportion de salariés qui resteront auprès de leur ancien employeur, devenu avocat ou accédant à une autre profession juridique, est difficile à évaluer. Ces perspectives de recrutement apparaissent toutefois limitées, chaque avocat employant en moyenne moins d'un salarié, alors que chaque avoué en emploie 4 ou 5. Les cabinets d'avocats pourraient néanmoins trouver un intérêt à recruter des salariés ayant acquis une grande expérience de la procédure d'appel.

En définitive, la situation des 1650 salariés se résume de la façon suivante :

- environ 170 collaborateurs juristes, diplômés, bénéficieraient de passerelles vers d'autres professions et pourront en toute hypothèse, grâce à leurs qualifications, se reconvertir plus facilement ;

- 380 salariés seraient recrutés par le ministère de la justice ;

- 350 salariés pourraient poursuivre une activité auprès d'un ancien avoué, si l'on exclut les avoués qui vont prendre leur retraite.

Toutefois, votre rapporteur souligne que pour de nombreux salariés, l'accès à ces nouveaux emplois n'interviendra qu'après leur licenciement par l'avoué qui les employait.

En outre, près de 750 à 800 salariés n'auront, au moment de leur licenciement, aucune perspective immédiate d'emploi. Ils devront donc bénéficier d'actions spécifiques et renforcées de soutien et de formation pour affronter la situation dans laquelle ils seront placés du fait de la loi.

4. L'impact de la réforme sur la caisse de retraite des personnels d'avocats et d'avoués

Les représentants de l'Association nationale des personnels d'avoués non syndiqués (ANPANS) et de l'Association des jeunes avoués ont alerté votre rapporteur sur les conséquences de la réforme pour le financement du régime de retraite des personnels d'avocats et d'avoués.

M. François Toucas, président de la Caisse de retraite du personnel des avocats et des avoués près les cours d'appel (CREPA), a rappelé à votre rapporteur que cette caisse gérait les régimes d'assurance maladie et décès et de retraite complémentaire de 1.800 salariés d'avoués et de 40.000 salariés d'avocats.

Cette caisse devrait en outre assurer, en liaison avec le Conseil national des barreaux, la gestion d'une bourse de l'emploi destinée à faciliter la réinsertion des personnels d'avoués dans des cabinets d'avocats. Selon son président, le taux de provisionnement des retraites dues par la CREPA atteint seulement 63 %. La caisse a connu des difficultés de financement qui l'ont conduite à suivre un plan de provisionnement, approuvé par l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, qui devrait se poursuivre jusqu'en 2026 pour assurer un provisionnement intégral des droits à pension.

Ce plan a entraîné une forte augmentation des cotisations patronales et salariales. Le licenciement de nombreux salariés d'avoués perturbera la mise en oeuvre de ce plan, entraînant un déficit de cotisations à percevoir pour la CREPA.

Les personnes entendues par votre rapporteur ont souligné les graves difficultés que risque de rencontrer la CREPA pour assurer le remboursement aux employeurs des indemnités de fin de carrière, dues au personnel des avoués. Ces indemnités correspondant à un montant total de 14 millions d'euros.

Versée par l'employeur au salarié lorsqu'il cesse son activité, son montant est lié à l'ancienneté et varie entre un cinquième de mois de salaire pour une ancienneté d'un an et sept mois de salaire pour une ancienneté supérieure à 35 ans. Les salariés qui, lors de la liquidation de leur retraite, ne travaillent plus dans un cabinet d'avocat ou un office d'avoué, ne perçoivent pas cette indemnité.

La réforme risque donc d'entraîner, pour les salariés qui ne poursuivraient pas une activité dans un cabinet d'avocat, la perte du bénéfice de cette indemnité, sauf si la CREPA était en mesure de « réserver » les sommes correspondantes, calculées au moment du licenciement, pour les verser aux salariés lors de leur départ à la retraite. Le CREPA évalue à 14 millions d'euros la valeur de ces droits.

Par ailleurs, le déficit de cotisation pour la branche retraite professionnelle qui résultera des licenciements induits par la disparition des offices d'avoués pourrait atteindre 12 à 17 millions d'euros.

A cet égard, si l'étude d'impact jointe au projet de loi relève les conséquences de la réforme sur la CREPA, le Gouvernement n'a à ce jour avancé aucune solution. Ainsi, l'étude d'impact souligne que « la CREPA s'est engagée à mettre à l'ordre du jour des prochaines négociations la reprise d'ancienneté, pour le calcul des droits, des salariés d'avoués devenant salariés d'avocats. Toutefois, le régime de retraite sur-complémentaire connaît actuellement des difficultés financières, dont la CREPA, affirme qu'elles seront aggravées par la réforme » 33 ( * ) .

Cette étude précise par ailleurs que « les salariés qui seront licenciés sans retrouver un emploi dans un cabinet d'avocat ne pourront bénéficier de l'indemnité de fin de carrière prévue par la convention collective des avoués comme par celle des avocats, qui peut aller jusqu'à sept mois de salaire pour une ancienneté égale ou supérieure à trente-cinq ans. Il convient toutefois de souligner que le dispositif d'indemnités supra-légales proposé en faveur des salariés licenciés permettra à ceux-ci de recevoir une indemnité plus favorable que celle qui aurait résulté du cumul de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité de fin de carrière . »

Votre rapporteur regrette que le Gouvernement n'ait pas encore conduit, en relation avec la CREPA, une analyse approfondie de l'impact de la suppression des offices d'avoués et des licenciements qui en résulteront sur l'équilibre financier de cette caisse.

Il considère que le Gouvernement doit prendre les mesures nécessaires pour préserver cet équilibre et garantir aux salariés licenciés du fait de la loi que leurs droits seront maintenus. Il serait en particulier inacceptable que l'absence d'intervention de l'Etat conduise à une discrimination entre les salariés d'avocats, qui percevront la totalité de leurs droits, et les salariés d'avoués, qui ne percevraient que 63 % des leurs, en raison d'un taux de provisionnement incomplet à ce jour.

Enfin, il paraît indispensable que le régime d'indemnisation des salariés d'avoués licenciés leur assure le bénéfice de droits correspondant à l'indemnité de fin de carrière qu'ils auraient perçue s'ils étaient restés salariés d'avoué, au prorata de leur ancienneté dans la profession.

II. LA DÉFINITION DE MODALITÉS DE RÉFORME ÉQUITABLES POUR LES AVOUÉS ET LEURS SALARIÉS ET RÉALISTES POUR LES JUSTICIABLES

A. LES LIMITES DU PROJET DE LOI INITIAL

Le projet de loi déposé à l'Assemblée nationale le 3 juin 2009 a pour intitulé « projet de loi portant fusion des professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel ». Ce projet comporte trente quatre articles, répartis en cinq chapitres.

1. La fusion des professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel

Le chapitre premier du projet de loi comporte douze articles modifiant la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, afin d'organiser la disparition de la profession d'avoué et l'exercice par les avocats de la postulation en appel. L'article 34 du projet de loi fixait au 1 er janvier 2011 la date d'entrée en vigueur de ce chapitre.

Les avoués rejoindraient par conséquent à cette date la profession d'avocat (article premier). Les offices d'avoués près les cours d'appel seraient supprimés, les avoués étant indemnisés dans les conditions définies au chapitre II du projet de loi (article 2).

L'activité des avocats serait étendue à la postulation devant les cours d'appel (articles 3 et 4), le tarif de postulation étant limité aux procédures devant le tribunal de grande instance (article 5). Le projet de loi réforme par conséquent le régime de la postulation en appel et supprime le tarif correspondant, mais laisse inchangé le régime de la postulation devant le tribunal de grande instance.

Les ordres d'avocats seraient habilités à délibérer de la postulation et de la communication électronique (article 6). Par ailleurs, l'un des bâtonniers du ressort de la cour serait désigné par ses pairs pour être l'interlocuteur de la cour d'appel sur ces questions (articles 7 et 11).

Les articles 8 à 10 inscrivent dans la loi du 31 décembre 1971 certaines conséquences sociales de la disparition de la profession d'avoué. Ainsi, les obligations de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et de la Caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels (CAVOM) au titre des régimes de retraite de base et complémentaire du régime invalidité-décès des anciens avoués seraient prises en charge par la Caisse nationale des barreaux français (CNBF) (article 8). Les conditions de représentation des avoués au sein de la CNBF seraient renvoyées à un décret (article 30).

L'article 9 définit les relations entre les anciens avoués devenus avocats et leurs personnels et l'article 10 prévoit l'affiliation du personnel salarié non avocat de la nouvelle profession d'avocat à la caisse de retraite du personnel des avocats (CREPA).

2. Un dispositif d'indemnisation insuffisant

Le chapitre II du projet de loi rassemble les articles relatifs à l'indemnisation des avoués et de leurs salariés licenciés.

Le projet de loi initial prévoit ainsi que la valeur des offices soit calculée selon la méthode utilisée pour l'instruction des dossiers de cession des offices par le ministère de la justice ; c'est-à-dire une moyenne entre les recettes nettes et trois fois le bénéfice net fiscal (article 13).

L'indemnité devait initialement s'élever à 66 % de la valeur de chaque office. Cette indemnité ne pourrait être inférieure au montant de l'apport personnel ayant financé l'acquisition de l'office ou des parts de la société, majoré, le cas échéant, du montant du capital restant dû au titre du prêt contracté pour financer cette acquisition.

S'agissant des salariés, tout licenciement intervenant en conséquence de la réforme serait réputé licenciement économique (article 14). Le montant des indemnités de licenciement était initialement fixé au double du montant égal, dès lors que le salarié comptait au moins un an d'ancienneté dans la profession.

Les indemnités de licenciement versées aux salariés licenciés en application de la loi avant le 31 décembre 2012 seraient remboursées aux avoués (article 15).

Une commission serait chargée d'apprécier les demandes d'indemnisation présentées par les avoués, les indemnités devant être versées dans les six mois suivant le dépôt de la demande (article 16). Les modalités de désignation des membres de cette commission et ces modalités de fonctionnement, ainsi que celles du fonds d'indemnisation, seraient renvoyées à un décret (article 20).

Par ailleurs, chaque avoué pourrait demander au président de cette commission le versement d'un acompte sur les indemnités qui lui sont dues, dans la limite de 50 % de la recette nette qu'il a réalisée au vu de sa dernière déclaration fiscale (article 17).

Les demandes d'indemnités devraient être formées par l'avoué s'il exerce à titre individuel ou, s'il exerce au sein d'une société :

- par la société en ce qui concerne le remboursement des indemnités de licenciement ;

- par la société titulaire de l'office ou par chaque associé en ce qui concerne les indemnités portant sur l'office supprimé (article 18).

Aussi l'article 19 du projet de loi crée-t-il un fonds d'indemnisation chargé du paiement des indemnités, dont la gestion comptable et financière serait confiée à la Caisse des dépôts et consignations.

Ce fonds, d'abord constitué par les emprunts et avances consentis par la Caisse des dépôts et consignations, serait ensuite alimenté par le produit d'une taxe affectée.

3. Les modalités d'accès des avoués et de leurs collaborateurs aux professions judiciaires et juridiques

Le chapitre III du projet de loi rassemble les dispositions visant à faciliter l'accès des avoués et de leurs collaborateurs aux professions judiciaires et juridiques.

Selon les indications de la chancellerie, des dispositions qui pourraient aménager l'accès des avoués et de leurs collaborateurs à la magistrature, relevant de la loi organique, pourraient être ultérieurement soumises au Parlement, dans le cadre d'un projet de loi organique qui modifierait l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

L'article 21 du projet de loi donne aux collaborateurs d'avoués titulaires du diplôme d'aptitude à la profession d'avoué, et aux avoués qui renonceraient à entrer dans la profession d'avocat, la possibilité d'accéder, dans un délai de cinq ans et selon des modalités dérogatoires, à l'ensemble des professions judiciaires et juridiques libérales réglementées (notaire, avocat aux conseils, commissaire-priseur judiciaire, huissier de justice, greffier de tribunal de commerce, administrateur judiciaire, mandataire judiciaire).

Les collaborateurs des avoués qui, sans détenir le diplôme d'aptitude à la profession d'avoué, disposeraient de qualifications juridiques, bénéficieraient également de passerelles vers ces professions.

Les collaborateurs pourraient en outre accéder à la profession d'avocat :

- directement s'ils sont titulaires du diplôme d'aptitude à la profession d'avoué ;

- avec des dispenses de formation théorique et pratique s'ils ne sont pas titulaires du diplôme d'aptitude à la profession d'avoué, mais sous conditions de diplôme et d'expérience professionnelle (article 22).

Enfin, les collaborateurs d'avoués en cours de stage pour obtenir le diplôme d'aptitude à la profession d'avoué pourraient accéder sans examen préalable à la formation d'avocat (article 23).

4. Les modalités de mise en oeuvre et le financement de la réforme

? Les modalités de mise en oeuvre

Le chapitre IV du projet de loi rassemble les dispositions transitoires.

Ainsi, l'article 24 permet aux associés d'exercer dès le 1 er janvier 2010, et simultanément, les professions d'avoué et d'avocat.

Par ailleurs, les sociétés d'avoués qui ne seraient pas dissoutes au 1 er janvier 2011 auraient pour objet social l'exercice de la profession d'avocat, leurs membres disposant d'un délai de six mois pour adapter les statuts (article 25).

L'article 26 donne aux avoués la possibilité ;

- de renoncer à entrer dans la profession d'avocat, dans un délai d'au moins trois mois avant le 1 er janvier 2011 ;

- de choisir un autre barreau que celui du tribunal de grande instance du lieu de leur office, dans le même délai.

Le projet de loi règle en outre le sort des instances en cours à la date d'entrée en vigueur d la réforme (article 27). Ainsi, l'avoué devenu avocat continuerait à postuler, tandis que l'avocat continuerait à assister la partie, sauf si ces deux auxiliaires de justice, de façon conjointe, ou la partie intéressée, en décidaient autrement.

L'article 28 définit le sort des sanctions et des procédures disciplinaires relatives aux avoués, les compétences des juridictions disciplinaires compétentes étant prorogées pour les instances en cours. Les nouvelles instances disciplinaires engagées à compter de la fusion des professions d'avoué et d'avocat relèveraient de la compétence du conseil de discipline des avocats, sauf si l'ancien avoué a préféré rejoindre une autre profession.

La Chambre nationale des avoués poursuivrait ses activités jusqu'au 31 décembre 2013, afin de traiter les questions relatives au reclassement des personnels des offices (article 29).

Enfin, le chapitre V rassemble les dispositions finales qui opèrent un toilettage des textes législatifs faisant référence aux avoués (articles 31 et 32) et abrogent les dispositions contraires à la loi (article 33).

B. LES APPORTS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a modifié l'intitulé du projet de loi, qui porte désormais sur la « réforme de la représentation devant les cours d'appel ».

1. L'inscription dans la loi d'une nouvelle spécialisation des avocats en procédure d'appel

Les députés ont inscrit à l'article premier de la loi du 31 décembre 1971 la possibilité, pour les avocats, de faire suivre leur titre de la mention d'une « spécialisation en procédure d'appel » (article premier). Cette spécialisation bénéficierait en premier lieu aux anciens avoués devenus avocats, qui pourraient faire Etat de leurs qualifications reconnues en la matière.

L'Assemblée nationale a par ailleurs retiré la postulation des nouveaux problèmes d'intérêt commun que les ordres des avocats seraient chargés de régler par délibération (article 6). Seule la communication électronique serait donc ajoutée à cette liste, qui comprend aujourd'hui l'informatique, la formation professionnelle, la représentation de la profession et le régime commun de la garantie.

Ainsi, les députés ont-ils également supprimé la postulation de la liste des questions intéressant la cour d'appel dont le représentant des bâtonniers des barreaux du ressort de chaque cour pourrait traiter avec les chefs de cour. L'Assemblée nationale a en outre précisé que les avoués pourraient s'inscrire de droit au barreau, sur simple demande, à compter du 1 er janvier 2010 (article 24). Elle a enfin prolongé d'un an l'activité de la Chambre nationale des avoués, qui serait donc maintenue jusqu'au 31 décembre 2014 (article 29).

2. Les règles d'affiliation des anciens avoués aux caisses de retraite des officiers ministériels et du barreau

L'Assemblée nationale a modifié l'article 8 du projet de loi, afin de prévoir que seuls les anciens avoués devenant avocats seraient affiliés à la Caisse nationale des barreaux français pour l'exercice de leur nouvelle activité, la Caisse nationale d'assurance vieillesse des officiers ministériels (CAVOM) conservant la gestion des droits acquis au titre des années de cotisations antérieures à la suppression des offices d'avoués.

Les anciens avoués qui rejoindraient une autre profession judiciaire ou juridique réglementée resteraient affiliés à la CAVOM. Par ailleurs, cette caisse assumerait ses obligations à l'égard des retraités et de leurs ayant-droits et verserait par conséquent à tous les anciens avoués leurs droits à pension, au prorata de leur durée de cotisation auprès de la CAVOM.

Les transferts financiers qui devraient intervenir entre la CNBF et la CAVOM pour assurer le versement des pensions seraient fixés par convention entre ces caisses ou, à défaut, par décret.

3. L'indemnisation des avoués

Comme votre rapporteur, M. Gilles Bourdouleix, rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, s'est heurté, dans sa volonté d'amélioration des conditions d'indemnisation des avoués et de leur personnel, aux conditions de recevabilité financière des amendements d'origine parlementaire, définies par l'article 40 de la Constitution.

Toutefois, l'Assemblée nationale a obtenu du Gouvernement une augmentation conséquente du taux d'indemnisation des avoués. La commission des lois a d'abord adopté un amendement du Gouvernement portant de 66 % à 92 % de la valeur de l'office ce taux d'indemnisation (article 13).

L'Assemblée nationale a ensuite adopté un autre amendement du Gouvernement élevant ce taux à 100 % de la valeur de l'office, afin d'assurer une indemnisation complète du préjudice patrimonial.

Les députés ont en outre précisé à l'article 16 du projet de loi que :

- le remboursement aux avoués des indemnités de licenciement versées à leurs salariés devrait intervenir dans les trois mois suivant le dépôt de la demande ;

- les décisions prises par la commission nationale chargée de statuer sur les demandes d'indemnisation et de remboursement, ou par son président statuant seul, pourraient faire l'objet d'un recours de pleine juridiction devant le Conseil d'Etat.

4. Les indemnités de licenciement du personnel des offices d'avoués

Le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, ayant déposé un amendement visant à améliorer les conditions d'indemnisation des salariés des avoués licenciés, s'est vu opposer l'irrecevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution. Dans l'impossibilité de faire aboutir une initiative parlementaire répondant à cet objectif, la commission des lois de l'Assemblée nationale a rejeté l'article 14 du projet de loi, afin d'inciter le Gouvernement à modifier son texte.

L'Assemblée nationale a ensuite adopté un amendement du Gouvernement ajoutant à la formule retenue par le projet de loi pour le calcul des indemnités de licenciement des salariés :

- deux quinzième de mois de salaire par année d'ancienneté comprise entre quinze et vingt ans ;

- puis respectivement quatre, six, huit, dix et douze quinzièmes de mois par année comprise dans chacune des tranches de cinq années supplémentaires.

? Le coût et le financement de la réforme

L'étude d'impact jointe au projet de loi déposé à l'Assemblée nationale en juin 2009 évalue le coût de la réforme à 201,8 millions d'euros.

Or, ce montant était fondé sur une indemnisation des avoués à hauteur de 66 % de la valeur de leur office. L'Assemblée nationale a depuis porté ce taux à 100 % de la valeur de l'office. Elle a en outre amélioré les conditions d'indemnisation des salariés.

Ainsi, l'indemnisation des avoués ne porte plus sur un montant total de 166,1 millions d'euros, mais plutôt sur un montant de 250 millions d'euros. Quant aux indemnités de licenciement des salariés, elles ne s'élèveraient pas à 19,2 millions d'euros, mais plutôt à 34 millions d'euros, non seulement en raison des modifications apportées par l'Assemblée nationale, mais aussi parce que les bases de calcul utilisées par l'étude d'impact étaient erronées.

Outre ces deux points essentiels, le coût de la réforme se décompose ainsi :

- 5,4 millions d'euros pour la majoration due au titre de la restitution de l'apport personnel ;

- 12 millions d'euros au titre des frais financiers ;

- 1,4 million d'euros pour les remboursements au Fonds national de l'emploi ;

- 1,1 million d'euros pour les frais de gestion.

Le montant des frais financiers devra également être réévalué puisque l'amélioration des conditions d'indemnisation des avoués entraînera le versement de sommes plus importantes par le fonds d'indemnisation, alimenté par des avances de la Caisse des dépôts et consignations.

Par conséquent, le coût total de la réforme résultant du texte adopté par l'Assemblée nationale, s'élève à près de 305 millions d'euros.

Le Gouvernement prévoyait initialement que la réforme serait financée par la voie d'une taxe assise sur toutes les affaires nouvelles avec représentation obligatoire devant la Cour de cassation, les cours d'appel et les tribunaux de grande instance.

Cette taxe de 85 euros par affaire aurait été due par tout demandeur, sauf s'il bénéficiait de l'aide juridictionnelle. Elle devait être créée par la loi de finances pour 2010 et être perçue dès 2010 pour les affaires introduites devant les tribunaux de grande instance et devant la Cour de cassation et à compter du 1 er janvier 2011 pour les appels interjetés devant les cours d'appel. Elle devait être perçue pendant 7 ans.

La base de cette taxe aurait porté sur 370 000 affaires par an environ, si l'on ne compte que les affaires civiles avec représentation obligatoire et sans bénéfice de l'aide juridictionnelle, soit :

- 235 000 affaires en première instance par an ;

- 116 000 affaires en appel par an ;

- 18 000 affaires en cassation par an.

La création de cette taxe ne figure pas dans le projet de loi de finances pour 2010.

En revanche, l'article 28 du projet de loi de finances rectificative pour 2009, déposé à l'Assemblée nationale le 16 novembre 2009, prévoit le financement de la réforme par un droit d'un montant de 330 euros , qui serait dû par la partie qui interjette appel, dans les affaires pour lesquelles la représentation est obligatoire. Ce droit serait perçu pendant 8 ans à compter du 1 er janvier 2011. Il serait acquitté par l'avocat postulant pour le compte de son client. Il ne serait pas dû par les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle.

Votre rapporteur souligne que cette taxe, d'un montant élevé, constituera un obstacle pour l'accès à la justice d'appel des personnes qui ne sont pas éligibles à l'aide juridictionnelle et qui ont, néanmoins, des revenus modestes.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : ASSURER UNE INDEMNISATION COMPLÈTE DES PRÉJUDICES SUBIS PAR LES AVOUÉS ET LEURS SALARIÉS

Votre commission a adopté 24 amendements, dont 20 de son rapporteur, parmi lesquels figurent 8 amendements de coordination.

Elle s'est en particulier attachée à améliorer les conditions d'indemnisation du personnel des études d'avoués, dont une majorité sera confrontée à un licenciement dans une conjoncture économique difficile. Elle a en outre souhaité organiser une indemnisation spécifique pour les jeunes avoués et pour les avoués qui ne détiendraient que des parts sociales en industrie.

1. Améliorer l'indemnisation et les conditions de reconversion du personnel salarié des avoués

? Un régime d'indemnisation fondé sur un mois de salaire par année d'ancienneté

Votre commission juge insuffisant le dispositif prévu par le projet de loi de loi adopté par l'Assemblée nationale en première lecture pour l'indemnisation des salariés des avoués.

En effet, ce dispositif se révèle inférieur à ce qui a été prévu pour les salariés des commissaires-priseurs en 2000, sauf à l'égard des salariés disposant de plus de 37 ans d'ancienneté, qui sont proches de l'âge de la retraite.

Or, 70 % des salariés d'avoué ont entre 11 et 30 ans d'ancienneté et seuls 0,01 % des salariés totalisent plus de 37 ans d'ancienneté.

Aussi, votre commission a-t-elle adopté un amendement présenté par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et M. Raymond Couderc, prévoyant que les salariés perçoivent, dès lors qu'ils comptent un an d'ancienneté ininterrompue dans la profession, des indemnités de licenciement calculées à hauteur d'un mois de salaire par année d'ancienneté (article 14).

? La création d'une indemnité de reconversion

Le projet de loi ne prévoit d'indemnisation des salariés des avoués qu'en cas de licenciement. Ainsi, les salariés qui s'efforceraient de se reconvertir avant d'être licenciés et qui démissionneraient pour rejoindre un nouvel emploi ne percevraient aucune indemnité. Ce changement dans leur vie professionnelle interviendrait pourtant à cause de la suppression de la profession d'avoué, décidée par l'Etat.

Le système proposé paraît conforme à l'équité. Il incite, en outre, les salariés à attendre leur licenciement pour bénéficier d'une indemnité majorée. Le salarié licencié percevrait ainsi des indemnités d'un montant plus élevé, puis une allocation de retour à l'emploi et aurait ensuite plus de difficultés à trouver un nouvel emploi, alors qu'une indemnité de reconversion l'inciterait à trouver un emploi avant d'être licencié et se révèlerait moins coûteuse pour l'Etat.

Afin de remédier aux défauts de ce dispositif et d'offrir aux salariés démissionnaires le bénéfice d'une indemnité tout en permettant une meilleure utilisation des deniers publics, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur créant une indemnité exceptionnelle de reconversion (article 14). Le montant de cette indemnité, égal à l'indemnité légale de licenciement, serait inférieur à l'indemnité majorée de licenciement.

Cette indemnité serait versée directement par le fonds d'indemnisation à tout salarié démissionnant, pour créer, rejoindre un nouvel emploi ou une entreprise.

? Le versement direct, par le fonds d'indemnisation, des indemnités de licenciement ou de l'indemnité exceptionnelle de reconversion

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur prévoyant le versement direct par le fonds d'indemnisation des sommes dues au titre du licenciement des salariés des avoués (article 14).

Pour garantir que les indemnités seront bien versées au moment où interviendra la rupture du contrat de travail, le délai du préavis de licenciement serait fixé à deux mois, alors qu'il varie en principe de zéro à deux mois selon l'ancienneté, et ne débuterait qu'à compter de l'envoi, par l'employeur, à la commission nationale d'indemnisation prévue à l'article 16, de la demande de versement des indemnités dues au salarié, cette demande lui étant par ailleurs notifiée.

? L'exonération de charges sociales patronales pour les anciens avoués et les professions juridiques employant d'anciens salariés d'avoués

Afin d'accompagner les anciens avoués dans leur nouvelle carrière d'avocat ou au sein de la profession juridique réglementée de leur choix, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur leur accordant une exonération de charges sociales patronales, pour l'emploi de salariés qui faisaient partie de leur personnel lorsqu'ils étaient avoués (article 13).

Cette exonération porterait sur la part des salaires versés équivalente au SMIC majoré de 50 %. Elle pourrait s'appliquer pendant deux ans maximum pour le même salarié et prendrait fin au 31 décembre 2014.

Votre commission a en outre adopté un amendement de son rapporteur permettant aux professions juridiques et judiciaires réglementées de bénéficier également d'une exonération de charges sociales patronales lorsqu'elles emploient un salarié issu d'une étude d'avoué (article 14 bis ).

Cette exonération, applicable aux salaires versés dans la limite du SMIC majoré de 50 %, ne pourrait bénéficier à l'employeur pendant plus de 18 mois. Ce dispositif prendrait fin le 1 er janvier 2013.

2. Assurer l'indemnisation de l'ensemble des préjudices subis par les avoués, en prenant en compte la situation des plus jeunes

? Une indemnité fixée par le juge de l'expropriation

Votre commission estime que la suppression des offices d'avoués et du monopole de la postulation en appel dont ils bénéficient constitue une atteinte à un droit patrimonial, relatif à l'outil de travail des avoués.

En effet, à la différence des avoués près les tribunaux de grande instance et des commissaires-priseurs, les avoués près les cours d'appel perdront leur activité et l'essentiel de leur clientèle, c'est-à-dire leur source de revenus.

Votre commission considère que cette situation justifie que l'indemnisation des avoués se fonde non sur l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, relatif à l'égalité devant les charges publiques, mais sur l'article 17 de cette Déclaration, relatif au droit de propriété.

En outre, la suppression de l'outil de travail des avoués requiert de la part de l'Etat une indemnisation équitable, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, dont l'arrêt Lallement contre France du 12 juin 2003, a consacré l'obligation pour l'Etat d'indemniser la perte de l'« outil de travail » et les préjudices matériels qui en résultent.

Votre commission a donc adopté un amendement de son rapporteur confiant au juge de l'expropriation la détermination du montant de l'indemnité accordée aux avoués (article 13). Le juge appliquerait à cette fin les dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

Le juge devrait en outre déterminer l'indemnité spécifique allouée aux avoués exerçant au sein d'une société dont ils détiennent des parts en industrie, afin d'assurer, en tenant compte de leur âge, la réparation du préjudice qu'ils subissent du fait de la loi.

? L'exonération fiscale des plus-values résultant, le cas échéant, de l'indemnisation

Votre commission considère que l'indemnité qui sera accordée aux avoués ne doit pas être soumise à l'impôt sur les plus-values. Elle a donc adopté un amendement de son rapporteur prévoyant que les plus-values réalisées dans le cadre du versement de l'indemnité accordée aux avoués sont exonérées de toute imposition (article 13).

? Des conditions de versement des indemnités plus protectrices des droits des avoués

Le dispositif de remboursement de l'emprunt contracté par l'avoué pour l'acquisition de son office, prévu à l'article 17, aboutit à faire bénéficier l'établissement d'un enrichissement sans cause au détriment de l'avoué, puisque, compte tenu des délais de remboursement, il percevra jusqu'à ce que ce dernier intervienne, les mensualités dues.

Pour remédier à cette difficulté, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur fixant le montant de remboursement, à la seule somme due au jour où il intervient, soit dans le mois où la demande de remboursement est formée. Elle a par ailleurs garanti que l'avoué puisse percevoir un acompte sur son indemnisation quel que soit le montant de l'emprunt remboursé.

3. Aménager la période transitoire préalable à la disparition de la profession d'avoué

Votre commission a souhaité maintenir la période transitoire pendant laquelle les avoués pourront également exercer la profession d'avocat, dans les mois précédant la disparition de leurs offices. Elle juge cette période indispensable pour permettre aux avoués d'entamer une nouvelle carrière tout en liquidant leur précédente activité.

Toutefois, afin d'éviter une prolongation de cette période dont les représentants des avocats estiment qu'elle engendrera une concurrence déloyale, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur décalant son commencement à la date de la publication de la loi (article 24). En effet, selon toute vraisemblance, le texte ne pourra être promulgué avant la date du 1 er janvier 2010 à laquelle renvoie l'article 24. La période transitoire devrait donc durer moins de dix mois, si l'on considère que le projet de loi pourrait être définitivement adopté en février 2010.

Votre commission a par ailleurs adopté un amendement présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues afin de prévoir que, pendant la période transitoire, il appartient à la partie intéressée -et non à l'avocat lui-même- de renoncer à l'assistance de son avocat, pour confier à l'avoué devenu avocat la mission de plaider.

4. Préciser le régime des transferts financiers entre les caisses de retraite

L'article 8 du projet de loi prévoit que les anciens avoués restent affiliés à la caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels (CAVOM), sauf s'ils rejoignent effectivement la profession d'avocat. Dans ce second cas, ils seraient affiliés à la Caisse nationale des barreaux français (CNBF).

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur afin de préciser les conditions selon lesquelles les caisses de retraite des avoués et des avocats assumeront leurs obligations à l'égard des anciens avoués.

En effet, les transferts financiers qui résulteront des nouvelles règles d'affiliation doivent être définis par convention entre les caisses ou, à défaut, par décret. Aussi votre commission a-t-elle souhaité préciser dans la loi les principes d'équité qui doivent s'imposer dans la définition de ces transferts. Le dispositif adopté prévoit que :

- chaque caisse versera les pensions au prorata du temps d'exercice de l'intéressé dans les professions d'avoué et d'avocat ;

- les transferts financiers tiennent compte des réserves constituées par chacune des caisses considérées et sont établis au prorata des effectifs d'anciens avoués rejoignant effectivement la profession d'avocat. Cette précision permettra d'assurer des transferts financiers équitables entre les caisses.

Votre commission a par ailleurs adopté deux amendements présenté par M. Jean-Pierre Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, afin de préciser :

- que les salariés trouvant un emploi auprès d'un avocat conserveront le bénéfice de l'intégralité des avantages individuels acquis en application de leur ancienne convention collective nationale (article 9) ;

- que les salariés des avoués qui relèveront, s'ils deviennent salariés d'un avocat, de la Caisse de retraite du personnel des avocats, conserveront le bénéfice de leurs cotisations (article 10).

Votre commission a enfin adopté trois amendements de son rapporteur complétant la liste des dispositions en vigueur au sein desquelles le projet de loi implique des coordinations et la liste des textes dont le projet de loi devrait entraîner l'abrogation.

*

* *

Votre commission a adopté le projet de loi ainsi rédigé.

EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE PREMIER DISPOSITIONS MODIFIANT LA LOI N° 71-1130 DU 31 DÉCEMBRE 1971 PORTANT RÉFORME DE CERTAINES PROFESSIONS JUDICIAIRES ET JURIDIQUES

Article premier (article premier de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Intégration des avoués à la profession d'avocat

Cet article prévoit l'intégration des avoués dans la profession d'avocat, sous réserve de leur renonciation à cette possibilité, dans les termes définis à l'article 26 du projet de loi.

Le principe de l'intégration des avoués dans la profession d'avocat serait inscrit à l'article premier de la loi du 31 décembre 1971, qui traite, d'une part, de la fusion entre les professions d'avocat et de conseil juridique (I) et, d'autre part, de la possibilité, pour les avocats, d'exercer les attributions naguère dévolues aux avoués devant les tribunaux de grande instance (II).

Le 1° de l'article premier du projet de loi modifie donc le I de l'article premier de la loi du 31 décembre 1971, afin de préciser que :

- la profession d'avocat se substitue à celle d'avoué près les cours d'appel (a). Elle exerce donc l'ensemble des fonctions antérieurement dévolues aux professions d'avocat, d'avoué et de conseil juridique ;

- sous réserve de leur renonciation à ce dispositif, les avoués près les cours d'appel sont inscrits au tableau du barreau établi près le tribunal de grande instance (TGI) dans le ressort duquel est situé leur office et les sociétés d'avoués sont inscrites au barreau établi près le TGI dans le ressort duquel se trouve leur siège. Cette inscription intervient, dans les deux cas, à la date de la première prestation de serment dans l'une ou l'autre des professions d'avoué et d'avocat (b) ;

- les avoués en exercice depuis plus de quinze ans et qui renoncent à intégrer la profession d'avocat pourront solliciter l'honorariat de leur activité professionnelle (c). Ceux qui intègreraient la profession d'avocat pourraient également solliciter cet honorariat lors de la cessation de leur activité, si celle-ci intervient après au moins vingt ans d'exercice de la profession d'avoué et de celle d'avocat.

Par ailleurs, en application du quatrième alinéa du I de l'article premier de la loi du 31 décembre 1971, les avoués pourraient faire suivre leur titre d'avocat de leur qualité d'ancien avoué.

L'Assemblée nationale a en outre précisé, à l'initiative de sa commission des lois, que les avocats, dont les anciens avoués, pourraient faire suivre leur titre d'avocat de la mention d'une spécialisation en procédure d'appel (b bis ).

Le 2° de l'article premier réécrit le premier alinéa du III de l'article premier de la loi du 31 décembre 1971, afin de permettre aux avocats inscrits au barreau de l'un des TGI de Paris, Bobigny, Créteil et Nanterre d'exercer les attributions auparavant dévolues aux avoués près les cours d'appel auprès de la cour d'appel de Paris, quand ils ont postulé devant le TGI de Paris, Bobigny ou Créteil, et auprès de la cour d'appel de Versailles quand ils ont postulé devant le TGI de Nanterre.

Ainsi, le projet de loi donne la possibilité aux avocats bénéficiant de la multipostulation en première instance auprès des TGI de Paris, Bobigny, Créteil et Nanterre de postuler devant les cours d'appel de Paris et Versailles s'ils ont postulé devant le TGI dépendant de la cour.

Votre commission a adopté l'article 2 sans modification.

Article 2 (art. 2 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Suppression des offices d'avoués près les cours d'appel

Cet article supprime les offices d'avoués près les cours d'appel et renvoie au chapitre II de la loi la définition du régime d'indemnisation des avoués en exercice.

Ces dispositions seraient inscrites à l'article 2 de la loi du 31 décembre 1971, relatif à la suppression des offices d'avoués près les tribunaux de grande instance.

Le projet de loi procède donc, à cet article, à une substitution de la référence aux avoués près les cours d'appel à la mention des avoués près les tribunaux de grande instance (alinéa 1).

Le second alinéa prévoit que les avoués seraient indemnisés pour la perte du droit de présentation qui leur est reconnu par l'article 91 de la loi du 2 avril 1816, dans les conditions définies au chapitre II de la présente loi.

Votre commission a adopté l'article 2 sans modification .

Articles 3 et 4 (art. 5 et 8 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Extension de l'activité des avocats à la postulation devant les cours d'appel

Les articles 3 et 4 étendent l'activité des avocats à la postulation devant les cours d'appel. Ils modifient à cette fin les articles 5 et 8 de la loi du 31 décembre 1971.

L'article 5 de cette loi dispose que les avocats exercent leur ministère et peuvent plaider sans limitation territoriale devant toutes les juridictions et organismes juridictionnels ou disciplinaires, sous réserve des dispositions régissant les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et les avoués près les cours d'appel.

Cependant, les avocats ne peuvent postuler que devant le TGI dans le ressort duquel ils ont établi leur résidence professionnelle et devant les TGI près desquels leur barreau est constitué.

L' article 3 du projet de loi étend leur activité à la postulation devant les cours d'appel. Ainsi, ils pourraient exercer devant la cour d'appel dont dépend le TGI dans le ressort duquel ils ont établi leur résidence professionnelle les activités jusqu'alors dévolues aux avoués près les cours d'appel.

L' article 4 du projet de loi étend, par coordination, cette activité aux groupements, sociétés ou associations d'avocats. Par conséquent, l'article 8 de la loi du 31 décembre 1971 permettrait aux groupements, sociétés ou associations d'avocats de postuler auprès de chaque tribunal et de la cour d'appel dont il dépend, par le ministère d'un avocat inscrit au barreau établi près ce tribunal.

Votre rapporteur avait présenté à l'article 3 un amendement visant à renforcer la cohérence du régime de postulation devant les tribunaux de grande instance.

En effet, le projet de loi prévoit que les avocats pourront tous postuler devant la cour d'appel dont dépend le tribunal de grande instance dans le ressort duquel ils ont établi leur résidence professionnelle ; mais il laisse subsister le monopole territorial de la postulation au niveau du tribunal de grande instance.

Ainsi, les avocats inscrits aux barreaux de Rouen, Le Havre, Dieppe et Evreux, pourront tous postuler devant la cour d'appel de Rouen. En revanche, un avocat inscrit au barreau du Havre ne pourra pas postuler devant le tribunal de grande instance de Rouen. Il devra pour cela faire appel à l'un de ses confrères inscrits au barreau de Rouen.

Le projet de loi, dont l'un des objectifs est de simplifier l'accès à la justice, laisse donc survivre un régime de postulation que la disparition de la profession d'avoué fait apparaître comme obsolète et incohérent.

Comment expliquer en effet au justiciable que s'il souhaite faire appel dans une affaire, il pourra conserver le même avocat et n'aura pas à recourir à un autre auxiliaire de justice, mais que être défendu dans une affaire localisée dans un tribunal de grande instance au ressort limitrophe de celui dans lequel exerce son avocat, et dépendant pourtant de la même cour d'appel, il devra recourir à la postulation d'un autre avocat ? La simplification se révèle incomplète et devra être poursuivie.

A cet égard, votre rapporteur souligne que le rapport Darrois recommande en effet de « s'orienter vers la suppression du monopole territorial de la postulation des avocats à horizon du 31 décembre 2014 ».

Votre rapporteur a néanmoins préféré retirer son amendement, afin de permettre une évaluation approfondie de l'impact de la suppression du monopole de la postulation, qui permettra de conduire un jour cette réforme dans de bonnes conditions.

Votre commission a adopté les articles 3 et 4 sans modification .

Article 5 (art. 10 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Limitation du tarif de postulation aux procédures devant le tribunal de grande instance

Cet article limite aux procédures devant le tribunal de grande instance l'application d'un tarif de postulation. Aux termes de l'exposé des motifs du projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, le Gouvernement entend supprimer le tarif de la postulation devant la cour d'appel, défini par le décret n° 80-608 du 30 juillet 1980.

Ce tarif assurait la rémunération des avoués devant la cour d'appel. La postulation assurée par les avocats serait donc rémunérée par des honoraires, de la même façon que les activités de conseil et de plaidoirie.

L'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 dispose que la tarification de la postulation et des actes de procédure est régie par les dispositions sur la procédure civile, tandis que les honoraires de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.

Aussi, l'article 5 du projet de loi précise-t-il que la tarification de la postulation ne porte que sur la postulation devant le tribunal de grande instance.

Le tarif de postulation devant le tribunal de grande instance est encore fondé sur le tarif des avoués près les tribunaux de grande instance, supprimés en 1971. Il apparaît complexe et d'un rapport très réduit pour les avocats, qui souvent renoncent à le percevoir.

Le tarif des frais liés à la postulation des avocats devant le tribunal de grande instance est en effet prévu par une disposition transitoire 34 ( * ) , dont le texte définitif n'a jamais été publié. Ce tarif transitoire renvoie aux dispositions du titre 1 et de l'article 81 du décret n° 60-323 du 2 avril 1960 portant règlement d'administration publique et fixant le tarif des avoués. Il comprend un droit fixe, des droits proportionnels et des déboursés.

Selon l'article 2 du décret, dans les instances contradictoires, le droit fixe s'élève à 5,49 euros, mais peut être réduit de moitié dans certains cas : si l'intérêt du litige n'excède pas 457 euros, si la demande n'est pas contestée, si l'instance terminée par un jugement sur requête donne lieu, outre celle du droit fixe, à la perception de tout ou partie du droit proportionnel ou si l'instance est relative à un accident du travail agricole.

Les droits proportionnels sont calculés différemment selon que le litige est ou non évaluable en argent. Si le litige est évaluable en argent, l'article 4 du décret définit un barème des droits dus à l'avocat par tranches selon l'intérêt du litige, ce barème devant être corrigé de la majoration de 20 % résultant de l'application du décret du 21 août 1975. Le barème corrigé s'établit donc comme suit :

- de 0 € à 1068 €

3, 60 %

montant max. de 38, 45 €

- de 1068, 01 € à 2135 €

2, 40 %

montant max. de 25, 61 €

- de 2135, 01 € à 3964 €

1, 20 %

montant max. de 21, 95 €

- de 3964, 01 € à 9147 €

0, 60 %

montant max. de 31, 10 €

- au dessus de 9147 €

0, 30 %

Si le litige n'est pas évaluable en argent, les droits proportionnels sont déterminés par l'utilisation d'un multiple du droit fixe calculé en application des articles 13 et 14 du décret de 1960. Si le litige comporte des chefs de demande indéterminés et déterminés dans la même cause, il convient d'appliquer une combinaison des deux procédures à chaque type de chef de demande selon leur caractère évaluable ou non en argent (article 7 du décret).

Votre commission a adopté l'article 5 sans modification.

Article 6 (art. 18 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Compétence des ordres des avocats en matière de communication électronique

Cet article étend la compétence des ordres des avocats aux questions relatives à la communication électronique.

Aux termes de l'article 18 de la loi du 31 décembre 1971, les ordres des avocats mettent en oeuvre, par délibération conjointe, les moyens appropriés pour régler les problèmes d'intérêt commun tels que l'informatique, la formation professionnelle, la représentation de la profession et le régime de la garantie.

Le 1° de l'article 6 du projet de loi ajoute à cette liste de problèmes d'intérêt commun, la communication électronique, élément essentiel aux échanges entre les greffes et les cabinets d'avocats.

Initialement, les questions relatives à la postulation devaient également être soumises à la délibération du conseil de l'ordre. Cependant, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur supprimant cette extension des compétences des ordres des avocats, après avoir rappelé que l'organisation de la postulation ne relevait pas des pouvoirs d'organisation des barreaux, mais de l'autorité publique.

Le 2° complète l'article 18 de la loi du 31 décembre 1971, afin de prévoir que les bâtonniers des barreaux d'une même cour d'appel soumettent à la délibération du conseil de l'ordre qu'ils président les questions relatives à la communication électronique.

Votre commission a adopté l'article 6 sans modification .

Article 7 (art. 21 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Désignation dans le ressort de chaque cour d'appel d'un bâtonnier représentant les barreaux pour traiter des questions d'intérêt commun

Cet article prévoit que dans le ressort de chaque cour d'appel, les bâtonniers désignent l'un d'entre eux pour les représenter afin de traiter les questions d'intérêt commun avec la cour.

Cette disposition viendrait compléter l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971, relatif au rôle du bâtonnier, représentant du barreau. Aux termes de cet article, le bâtonnier prévient ou concilie les différends d'ordre professionnel entre les membres du barreau et instruit les réclamations des tiers. Il règle par son arbitrage, en l'absence de conciliation, les différends intervenant entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel.

Le projet de loi organise donc la représentation des barreaux auprès de chaque cour d'appel pour évoquer les questions d'intérêt commun. Les bâtonniers des barreaux du ressort de chaque cour désigneraient donc, tous les deux ans, celui d'entre eux qui devrait assurer cette représentation.

En toute hypothèse, ce représentant ne pourrait être qu'un bâtonnier en exercice. Le projet de loi initial mentionnait, parmi les questions dont le représentant des barreaux devrait traiter avec la cour d'appel, la postulation et la communication électronique.

Par coordination avec l'amendement qu'elle avait adopté à l'article 6, la commission des lois de l'Assemblée nationale a supprimé la référence à la postulation, dont les modalités ne lui ont pas paru relever de la compétence des barreaux.

Votre commission a adopté un amendement rédactionnel de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 7 ainsi rédigé.

Article 8 (art. 43 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Régimes de retraites de base et complémentaire et régime invalidité-décès des avoués

Cet article prévoit que la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et la Caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels (CAVOM) prennent en charge le régime de retraite de base, le régime complémentaire et le régime invalidité-décès des avoués et anciens avoués, de leurs conjoints collaborateurs et de leurs ayants droit. La CNAPVL sert à ses affiliés la retraite de base et la CAVOM assure la retraite complémentaire.

Complétant l'article 43 de la loi du 31 décembre 1971, cet article a été sensiblement modifié par l'Assemblée nationale en première lecture, à l'initiative du Gouvernement.

L'article 43 traite du régime de retraite des personnes qui exerçaient la profession d'avoué près les tribunaux de grande instance, supprimée en 1971. Ainsi, pour ces personnes et leurs ayants droit, les obligations de la CAVOM au titre du régime de base et du régime complémentaire sont pris en charge par la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), puisque les avoués près les tribunaux de grande instance sont devenus avocats.

Par ailleurs, l'article 42 dispose que les membres de la nouvelle profession d'avocat, à l'exception des avocats salariés qui exerçaient auparavant en tant que salariés la profession de conseil juridique, sont affiliés d'office à la CNBF.

Suivant une logique analogue à celle suivie en 1971 pour la rédaction de l'article 43, l'article 8 du projet de loi prévoyait initialement le transfert à la CNBF des dossiers des avoués dont la retraite n'est pas liquidée au 1 er janvier 2011, qu'ils soient ou non devenus avocats. Ce transfert devait être assorti du versement d'une soulte à la CNBF, par la CNAVPL et la CAVOM. Le montant de cette soulte, destinée à consolider les provisions de la CNBF pour faire face à la charge transférée, devait être fixé par convention entre les caisses ou, à défaut, par décret.

Comme l'a relevé le rapporteur de l'Assemblée nationale, ce dispositif complexe manquait de cohérence. Il contredisait le principe établi par la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, selon lequel il appartient à chacune des caisses de retraite auprès desquelles une personne a cotisé au cours de sa vie professionnelle de servir à celle-ci sa pension, au prorata des années d'affiliation .

Par ailleurs, le dispositif reposait sur le postulat d'une accession très majoritaire des avoués à la profession d'avocat. Or, comme l'a indiqué à votre rapporteur Me Roland Bayard, président de la CAVOM, selon une étude réalisée par cette caisse, seuls 21 % des avoués exprimeraient le souhait de devenir avocats. Ainsi le transfert à la CNBF des obligations de la CNAVPL et de la CAVOM conduirait-il à des situations peu cohérentes :

- si l'avoué devient avocat, la CNBF lui servira, lors de son départ à la retraite, deux prestations, l'une au titre des années d'affiliation à la CAVOM, l'autre au titre de ses années de cotisation en tant qu'avocat ;

- si l'avoué ne devient pas avocat mais exerce une autre profession juridique, comme le lui permettrait l'article 21 du projet de loi (notaire, huissier, commissaire-priseur judiciaire...), il sera à nouveau affilié à la CAVOM, alors que ses droits acquis auprès de cette caisse lorsqu'il était avoué auront été transférés à la CNBF ;

- si l'avoué ne devient pas avocat et relève d'un tout autre régime, tel que le régime général, ses droits acquis auprès de la CAVOM auront néanmoins été transférés à la CNBF, auprès de laquelle il n'aura jamais été affilié.

Aussi le dispositif finalement retenu par les députés paraît-il plus satisfaisant. En effet, seuls les avoués qui deviendront avocats seront affiliés à la Caisse nationale des barreaux français, pour leur nouvelle activité. La CAVOM continuerait dans tous les cas à assurer ses obligations à l'égard des retraités et à verser aux nouveaux retraités des pensions de retraites, au prorata de leurs années de cotisations.

Cette caisse compte actuellement 4.801 cotisants, dont 434 avoués (9,2 %). Les huissiers y sont, de loin, les cotisants les plus nombreux (3.240).

Le texte adopté par l'Assemblée nationale précise que le temps passé dans les professions d'avoué ou d'avocat serait pris en compte pour l'application des règles relatives à la liquidation des retraites.

Enfin, les transferts financiers résultant de ce dispositif devraient être fixés par convention entre les caisses concernées ou, à défaut, par décret. En effet, la CAVOM devra assumer la charge des prestations à servir, mais ne percevra plus de cotisations des avoués. Or, cette caisse fonctionnant selon un régime de répartition, il paraît probable que la CNBF doive verser à la CAVOM une soulte, dont les modalités de calcul seraient déterminées par convention ou, à défaut, par décret. Votre rapporteur souligne d'ailleurs que la question des transferts financiers paraît faire l'objet d'appréciations différentes de la part des deux caisses.

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur afin de préciser les conditions selon lesquelles les caisses de retraite des avoués et des avocats assumeront leurs obligations à l'égard des anciens avoués.

L'article 8 du projet de loi prévoit que les anciens avoués restent affiliés à la caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels (CAVOM), sauf s'ils rejoignent effectivement la profession d'avocat. Dans ce second cas, ils seraient affiliés à la Caisse nationale des barreaux français (CNBF).

Or, les transferts financiers qui résulteront des nouvelles règles d'affiliation doivent être définis par convention entre les caisses ou, à défaut, par décret. Compte tenu des relations entre la CAVOM et la CNBF et de leurs divergences d'appréciation, il est probable que le décret devra pallier l'absence de convention. Dès lors, il paraît important de préciser dans la loi les principes d'équité qui doivent s'imposer dans la définition de ces transferts.

Ainsi, M. Jean-Pierre Forestier, président de la CNBF, a indiqué à votre rapporteur que les principes de répartition des charges entre les caisses devraient prendre en compte les réserves constituées par chacune d'entre elles, ainsi que les effectifs d'anciens avoués qui leur sont affiliés.

Aussi votre commission a-t-elle souhaité préciser que :

- chaque caisse verse les pensions aux personnes intéressées au prorata du temps d'exercice dans les professions d'avoué et d'avocat. Il s'agit d'éviter que l'une des deux caisses ait à supporter le versement de l'intégralité de la pension alors que la personne n'aurait été affiliée auprès d'elle que pendant deux ou trois ans et que l'autre caisse ne verserait pas à la première la somme correspondant aux cotisations perçues pendant l'essentiel de la carrière.

L'âge moyen des avoués s'élevant à 51 ans, nombre d'entre eux ne rejoindront en effet la profession d'avocat que pour une période relativement courte. Cette disposition reprend donc le principe établi par la loi du 21 août 2003, afin d'éviter que la CNBF n'ait à supporter une charge indue ;

- les transferts financiers tiennent compte des réserves constituées par chacune des caisses considérées et sont établis au prorata des effectifs d'anciens avoués rejoignant la profession d'avocat. Cette précision permettra d'assurer des transferts financiers équitables entre les caisses.

Votre commission a adopté l'article 8 ainsi rédigé .

Article 9 (art. 46 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Convention collective réglant les rapports entre les anciens avoués et leur personnel

Cet article définit la convention collective applicable aux rapports entre les anciens avoués devenus avocats et leur personnel. Il réécrit l'article 46 de la loi du 31 décembre 1971 afin de prévoir que les rapports entre les anciens avoués devenus avocats et leur personnel restent régis par la convention collective qui leur était applicable avant le 1 er janvier 2011, y compris pour les contrats de travail qui seraient conclus après cette date (deuxième alinéa). Cette convention collective nationale leur resterait applicable jusqu'à la conclusion d'une nouvelle convention collective.

Si la nouvelle convention collective n'était pas adoptée à cette date, les rapports entre les anciens avoués devenus avocats et leur personnel seraient régis, à compter du 1 er janvier 2012, par la convention nationale du personnel des cabinets d'avocats.

Pendant la période transitoire, en cas de regroupement d'avocats et d'anciens avoués au sein d'une association ou d'une société, ou de fusion de sociétés ou d'associations, le personnel salarié bénéficierait encore de la convention collective qui lui était applicable avant le 1 er janvier 2011 ou, à défaut, de la convention collective nationale du personnel et des cabinets d'avocats (troisième alinéa).

En outre, si, à défaut de conclusion d'une nouvelle convention collective avant le 31 décembre 2011, les relations entre les anciens avoués devenus avocats et leur personnel devaient être régies par la convention collective nationale du personnel des cabinets d'avocats, les salariés des anciens avoués conserveraient les avantages individuels acquis sur le fondement de la convention collective qui s'appliquait spécifiquement à eux.

Votre commission a adopté un amendement présenté par M. Jean-Pierre Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, afin de garantir aux salariés trouvant un emploi auprès d'un avocat qu'ils conserveront le bénéfice de l'intégralité des avantages individuels acquis en application de leur ancienne convention collective nationale.

Votre commission a adopté l'article 9 ainsi rédigé .

Article 10 (art. 46-1 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Affiliation du personnel salarié de la nouvelle profession d'avocat à la caisse de retraite du personnel des avocats

L'article 46-1 de la loi du 31 décembre 1971, issu de l'article 21 de la loi du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, dispose qu'à compter de l'entrée en vigueur des dispositions de cette loi organisant la fusion des professions d'avocat et de conseil juridique, le personnel salarié de la nouvelle profession d'avocat relève de la caisse de retraite du personnel des avocats et des avoués près les cours d'appel.

Le projet de loi réécrit cet article, afin de préciser que le personnel salarié non avocat de la profession d'avocat relève de la caisse de retraite du personnel des avocats (CREPA). Il s'agit d'une part d'actualiser cette disposition et, d'autre part, d'établir que les salariés des avocats, qu'ils soient employés par d'anciens avoués ou non, sont désormais affiliés à la CREPA.

Votre commission a adopté un amendement présenté par M. Jean-Pierre Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, afin de préciser que les salariés des avoués qui relèveront, s'ils deviennent salariés d'un avocat, de la CREPA, conserveront le bénéfice de leurs cotisations.

Votre commission a adopté l'article 10 ainsi rédigé .

Article 11 (art. 53 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Modalités de désignation du bâtonnier chargé de représenter les barreaux du ressort de chaque cour d'appel

Cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat la définition des modalités de désignation, par les bâtonniers des barreaux du ressort de chaque cour d'appel, du bâtonnier en exercice chargé de les représenter pour traiter des questions intéressant la cour d'appel, telles que la communication électronique 35 ( * ) .

Ce renvoi serait inscrit à l'article 53 de la loi du 31 décembre 1971, qui prévoit qu'un ensemble de décrets en Conseil d'Etat fixent « dans le respect de l'indépendance de l'avocat, de l'autonomie des conseils de l'ordre et du caractère libéral de la profession », les conditions d'application du titre premier de cette loi, consacré à la nouvelle profession d'avocat.

Ces décrets définissent notamment :

- les conditions d'accès à la profession d'avocat, les incompatibilités et les conditions d'inscription au tableau et d'omission du tableau ;

- les règles de déontologie et la procédure disciplinaire ;

- les règles d'organisation professionnelle ;

- les modalités de dispense du diplôme et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat.

Votre commission a adopté l'article 11 sans modification .

Article 12 (art. 4 et 56 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques) Coordination

Cet article effectue une coordination au sein des articles 4 et 56 de la loi du 31 décembre 1971, où il supprime la référence aux avoués près les cours d'appel.

L'article 4 de la loi dispose que nul ne peut assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires s'il n'est avocat, sous réserve des dispositions régissant les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et les avoués près les cours d'appels. Cette dernière référence serait donc supprimée.

L'article 56 établit la liste des professions juridiques qui ont le droit de donner des consultations juridiques et de rédiger des actes sous seing privé pour autrui : avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocats inscrits à un barreau français, notaires, huissiers, administrateurs judiciaires et mandataires liquidateurs. Les avoués près les cours d'appels seraient supprimés de cette énumération.

Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur complétant l'article 56 de la loi du 31 décembre 1971, afin de préciser que ce ne sont pas les « commissaires-priseurs » qui peuvent donner des consultations juridiques et rédiger des actes sous seing privé, mais les commissaires-priseurs judiciaires .

En effet, la loi du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques a supprimé le monopole de la profession de commissaire-priseur en matière de ventes volontaires, si bien que seule la profession de commissaire-priseur judiciaire demeure aujourd'hui, dans ce secteur, une profession juridique réglementée exercée par des officiers publics et ministériels 36 ( * ) .

Votre commission a adopté l'article 12 ainsi rédigé.

CHAPITRE II DISPOSITIONS RELATIVES À L'INDEMNISATION DES AVOUÉS PRÈS LES COURS D'APPEL

Ce chapitre définit à la fois les conditions d'indemnisation des avoués et celles de leur personnel. La nouvelle rédaction de l'article 2 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques , issue de l'article 2 du présent texte, pose en effet le principe de l'indemnisation des avoués pour la perte de leur droit de présentation et renvoie la détermination des conditions de cette indemnisation au présent chapitre.

Article 13 Modalités de calcul de l'indemnisation versée aux avoués

Cet article définit les modalités de calcul de l'indemnisation versée aux avoués pour la réparation du préjudice associé à la perte du monopole dont ils bénéficient. Il prend comme base de référence la valeur de leur office.

1. La nature du préjudice indemnisé

L'indemnisation organisée par le présent article est la seule proposée aux avoués. Elle correspond ainsi à une indemnisation tous chefs de préjudice confondus et entend couvrir, avec les dispositifs de poursuite d'activité prévus par la loi, la totalité du préjudice subi par les avoués du fait de la suppression de leur monopole de postulation en appel.

Aussi, avant de s'attacher au montant de l'indemnisation, il convient d'identifier l'ensemble des préjudices qu'elle est susceptible de recouvrir.

? La perte du droit de présentation

Le premier préjudice correspond à la perte du droit de présentation de leur successeur au garde des sceaux, que les avoués tiennent de la loi sur les finances du 28 avril 1816.

En effet, la cession des offices s'organise à partir de ce droit de présentation. La perte du monopole de postulation devant la cour d'appel entraîne la perte du droit de présentation et donc, de la possibilité de céder l'office dont ils sont titulaires. Elle correspond ainsi à une perte patrimoniale fixée en référence à la valeur économique de l'entreprise transmise.

Si l'on se réfère aux précédentes réformes ayant mis fin au monopole de certaines professions, il ne s'agit pas pour autant d'une privation de propriété. En effet, comme l'a relevé le juge constitutionnel à l'occasion de l'examen de la loi supprimant le monopole des courtiers interprètes et conducteurs de navires, la suppression d'un tel privilège professionnel « ne constitue pas une privation de propriété au sens de l'article 17 de [... ] la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen » 37 ( * ) . Une telle jurisprudence rend compte du fait que les offices ministériels, qui répondent à un intérêt public et engagent des prérogatives de puissance publique, ne peuvent être, en tant que tel, objet de propriété 38 ( * ) .

En revanche, la jurisprudence assimile bien à une perte patrimoniale la suppression du droit de présenter un successeur . Prenant appui sur l'article 1 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), le Conseil d'État a ainsi jugé que « la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit de présentation résultant, pour les commissaires-priseurs, de la suppression par la loi du 10 juillet 2000 de leur monopole dans le domaine des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques porte atteinte à un droit patrimonial qui, s'il revêt une nature exceptionnelle, [...], n'en est pas moins un bien au sens de l'article 1 er du premier protocole additionnel » 39 ( * ) .

Le Conseil constitutionnel assimile, lui, cette perte patrimoniale à une rupture d'égalité devant les charges publiques, si elle ne s'accompagne de mesures de réparation spécifiques.

Ainsi, s'agissant des courtiers interprètes et conducteurs de navires, il a jugé dans la décision précitée que « si l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 n'interdit pas de faire supporter, pour un motif d'intérêt général, à certaines catégories de personnes des charges particulières, il ne doit pas en résulter de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ». Cependant, il a considéré que, compte tenu des garanties apportées, « les modalités de réparation prévues par la loi déférée n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques » 40 ( * ) . La logique suivie par le Conseil constitutionnel est la suivante : la suppression du monopole répond à un objectif d'intérêt général qui profite aux citoyens, mais qui s'accompagne d'un préjudice spécifique pour les courtiers interprètes et conducteurs de navires, ce qui aurait pour conséquence une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques s'ils n'en étaient pas correctement indemnisés.

Le projet de loi se fonde sur l'application du même raisonnement à la suppression du monopole de postulation des avoués : la perte de leur droit de présentation constituerait un préjudice indemnisable sur le fondement de l'égalité devant les charges publiques.

? Le préjudice de liquidation

Le second préjudice supporté par les avoués correspond au préjudice lié à la liquidation, partielle ou totale, de leur activité.

Les avoués et les représentants de la profession d'avoué que votre rapporteur a entendus ont tous souligné que la fin de leur activité allait entraîner des coûts spécifiques, liés, par exemple, à certaines avances de trésorerie qui devront être consenties dans l'attente des remboursements prévus par la loi, ou aux pénalités de ruptures des contrats que l'avoué aura, le cas échéant, conclus avec ses fournisseurs ou son bailleur.

Ce préjudice propre de liquidation sera, cependant, sans commune mesure avec le préjudice lié à la perte de l'office. Son montant devrait lui-même être très variable d'un office à l'autre, puisqu'il dépendra de la façon dont son exercice professionnel est organisé ainsi que du choix de l'avoué de poursuivre ou non une activité d'avocat avec les moyens qu'il détient.

En outre, plusieurs éléments, prévus par le présent texte, semblent susceptibles de garantir la juste réparation de ce préjudice particulier de liquidation ou d'en réduire sensiblement le coût, sans nécessiter une indemnisation spécifique.

Tel est le cas de l'intégration, au montant de l'indemnisation, de la valeur nette des immobilisations corporelles autres que les immeubles, du versement d'un acompte sur l'indemnisation qui permettra de réduire les difficultés de trésorerie, ou de la durée de la période transitoire pendant laquelle la liquidation ou la reconversion de l'office pourra être organisée, l'avoué ayant été soit libéré de ses charges d'emprunt, soit indemnisé pour la valeur de son étude.

? Le préjudice lié à la perte d'activité est-il un préjudice totalement distinct de celui lié à la perte du monopole de postulation ?

Les différents représentants de la profession des avoués, que ce soit l'Association des jeunes avoués, l'Association syndicale des avoués ou la Chambre nationale des avoués, ont tous souligné devant votre rapporteur que les avoués subiront, du fait de la disparition de leur profession, un préjudice de perte d'activité distinct de celui lié à la perte de leur droit de présentation de leur successeur. Ce préjudice pourrait être assimilé à un préjudice de carrière .

Ils ont appuyé leur analyse sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sur la protection de l'article 1 du premier protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Dans l'affaire « Lallement c/ France », la Cour a en effet considéré que, lorsque « le bien exproprié est l'" outil de travail " de l'" exproprié ", l'indemnité versée n'est pas " raisonnablement en rapport avec la valeur du bien " si, d'une manière ou d'une autre, elle ne couvre pas cette perte spécifique » 41 ( * ) . En l'espèce il s'agissait de terrains agricoles qui n'avaient été indemnisés qu'à hauteur de leur valeur foncière alors que ceux-ci constituaient pour l'agriculteur concerné le support de son activité de production laitière.

Les représentants des avoués ont ainsi fait valoir que la perte de leur monopole de postulation devant les cours d'appel entraînera la fin de leur activité. Ils ont souligné à cet égard qu'ils ne disposent pas, contrairement aux avocats, d'une clientèle propre : ce sont les avocats qui ont défendu le dossier en première instance qui leur présentent leurs clients.

L'Association syndicale des avoués (ASA) a ainsi fait réaliser une enquête portant sur 78 études d'avoués, qui montre que les dossiers transmis par les avocats représentent 94,60 % en moyenne des dossiers traités par l'étude, tandis que les dossiers pris en charge sans intervention d'avocat ne représentent que 5,40 % de l'activité, pour un chiffre d'affaires très faible en proportion.

Compte tenu de cette absence de clientèle propre, la reconversion éventuelle des avoués en qualité d'avocat ne leur garantirait pas un niveau d'activité équivalent à celui qu'ils ont actuellement, puisqu'il leur faudra d'abord se constituer une clientèle, ce qui prendra plusieurs années.

Dans l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi, le gouvernement a pour sa part estimé que « la diminution de revenus que les avoués connaîtront sans doute ne paraît pas devoir être considérée comme une " rupture caractérisée " de l'égalité devant les charges publiques ». A l'appui de cette affirmation, il fait valoir que « les avoués ont des clients institutionnels », que « la constitution d'une nouvelle clientèle sera facilitée par leur expérience et l'existence d'infrastructures matérielles qui fait que leur situation sera sensiblement différente d'un avocat qui débute » et que « le montant de l'indemnisation du droit de présentation pourra être réinvesti dans l'achat de parts d'une SCP d'avocats ».

De plus, il convient de rappeler que ni les commissaires-priseurs ni les courtiers interprètes et conducteurs de navires n'ont reçu une indemnité spécifique pour leur perte d'activité causée par la fin du monopole dont ils bénéficiaient. Ils ont eu, à la différence des avoués, la possibilité de poursuivre leur activité, même si le volume de cette dernière a diminué, ce qui constituait un préjudice de carrière partiel.

Ni le législateur ni le juge n'ont donc considéré, à l'époque, que ce préjudice était distinct de celui lié à la disparition du monopole et à la perte de leur droit de présentation, pour lequel ils étaient indemnisés.

Par ailleurs, si le rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, M. Gilles Bourdouleix, a évoqué la question de la perte d'activité liée à l'absence de clientèle des avoués 42 ( * ) , l'Assemblée nationale n'a pas entendu prévoir une indemnisation spécifique des avoués à ce titre.

Votre rapporteur considère néanmoins que la réforme doit prendre en compte les apports de la jurisprudence européenne, la suppression des offices d'avoué apparaissant, pour ces derniers, comme une suppression de leur « outil de travail ».

En effet, le bénéfice réalisé par les avoués, dont le montant moyen apparaît élevé par rapport à d'autres professions judiciaires, procède de l'acquisition de leur office, qui leur donne accès à un monopole et à un niveau élevé de rémunération.

Bénéfice moyen (1) des offices d'avoués calculé sur les dernières années (établis à partir des déclarations fiscales jointes aux dossiers de cession)

Office individuel

Office en société

Nombre de déclarations

Montant moyen

Montant minimum

Montant maximum

Nombre de déclarations

Montant moyen

Montant minimum

Montant maximum

par office

par associé

2001-2007

41

183 240

24 364

914 447

184

450 486

195 863

18 318

1 213 800

2002-2007

32

188 915

35 715

914 447

154

461 997

200 868

18 318

1 213 800

2003-2007

21

175 163

35 715

329 682

110

468 275

203 598

23 152

1 157 154

2004-2007

12

168 315

35 715

329 682

66

492 307

214 047

23 152

1 157 154

2005-2007

6

151 568

35 715

219 972

37

487 085

211 776

23 152

1 023 402

Source : étude d'impact jointe au projet de loi

(1) Il s'agit du bénéfice imposable ; le montant du bénéfice correspond à la différence entre le total des recettes et le total des dépenses auquel on ajoute les plus values à court terme et les montants divers à réintégrer.

Certes, la situation des avoués les plus anciens et proches de l'âge de la retraite ne sera pas très différente, d'un point de vue financier, de celle dans laquelle ils seraient placés s'ils cédaient demain leur office à leur successeur et cessaient en conséquence toute activité professionnelle. Certains avoués pourront également réemployer les sommes perçues pour investir dans une nouvelle activité qui leur assurera un niveau de revenu proche, en achetant par exemple une charge notariale ou des parts dans une société civile et professionnelle d'avocat dont la clientèle est déjà constituée.

Votre rapporteur note en revanche que la situation des jeunes avoués qui ne posséderaient que des parts en industrie, ou qui n'auraient pas achevé le remboursement d'un emprunt souscrit pour acheter leur charge, mérite d'être prise en considération de manière plus effective, dans la mesure où, une fois leurs éventuelles charges d'emprunt, remboursées, ils devront opérer une reconversion professionnelle sans disposer d'une indemnité spécifique.

Dans de tels cas, la réparation du préjudice subi n'est pas assurée par les dispositifs figurant dans le projet de loi.

En effet, ces dispositifs, comme la mise en place d'une période transitoire pendant laquelle les avoués pourront exercer de front les deux activités d'avocat et d'avoué, tout en étant libérés de leurs éventuelles charges d'emprunt, n'apportent qu'une réponse très partielle aux difficultés que pourraient rencontrer les jeunes avoués.

Votre commission a en conséquence estimé qu'il était nécessaire, pour couvrir le préjudice de carrière des jeunes avoués, de garantir une autre indemnisation que celle envisagée au titre de la perte du droit de présentation de son successeur.

2. Les modalités de l'indemnisation prévue par le projet de loi

? La base de calcul

L'indemnisation qu'organise le I du présent article vise principalement la perte du droit de présentation, c'est-à-dire la perte de la possibilité de céder son office. La base de référence adoptée pour calculer l'indemnisation due correspond donc à une évaluation de la valeur vénale des offices d'avoués.

Cette évaluation reprend la formule utilisée par le ministère de la justice lors des cessions volontaires d'études, pour vérifier que le prix proposé n'est pas excessif :

moyenne de la recette nette des cinq derniers exercices comptables + (3 x moyenne solde d'exploitation annuel)

2

+

valeur des immobilisations corporelles (hors immeubles)

Cette formule rend compte de l'idée que la valeur de l'office peut être approchée par une combinaison de son chiffre d'affaires et de ses résultats.

C'est cette même formule qui a été utilisée, par le passé, pour déterminer la valeur des offices de commissaires-priseurs judiciaires 43 ( * ) ou celles des courtiers interprètes et conducteurs de navires 44 ( * ) . Elle a alors été préférée à la formule dite des produits demi-net 45 ( * ) , qui avait été utilisée pour calculer l'indemnisation des greffiers 46 ( * ) et celle des avoués des tribunaux de grande instance 47 ( * ) , qui présentait le défaut d'aboutir à des montants très différents en fonction des choix de gestion effectués, notamment sur la question des externalisations éventuelles d'activité.

Le présent article prévoit que les moyennes des recettes et des bénéfices soient calculées sur les cinq derniers exercices comptables , afin de lisser les fluctuations d'activités éventuelles.

La recette nette correspond à la recette encaissée par l'office, telle que retenue pour le calcul de l'imposition des bénéfices, moins les débours payés pour le compte des clients et les honoraires le cas échéant rétrocédés. Ce dernier point rend compte du fait que sont parfois associés à l'activité de l'étude, des avocats qui continuent d'exercer à titre libéral et qui sont en conséquence rémunérés par honoraires.

Le solde d'exploitation correspond aux recettes totales retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices, auxquelles s'ajoutent les frais financiers et les pertes diverses, moins le montant des produits financiers, des gains divers et de l'ensemble des dépenses nécessitées pour l'exercice de la profession, ce qui permet de ne tenir compte que de l'activité propre de l'office.

La prise en considération des immobilisations corporelles, hors immeubles, inscrites au bilan du dernier exercice comptable à la date de la publication de la loi, vise à intégrer le coût éventuel des investissements non encore amortis qui ne pourront faire l'objet, à la différence du local hébergeant l'étude, d'une revente à leur juste prix.

L'article 13 prévoit enfin de prendre pour base de référence les valeurs qui figurent sur la déclaration fiscale annuelle ou dans la compatibilité de l'office. D'une manière générale, il conviendra de se référer aux règles applicables en matière fiscale pour décider si une dépense ou une recette relève bien du champ d'application du présent article.

L'Assemblée nationale n'a pas remis en cause cette méthode d'évaluation de la valeur des offices.

Les calculs effectués par les services du ministère de la justice sur la base de cette formule montrent qu'elle aboutit à une évaluation de la valeur de l'office proche, pour les études cédées depuis le deuxième semestre 2004, du prix de cession effectif.

Source : étude d'impact jointe au projet de loi

? Le montant d'indemnisation

Initialement, le texte proposé par le gouvernement prévoyait que l'indemnisation versée aux avoués serait égale à 66 % de la valeur de l'office calculée sur la base de la formule précédente.

L'abattement forfaitaire de 34 % sur la valeur de l'office était notamment justifié par le gouvernement par le fait que :

- les avoués disposaient d'activités hors monopole qu'ils pourraient continuer d'exercer ;

- le tarif avait été revalorisé par le décret n° 2003-429 du 12 mai 2003, ce qui aurait renchéri la valeur des offices ;

- les avoués pourraient exercer la profession d'avocat et conserver leur clientèle propre.

Aucun de ces arguments n'était cependant convaincant, dans la mesure où l'activité des avoués hors monopole ou celle pour laquelle ils disposent d'une clientèle propre est négligeable dans leur chiffre d'affaires.

La comparaison avec la situation des courtiers interprètes et conducteurs de navire ou celle des commissaires priseurs n'était pas non plus pertinente. Certes, ces derniers n'avaient été indemnisés qu'à hauteur de 65 % pour les premiers et qu'à hauteur de 50 %, plus ou moins 20 %, pour les seconds.

Mais, la suppression du monopole dont ils bénéficiaient ne les a que partiellement affectés, dans la mesure où ils ont pu poursuivre leur activité principale ou se rabattre sur les autres éléments de leur activité professionnelle.

Ainsi, lorsque le Conseil d'État s'est penché sur l'indemnisation reçue par les commissaires-priseurs, il a relevé que l'abattement retenu se justifiait « par la possibilité, laissée aux commissaires-priseurs, de poursuivre leur activité de ventes volontaires dans le nouveau cadre légal » 48 ( * ) .

La commission des lois de l'Assemblée nationale et son rapporteur s'étant inquiétés de la faiblesse du taux d'indemnisation retenu initialement par le projet de loi, le garde des sceaux a déposé un amendement en commission tendant à élever ce taux à 92 %, puis un amendement en séance publique qui l'a finalement porté à 100 %, permettant ainsi une indemnisation complète du préjudice patrimonial.

Cette indemnisation est fiscalisée, sur la base de la plus-value le cas échéant réalisée.

? Le plancher d'indemnisation

Pour éviter qu'un avoué puisse recevoir une indemnisation inférieure aux sommes qu'il a engagées pour acquérir son office ou à l'emprunt qu'il a dû contracter à cette fin, le II de l'article 13 prévoit que le dédommagement perçu ne puisse être inférieur au montant de l'apport personnel ayant financé cette acquisition, ou celle des parts sociales dans la société civile et professionnelle titulaire de l'office, majoré, le cas échéant, du montant du capital restant dû, à la date du 1 er janvier 2010.

Cette disposition garantit aux avoués, et particulièrement à ceux qui seraient endettés ou dont l'office aurait subi une décote, une indemnisation « plancher », qui doit leur éviter d'avoir à entamer leur reconversion professionnelle en ayant encore à supporter des charges contractées lorsqu'ils étaient avoués.

Par coordination avec la modification adoptée à l'article 17, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur remplaçant la référence à la date du 1 er janvier 2010 par celle à la date à laquelle est intervenu le remboursement du capital restant dû, sur le fondement de l'article 17.

3. Le dispositif retenu par la commission : une indemnité fixée par le juge de l'expropriation, une exonération des plus-values et une exonération de charges sociales

? Les principes auxquels doit répondre l'indemnisation des avoués

Votre commission estime que la suppression du droit de présentation, par les avoués, de leur successeur, la suppression de leurs offices et la suppression de leur monopole sont assimilables à une atteinte au droit de propriété.

La suppression de la profession d'avoué près les cours d'appel se distingue en effet de la suppression des avoués près les tribunaux de grande instance, réalisée en 1971, ou de la suppression du monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires, réalisée en 2000. Dans ces derniers cas, les avoués et les commissaires-priseurs ont conservé leur activité et une part importante de leur clientèle, dans un cadre devenu concurrentiel.

Les avoués près les cours d'appel perdront en revanche leur activité et l'essentiel de leur clientèle. Votre commission estime que cette situation peut entraîner une nouvelle appréciation des fondements de l'indemnisation des avoués près les cours d'appel.

Ainsi, alors que l'indemnisation des commissaires-priseurs se fondait sur l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, relatif à l'égalité devant les charges publiques, l'indemnisation des avoués près les cours pourrait se fonder sur l'article 17 de cette Déclaration, aux termes duquel « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » .

? La fixation de l'indemnité par le juge de l'expropriation

Votre commission considérant que l'indemnisation des avoués devait se fonder sur l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, elle a adopté un amendement de son rapporteur confiant au juge de l'expropriation la détermination du montant de l'indemnité. Le juge appliquerait à cette fin les dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (art. L. 13-1 à L. 13-25). Aussi le jugement devrait-il distinguer pour chaque avoué une indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires (art. L. 13-6).

Par ailleurs, afin de compléter le principe selon lequel « le juge prononce des indemnités distinctes en faveur des parties qui les demandent à des titres différents » (art. L. 13-7), l'amendement adopté par votre commission prévoit que le juge détermine l'indemnité allouée aux avoués exerçant au sein d'une société dont ils détiennent des parts en industrie afin d'assurer, en tenant compte de leur âge, la réparation du préjudice spécifique qu'ils subissent du fait de la loi.

En effet, sur le fondement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme établie en référence à l'article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, votre commission a souhaité assurer l'indemnisation des avoués détenant seulement des parts sociales en industrie .

Ainsi, la Cour européenne des droits de l'homme dans son arrêt Lallement contre France précité 49 ( * ) , a consacré l'obligation pour l'Etat d'indemniser la perte de l'« outil de travail » et les préjudices matériels qui en résultent, ce que ne prévoit pas le projet de loi.

Or, l'outil de travail des avoués est constitué par l'office qu'ils ont acquis, sur lequel ils entendent construire leur carrière et duquel ils tirent leurs revenus. La Cour européenne des droits de l'homme a jugé que l'expropriation de l'outil de travail imposait une indemnisation spécifique.

Elle a en effet constaté que l'expropriation litigieuse avait eu pour effet d'empêcher le requérant de poursuivre de manière rentable son activité. L'intéressé ayant perdu son « outil de travail » sans indemnisation appropriée, la Cour a conclu à la violation de l'article 1 du Protocole n° 1, soulignant que le préjudice causé par cette violation de la Convention était susceptible de justifier l'allocation d'une indemnité.

Votre commission estime que les avoués détenant des parts en industrie subiront un préjudice dont l'indemnisation fondée sur la valeur de l'office n'assurera pas la réparation. Il est donc indispensable, pour assurer le respect du droit existant, que le juge leur alloue, en tenant compte de leur âge, une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de la loi.

L'amendement adopté par votre commission devrait entraîner des mesures de coordination au sein du projet de loi, en particulier à l'article 19, (suppression de l'intervention d'une commission dans la détermination de l'indemnité), qui sont renvoyées à l'examen du texte en séance publique.

Votre commission estime que le dispositif d'indemnisation fondé sur le droit de l'expropriation apparaît indispensable à la juste indemnisation des avoués, tant qu'un dispositif alternatif apportant la garantie d'une réparation de l'ensemble des préjudices occasionnés par la loi n'est pas avancé par le Gouvernement.

? L'exonération des plus-values réalisées dans le cadre de l'indemnisation

Selon les indications fournies à votre rapporteur par les ministères de la justice et du budget, l'indemnité qui sera versée aux avoués est constitutive d'un gain exceptionnel imposable selon les règles de détermination des plus-values professionnelles.

La plus-value qui sera calculée sur le montant de l'indemnité versée à chaque office, déduction faite de la valeur du droit de présentation inscrite à l'actif du bilan, sera soumise à l'impôt sur le revenu au taux fixe de 16 %, augmenté de 12 % de prélèvements sociaux.

S'agissant des sociétés titulaires d'un office d'avoué, l'indemnité sera imposée de la même manière entre les mains des associés au prorata de leurs parts, dès lors que la société, par sa forme, bénéficie de la transparence fiscale. Au contraire, dans un petit nombre de cas, limité à 3 selon la chancellerie, la société titulaire de l'office est assujettie à l'impôt sur les sociétés et, dès lors, l'indemnité sera soumise à l'imposition au niveau de la société, d'une part, et au niveau des associés, d'autre part.

Votre commission considère que l'indemnité qui sera accordée aux avoués, qu'elle procède d'un taux appliqué à la valeur de l'office comme le prévoit le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, ou d'une décision du juge de l'expropriation, ne doit pas être soumise à l'impôt sur les plus-values.

Aussi a-t-elle adopté un amendement de son rapporteur prévoyant que les plus-values réalisées dans le cadre du versement de l'indemnité accordée aux avoués sont exonérées de toute imposition.

? L'exonération de charges sociales patronales des salaires versés par les anciens avoués

Afin d'aider les avoués à commencer une nouvelle carrière dans la profession d'avocat ou dans une autre profession juridique réglementée de leur choix, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur leur permettant de bénéficier, dans leur nouvelle profession, d'une exonération de charges sociales patronales, pour l'emploi de salariés qu'ils employaient en tant qu'avoués.

Cette exonération porterait sur la part des salaires versés à hauteur d'1,5 SMIC. Elle pourrait s'appliquer pendant deux ans maximum pour le même salarié et prendrait fin au 31 décembre 2014.

Votre commission a adopté l'article 13 ainsi modifié.

Article 14 Reconnaissance du caractère économique du licenciement des salariés des avoués - Majoration des indemnités de licenciement versées à cette occasion

Cet article a pour objet d'attribuer aux licenciements intervenant en conséquence de la loi le caractère de licenciements économiques. Il prévoit en outre une majoration des indemnités de licenciement versées aux salariés. Les personnels concernés sont à la fois ceux des avoués et anciens avoués et ceux des instances représentatives de la profession (chambres de la compagnie et chambre nationale des avoués).

1. Le dispositif prévu par le projet de loi

? La reconnaissance du caractère économique du licenciement des salariés d'avoués

Le présent article crée une présomption légale pour l'ensemble des licenciements qui interviendront en conséquence directe de la loi entre sa publication et le 31 décembre 2012. Ceux-ci seront réputés avoir le caractère de licenciements économiques au sens de l'article L. 1233-3 du code du travail, qui dispose que « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ».

Cette reconnaissance du caractère économique des licenciements causés par la disparition des offices d'avoués apporte une certaine sécurité juridique aux procédures de licenciements qui s'engageront. En effet, celles-ci ne pourront être annulées pour défaut de cause réelle et sérieuse, puisque la raison économique sera présumée.

En revanche, cette reconnaissance contraint les employeurs des personnels à suivre les règles de procédure applicables en matière de licenciement économique.

Si l'obligation de reclassement interne prévue à l'article L. 1233-4 du code du travail ne pourra vraisemblablement pas être respectée, en raison de la cessation de l'activité de l'étude, en revanche les autres obligations s'appliqueront, en particulier celles liées à l'ordre des licenciements (articles L. 1233-5 à L. 1233-7 du code du travail), celles relatives à la consultation éventuelle des représentants du personnel en fonction du nombre de licenciements prévus et de la taille de l'étude (articles L. 1233-8 et suivants et L. 1233-28 et suivants du code du travail) ou celles portant sur la convention de reclassement personnalisée qui permet un accompagnement du salarié après la rupture du contrat de travail (articles L. 1233-65 et suivants du code du travail).

De plus les employeurs qui auraient maintenu leur activité sous une autre forme, par exemple en transformant leur étude en cabinet d'avocat, seront tenus, dans le délai légal d'un an, de respecter la priorité de réembauchage de leurs salariés, définie à l'article L. 1233-45 du code du travail.

? Le montant des indemnités de licenciement majorées

En l'état actuel du droit, tout salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit à une indemnité de licenciement égale à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à dix ans et deux quinzièmes de mois par année d'ancienneté au-delà (articles L. 1234-9 et R. 1234-1 et suivants du code du travail).

La convention collective nationale du travail réglant les rapports entre les avoués près les cours d'appel et leur personnel fixe, quant à elle, ces indemnités à un mois de salaire, entre deux et cinq ans, deux mois entre cinq et dix ans, trois mois entre dix et quinze ans et quatre mois au-delà. S'ajoute à ce montant, pour les seuls salariés âgés de 52 ans ou plus, un mois de salaire.

Le principe est que les indemnités soient calculées sur la base du plus favorable de ces deux régimes pour le salarié.

Le deuxième alinéa du présent article prévoit une majoration des indemnités de licenciement que pourront recevoir les personnels des avoués.

Initialement, le texte du Gouvernement prévoyait un doublement des indemnités légales, plafonnées à vingt-cinq ans, soit un montant maximum de 14 mois de salaire.

Les syndicats de salariés et l'ANPANS, jugeant cette indemnisation insuffisante, ont demandé à ce que soient appliquées les mêmes dispositions que pour les salariés des commissaires-priseurs, qui ont pu bénéficier d'indemnités de licenciement calculées sur la base d'un mois de salaire par année d'ancienneté, dans la limite de trente mois.

L'amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale tendant à leur donner satisfaction s'étant vu opposer l'irrecevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution, la commission des lois, n'a pu améliorer, à ce stade, les conditions financières faites au personnel des avoués et elle a en conséquence rejeté l'article 14 en l'état.

L'Assemblée nationale a cependant adopté en séance publique un amendement du Gouvernement tendant à ajouter à la base de calcul retenue par le projet de loi, deux quinzièmes de mois par année d'ancienneté comprise entre quinze et vingt ans, puis respectivement quatre, six, huit, dix et douze quinzièmes de mois par année comprise dans chacune des tranches de cinq années supplémentaires.

Les différents dispositifs d'indemnisation envisagés donnent ainsi, comparé au dispositif finalement adopté par votre commission, les résultats suivants :

Montant de l'indemnisation perçue par un salarié suivant le dispositif retenu

(calcul opéré à partir du salaire moyen dans chaque tranche d'ancienneté)

Ancienneté

(années)

Salaire moyen dans la tranche d'ancienneté

Indemnités conventions coll. + légales*

Légales x2 plafonné à 25 ans **

Dispositif adopté par l'Assemblée nationale en première lecture

Dispositif adopté par la commission

En mois de salaire /

en Euros

En mois de salaire /

en Euros

En mois de salaire /

en Euros

En mois de salaire /

en Euros

0

1 400

0

0

0

0

0

0

0

0

1

2 162

0,2

432

0,40

865

0,40

865

1

2162

2

1 881

1

1881

0,80

1505

0,80

1505

2

3762

3

2 019

1

2019

1,20

2423

1,20

2423

3

6057

4

2 349

1

2349

1,60

3758

1,60

3758

4

9396

5

2 300

2

4600

2,00

4600

2,00

4600

5

11500

6

2 098

2

4196

2,40

5035

2,40

5035

6

12588

7

2 192

2

4384

2,80

6138

2,80

6138

7

15344

8

2 669

2

5338

3,20

8541

3,20

8541

8

21352

9

2 491

2

4982

3,60

8968

3,60

8968

9

22419

10

2 381

3

7143

4,00

9524

4,00

9524

10

23810

11

2 594

3

7782

4,67

12114

4,67

12114

11

28534

12

2 405

3

7215

5,33

12819

5,33

12819

12

28860

13

2 412

3

7236

6,00

14472

6,00

14472

13

31356

14

2 522

3,33

8398

6,67

16822

6,67

16822

14

35308

15

2 373

4

9492

7,33

17394

7,33

17394

15

35595

16

2 767

4

11068

8,00

22136

8,13

22496

16

44272

17

2 639

4,33

11427

8,67

22880

8,93

23566

17

44863

18

2 316

4,67

10816

9,33

21608

9,73

22535

18

41688

19

2 722

5

13610

10,00

27220

10,53

28663

19

51718

20

2 871

5,33

15302

10,67

30634

11,33

32528

20

57420

21

3 296

5,67

18688

11,33

37344

12,27

40442

21

69216

22

2 726

6

16356

12,00

32712

13,20

35983

22

59972

23

2 956

6,33

18711

12,67

37453

14,13

41768

23

67988

24

2 712

6,67

18089

13,33

36151

15,07

40870

24

65088

25

2 909

7

20363

14,00

40726

16,00

46544

25

72725

26

3 120

7,33

22870

14,00

43680

16,93

52822

26

81120

27

3 128

7,67

23992

14,00

43792

18,13

56711

27

84456

28

3 558

8

28464

14,00

49812

19,20

68314

28

99624

29

3 292

8,33

27422

14,00

46088

20,27

66729

29

95468

30

3 070

8,67

26617

14,00

42980

21,33

65483

30

92100

31

2 820

9

25380

14,00

39480

22,53

63535

31

87420

32

3 020

9,33

28177

14,00

42280

23,73

71665

32

96640

33

3 029

9,67

29290

14,00

42406

24,93

75513

33

99957

34

3 267

10

32670

14,00

45738

26,13

85367

34

111078

35

2 457

10,33

25381

14,00

34398

27,33

67150

35

85995

36

2 433

10,67

25960

14,00

34062

28,67

69754

36

87588

37

2 000

11

22000

14,00

28000

30,00

60000

37

74000

38

2 450

11,33

27759

14,00

34300

31,33

76759

38

93100

39

4 133

11,67

48232

14,00

57862

32,67

135025

39

161187

40

2 840

12

34080

14,00

39760

34,00

96560

40

113600

41

***

12

***

14,00

***

35,47

***

41

***

42

3 533

12

42396

14,00

49462

36,93

130474

42

148386

43

***

12

***

14,00

***

38,40

***

43

***

44

***

12

***

14,00

***

39,87

***

44

***

45

2 600

12

31200

14,00

36400

41,33

107458

45

117000

Source : Commission des Lois du Sénat.

* Est systématiquement retenue l'indemnité la plus favorable entre celle du régime légal et celle de la convention collective

** Pour deux ans d'ancienneté, le doublement de l'indemnité légale est inférieur à ce que prévoit la convention collective

*** Les chiffres fournis par le ministère indiquent qu'il n'existe de salariés d'avoués appartenant à cette tranche d'ancienneté.

L'étude d'impact réalisée par les services de la Chancellerie a évalué le coût de la mesure initialement proposée à 19 200 000 euros, en prenant comme référence un salaire moyen mensuel brut de 1 950 euros, et un nombre total de salariés à indemniser égal à 1 400.

Cependant une telle évaluation ne prend pas en compte le fait que l'ancienneté du salarié joue doublement en sa faveur, puisqu'elle détermine à la fois le nombre de mois de salaire qui lui seront versés, mais aussi le niveau de sa rémunération moyenne.

L'application d'une moyenne de rémunération aux grilles d'indemnités retenues fausse donc largement l'évaluation du coût de la mesure. Les simulations opérées par votre rapporteur sur la base des chiffres fournis par les services du ministère de la justice donnent, quant à elles, les résultats suivants, pour chacune des options proposées :

Coût total des indemnisations versées aux salariés en fonction du dispositif retenu

(calcul opéré à partir du salaire moyen dans chaque tranche d'ancienneté)

Ancienneté (années)

Salaire moyen dans la tranche

Nombre de salariés dans la tranche

Montant des indemnités pour l'ensemble

Indemnités conv° coll + légales*

Légales x 2 plafonné à 25 ans **

Dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Dispositif adopté par la commission

0

1 400

0

0

0

0

0

1

2 162

63

27241

54482

54482

136206

2

1 881

71

133551

106841

106841

267102

3

2 019

63

127197

152636

152636

381591

4

2 349

59

138591

221746

221746

554364

5

2 300

56

257600

257600

257600

644000

6

2 098

50

209800

251760

251760

629400

7

2 192

31

135904

190266

190266

475664

8

2 669

40

213520

341632

341632

854080

9

2 491

41

204262

367672

367672

919179

10

2 381

51

364293

485724

485724

1214310

11

2 594

38

295716

460331

460331

1084292

12

2 405

51

367965

653751

653751

1471860

13

2 412

40

289440

578880

578880

1254240

14

2 522

48

403116

807444

807444

1694784

15

2 373

50

474600

869705

869705

1779750

16

2 767

46

509128

1018256

1034803

2036512

17

2 639

64

731320

1464328

1508241

2871232

18

2 316

66

713838

1426146

1487289

2751408

19

2 722

41

558010

1116020

1175169

2120438

20

2 871

69

1055868

2113716

2244462

3961980

21

3 296

32

598026

1194998

1294141

2214912

22

2 726

41

670596

1341192

1475311

2458852

23

2 956

21

392941

786503

877134

1427748

24

2 712

29

524582

1048378

1185225

1887552

25

2 909

25

509075

1018150

1163600

1818125

26

3 120

23

526001

1004640

1214897

1865760

27

3 128

29

695761

1269968

1644609

2449224

28

3 558

29

825456

1444548

1981094

2889096

29

3 292

15

411335

691320

1000933

1432020

30

3 070

23

612189

988540

1506111

2118300

31

2 820

11

279180

434280

698881

961620

32

3 020

13

366296

549640

931640

1256320

33

3 029

17

497937

720902

1283720

1699269

34

3 267

7

228690

320166

597567

777546

35

2 457

16

406093

550368

1074397

1375920

36

2 433

8

207681

272496

558033

700704

37

2 000

6

132000

168000

360000

444000

38

2 450

5

138793

171500

383793

465500

39

4 133

3

144696

173586

405075

483561

40

2 840

6

204480

238560

579360

681600

41

0

0

0

0

0

42

3 533

3

127188

148386

391421

445158

43

0

0

0

0

0

44

0

0

0

0

0

45

2 600

1

31200

36400

107458

117000

Total

1401

15 741 156

27 511 457

33 964 834

57072179

Source : Commission des Lois du Sénat, à partir des données de l'enquête IDDEM sur les salariés des études d'avoués

? La nature des indemnités de licenciement

Bien qu'elles fassent l'objet d'une majoration, les indemnités versées restent des indemnités de licenciement au sens de l'article L. 1234-9 du code du travail. Elles ne seront en conséquence pas soumises à l'impôt sur le revenu, en vertu du 3° de l'article 80 duodecies du code général des impôts. Elles ne seront pas non plus soumises à charges sociales, à la condition qu'elles ne dépassent pas trente fois le plafond annuel de la sécurité sociale 50 ( * ) (article L. 242-1 du code de la sécurité sociale).

De plus, elles sont dues par l'employeur dès la rupture du contrat de travail, soit à la fin du préavis de licenciement, à la fin du dernier jour travaillé si le salarié est dispensé de son préavis, ou au moment où le salarié a accepté l'offre de convention de reclassement personnalisé qui lui a été proposée par son employeur (article L. 1233-67 du code du travail).

À défaut, dans le dispositif retenu par le projet de loi, les salariés concernés pourront en obtenir le versement en saisissant le juge prud'homal agissant en référé. Ceci répond partiellement à l'inquiétude exprimée par l'ANPANS et les organisations syndicales représentatives des personnels d'avoués, qui craignaient que les employeurs diffèrent, pour des raisons de trésorerie, le versement des indemnités de licenciement dues.

? La question de l'indemnité de fin de carrière

Aux termes de l'article L. 1237-9 du code du travail, « tout salarié quittant volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse a droit à une indemnité de départ à la retraite ». La valeur de cette indemnité est en principe fonction de l'ancienneté de l'intéressé dans l'entreprise.

Le régime applicable aux personnels d'avoués en vertu de la convention collective de travail réglant les rapports entre les avocats et leur personnel du 20 février 1979 étant plus favorable que le régime légal, l'indemnité à laquelle ont droit ces salariés est fixée de la manière suivante :

Montant de l'indemnité de fin de carrière

Ancienneté

Nombre de mois de salaire

Entre un an et moins de 5 ans

1/5 e par année d'ancienneté

Entre 5 ans inclus et moins de 10 ans

1

Entre 10 ans inclus et moins de 15 ans

2

Entre 15 ans inclus et moins de 20 ans

3

Entre 20 ans inclus et moins de 25 ans

4

Entre 25 ans inclus et moins de 30 ans

5

Entre 30 ans inclus et moins de 35 ans

6

35 ans et plus

7

Les salariés d'avoués qui quitteront l'étude se trouveront donc pénalisés puisqu'ils perdront le bénéfice de leur ancienneté. L'ANPANS et les organisations syndicales représentatives des personnels d'avoués ont émis le voeu que les salariés concernés puissent bénéficier, dans le cadre de leur nouvel emploi, de l'ancienneté qu'ils se sont constitués dans leur profession initiale.

Cependant, l'accord négocié le 17 avril 2009 au sein de la commission mixte paritaire de la convention collective nationale du personnel des cabinets d'avocats apporte une première réponse à cette préoccupation.

En effet, les signataires de cette convention se sont engagés à négocier un avenant ayant pour objet d'assurer aux salariés qui seront employés par des cabinets d'avocats la reprise de l'ancienneté acquise dans une étude d'avoué, conformément à l'article 2 de l'avenant 79 de cette convention nationale. Les personnels des études d'avoués ayant vocation à se reclasser principalement dans des cabinets d'avocats, un tel accord devrait permettre que, dans la plus grande part des cas, leur ancienneté soit conservée.

La généralisation d'un tel système n'est en revanche pas apparue souhaitable à votre rapporteur.

En effet, contraindre tout futur employeur à prendre à sa charge l'ancienneté qu'a acquise le salarié d'avoué dans son précédent emploi pourrait nuire au reclassement des personnels les plus âgés, puisque cela renchérirait le coût de leur embauche par les employeurs potentiels.

Par ailleurs, pour tous les cas non réglés par l'avenant à la convention nationale, le préjudice des personnels est indemnisé par la majoration des indemnités de licenciement que prévoit le présent article.

2. Le texte adopté par la commission : assurer la juste indemnisation et la reconversion des salariés

Une indemnisation fondée sur un mois de salaire par année d'ancienneté

Votre commission juge insuffisant le dispositif prévu par le projet de loi de loi pour l'indemnisation des salariés des avoués.

En effet, le dispositif proposé par le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale est inférieur à ce qui a été prévu pour les salariés de commissaires-priseurs en 2000 (1 mois par année d'ancienneté, plafonné à 30 mois), sauf en ce qui concerne les salariés disposant de plus de 37 ans d'ancienneté, qui devraient pouvoir prendre sous peu leur retraite.

Or, 70 % des salariés d'avoué ont entre 11 et 30 ans d'anciennetés et seuls 0,01 % des salariés totalisent plus de 37 ans d'ancienneté.

Aussi, votre commission a-t-elle adopté un amendement présenté par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et M. Raymond Couderc, prévoyant que les salariés perçoivent, dès lors qu'ils comptent un an d'ancienneté ininterrompue dans la profession, des indemnités de licenciement calculées à hauteur d'un mois de salaire par année d'ancienneté.

? Le versement direct, par le fonds d'indemnisation, des indemnités de licenciement

Le présent article prévoit que ce sont les employeurs des personnels licenciés qui versent l'indemnité majorée de licenciement, cette dernière leur étant ensuite remboursée dans les conditions fixées aux articles 15, 16 et 19.

Cependant, les avoués, leurs associations représentatives, comme celles représentatives de leurs personnels ont tous indiqué à votre rapporteur qu'un versement direct aux intéressés, par le fonds d'indemnisation, des sommes visés au présent article leur paraissait préférable au système de remboursement.

La loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques avait d'ailleurs prévu que les indemnités de licenciement versées aux salariés des commissaires-priseurs le soit directement par le fonds d'indemnisation créé à cette fin 51 ( * ) .

La solution retenue par le présent article procède du souci de maintenir l'unité de la procédure de licenciement, depuis la décision initiale de l'employeur jusqu'au versement des indemnités prévues et d'éviter ainsi que le fonds d'indemnisation ait à intervenir directement dans le cadre d'un contentieux opposant un salarié licencié à son employeur.

Cependant, il apparaît que la procédure proposée rallonge inutilement les délais de versement de l'indemnisation, puisqu'elle fait intervenir l'employeur dans le versement d'une indemnisation dérogatoire au droit commun, qui est financée par le fonds d'indemnisation. De plus, elle présente un risque pour les salariés, en cas de défaut ou de décès de leur employeur, puisque le versement des indemnités auxquelles ils ont droit pourrait s'en trouver anormalement différé.

C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement de son rapporteur prévoyant le versement direct par le fonds d'indemnisation des sommes dues au titre du présent article.

Pour garantir que les indemnités seront bien versées au moment où interviendra la rupture du contrat de travail, le délai du préavis de licenciement serait fixé à deux mois , alors qu'il varie en principe de zéro à deux mois selon l'ancienneté, et ne débuterait qu'à compter de l'envoi, par l'employeur, à la commission nationale d'indemnisation prévue à l'article 16, de la demande de versement des indemnités dues au salarié, cette demande lui étant par ailleurs notifiée.

? L'instauration d'une indemnité exceptionnelle de reconversion

Aux termes du projet de loi, les salariés des avoués ne percevraient d'indemnités de départ qu'en cas de licenciement. Par conséquent, les salariés qui démissionneraient pour rejoindre un nouvel emploi après avoir accompli une recherche active et des efforts de reconversion et de mobilité ne percevraient aucune indemnité. Ce bouleversement de leur vie professionnelle procèderait pourtant de la suppression de la profession d'avoué, décidée par l'Etat. Le dispositif prévu ne paraît donc pas équitable .

Par ailleurs, compte tenu des sommes en jeu, il risque de conduire certains salariés à différer leur reconversion, dans l'attente de leur licenciement par leur employeur. Le dispositif retenu pourrait ainsi susciter des arbitrages défavorables à la reprise d'emploi, puisque les personnels souhaiteront percevoir les indemnités de licenciement afin de compenser la décote salariale qu'ils subiront du fait de leur reconversion.

En effet, les rémunérations des employés d'avoués sont sensiblement supérieures, eu égard à leur niveau de qualification reconnu, à celles de personnels d'avocat, ou à celles des emplois qui leur seront proposés dans la fonction publique. Or, en application du mécanisme d'allocation temporaire dégressive (ATD) les salariés reclassés dans un emploi comportant une rémunération inférieure à celle qu'ils recevaient au titre de leur emploi antérieur pourront percevoir jusqu'à 300 euros de compensation par mois. Il n'est pas acquis que cette allocation suffise à répondre aux attentes des salariés.

Le dispositif proposé se révèle ainsi contreproductif et doublement pénalisant pour les finances publiques : non seulement, la reconversion des salariés d'avoués serait retardée, ce qui augmenterait le risque qu'ils se trouvent, à l'issue de la période transitoire, à la charge de la solidarité nationale, mais en plus, le montant des indemnités de licenciement versées serait le plus élevé possible.

C'est pourquoi, afin de remédier à ce défaut du dispositif prévu, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur créant une indemnité exceptionnelle de reconversion , dont le montant, égal à l'indemnité légale de licenciement, sera inférieur à l'indemnité majorée de licenciement. Cette indemnité serait versée directement par le fond d'indemnisation à tout salarié démissionnant, pour créer une entreprise ou rejoindre un nouvel emploi.

Cette indemnisation spécifique éviterait ainsi que l'intéressé diffère sa reconversion dans l'attente de son licenciement afin de percevoir la prime à laquelle il aurait droit. De plus, compte tenu de son montant, elle coûterait moins cher, au total, au fonds d'indemnisation mis en place, que la seule indemnité de licenciement. Elle permettrait enfin aux salariés qui souhaiteraient lancer leur propre entreprise de bénéficier d'une mise de départ.

Le dispositif retenu prévoit qu'à compter de six mois après la promulgation de la loi, l'employeur devra indiquer, au salarié qui lui en ferait la demande, s'il est susceptible de faire l'objet d'un licenciement économique. Le salarié, disposant alors d'une information précieuse pour la préparation de son avenir professionnel, percevra, s'il démissionne par anticipation, une indemnité exceptionnelle de reconversion.

En outre, l'employeur qui s'abstiendrait de répondre à la demande du salarié ou lui indiquerait qu'il ne devrait pas être licencié et qui procèderait tout de même à ce licenciement devrait s'acquitter du paiement des indemnités légales ou conventionnelles de licenciement. Le fonds d'indemnisation ne verserait dans ce cas à l'employeur que la part des indemnités correspondant à la majoration.

Votre commission a adopté l'article 14 ainsi rédigé .

Article 14 bis Exonération de charges sociales pour les professions juridiques employant d'anciens salariés d'avoués

Cet article additionnel, issu d'un amendement du rapporteur, permettrait aux avocats, avocats aux Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, notaires, huissiers de justice, commissaires-priseurs judiciaires, greffiers de tribunal de commerce, mandataires judiciaires et administrateurs judiciaires de bénéficier d'une exonération de charges sociales patronales lorsqu'ils emploient un salarié issu d'une étude d'avoué.

Cette exonération vise à favoriser le recrutement des salariés d'avoués par les professions juridiques. Elle s'appliquerait aux salaires versés dans la limite du SMIC majoré de 50 % et ne pourrait bénéficier à l'employeur pendant plus de 18 mois.

En tout état de cause, le dispositif prendrait fin deux ans après la disparition de la profession d'avoué, soit le 1 er janvier 2013.

Enfin, pour éviter un détournement du dispositif, l'exonération ne pourrait s'appliquer qu'aux salariés qui justifient, au 1 er janvier 2010, d'un contrat de travail d'une durée de 12 mois minimum auprès d'un avoué.

Votre commission a adopté l'article 14 bis ainsi rédigé.

Article 15 Remboursement aux intéressés des sommes versées pour les licenciements

Cet article pose le principe du remboursement intégral des indemnités versées par leur employeur aux salariés des avoués, ainsi que des sommes versées par la chambre nationale des avoués au titre du reclassement des salariés licenciés.

Il s'agit d'une part des indemnités de licenciement versées par les avoués ou anciens avoués, les chambres de la compagnie et la chambre nationale des avoués, à leur personnel. Ce remboursement porte sur la totalité de l'indemnité versée et non sur la seule part majorée, de manière à ce que l'opération soit financièrement neutre pour les employeurs concernés.

D'autre part, le remboursement porte aussi sur les abondements versés par la chambre nationale des avoués près les cours d'appel, pour le financement des dispositifs qui seront visés par la convention de reclassement des salariés licenciés 52 ( * ) .

Il est en effet prévu qu'à la prise en charge des salariés licenciés par le Fonds national pour l'emploi, pendant une période de douze à dix-huit mois et à hauteur de 2 000 euros, s'ajoute un versement de 1 000 euros par les employeurs, pour chaque salarié.

En outre, il convient d'ajouter aux sommes à rembourser l'éventuelle allocation temporaire dégressive dont le versement pourrait être décidé par la convention de reclassement, aux salariés licenciés et reclassés dans un emploi moins bien rémunéré, pour compenser cette différence de rémunération.

Votre commission a adopté un amendement coordonnant le dispositif prévu avec le versement direct, par le fonds d'indemnisation, des indemnités dues aux salariés.

Votre commission a adopté l'article 15 ainsi rédigé .

Article 16 Organisation et fonctionnement de la commission chargée de statuer sur les demandes de versement ou de remboursement d'indemnités

Cet article détermine les conditions dans lesquelles les demandes d'indemnisation formées par les avoués sont déposées et instruites par la commission nationale compétente.

Le projet de loi prévoit que, pour être indemnisés de la valeur de leur office ou pour obtenir le remboursement des indemnités qu'ils auront versées à leurs salariés, les avoués, les anciens avoués ou les différentes chambres d'avoués devront former leur demande avant le 31 décembre 2012 auprès d'une commission nationale ad hoc .

Cette commission sera présidée par un magistrat hors hiérarchie de l'ordre judiciaire, et composée d'un représentant du garde des sceaux et d'un représentant du ministre chargé du budget, ainsi que de deux représentants des avoués.

Le président de la commission pourra statuer seul sur les demandes de remboursement des indemnités versées. En revanche, l'indemnisation de la valeur des offices sera décidée par la commission. Votre rapporteur souscrit sur ce point à la remarque de son homologue de l'Assemblée nationale, lorsqu'il souligne que les membres de la commission nationale devront se déporter lorsque leur participation à la décision pourrait être de nature à faire douter de leur impartialité 53 ( * ) .

La commission déterminera la valeur de l'office sur la base des critères définis à l'article 13 sans disposer d'aucune marge d'appréciation à cet égard 54 ( * ) .

Alors que le texte initial prévoyait que l'indemnité serait versée dans les six mois de la demande, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à raccourcir à trois mois le délai de remboursement des indemnités de licenciement ou de reclassement versées par les avoués ou leurs chambres professionnelles. Les députés ont de plus précisé que les décisions de la commission ou de son président seront susceptibles de faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le Conseil d'État.

Comme cela a été indiqué précédemment, en organisant le remboursement des sommes avancées par les avoués pour le licenciement de leurs salariés, le présent texte optait pour un système qui ne remettait pas en cause le cadre personnel de la relation professionnelle entre l'employeur et ses salariés.

Votre commission ayant privilégié la solution du versement direct par le fonds d'indemnisation des indemnités dues aux salariés, elle a adopté un amendement de coordination qui prévoit que le président de la commission nationale se prononce sur les demandes qui lui sont adressées à ce sujet, et que le versement intervient dans un délai de deux mois, ce qui permet de le faire coïncider avec la fin du délai du préavis de licenciement.

Votre commission a adopté l'article 16 ainsi rédigé .

Article 17 Possibilité d'obtenir le versement d'un acompte ou le remboursement du capital restant dû sur un prêt pendant la période transitoire

Le présent article définit les conditions dans lesquelles un acompte sur l'indemnisation due est versé aux avoués qui en font la demande. Il organise aussi les modalités du remboursement au prêteur de l'avoué du capital restant dû sur le prêt ayant servi à financer l'achat de l'office.

Le principe retenu est le suivant : à compter du 1 er janvier 2010 et au plus tard le 31 décembre de la même année, les avoués qui le souhaiteront pourront demander au président de la commission nationale prévue à l'article précédent que leur soit versé un acompte sur l'indemnisation qu'ils doivent recevoir. L'acompte sera de 50 % du montant de la recette nette réalisée pour le dernier exercice fiscal connu à la date de la publication de la loi. Il sera versé dans les trois mois suivant le dépôt de la demande.

Le montant de l'acompte équivaut ainsi à une part substantielle du chiffre d'affaires, qui permettra à l'avoué qui l'aura sollicité suffisamment tôt de bénéficier de la trésorerie nécessaire pour procéder aux opérations de liquidation et aux licenciements nécessités par sa reconversion, dans l'attente du versement de la totalité de l'indemnité. Ce dernier devrait d'ailleurs logiquement intervenir dans les trois mois qui suivent, puisqu'il est vraisemblable que les avoués auront déposé en même temps la demande d'acompte et celle d'indemnisation.

Pendant la même période, les avoués qui se sont endettés pour acheter leur office ou les parts de la société d'exercice pourront demander directement au fonds d'indemnisation qu'il rembourse à leur établissement de crédit le capital restant dû à ce titre. À cet égard, l'article 19 prévoit que les pénalités éventuelles dues par l'avoué en raison de ce remboursement anticipé seront elles aussi prises en charge par le fonds d'indemnisation.

Le choix de s'adresser directement au fonds d'indemnisation et non à la commission nationale de l'article 16 se justifie par le souci d'accélérer, autant que faire se peut, le remboursement. L'évaluation des sommes à rembourser est en effet immédiate, puisqu'elle résulte directement de l'état d'endettement fourni par l'établissement de crédit. Elle ne nécessite donc pas l'intervention d'une commission d'évaluation.

Dans un cas comme dans l'autre, les sommes versées au titre de l'acompte ou du remboursement viennent en déduction de l'indemnité perçue par les avoués sur la valeur de leur office.

Plusieurs éléments de la procédure de remboursement du prêt ont retenu l'attention de votre rapporteur .

Tout d'abord, le texte prévoit que, dans le cas où le remboursement du capital restant dû est sollicité, l'acompte est diminué de son montant.

Or, ainsi que l'ont indiqué à votre rapporteur les représentants de l'Association des jeunes avoués, cette mesure risque de pénaliser tout particulièrement les jeunes avoués fortement endettés, puisque ceux dont l'endettement sera supérieur à la valeur de l'acompte auquel ils peuvent prétendre ne percevront rien. Ils seront certes libérés de leurs charges d'emprunt, mais ils ne bénéficieront pas de l'avantage de trésorerie que constitue le versement de l'acompte.

C'est pourquoi votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur supprimant cette disposition. Le versement de l'indemnisation devant intervenir dans les six mois de la demande, il n'y a en effet pas d'inconvénient majeur à permettre à l'avoué concerné de percevoir l'acompte, à la condition cependant que la somme versée reste inférieure au reliquat de l'indemnisation due.

Par ailleurs, il apparaît nécessaire de corriger le dispositif retenu dans la mesure où il prévoit que le remboursement s'effectue sur la base du capital restant dû au 1 er janvier 2010. En effet, jusqu'à ce remboursement, l'avoué continuera de payer à l'établissement de crédit les mensualités. Une fois le remboursement effectué, le prêteur bénéficierait d'un enrichissement sans cause au détriment de son ancien débiteur, puisqu'il aurait perçu trop de mensualités.

En outre, aucun délai n'est fixé pour le remboursement du capital restant dû.

Il est possible de remédier à ces deux inconvénients en prévoyant que le remboursement intervient dans le mois qui suit la demande et qu'il porte sur le capital restant dû au jour où il intervient. Compte tenu de la facilité avec laquelle le montant du capital restant dû pourra être établi, un tel délai ne semble pas trop court. En revanche, votre rapporteur note qu'il imposera au fonds d'indemnisation de disposer suffisamment tôt des sommes nécessaires, car il est plus que probable que les demandes d'indemnisation seront déposées dès la promulgation de la loi .

Par ailleurs, l'obligation dans laquelle seront placés les avoués endettés de verser une ou plusieurs mensualités pendant le délai nécessaire pour obtenir le remboursement de leur emprunt apparaît largement compensée par la suppression de l'imputation du montant du remboursement sur la valeur de l'acompte.

Votre commission a adopté l'article 17 ainsi rédigé .

Article 18 Modalités de présentation de la demande effectuée au titre des articles 13, 15 et 17

Cet article définit, selon la forme d'exercice de la profession d'avoué, quelle personne, physique ou morale, est compétente pour déposer la demande d'indemnisation ou de remboursement.

Si l'avoué exerce à titre individuel, lui seul, ou, le cas échéant, ses ayants droit peuvent former la demande tendant à l'indemnisation de la valeur de l'office, ainsi que celles tendant au remboursement des indemnités majorées de licenciement, au versement de l'acompte ou au remboursement du capital restant dû au titre de l'emprunt contracté.

Pour les avoués exerçant au sein d'une société, l'article distingue selon le type de demande formée et selon le type de société d'exercice.

Les indemnités de licenciement étant versées par la personne morale employeur, seule la société peut en demander le remboursement.

Les autres demandes doivent être présentées par le ou les titulaires de l'office, c'est-à-dire soit la société, si elle est seule titulaire de l'office, soit conjointement par chaque associé, dans le cas d'une société d'avoués ou d'une société en participation d'avoués où chacun des associés reste titulaire de son office.

Votre commission a adopté à cet article un amendement rédactionnel et de coordination de son rapporteur avec le versement direct des indemnités dues aux salariés par le fonds d'indemnisation.

Votre commission a adopté l'article 18 ainsi rédigé .

Article 19 Création, organisation et fonctionnement du fonds d'indemnisation chargé du paiement des sommes dues aux avoués

Cet article prévoit la création d'un fonds d'indemnisation spécifique et en règle les attributions et les modalités de fonctionnement.

Le paragraphe I précise que ce fonds est administré par un conseil de gestion composé d'un représentant du garde des sceaux, d'un représentant du ministre chargé du budget, d'un représentant de la Caisse des dépôts et consignations et de deux représentants des avoués. Sa gestion comptable, administrative et financière est assurée par la Caisse des dépôts et consignations qui perçoit à ce titre une rétribution dont le montant et les modalités de versement sont fixées par une convention passée avec l'État.

Le paragraphe II définit les missions du fonds d'indemnisation :

- assurer les paiements aux avoués et à leurs chambres des sommes déterminées par la commission nationale de l'article 16 ou son président ;

- procéder au remboursement au prêteur du capital restant dû sur les emprunts contractés par les avoués pour acquérir leur office ou les parts de société d'avoué. Le même article prévoit par ailleurs que le fonds d'indemnisation prenne aussi en charge les indemnités de remboursement anticipé que l'organisme de crédit serait en droit d'exiger de l'avoué. Ceci permet de garantir la neutralité financière pour l'avoué de ce remboursement.

Par coordination avec la modification intervenue sur ce point à l'article 17, la référence à la date du 1 er janvier 2010 doit être remplacée par celle de la date où le remboursement est censé intervenir. Votre commission a adopté un amendement de son rapporteur à cet effet.

Le paragraphe III prévoit que le fonds d'indemnisation reçoive, à titre de ressources, le produit de certaines taxes ainsi que celui d'emprunts ou d'avances effectués par la Caisse des dépôts et consignations.

Il est très vraisemblable que les avoués et leurs chambres demanderont à bénéficier dès que possible des indemnisations auxquelles ils auront droit. Pour faire face aux dépenses que cela représentera, le fonds devra s'endetter massivement dans les premiers temps de sa mise en place, puis, dans un second temps, rembourser les emprunts contractés grâce au produit de la taxe affectée.

L'étude d'impact jointe au projet de loi indiquait que le financement de long terme de la réforme serait assuré par une taxe spéciale, créée dans la loi de finances pour 2010, supportée par chaque demandeur pour les affaires civiles avec représentation obligatoire d'avocat. Son montant était évalué à 85 euros par affaire. La garde des sceaux est cependant revenue sur ce dispositif qui pénalisait les demandeurs de première instance, alors que la taxe avait pour objet de financer une réforme de la procédure d'appel.

En conséquence, il est prévu que l'assiette de la taxe soit limitée aux affaires en appel devant les juridictions civiles avec représentation obligatoire, et hors aide juridictionnelle (soit un total de 125 744 affaires par an). L'article 28 du projet de loi de finances rectificative pour 2009, déposé à l'Assemblée nationale, prévoit la création de ce droit, affecté au fonds d'indemnisation de la profession d'avoué. Ce droit serait dû par l'appelant, lorsque le ministère d'avocat est obligatoire. Les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle en seraient exonérés. Le montant de ce droit serait fixé à 330 euros. Il appartiendrait à l'avocat de l'acquitter pour le compte de son client, par voie de timbre ou par voie électronique. Ce droit serait applicable du 1 er janvier 2011 au 31 décembre 2018.

Votre commission a par ailleurs adopté un amendement de coordination de son rapporteur prenant en compte le versement direct des indemnités dues aux salariés par le fonds d'indemnisation.

Votre commission a adopté l'article 19 ainsi modifié .

Article 20 Modalités de mise en oeuvre

Cet article renvoie à un décret la détermination des modalités de désignation des membres de la commission nationale d'indemnisation et du conseil de gestion du fonds d'indemnisation ainsi que leur fonctionnement.

Il prévoit en outre qu'un décret fixe la liste des justificatifs à joindre aux demandes présentées pour obtenir l'indemnisation ou les remboursements prévus par la présente loi.

Votre commission a adopté un amendement de coordination de son rapporteur prenant en compte la demande formée pour le versement direct des indemnités dues aux salariés par le fonds d'indemnisation.

Votre commission a adopté l'article ainsi modifié .

CHAPITRE III DISPOSITIONS RELATIVES A L'ACCÈS AUX PROFESSIONS JUDICIAIRES ET JURIDIQUES

Article 21 Accès des avoués et de leurs collaborateurs aux professions juridiques réglementées

Cet article permet aux avoués qui n'auraient pas intégré la profession d'avocat et aux collaborateurs titulaires du diplôme d'avoué d'accéder à l'ensemble des professions juridiques et judiciaires libérales réglementées : avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, notaire, commissaire-priseur judiciaire, greffier de tribunal de commerce, huissier de justice, administrateur judiciaire et mandataire judiciaire.

Cette passerelle vers les professions juridiques et judiciaires serait donc ouverte pendant un délai de cinq ans à compter de la publication de la loi :

- aux avoués renonçant à faire partie de la profession d'avocat ;

- aux avoués renonçant à demeurer au sein de la profession d'avocat ;

- aux collaborateurs des avoués justifiant, à la date d'entrée en vigueur du chapitre Ier, soit au 1 er janvier 2011, de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué.

Pour chacune des professions juridiques et judiciaires dont l'accès leur est ainsi ouvert, les textes en vigueur requièrent l'obtention de titres ou de diplômes, la réalisation de stages ou de formations professionnelles.

Aussi le premier alinéa de l'article 21 du projet de loi renvoie-t-il à un décret en Conseil d'Etat la définition des conditions dans lesquelles les avoués ou leurs collaborateurs titulaires du diplôme d'aptitude à la profession d'avoué pourraient être dispensés, en tout ou partie, de satisfaire à ces exigences.

Le second alinéa de l'article 21 prévoit en outre que les collaborateurs d'avoués pourraient, s'ils ne détiennent pas le diplôme d'aptitude à la profession d'avoué, demander à être dispensés de certaines conditions d'accès aux professions judiciaires et juridiques réglementées.

Ils pourraient former cette demande dans le délai de cinq ans après la publication de la loi. Les modalités de dispense seraient fixées par décret en Conseil d'Etat.

Cette passerelle « partielle » ou adaptée, est un élément essentiel de la reconversion des personnels salariés qui ne disposent pas du diplôme d'aptitude à la profession d'avoué. En ce qui concerne le niveau de qualification de ces salariés, l'étude d'impact jointe au dépôt du projet de loi indique seulement que 32 % de la population des salariés n'a pas le niveau du baccalauréat, et que 39 % bénéficient d'un niveau de formation supérieure, dont 21 % d'un niveau d'au moins Bac + 4.

L'étude réalisée par l'Association nationale du personnel des avoués non syndiqué (ANPANS) en juillet 2008 confirme ces données. Il apparait ainsi que 39 % des 1 165 personnes ayant répondu à cette enquête ont un niveau de formation égal ou supérieur à Bac + 2 et que 23 % ont le niveau Bac.

Les représentants de l'ANPANS estiment que la loi devrait prévoir une intégration directe pour les collaborateurs diplômés et préciser les conditions d'intégration des autres.

Votre rapporteur rappelle toutefois que les conditions d'accès aux différentes professions judiciaires et juridiques visées sont fixées par des décrets et non par la loi 55 ( * ) .

Celle-ci ne saurait donc organiser des conditions dérogatoires sans créer un désordre juridique.

En outre, pour assurer la bonne intégration des collaborateurs d'avoués au sein de ces professions et garantir aux clients un niveau de prestation sur lequel repose la crédibilité desdites professions, il paraît souhaitable qu'une condition de pratique professionnelle au sein d'un office de la profession visée soit prévue.

Votre commission a adopté l'article 21 sans modification .

Article 22 Accès des collaborateurs d'avoué à la profession d'avocat

Cet article permet aux collaborateurs d'avoué justifiant de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué d'accéder à la profession d'avocat, en étant dispensés de la formation théorique et pratique, ainsi que du certificat d'aptitude à la profession d'avocat.

L'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 soumet en effet l'accès à la profession d'avocat à un ensemble de conditions :

- détenir la nationalité française ou être ressortissant d'un Etat membre des Communautés européennes ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ;

- être titulaire d'au moins une maîtrise en droit, ou de titres ou diplômes reconnus équivalents ;

- être titulaire du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) ;

- n'avoir pas été l'auteur de faits ayant donné lieu à condamnation pénale pour agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs, ou de faits de même nature ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative telle que la destitution, la radiation ou la révocation ;

- n'avoir pas été frappé de faillite personnelle.

En outre, l'article 12 de la même loi dispose que la formation professionnelle exigée pour l'exercice de la profession d'avocat est subordonnée à la réussite à un examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle et comprend une formation théorique et pratique d'une durée d'au moins dix-huit mois, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat.

L'article 22 du projet de loi définit par conséquent un régime dérogatoire à ces deux articles de la loi du 31 décembre 1971, afin de faciliter l'accès des collaborateurs d'avoué à la profession d'avocat.

Selon les données fournies à votre rapporteur par l'Association nationale du personnel des avoués non syndiqué (ANPANS), 55 collaborateurs d'avoués sont titulaires de l'examen d'aptitude à la profession d'avoué, soit 32 % de l'ensemble des collaborateurs juristes des avoués, dont l'effectif comprend 172 personnes (hors la cour d'appel de Bastia, non comptabilisée par l'ANPANS).

Les conditions d'accès à la profession d'avoué, définies par les articles 4-1 et suivants du décret n° 45-0118 du 19 décembre 1945 modifié, sont en effet quasiment semblables à celles prévues pour la profession d'avocat. Le stage de formation professionnelle de deux ans, qui doit être accompli avant de se présenter à l'examen d'aptitude professionnelle aux fonctions d'avoué, peut d'ailleurs être effectué, pour moitié, auprès d'un avocat.

Aussi le premier alinéa de l'article 22 du projet de loi prévoit-il que les collaborateurs d'avoué justifiant, à la date d'entrée en vigueur du chapitre premier de la réforme, c'est-à-dire au 1 er janvier 2011, de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué, seraient dispensés :

- de la formation théorique et pratique requise pour l'accès à la profession d'avocat ;

- du certificat d'aptitude à la profession d'avocat.

Le second alinéa précise que le bénéfice de ces dispenses serait également ouvert aux collaborateurs d'avoué justifiant d'un nombre d'années de pratique professionnelle fixé par décret en Conseil d'Etat, en fonction du niveau de diplôme obtenu. Pour ces collaborateurs juristes non titulaires de l'examen d'aptitude ou non stagiaires, le nombre d'années de pratique professionnelle exigé serait donc inversement proportionnel au nombre d'années d'études : de deux pour les titulaires d'un master II (Bac + 5) à quatre pour les titulaires d'une licence.

Le projet de loi précise que les années de pratique professionnelle comptabilisées sont celles exercées en qualité de collaborateur d'avoué ou, après le 1 er janvier 2011, en qualité de collaborateur d'avocat.

Afin de prendre en compte la situation des personnes en cours de formation, le décret du 17 avril 2009 relatif à l'accès aux professions d'avoué et de notaire ouvre, par dérogation, aux stagiaires inscrits sur le registre du stage au 1 er juillet 2008, la possibilité de se présenter à l'examen d'aptitude professionnelle aux fonctions d'avoué en 2009. Ces personnes peuvent donc se présenter à l'examen même si elles n'ont pas accompli deux années de stage.

Par ailleurs, le décret du 17 avril 2009 permet au garde des sceaux d'organiser, par arrêté, en 2009, des sessions d'examen supplémentaires. En effet, aux termes de l'article 11 du décret du 19 décembre 1945, une session d'examen est organisée chaque année au cours du mois de novembre. Un arrêté du garde des sceaux en date du 10 juin 2009 a organisé une session supplémentaire d'examen d'aptitude en septembre (épreuves écrites) et octobre 2009 (épreuves orales).

Votre commission a adopté l'article 22 sans modification .

Article 23 Dispense d'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle des avocats pour les personnes en cours de stage

Cet article dispense les personnes qui seraient, au 1 er janvier 2011, en cours de stage pour l'accès à la profession d'avoué, de l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle des avocats (CRFPA).

L'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 dispose en effet que la formation professionnelle exigée pour l'exercice de la profession d'avocat est subordonnée à la réussite à un examen d'accès à un CRFPA et comprend une formation théorique et pratique d'une durée d'au moins dix-huit mois, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat.

Afin de faciliter la reconversion des collaborateurs juristes des avoués, l'article 23 du projet de loi permet à ceux qui seraient inscrits, au 1 er janvier 2011, depuis au moins un an sur le registre du stage tenu par la chambre nationale des avoués pour l'accès à la profession d'avoué, d'accéder à la formation théorique et pratique assurée par les CRFPA sans avoir à subir l'examen d'accès.

Cette dispense paraît fondée, puisque les personnes en cours de stage pour l'accès à la profession d'avoué ont nécessairement subi avec succès l'examen d'aptitude professionnelle aux fonctions d'avoué 56 ( * ) .

Votre commission a adopté l'article 23 sans modification .

CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 24 Exercice simultané, pendant la période transitoire, de la profession d'avocat par les avoués

Cet article organise la période transitoire pendant laquelle les avoués pourront exercer simultanément leur profession et celle d'avocat.

Cette période transitoire commencerait au 1 er janvier 2010 et se terminerait au moment de l'entrée en vigueur du chapitre premier du présent texte, fixée au 1er janvier 2011 par l'article 34.

Pendant cette période, les avoués continueront de bénéficier du monopole de postulation devant les cours d'appel et ils auront la possibilité de commencer à exercer, s'ils le souhaitent la profession d'avocat. À cette fin, le présent article prévoit que l'inscription au barreau leur sera accordée de droit sur simple demande.

Les avoués pourront mettre à profit cette période pour établir leur nouvelle clientèle et adapter la dimension de leur étude aux nouvelles fonctions qui seront les leurs lorsqu'ils n'exerceront plus que la profession d'avocat.

Les représentants de la profession d'avoué ont tous indiqué à votre rapporteur que cette période transitoire était essentielle pour leur permettre d'organiser, pour ceux qui le souhaitaient, le basculement de leur activité. Elle leur est cependant apparue trop courte, et ils se sont prononcés pour une durée de cinq ans.

Inversement cependant, les représentants de l'A.N.P.A.N.S. ont émis le voeu que la période transitoire soit la plus courte possible afin que les personnels puissent connaître leur sort le plus tôt possible et sortir enfin de l'incertitude dans laquelle ils sont actuellement plongés. Cette prise de position n'est néanmoins pas unanime dans la profession, certains salariés ayant indiqué, dans les courriers qu'ils ont envoyés à votre rapporteur, qu'ils souhaitaient que la période transitoire soit allongée pour qu'ils puissent continuer à exercer leur métier quelques années supplémentaires.

Les représentants de la profession d'avocat ont quant à eux fait valoir que la période transitoire posait problème dans la mesure où elle permettrait aux avoués d'attraire notamment la clientèle institutionnelle, qui devra encore faire appel à eux pour la postulation, en lui proposant de plaider en même temps devant la cour d'appel.

La disposition prévue au deuxième alinéa du présent article apporte cependant une réponse à cette inquiétude, puisqu'elle interdit aux avoués de plaider et de postuler simultanément dans les affaires introduites devant la cour d'appel antérieurement au début de la période transitoire, si la partie est déjà assistée d'un avocat, à moins que ce dernier renonce à cette assistance.

Les avoués ne pourront proposer de plaider et de postuler en même temps devant la cour d'appel que pour les affaires introduites après le début de la période transitoire. Mais les avocats qui assisteront des parties dont l'affaire arrivera en cause d'appel à ce moment pourront, comme aujourd'hui, décider vers quel avoué diriger leur client et s'entendre avec lui sur le partage des tâches. Les avoués ne plaideront et ne postuleront donc simultanément que pour les parties qui se seront adressées directement à eux, en raison par exemple, de leur expérience particulière de la procédure d'appel.

Votre commission a donc estimé que rien ne justifiait que la période transitoire soit supprimée. Au contraire, elle aidera les avoués à entamer leur reconversion sans nuire excessivement aux avocats avec lesquels ils entreront en concurrence.

Soucieuse néanmoins de ne pas prolonger indûment une situation incertaine, votre commission a aussi exclu d'allonger cette période transitoire. Elle s'est limitée à en reporter, par l'adoption d'un amendement de son rapporteur, le commencement à la date de la publication de la loi, dans la mesure où, selon toute vraisemblance, le texte ne pourra être promulgué avant la date du 1er janvier 2010 à laquelle renvoie le présent article.

Votre commission a par ailleurs adopté un amendement présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues afin de prévoir que, pendant la période transitoire, il appartient à la partie intéressée de renoncer à l'assistance de son avocat, pour confier à l'avoué devenu avocat la mission de plaider. Le projet de loi prévoit en effet que seul l'avocat lui-même pourrait renoncer à assister son client et permettre ainsi à l'avoué devenu également avocat de plaider. Il semble préférable que ce choix soit celui de la partie.

Votre commission a adopté l'article 24 ainsi rédigé .

Article 25 Transformation automatique des sociétés d'avoués en sociétés d'avocats

Cet article prévoit la transformation automatique des sociétés constituées par les avoués, en sociétés ayant pour objet social l'exercice de la profession d'avocat.

Cette transformation interviendrait dès la suppression de la profession d'avoué, prévue le 1 er janvier 2011 et ne concernerait évidemment que les sociétés encore en exercice à cette date. Elle garantira ainsi que les structures évoluent conformément à la reconversion professionnelle des avoués dans le métier d'avocat.

À compter de cette transformation, les avoués disposeraient d'un délai de six mois pour procéder aux modifications nécessitées par le changement de raison sociale de la société.

Votre commission a adopté cet article 25 sans modification .

Article 26 Conditions, pour les avoués, de leur renonciation à l'exercice de la profession d'avocat ou de leur inscription à un barreau autre que celui de leur cour d'appel d'origine

Cet article donne aux avoués la possibilité de renoncer à leur inscription au barreau ou de demander leur inscription à un autre barreau que celui de la cour d'appel auprès de laquelle ils exerçaient leur profession initiale.

Ainsi qu'il a été vu précédemment, aux termes de la nouvelle rédaction de l'article 1er de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, proposée par l'article 1er du projet de loi, en principe les avoués près les cours d'appel seront inscrits, à la date de leur première prestation de serment dans l'une ou l'autre des professions d'avoués ou d'avocats, au tableau du barreau établi près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé leur office.

Le premier alinéa de l'article 26 du projet de loi prévoit qu'au plus tard trois mois avant la suppression de la profession d'avoué, c'est-à-dire au plus tard le 30 septembre 2010, un avoué pourra renoncer, par dérogation à l'article premier de la loi du 31 décembre 1971 dans sa nouvelle rédaction, à intégrer la profession d'avocat.

Les modalités d'exercice de cette renonciation sont renvoyées à un décret (troisième alinéa de l'article 26 du projet de loi).

Les avoués ayant renoncé à faire partie de la profession d'avocat pourraient toutefois revenir sur cette décision.

En effet, le projet de décret relatif à l'organisation de la profession d'avocat et à l'accès aux professions judiciaires et juridiques, communiqué à votre rapporteur, prévoit que les « anciens » avoués près les cours d'appel seront dispensés de la condition de diplôme, de la formation théorique et pratique, ainsi que du certificat d'aptitude à la profession d'avocat et du stage.

Le deuxième alinéa de l'article 26 du projet de loi permet en outre à l'avoué qui devient avocat de demander son inscription à un autre barreau que celui établi près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé son office. Le choix devrait alors être exprimé au plus tard le 30 septembre 2010, dans des conditions définies par décret.

Votre commission a adopté l'article 26 sans modification .

Article 27 Sort des instances d'appel en cours au moment de la disparition de la profession d'avoué

Cet article détermine le sort des instances en cours à la date d'entrée en vigueur de la réforme.

Ainsi, dans les instances en cours au 1 er janvier 2011, l'avoué devenu avocat conserverait ses attributions dans la suite de la procédure, jusqu'à l'arrêt sur le fond, tandis que l'avocat de chaque partie continuerait à assister celle-ci (premier alinéa).

Cette continuité des attributions s'appliquerait sous réserve de la démission, du décès ou de la radiation de l'avoué ou de l'avocat. Ces derniers pourraient également définir d'un commun accord d'autres modalités de répartition des missions, l'avocat cédant par exemple à l'ancien avoué sa mission d'assistance de la partie. En outre, la partie intéressée pourrait elle-même faire un choix différent et décider de ne conserver que l'un des deux auxiliaires de justice, par exemple.

Le deuxième alinéa de l'article 27 prévoit qu'en toute hypothèse, l'ancien avoué devenu avocat et l'avocat seraient rémunérés selon les dispositions applicables avant la réforme. Par conséquent, l'ancien avoué restera rémunéré sur le fondement du tarif des avoués.

Si l'avoué renonce à devenir avocat, comme le lui permettra l'article 26 du projet de loi, il devra en informer la partie, au plus tard trois mois avant l'entrée en vigueur de la réforme, soit au plus tard le 30 septembre 2010 (troisième alinéa). L'avoué devra alors indiquer à la partie qu'il lui incombe de choisir un avocat, qui se constituera comme postulant à compter du 1 er janvier 2011.

Le quatrième alinéa de l'article 27 prend en compte le cas où la partie serait bénéficiaire de l'aide juridictionnelle. En effet, dans une telle hypothèse, en l'absence d'avocat désigné, l'avoué renonçant à devenir avocat devrait aviser le bâtonnier afin qu'il désigne un avocat chargé de se substituer à lui dans la suite de la procédure.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 27 prévoit que l'avoué dessaisi du dossier, sur décision de la partie ou parce qu'il renonce à devenir avocat, sera rémunéré, au titre des actes accomplis avant son dessaisissement, selon les dispositions applicables avant la réforme, c'est-à-dire conformément au tarif des avoués.

Votre commission a adopté l'article 27 sans modification.

Article 28 Sort des procédures ou sanctions disciplinaires engagées ou prononcées avant la réforme

Cet article définit le sort des sanctions et procédures disciplinaires intéressant les avoués. Il convient en effet d'assurer l'exécution des sanctions prononcées et l'aboutissement des procédures engagées avant la disparition de la profession.

Le régime disciplinaire des avoués près les cours d'appel est le même que celui des notaires, huissiers et commissaires-priseurs judiciaires. Il est défini par l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, dont l'article 2 dispose que donne lieu à sanction disciplinaire, même si ces agissements se rapportent à des faits extraprofessionnels :

- toute contravention aux lois et règlements ;

- toute infraction aux règles professionnelles ;

- tout fait contraire à la probité, à l'honneur ou à la délicatesse ;

L'échelle des peines disciplinaires, définie par l'article 3 de l'ordonnance, comporte six degrés :

- le rappel à l'ordre ;

- la censure simple ;

- la censure devant la chambre assemblée ;

- la défense de récidiver ;

- l'interdiction temporaire ;

- la destitution.

Les quatre premières peines peuvent être assorties d'une peine complémentaire d'inéligibilité, de dix ans au plus, aux chambres, organismes et conseil professionnels. L'interdiction et la destitution s'accompagnent automatiquement d'une inéligibilité définitive.

L'action disciplinaire s'exerce soit devant la chambre de discipline, soit devant le tribunal de grande instance. Le procureur de la République peut en effet citer l'officier public ministériel devant le tribunal de grande instance statuant disciplinairement. La chambre de discipline de la profession est alors dessaisie de la procédure.

L'article 28 du projet de loi traite trois cas de figure différents :

- le sort des sanctions disciplinaires prononcées ;

- le sort des procédures en cours au 1 er janvier 2011 ;

- le sort des procédures engagées à compter du 1 er janvier 2011.

Le premier alinéa de l'article 28 prévoit que l'interdiction temporaire d'exercice et les peines disciplinaires prononcées à l'encontre d'un avoué avant le 1 er janvier 2011, ou après cette date en application des nouvelles dispositions définies par le projet de loi, continuent à produire leurs effets dans le cadre de la profession réglementée que l'avoué a rejointe. Les sanctions disciplinaires en cours continuent par conséquent de s'appliquer dans le cadre de la nouvelle profession de l'avoué.

Le deuxième alinéa de l'article 28 proroge les compétences des juridictions disciplinaires pour les instances en cours au 1 er janvier 2011. En revanche, les procédures engagées après cette date relèveraient de la compétence :

- du conseil de discipline des avocats, défini à l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971, si l'ancien avoué est devenu avocat ;

- de l'instance disciplinaire compétente pour la profession exercée par l'ancien avoué, si celui-ci a renoncé à accéder à la profession d'avocat.

Enfin, le projet de loi précise que seules peuvent être prononcées les sanctions encourues à la date des faits, conformément au principe de légalité des délits et des peines, défini à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789.

Votre commission a adopté l'article 28 sans modification .

Article 29 Maintien jusqu'au 31 décembre 2014 de la chambre nationale des avoués près les cours d'appel Suppression de la bourse commune des chambres

Cet article assure le maintien de la Chambre nationale des avoués et la prorogation du mandat de ses membres jusqu'au 31 décembre 2014.

Ce maintien vise à permettre à la Chambre de traiter des questions relatives au reclassement du personnel des offices, et de procéder à la gestion et à la liquidation de son patrimoine.

Le projet de loi organisant la disparition de la profession d'avoué à compter du 1 er janvier 2011, il ne sera pas possible d'organiser, à compter de cette date, la désignation de nouveaux représentants pour assurer le renouvellement de la Chambre par tiers tous les deux ans, comme le prévoit l'article 33 du décret n° 45-0118 du 19 décembre 1945 modifié.

Aussi le deuxième alinéa de l'article 29 du projet de loi proroge-t-il les mandats en cours au 1 er janvier 2011 jusqu'à la dissolution de la Chambre nationale le 31 décembre 2014. Cette prorogation vise les délégués siégeant à la Chambre nationale, les membres de son bureau, ainsi que les clercs et les employés membres du comité mixte.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 29 renvoie à un décret en Conseil d'Etat la définition des conséquences de la suppression de la bourse commune des chambres de compagnie.

L'article 24 du décret du 19 décembre 1945 dispose en effet qu'il est pourvu aux dépenses de la compagnie sur une bourse commune, dans laquelle doivent être versées les sommes nécessaires aux dépenses votées par l'assemblée générale pour subvenir au fonctionnement des organismes professionnels et des oeuvres sociales professionnelles. La bourse commune a en outre pour rôle essentiel de garantir la responsabilité professionnelle des membres de la compagnie.

La disparition de la profession suppose par conséquent que la bourse commune soit liquidée.

Votre commission a adopté l'article 30 sans modification .

Article 30 Modalités de prorogation du mandat des administrateurs élus représentants les avoués au sein du conseil d'administration et de l'assemblée générale de la Caisse nationale des barreaux français

Cet article renvoie à un décret la détermination des modalités selon lesquelles les administrateurs élus représentant les avoués à la caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels, des officiers publics et des compagnies judiciaires (CAVOM) siègent également, à compter de la disparition de la profession d'avoué, au conseil d'administration et à l'assemblée générale de la Caisse nationale des barreaux français (CNBF).

Les représentants des avoués siégeraient dans les instances dirigeantes de la CNBF jusqu'à leur renouvellement.

Il paraît en effet pertinent de prévoir la représentation des avoués devenus avocats au sein des instances de la CNBF.

Votre commission a adopté l'article 30 sans modification .

CHAPITRE V DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES

Ce chapitre a pour double objet d'une part de prévoir la date d'entrée en vigueur du chapitre I er du présent texte, qui emporte la suppression de la profession d'avoué, et d'autre part de procéder aux coordinations textuelles rendues nécessaires par cette suppression et le remplacement des avoués par les avocats.

Article 31 (art. 13 de l'ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative ; art. 3 de la loi n° 56-672 du 9 juillet 1956 instituant diverses mesures de protection envers certains militaires ; art. 90 et 1597 du code civil ; art. 113, 130 et 131 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ; art. 64 du code des douanes ; art. 279 et 293 B du code général des impôts ; art. L. 561-3, L. 561-17, L. 561-19, L. 561-26, L. 561-28 et L. 561-36 du code monétaire et financier ; art. 418, 544 et 576 du code de procédure pénale et art. L. 16 B et L. 38 du livre des procédures fiscales) Coordinations textuelles

Le présent article procède aux coordinations textuelles rendues nécessaire par la suppression de la profession d'avoué et son remplacement, dans ses attributions, par celle d'avocat.

À cette fin, le I de cet article remplace les termes « avoué » et « avoués » par ceux d'« avocat » et d' « avocat » dans les textes suivants :

- à l'article 13 de l'ordonnance du 1er juin 1828 relative aux conflits d'attribution entre les tribunaux et l'autorité administrative, qui prévoit les conditions dans lesquelles le procureur de la République prévient les parties ou leurs avoués de la contestation par le préfet de la compétence du tribunal de grande instance pour connaître de l'affaire dont il est saisi, lorsqu'il estime que cette dernière devrait relever de l'ordre administratif ;

- au premier alinéa de l'article 3 de la loi n° 56-672 du 9 juillet 1956 instituant diverses mesures de protection envers certains militaires qui prévoit la possibilité pour les militaires de se faire représenter par avoué pour la présentation de la requête en divorce, ainsi que pour la comparution en conciliation dans les instances en divorce ou en séparation de corps ;

- aux dix-huitième alinéa du a et huitième alinéa du b du 2 de l'article 64 du code des douanes qui reconnaissent aux parties la possibilité de ne pas constituer avoué devant le premier président de la cour d'appel dans deux situations : lorsqu'elles font appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance autorisant les services des douanes à procéder à des visites des lieux où des marchandises et documents se rapportant à des délits douaniers sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie ; ou lorsqu'elles le saisissent d'un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie en cause ;

- aux dix-neuvième alinéa du II et quatrième alinéa du V de l'article L. 16 B et aux dix-huitième alinéa du 2 et troisième alinéa du 5 de l'article L. 38 du livre des procédures fiscales qui dispensent les parties de constituer avoué lorsqu'elles font appel devant le premier président de la cour d'appel contre les ordonnances du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance autorisant les services fiscaux à procéder à des visites en matière de délit fiscal ; ou lorsqu'elles déposent un recours contre le déroulement de ces opérations de visite ;

- au deuxième alinéa de l'article 576 du code de procédure pénale qui prévoit qu'un avoué puisse signer à la place du demandeur son pourvoi en cassation contre la décision rendue ;

Le II du présent article supprime la référence faite aux « avoués » ou au « président de la compagnie dont relève l'avoué » tout en maintenant celle faite aux « avocats » ou « au bâtonnier de l'ordre auprès duquel est l'avocat est inscrit » dans les articles suivants du code monétaire et financier :

- au II de l'article L. 561-3 qui exempte les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les avocats et les avoués près les cours d'appel, des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme pour ce qui concerne la part de leurs activités qui se rattache à une procédure juridictionnelle ;

- aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 561-17 qui définit les conditions dans lesquelles les avocats et les avoués sont tenus de communiquer respectivement au bâtonnier de l'ordre ou au président de la compagnie la déclaration qu'ils font des sommes inscrites sur leurs comptes, dont ils savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu'elles proviennent d'une infraction passible d'une peine privative de liberté supérieure à un an ou participent au financement du terrorisme ;

- au deuxième alinéa du I de l'article L. 561-19 qui fait interdiction aux personnes destinataires de la communication prévue par l'article L. 561-17, dont, notamment le président de la compagnie dont relève l'avoué, de porter à la connaissance des tiers ou du propriétaire de la somme dénoncée, l'existence ou le contenu de la déclaration faite à son encontre ;

- aux premier, deuxième et troisième alinéas du II et au premier alinéa du III de l'article L. 561-26, qui déterminent d'une part les conditions dans lesquelles la cellule de renseignement financier nationale présente, entre autres, au bâtonnier de l'ordre auprès duquel l'avocat est inscrit ou au président de la compagnie auprès de laquelle l'avoué est inscrit, les demandes de communication des pièces litigieuses détenues par les intéressés ; et, d'autre part, les sanctions auxquelles s'exposeraient le bâtonnier de l'ordre ou le président de la compagnie qui en informerait des tiers ou le propriétaire des fonds suspects ;

- au deuxième alinéa du I de l'article L. 561-28 qui prévoit que la cellule de renseignement financier nationale informe le bâtonnier de l'ordre et le président de la compagnie qu'elle a transmis au procureur de la République la déclaration faite par l'avocat ou l'avoué ;

- au second alinéa du III de l'article L. 561-36 qui dispose notamment, que lorsqu'un avocat ou un avoué manque à une des obligations auxquelles il est tenu en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme, et que l'autorité de contrôle dont il relève engage une procédure à son encontre, elle en avise, non pas le procureur de la République, mais le procureur général près la cour d'appel.

Le III du présent article supprime la référence aux avoués dans les articles suivants :

- au f de l'article 279 du code général des impôts qui prévoit l'application d'un taux de TVA réduit sur les prestations pour lesquelles les avocats, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et les avoués sont indemnisés totalement ou partiellement par l'Etat dans le cadre de l'aide juridictionnelle ;

- au 1 du III de l'article 293 B du code général des impôts, qui dispose que les avocats, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et les avoués, bénéficient d'une franchise sur leur chiffre les dispensant de payer la TVA, qui s'élève à 41 500 euros.

L'Assemblée nationale a par ailleurs supprimé le 3° du I qui visait les articles L. 450-4 et L. 663-1 du code du commerce. Une telle suppression est légitime dans la mesure où l'article L. 450-4 vise une rédaction qui n'est aujourd'hui plus en vigueur, tandis que l'article L. 663-1 est rédigé d'une manière telle que la modification proposée ne peut s'y appliquer.

D'autres modifications de coordination sont cependant apparues nécessaires à votre commission sur amendement de votre rapporteur, pour remplacer la référence aux avoués par une référence aux avocats, y compris pour les textes qui mentionnaient encore les avoués près les tribunaux de grande instance :

- à l'article L. 621-12 du code monétaire et financier qui dispose notamment que le recours contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la visite des enquêteurs de l'Autorité des marchés financiers est dispensé du ministère d'avoué ;

- aux articles L. 5-9-1 et L. 32-5 du code des postes et communications électroniques qui définit les conditions dans lesquelles le ministre chargé des communications électroniques et l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes peuvent faire procéder, sur autorisation judiciaire à des visites et des saisies, et qui prévoit, notamment, que les recours formés contre cette autorisation ou les opérations menées sur son fondement ne nécessitent pas la constitution d'avoué ;

- à l'article L. 1421-2-1 du code de la santé publique qui définit les conditions dans lesquelles les agents des services de l'État exerçant une mission de contrôle dans le domaine sanitaire et médical peuvent procéder, sur autorisation judiciaire à des visites et des saisies, et qui prévoit, notamment, que les recours formés contre cette autorisation ou les opérations menées sur son fondement ne nécessitent pas la constitution d'avoué ;

- à l'article 41 du code des douanes de Mayotte qui reconnaît aux parties la possibilité de ne pas constituer avoué devant le président du tribunal supérieur d'appel dans deux situations : lorsqu'elles font appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance autorisant les services des douanes à procéder à des visites des lieux où des marchandises et documents se rapportant à des délits douaniers sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie ; ou lorsqu'elles le saisissent d'un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie en cause ;

- aux articles 90 et 1597 du code civil qui, pour le premier, dispense du ministère d'avoué près les tribunaux de grande instance les requêtes de déclaration judiciaire du décès d'une personne disparue et, pour le second, interdit aux avoués de devenir cessionnaires des procès, droits et actions litigieux de la compétence du tribunal dans le ressort duquel ils exercent leurs fonctions ;

- à l'articles 418 du code de procédure pénale qui dispense du ministère d'avoué la constitution de partie civile pour un délit, ainsi qu'à l'article 544 du même code qui permet au prévenu devant un tribunal de police ou une juridiction de proximité de se faire représenter par un avoué ;

- à l'article 10 de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance, qui dispense les parties formant un recours en récupération concernant la prestation spécifique dépendance du ministère d'avoué ;

- à l'article 34 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité qui définit les conditions dans lesquelles les fonctionnaires et agents habilités à cet effet par le ministre chargé de l'énergie ou par le ministre chargé de l'économie peuvent procéder, sur autorisation judiciaire à des visites et des saisies, et qui prévoit, notamment, que les recours formés contre cette autorisation ou les opérations menées sur son fondement ne nécessitent pas la constitution d'avoué ;

- à l'article 7-1 de la loi n° 2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales, qui définit les conditions dans lesquelles des visites et des saisies peuvent être organisés dans le domaine spatial, sur autorisation judiciaire, et qui prévoit, notamment, que les recours formés contre cette autorisation ou les opérations menées sur son fondement ne nécessitent pas la constitution d'avoué ;

Votre commission a adopté l'article 31 ainsi rédigé .

Article 32 (art. 7 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat ; art. 31 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit ; art. 1er, 2 et 5 de la loi du 25 nivôse an XIII contenant des mesures relatives au remboursement des cautionnements fournis par les agents de change, courtiers de commerce, etc. ; art. 1er de la loi du 6 ventôse an XIII additionnelle à celle du 25 nivôse an XIII ; art. 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances ; art. 1er, 2 et 4 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers ; art. 18 de la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 instituant l'ordre des géomètres-experts ; art. 1er de la loi n° 48-460 du 20 mars 1948 permettant aux femmes l'accession à diverses professions d'auxiliaire de justice ; art. 16, 31 et 38 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; art. 131 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ; art. L. 1424-30 et L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ; art. 860, 862, 865, 866 et 1711 du code général des impôts ; art. L. 314-8 du code des juridictions financières ; art. L. 212-11 du code de justice militaire ; art. L. 561-2 et L. 561-30 du code monétaire et financier ; art. L. 211-6, L. 211-8, L. 311-5, L. 311-6 et L. 312-3 du code de l'organisation judiciaire ; art. 56-3, 380-12, 388-1, 415, 417, 424, 502, 504 et 576 du code de procédure pénale ; art. L. 144-3 du code de la sécurité sociale) Suppression des références aux avoués

Cet article supprime les références aux avoués ou aux procédures qui les concernent dans les textes suivants :

- à l'article 7 de la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat qui définit les incompatibilités de fonction judiciaire des notaires ;

- à l'article 31 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit qui détermine le serment que les avocats et les avoués doivent prêter avant d'entrer en fonction ;

- aux articles 1er, 2 et 5 de la loi du 25 nivôse an XIII contenant des mesures relatives au remboursement des cautionnements fournis par les agents de change, courtiers de commerce, etc. qui fixent les privilèges grevant les cautionnements, entre autres, des avoués, et les conditions dans lesquelles ils peuvent les réclamer, notamment lorsqu'ils cessent leurs fonction ;

- à l'article 1er de la loi du 6 ventôse an XIII additionnelle à celle du 25 nivôse an XIII, qui fait référence à l'intitulé de cette dernière loi, qui contient, entre autres, le terme d'avoué. Il n'apparaît cependant pas nécessaire de supprimer cette mention, dans la mesure où cette référence n'emporte aucune conséquence sur le régime juridique applicable aux avoués. Votre rapporteur a proposé un amendement en ce sens à votre commission ;

- à l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances, qui fonde le droit des avoués à présenter leur successeur ;

- aux articles 1er, 2 et 4 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers qui fixent les règles de prescription applicable en cette matière ;

- à l'article art. 18 de la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 instituant l'ordre des géomètres-experts qui prévoit la mise à disposition du public du tableau des géomètres-experts et des sociétés de géomètres-experts, notamment dans les études d'avoués ;

- à l'article 1 er de la loi n° 48-460 du 20 mars 1948 permettant aux femmes l'accession à diverses professions d'auxiliaire de justice, qui a ouvert aux femmes, entre autres, la profession d'avoué près la cour d'appel ;

- aux articles 16, 31 et 38 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique qui règlent la participation des avoués au système d'aide juridictionnel ;

- aux articles L. 1424-30 et L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales qui donnent compétence respectivement au président du conseil d'administration d'un service départemental d'incendie et de secours et au maire pour fixer les rémunérations, les frais et les honoraires, entre autres, des avoués auxquels il est fait appel ;

- dans le code général des impôts, à l'article 860 qui impose à certains officiers ministériels d'établir en double exemplaire des extraits d'actes soumis à publicité foncière, à l'article 862, qui organise les délais dans lesquels les actes concernés peuvent être rédigés, à l'article 865, qui fixe les modalités de présentation des états de frais qui incluent le versement de droits payés au Trésor public, à l'article 866, qui exempte les huissiers d'avoir à établir d'établir deux originaux de leurs actes ou procès-verbaux lorsqu'il s'agit, entre autres, d'actes d'avoués à avoués. En revanche, la suppression prévue par b) du 1° du présent article au sujet de l'article 1711 du code général des impôts paraît erronée dans la mesure où elle vise l'intitulé de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers, qui n'a pas lieu d'être modifié. Votre rapporteur a en conséquence proposé à proposer à votre commission de supprimer par amendement cette disposition ;

- à l'article L. 314-8 du code des juridictions financières qui définit les conditions dans lesquelles l'individu renvoyé devant la cour de discipline budgétaire et financière peut prendre connaissance, directement ou par son mandataire, du dossier de l'affaire. Cependant cette disposition ayant une nature réglementaire, la suppression proposée ne relève pas de la loi. Votre rapporteur a en conséquence proposé à votre commission de la supprimer par amendement ;

- à l'article L. 212-11 du code de justice militaire qui règle les conditions de perquisition dans le cabinet de certaines professions, dont les avoués ;

- à l'article L. 561-2 du code monétaire et financier qui fixe la liste des professionnels assujetti aux obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, et à l'article L. 561-30 du même code, qui prévoit que lorsqu'elles ont connaissance de faits susceptibles d'être liés à une opération de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, les instances représentatives des avoués et des avocats en informe le procureur général près la cour d'appel. Votre rapporteur a proposé à votre commission de compléter la suppression prévue à l'article L. 561-30 précité par la suppression de la référence au président de la chambre de la compagnie des avoués ;

- dans le code de l'organisation judiciaire, aux articles L. 211-6 et L. 211-8 qui prévoient la compétence du tribunal de grande instance respectivement pour connaître des demandes relatives aux frais, émoluments et débours des auxiliaires de justice et des officiers publics ou ministériels et pour faire fonction de juridiction disciplinaire, aux articles L. 311-5 et L. 311-6 qui déterminent la compétence de la cour d'appel pour connaître des recours contre, respectivement, les décisions la chambre de discipline et les élections des membres des organismes professionnels des intéressés, ainsi qu'à l'article L. 312-3 qui prévoit qu'après les avocats, les avoués, selon la date de leur réception dans cette fonction, peuvent être appelés à suppléer les conseillers pour compléter la cour d'appel ;

- dans le code de procédure pénale, à l'article art. 56-3 qui règle les conditions de perquisition dans le cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier, aux articles 380-12 d'une part et 502 et 504, d'autre part, qui définissent les formalités de la déclaration d'appel contre une décision, respectivement, de la cour d'assise ou du tribunal correctionnel, à l'article 388-1 sur l'obligation, pour les assureurs appelé à garantir le dommage dont il est question dans l'affaire, à se faire représenter devant le tribunal correctionnel par un avoué ou un avocat, s'ils décident d'intervenir dans l'instance ou s'ils sont mis en cause, aux articles 415, 417, 424, du code de procédure pénale qui consacrent la possibilité pour la partie civile ou le prévenu à se faire représenter par un avoué ou un avocat devant le tribunal correctionnel ;

- à l'article L. 144-3 du code de la sécurité sociale qui prévoit notamment la possibilité pour les parties de se faire assister ou représenter par un avoué devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;

Votre commission a adopté, en outre, des amendements de votre rapporteur tendant à corriger ou compléter les coordinations textuelles proposées :

- à l'article L. 663-1 du code du commerce qui fixe les conditions dans lesquels le trésor public fait l'avance des frais de procédure et notamment des débours et émoluments dus aux avoués pour des contentieux engageant des entreprises en difficulté ;

- à l'article L. 622-5 du code de la sécurité sociale qui énumère l'ensemble des professions libérales ;

- à l'article L. 122-20 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie qui prévoit notamment que le maire agissant sur délégation du conseil municipal peut fixer les frais et honoraires, entre autres, des avoués ;

- à l'article 10 de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs qui prévoit que, entre autres, les avoués peuvent obtenir du procureur de la République communication, par extrait, d'une déclaration aux fins de sauvegarde de justice, s'ils justifient de l'utilisation de la communication pour un acte de leurs fonctions.

- par coordination avec les modifications proposées à l'article 31 du présent texte, des modifications de conséquences ont été adoptées à l'article 131 du code du domaine public fluvial et à l'article 576 du code de procédure pénale ;

La commission a adopté l'article 32 ainsi rédigé .

Article 33 (art. 93 à 95 de la loi du 27 ventôse an VIII sur l'organisation des tribunaux ; art. 27 et 32 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit ; art. 2, 3, 5, 6 et 7 du décret du 2 juillet 1812 sur la plaidoirie dans les cours d'appel et dans les tribunaux de grande instance ; art. 5 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers ; art. 10 de la loi du 22 août 1929 sur l'organisation des tribunaux de grande instance ; ordonnance n° 45-2591 du 2 novembre 1945 relative au statut des avoués ; loi n° 57-1420 du 31 décembre 1957 sur le recouvrement des honoraires d'avocat ; art. 82 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ; art. 55 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; art. L. 311-4 du code de l'organisation judiciaire) Abrogation des dispositions contraires au présent texte

Cet article prévoit l'abrogation générale de l'ensemble des dispositions contraires au présent texte, dont, plus particulièrement, les suivantes :

- les articles 93 à 95 de la loi du 27 ventôse an VIII sur l'organisation des tribunaux qui organisent l'institution des avoués pour chaque niveau de juridiction, la détermination de leur nombre et leur nomination par l'autorité publique ;

- les articles 27 et 32 de la loi du 22 ventôse an XII relative aux écoles de droit sur, respectivement, la possibilité de plaider des avoués ou les conditions de leur nomination en tant que juge ;

- les articles 2, 3, 5, 6 et 7 du décret du 2 juillet 1812 sur la plaidoirie dans les cours d'appel et dans les tribunaux de grande instance qui prévoient certains cas dans lesquels les avoués plaident à la place des avocats ;

- l'article 5 de la loi du 24 décembre 1897 relative au recouvrement des frais dus aux notaires, avoués et huissiers, qui étend aux avoués les règles de recouvrement prévues pour les autres officiers ministériels ;

- l'ordonnance n° 45-2591 du 2 novembre 1945 relative au statut des avoués ;

- la loi n° 57-1420 du 31 décembre 1957 sur le recouvrement des honoraires d'avocat, qui s'applique aux avoués et a cessé de recevoir application pour les avocats en vertu de l'article 76 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée ;

- l'article 82 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée, qui a organisé la suppression des avoués près les tribunaux de grande instance ou les cours d'appel dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, et prévu qu'ils seraient remplacés par les avocats, rémunérés au tarif des avoués près les cours d'appel exerçant en métropole. Votre rapporteur tient à souligner que cette abrogation, qui est conforme à l'objectif poursuivi par le texte qui consiste à supprimer la rémunération tarifaire pour l'appel modifiera nécessairement la pratique suivie en la matière par les avocats des départements d'outre-mer ;

- le 8° de l'article 55 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 qui prévoit, dans les départements sièges d'une cour d'appel, la participation, au conseil départemental de l'accès au droit, de la chambre de discipline des avoués près cette cour ;

- le 1° de l'article L. 311-4 du code de l'organisation judiciaire qui dispose que la cour d'appel connaît des recours contre les décisions de la chambre de la compagnie des avoués qui concerne le stage des avoués.

Votre rapporteur tient à souligner qu'il est préférable pour la sécurité juridique et le bon accès au droit que les abrogations visent expressément les textes concernés et, en conséquence, il juge nécessaire de privilégier un examen exhaustif de la législation.

En tout état de cause, les dispositions qui échapperaient à cet examen attentif ne pourraient être appliquées dans la mesure où elles seraient contraires à la présente loi.

La disposition générale d'abrogation n'est donc ni nécessaire, ni pertinente, ce pourquoi votre commission l'a supprimée.

Elle a par ailleurs ajouté à la liste des abrogations celle du septième alinéa de l'article L. 144-3 du code de la sécurité sociale qui prévoit que les parties peuvent également se faire assister ou représenter par un avoué devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, ainsi que celle du deuxième alinéa de l'article 10 de la loi du 22 août 1929 sur l'organisation des tribunaux de grande instance qui prévoit porte sur le droit de plaider au civil des avoués près ces tribunaux.

La commission a adopté l'article 33 ainsi rédigé .

Article 34 Entrée en vigueur différée de la suppression de la profession d'avoué

Cet article a pour objet de reporter l'entrée en vigueur du chapitre Ier de la présente loi qui organise la disparition de la profession d'avoué au 1 er janvier 2011. Les dispositions de coordination textuelle du chapitre V prendraient effet à la même date.

Votre commission a adopté l'article 34 sans modification .

*

* *

Votre commission a adopté le projet de loi ainsi rédigé .

EXAMEN EN COMMISSION MARDI 8 DÉCEMBRE 2009

_______

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Patrice Gélard et a établi le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 16 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel.

M. Patrice Gélard , rapporteur, a indiqué que plusieurs travaux de réflexion avaient conduit le Gouvernement à soumettre au Parlement une réforme organisant la disparition à compter du 1er janvier 2011 de la profession d'avoué près les cours d'appel, dont l'examen se révélait difficile, en raison des enjeux humains d'une telle entreprise. Il a indiqué que la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques avait supprimé la profession d'avoué près les tribunaux de grande instance, mais que le Parlement avait maintenu, lors de l'examen de ce texte, les avoués près les cours d'appel. Il a rappelé que le rapport de la commission pour la libération de la croissance française, présidée par M. Jacques Attali, proposait la suppression de la profession d'avoué près les cours d'appel et la possibilité pour les avoués de devenir avocats, et que le rapport de la commission sur les professions du droit, présidée par Me Jean-Michel Darrois, recommandait la fusion des professions d'avocat et d'avoué près la cour.

Il a indiqué que la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur affectait également la réglementation applicable aux avoués près les cours d'appel. En effet, la profession d'avoué ne peut être regardée comme participant à l'exercice de l'autorité publique conformément à l'article 45 du traité instituant la Communauté européenne, ce qui lui aurait permis d'échapper au champ d'application de la directive. Elle ne figure pas non plus au nombre des professions explicitement exclues de ce champ d'application, comme celles de notaire et d'huissier. En conséquence, la réglementation de la profession d'avoué n'est pas compatible avec les dispositions de la directive services sur la liberté d'établissement des prestataires.

Ainsi, le régime actuel d'autorisation n'est pas compatible avec les exigences de la directive, en particulier parce qu'il limite le nombre des offices. En vertu de l'article 93 de la loi du 27 ventôse an VIII, il est établi près de chaque cour d'appel un nombre fixe d'offices d'avoués. Toute création ou transfert d'office est prononcée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice (articles 12-2 et suivants du décret du 19 décembre 1945). Par ailleurs, le système des offices aboutit à réserver la possibilité d'être autorisé à exercer l'activité d'avoué aux seuls professionnels qui sont présentés à l'agrément du garde des sceaux par les professionnels déjà autorisés, soit qu'ils souhaitent quitter la profession, soit qu'ils souhaitent céder un certain nombre de parts pour trouver un nouvel associé, et qui reversent à leur prédécesseur la valeur du droit de présentation. Un tel mécanisme est incompatible avec les exigences des articles 12 et 13 de la directive, relatifs à la sélection entre plusieurs candidats et aux procédures d'autorisation.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a souligné que pour respecter les prescriptions de la directive services, la disparition de la profession d'avoué n'était pas la seule option envisageable, l'étude d'impact jointe au projet de loi déposé à l'Assemblée nationale évoquant même une option alternative, qui aurait consisté à créer des avocats spécialisés dans la procédure d'appel, sur le modèle en vigueur dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Il a expliqué que le Gouvernement avait retenu l'option de la disparition de la profession, afin de simplifier l'accès à la justice d'appel et parce que les avoués ne s'étaient pas suffisamment mobilisés en amont de la réforme pour promouvoir un système fondé sur des avocats spécialisés.

Estimant que l'idée selon laquelle la réforme permettrait de simplifier l'accès à la justice d'appel, en n'obligeant pas le justiciable à recourir à un auxiliaire de justice spécialisé, était fondée, il a jugé que les arguments avancés par le Gouvernement quant à la baisse du coût de la justice d'appel étaient beaucoup moins convaincants. Il a relevé que le financement de la réforme s'appuierait sur la création d'un droit de 330 euros, dû par tout appelant ne bénéficiant pas de l'aide juridictionnelle, dans les procédures avec représentation obligatoire. Précisant que ce droit devait être créé au sein du projet de loi de finances rectificative pour 2009 et que le coût moyen d'un appel avec recours à un avoué atteignait aujourd'hui 900 euros, il a estimé que le coût moyen d'une procédure d'appel serait au moins aussi élevé après la réforme. Si le barème des avoués conduit parfois le justiciable à payer des émoluments très élevés, déterminés en fonction de l'intérêt du litige, les avocats chercheront sans doute à percevoir des honoraires, en dehors de tout barème, pour les procédures d'appel qu'ils mettront en oeuvre.

Evoquant ensuite les conséquences de la réforme sur le fonctionnement des cours d'appel, M. Patrice Gélard, rapporteur, a indiqué que les cours n'auraient plus pour interlocuteurs 434 avoués, mais plus de 50 000 avocats. Il a souligné que la réforme intervenait au moment où la Chancellerie s'apprêtait à publier un décret réformant la procédure d'appel et rendant irrecevables, à compter du 1er janvier 2011, les déclarations d'appel et les constitutions d'intimés qui ne seraient pas transmises à la cour par voie électronique, pour les appels formés à l'encontre des décisions rendues à compter de cette date. La sanction d'irrecevabilité suppose que les professionnels, avoués et avocats, ainsi que les cours d'appel, disposent des équipements informatiques nécessaires et soient en mesure de les utiliser dès le 1er janvier 2011.

Le rapporteur a fait savoir que les premiers présidents de cour d'appel et les conseillers de la mise en état qu'il avait entendus estimaient peu probable que les 28 cours d'appel et l'ensemble des avocats soient prêts à respecter dès cette date les nouvelles contraintes définies par le décret réformant la procédure civile. Les avocats devront en particulier s'équiper du matériel et des logiciels nécessaires. M. Patrice Gélard, rapporteur, a estimé que la réforme pourrait donc entraîner des dysfonctionnements dans les cours d'appel pendant quelques mois.

Rappelant que les avoués accéderaient automatiquement à la profession d'avocat, sauf s'ils préféraient rejoindre une autre des professions judiciaires et juridiques, telle que notaire, huissier, ou avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, ou encore exercer une autre profession en intégrant par exemple la magistrature, il a estimé que la situation du personnel des avoués était la plus préoccupante au regard de la réforme. La disparition de la profession d'avoué près les cours d'appel devrait entraîner le licenciement d'une part importante des 1 650 salariés des offices d'avoué, dont près de 70 % ont entre onze et trente ans d'ancienneté. Par ailleurs, la loi de finances pour 2010 prévoit la création de 190 emplois temps plein au milieu de l'année 2010, afin de permettre le recrutement, parmi les salariés des études d'avoué, de 380 personnes qui seront affectées aux greffes des juridictions. Environ 170 collaborateurs juristes, diplômés, bénéficieraient de passerelles vers d'autres professions et pourront en toute hypothèse, grâce à leurs qualifications, se reconvertir plus facilement. Toutefois, une majorité de salariés n'auront, au moment de leur licenciement, aucune perspective immédiate d'emploi.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a indiqué que la proportion de salariés qui resteront auprès de leur ancien employeur, devenu avocat ou accédant à une autre profession juridique, était difficile à évaluer, ces perspectives de recrutement apparaissant toutefois limitées, chaque avocat employant en moyenne moins d'un salarié, alors que chaque avoué en emploie 4 ou 5. Précisant que les améliorations adoptées par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, n'étaient pas aussi favorables que le dispositif demandé par les salariés, sauf à l'égard de ceux ayant au moins 37 ans d'ancienneté soit, selon les données fournies par la Chancellerie, 18 personnes, il a expliqué avoir demandé au Gouvernement de porter l'indemnité des salariés à un mois de salaire par année d'ancienneté, afin d'indemniser équitablement le plus grand nombre de salariés.

Relevant que le projet de loi ne comportait aucun dispositif visant à inciter les salariés à se reconvertir par eux-mêmes, sans attendre le bénéfice de l'indemnité, il a jugé indispensable de mettre en place une indemnité de reconversion pour les salariés qui démissionneraient parce qu'ils ont trouvé un nouvel emploi, puisque tous devraient connaître une baisse de leurs revenus.

Expliquant que les avoués se trouvaient dans des situations très variables, il a estimé que les plus anciens, proches de l'âge de la retraite, seraient ceux pour lesquels la disparition des offices serait le moins préjudiciable. Il a déclaré que le projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, qui prévoyait une indemnisation de chaque avoué à hauteur de 66 % de la valeur de son office, constituait néanmoins une spoliation, attenuée par des amendements du Gouvernement qui ont porté ce taux à 100 % de la valeur de l'office.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a indiqué que le versement de l'indemnité accordée aux avoués pourrait donner lieu à l'application d'un impôt sur les plus-values, quelques avoués exerçant au sein de sociétés étant en outre susceptibles de voir leur indemnité soumise à l'impôt sur les sociétés. Considérant que les jeunes avoués connaîtraient les situations les plus graves, il a souligné :

- qu'un jeune avoué endetté risquait de ne percevoir quasiment aucune indemnité, puisque celle-ci serait essentiellement utilisée à rembourser le capital restant dû pour l'achat de son office ;

- qu'un avoué détenant seulement des parts sociales en industrie au sein d'une société ne percevrait aucune indemnité et se retrouverait sans clientèle particulière dans le cadre de la nouvelle profession d'avocat, s'il choisissait de la rejoindre.

Indiquant que ces constats le conduisaient à être en désaccord avec les dispositions relatives à l'indemnisation figurant dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, il a regretté que le Gouvernement n'ait avancé aucune proposition d'amélioration.

Relevant que la réforme présentait en outre des difficultés pour l'équilibre des caisses de retraites concernées, la Caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels, la Caisse nationale des barreaux français et la Caisse de retraite du personnel des avocats, il a précisé que celle-ci gérait les régimes d'assurance maladie et décès et de retraite complémentaire des salariés d'avoués et des salariés d'avocats.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a expliqué que le projet de loi prévoyait une période transitoire d'un an, du 1er janvier 2010 au 1er janvier 2011, au cours de laquelle les avoués pourraient exercer également la profession d'avocat, afin de se constituer une clientèle dans cette nouvelle profession. Estimant que cette période transitoire était nécessaire pour permettre aux avoués de se préparer à changer de profession, il a observé que les avocats y étaient opposés, parce qu'elle constituerait une distorsion de concurrence.

Il a indiqué que, dans un objectif de cohérence, il avait déposé des amendements tendant à supprimer le tarif de postulation devant le tribunal de grande instance et le monopole géographique de la postulation devant le tribunal de grande instance dans le ressort de chaque cour d'appel, ce qui permettrait aux avocats de postuler devant tous les tribunaux de grande instance dépendant de la cour d'appel dans le ressort de laquelle ils ont établi leur résidence professionnelle. Considérant que cette évolution s'inscrivait dans la logique de simplification de l'accès à la justice et paraissait s'imposer, puisque tous les avocats du ressort d'une cour d'appel pourraient désormais postuler devant cette cour, il a souligné qu'elle suscitait cependant une vive opposition de la profession d'avocat. Il a rappelé que la commission sur les professions du droit, présidée par Me Jean-Michel Darrois, préconisait la suppression du monopole territorial de la postulation des avocats à l'horizon du 31 décembre 2014.

M. Patrice Gélard, rapporteur, s'est dit prêt à retirer ses amendements visant à supprimer le monopole territorial de la postulation devant le tribunal de grande instance dans le ressort d'une cour d'appel, si la commission se prononçait pour le maintien d'une période transitoire pendant laquelle les avoués pourraient également exercer la profession d'avocat dans les mois précédant la disparition de leur profession.

M. Jean-Pierre Michel a souligné la qualité des travaux du rapporteur. Il a indiqué que le groupe socialiste, après avoir assisté à une partie des auditions du rapporteur et entendu lui-même un certain nombre de personnes, se ralliait aux arguments qui venaient d'être exposés. Il a fait valoir que son groupe avait décidé de ne pas déposer de motion de procédure (exception d'irrecevabilité) à l'occasion de l'examen du texte en séance publique mais que le Conseil constitutionnel serait saisi de la conformité à la Constitution de ce projet de loi, notamment de ses dispositions relatives à l'indemnisation des avoués et de leurs personnels, qui ne lui semblent pas conformes au principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques.

Il a considéré que ce projet de loi n'était pas prêt à être adopté en l'état. En effet, il a souligné que seules quelques cours d'appel disposaient des moyens nécessaires pour faire face à la généralisation de la dématérialisation et que l'entrée en vigueur au 1er janvier 2011 de l'obligation, sous peine d'irrecevabilité, de transmettre les actes de procédure à la cour d'appel par voie électronique entraînerait inévitablement une désorganisation qui se traduirait par des nullités de procédures d'appel dommageables pour le justiciable.

En ce qui concerne la suppression de la profession d'avoué, il a estimé que l'indemnisation offerte à ces derniers devait couvrir l'intégralité du préjudice subi, conformément à la jurisprudence administrative relative à la responsabilité du fait des lois.

S'agissant des solutions proposées aux personnels des offices d'avoués, il s'est étonné que des concours leur soient d'ores et déjà réservés alors que la profession d'avoué n'est pas encore supprimée, plaçant de fait ces personnels dans une situation d'incertitude. En outre, il a souligné que ces concours ouvraient droit, pour la plupart, à des postes de contractuels, regrettant qu'aucun emploi pérenne ne leur soit proposé. Enfin, il a considéré que les collaborateurs d'avoués devaient être indemnisés en totalité du préjudice causé par la disparition de leur emploi et que cette indemnisation devait également concerner les personnels qui décident de démissionner sans attendre l'entrée en vigueur de la réforme.

En outre, il a observé que les ressources nécessaires à la mise en oeuvre du projet de loi étaient définies dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009 et s'est interrogé sur la conformité à la loi organique relative aux lois de finances de la nouvelle taxe destinée à alimenter le fonds d'indemnisation chargé du paiement des indemnités, estimant qu'une taxe nouvelle ne pouvait être créée qu'en cas de mission nouvelle et non en cas de suppression d'une profession. Il a conclu son propos en observant que les finalités du projet de loi n'apparaissaient pas clairement définies.

M. François Zocchetto a estimé que le projet de loi soulevait, en l'état, deux difficultés principales. En ce qui concerne la date d'entrée en vigueur de la réforme, il a fait savoir que les avocats ne seraient pas prêts à assumer, dans les délais impartis, l'ensemble des procédures d'appel, attirant l'attention notamment sur le fait que de nombreux cabinets n'étaient pas équipés des moyens informatiques nécessaires. Pour cette raison, il a approuvé la démarche du rapporteur tendant à maintenir une entrée en vigueur de la réforme en 2011, considérant qu'un tel délai aurait une vertu incitative. Par ailleurs, il a estimé qu'il n'était pas possible d'aborder la réforme de la procédure d'appel sans évoquer celle de la postulation devant les tribunaux de grande instance, considérant qu'il aurait été souhaitable d'examiner la réforme dans son ensemble. Il a indiqué qu'il voterait en faveur de la réforme portée par le projet de loi, qui lui paraît inéluctable. Il a fait valoir que les jeunes avoués, qui présentent souvent un haut niveau de qualification, feraient d'excellents avocats. En revanche, il a observé avec regret que les personnels des offices d'avoués, qui disposent d'une expérience précieuse et jouissent à l'heure actuelle de conditions de travail favorables, seraient inévitablement touchés par les effets de cette réforme.

M. Alain Anziani a remercié le rapporteur d'avoir renoncé à ses amendements tendant à réformer le monopole territorial de la postulation. Il a en effet observé que supprimer ce monopole dans le ressort de chaque cour d'appel créerait le risque de marginaliser les barreaux dépendant de tribunaux de grande instance « périphériques ». De façon plus générale, il a considéré qu'une réforme d'une telle ampleur nécessitait de s'interroger au préalable sur l'organisation territoriale de la justice. Il a relevé que la période de transition prévue par le projet de loi placerait les avocats en situation de concurrence avec les avoués. Observant que la plupart des personnels des offices d'avoués souhaitaient que cette période de transition soit la plus brève possible, il a estimé indispensable de définir au plus vite une date précise d'entrée en vigueur de la réforme. A ce sujet, il a considéré qu'il serait préférable de reporter l'entrée en vigueur de la loi plutôt que de prévoir une période de transition aux effets incertains. En outre, il a noté que ni les juridictions, ni les avocats ne disposaient des moyens informatiques nécessaires pour mettre en oeuvre dans les délais impartis la réforme relative à la dématérialisation des actes de procédure. Enfin, il a estimé intéressantes les propositions formulées par le rapporteur concernant l'indemnisation des avoués et de leur personnel.

M. René Garrec a souligné la qualité du travail accompli par le rapporteur concernant les collaborateurs d'avoués, qui se distinguent par leur expérience et leur compétence. Il s'est étonné des dispositions du projet de loi permettant à ces personnels d'accéder à des postes de contractuels de la fonction publique par le biais de concours, rappelant que, en droit public français, un concours ouvre l'accès au statut de fonctionnaire, et non de contractuel. En outre, il a observé que ces concours réservés ne seraient ouverts que pendant un an et il s'est interrogé sur le devenir des personnels d'avoués qui auraient échoué à ces concours ou ne s'y seraient pas présentés. De façon générale, il a estimé qu'il aurait été préférable de prévoir le recrutement de ces personnels par des avocats, rappelant que ces derniers sont à l'heure actuelle les principaux clients des études d'avoués. Enfin, il a estimé que la période transitoire d'environ six mois risquait d'être trop courte, considérant qu'il convenait d'instaurer une période d'expérimentation de la réforme d'une durée d'un an.

M. François Pillet a approuvé le rapporteur d'avoir renoncé à ses amendements relatifs à la postulation. Il a rappelé que celle-ci donnait droit à l'application d'un tarif, déterminé par l'Etat, qui entre dans les dépens, lesquels sont à la charge de la partie perdante. Il a considéré que la suppression du monopole territorial de la postulation au sein des cours d'appel aurait des conséquences importantes et se traduirait notamment par une concentration importante des cabinets d'avocats. Estimant, en outre, qu'une telle réforme impliquait de s'interroger sur l'imputation des frais de justice lorsque le justiciable est contraint de recourir à la justice pour faire valoir ses droits, il a souhaité que ces questions soient examinées dans le cadre d'une réflexion globale. Par ailleurs, il a salué le travail accompli par le rapporteur s'agissant de l'indemnisation des avoués et de leurs salariés. Il a observé que la réforme de 1971 avait été particulièrement favorable à ces derniers et que la réforme portée par le projet de loi, même améliorée des amendements du rapporteur, ne créerait pas d'effet d'aubaine.

M. Jean-Jacques Hyest , président, estimant que la réforme de la représentation devant les cours d'appel devait être guidée avant tout par l'intérêt général et par le souci des justiciables, a attiré l'attention sur le fait que la justice ne devait pas être considérée comme un marché. Il a en outre considéré qu'une partie du malaise suscité par cette réforme trouvait sa source dans la crise d'identité que traverse la profession d'avocat à l'heure actuelle. Il a affirmé qu'une bonne réforme ne devait être motivée que par des considérations d'intérêt général.

Examinant l'ensemble des amendements, la commission s'est ainsi prononcée :

Article premier Intégration des avoués à la profession d'avocat

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Béteille

1

Suppression de l'inscription dans la loi d'une spécialisation des avocats en procédure d'appel

Rejeté

M.  Béteille

2

Rappel de la compétence du conseil national des barreaux pour la définition des conditions d'obtention des spécialisations des avocats

Rejeté

Mme Des Esgaulx

15

Rappel de la compétence du conseil national des barreaux pour la définition des conditions d'obtention des spécialisations des avocats

Retiré

Article 3 Extension de l'activité des avocats à la postulation devant les cours d'appel

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

330

Suppression du monopole géographique de la postulation devant les tribunaux de grande instance dans le ressort de chaque cour d'appel

Retiré

Article 4 Extension de l'activité des avocats à la postulation devant les cours d'appel

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

31

Coordination avec l'amendement n° 30

Retiré

M. Patrice Gélard , rapporteur, rappelant que le projet de loi supprimait le tarif de la postulation en appel, a expliqué que l'amendement n° 18, présenté par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues, tendait à maintenir ce tarif dans un objectif de protection de l'accès au droit, en limitant le coût de l'accès de la justice d'appel. Indiquant qu'il avait lui-même proposé la suppression du tarif de postulation devant le tribunal de grande instance, il a jugé que le maintien du tarif de postulation en appel ne paraissait pas constituer le moyen adéquat pour assurer un coût limité à la justice d'appel. M. Jacques Mézard , estimant que le tarif de postulation devant le tribunal de grande instance et le tarif de postulation en appel étaient très différents, a rappelé que le premier n'avait été réévalué qu'une fois depuis 1960, à hauteur de 20 % en 1973.

Article 5 Limitation du tarif de postulation aux procédures devant le tribunal de grande instance

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

32

Suppression du tarif de postulation devant le tribunal de grande instance

Retiré

MM. Détraigne et plusieurs de ses collègues

18

Suppression de l'article

Rejeté

Article 7 Désignation dans le ressort de chaque cour d'appel d'un bâtonnier représentant les barreaux pour traiter des questions d'intérêt commun

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

33

Précision rédactionnelle

Adopté

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

24

Désignation d'un ancien président d e compagnie d'avoué pour traiter avec le bâtonnier délégué des questions intéressant la cour d'appel

Rejeté

Article 8 Régimes de retraites de base et complémentaire et régime invalidité-décès des avoués

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

34

Précision relative aux obligations des caisses de retraite des avoués et des avocats à l'égard des anciens avoués

Adopté

M. Béteille

3

Précision relative aux obligations des caisses de retraite des avoués et des avocats à l'égard des anciens avoués

Satisfait

M. Béteille

4

Précision relative aux obligations des caisses de retraite des avoués et des avocats à l'égard des anciens avoués

Satisfait

Mme Des Esgaulx

16

Précision relative aux obligations des caisses de retraite des avoués et des avocats à l'égard des anciens avoués

Satisfait

Article 9 Convention collective réglant les rapports entre les anciens avoués et leur personnel

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés

6

Renforcement des garanties offertes aux salariés des avoués concernant l'application de leur convention collective

Adopté

Article 10 Affiliation du personnel salarié de la nouvelle profession d'avocat à la caisse de retraite du personnel des avocats

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés

7

Renforcement des garanties offertes aux salariés des avoués pour la conservation du bénéfice de leurs cotisations de retraite

Adopté

Article 12 Coordination

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

35

Précision rédactionnelle

Adopté

M. Patrice Gélard , rapporteur, a expliqué que l'amendement n° 36 rectifié visait à confier au juge de l'expropriation la détermination du montant de l'indemnisation des avoués, retenant ainsi le principe selon lequel la suppression du droit de présentation, par les avoués, de leur successeur, la suppression de leurs offices et la suppression de leur monopole constituent une atteinte au droit de propriété.

Il a souligné que la suppression de la profession d'avoué près les cours d'appel se distinguait de la suppression des avoués près les tribunaux de grande instance ou de la suppression du monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires. Dans ces derniers cas, les avoués et les commissaires-priseurs avaient gardé leur activité et leur clientèle, dans un cadre devenu concurrentiel. Les avoués près les cours d'appel perdront en revanche leur activité propre et leur clientèle qui leur vient des avocats. Cette situation peut entraîner une nouvelle appréciation des fondements de l'indemnisation des avoués près les cours.

Rappelant que l'indemnisation des commissaires-priseurs se fondait sur l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, relatif à l'égalité devant les charges publiques, M. Patrice Gélard , rapporteur, a estimé que l'indemnisation des avoués près les cours pourrait se fonder sur l'article 17 de cette Déclaration, aux termes duquel « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ».

Il a considéré que le projet de loi pouvait donc prévoir le versement aux avoués d'une indemnité dont le montant doit être fixé par le juge de l'expropriation, en application des règles applicables en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Il a expliqué que, sur le fondement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme faisant référence à l'article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, cet amendement prévoyait que le juge déterminerait une indemnité spécifique allouée aux avoués détenant seulement des parts sociales en industrie.

Soulignant que cette jurisprudence faisait partie du droit existant, il a indiqué que la Cour européenne des droits de l'homme, dans son arrêt Lallement contre France du 12 juin 2003, avait consacré l'obligation pour l'Etat d'indemniser la perte de l'outil de travail et les préjudices matériels qui en résultent, et il a estimé que l'outil de travail des avoués était constitué par l'office qu'ils avaient acquis et duquel ils tiraient leurs revenus.

Relevant que la Cour européenne des droits de l'homme avait jugé que l'expropriation de l'outil de travail imposait une indemnisation spécifique de cette perte spécifique, il a indiqué que la Cour avait constaté que l'expropriation litigieuse avait eu pour effet d'empêcher le requérant de poursuivre de manière rentable son activité. L'intéressé ayant perdu son « outil de travail » sans indemnisation appropriée, la Cour a conclu à la violation de l'article premier du Protocole n° 1. Elle a en outre souligné que le préjudice causé spécifiquement par cette violation de la Convention était susceptible de justifier l'allocation d'une indemnité.

M. Patrice Gélard , rapporteur, observant que le projet de loi ne prévoyait aucune indemnisation pour les avoués détenant des parts sociales en industrie, a considéré indispensable, pour assurer le respect du droit, que le juge leur alloue une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de la loi.

Il a indiqué que l'adoption de cet amendement devrait entraîner des mesures de coordination, notamment à l'article 19 du projet de loi, qui seraient renvoyées à l'examen du texte en séance publique.

Article 13 Modalités de calcul de l'indemnisation versée aux avoués

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

36 Rect.

Compétence du juge de l'expropriation pour déterminer le montant de l'indemnité des avoués et allouer une indemnité aux avoués détenant des parts sociales en industrie

Adopté

M. Gélard, rapporteur

38

Majoration de 20 % au plus des indemnités versées aux avoués

Sans objet

M. Gélard, rapporteur

37

Exonération des charges sociales patronales pour l'emploi par d'anciens avoués, dans le cadre de leur nouvelle activité, de salariés qu'ils employaient en tant qu'avoués

Adopté

M. Gélard, rapporteur

39

Exonération fiscale des plus-values réalisées dans le cadre du versement de l'indemnité accordée aux avoués

Adopté

Article additionnel après l'article 13

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

19

Exonération d'impôt, de prélèvements sociaux et de cotisations sociales des plus-values réalisées dans le cadre du versement de l'indemnité accordée aux avoués

Satisfait

Article 14 Reconnaissance du caractère économique du licenciement des salariés des avoués - Majoration des indemnités de licenciement versées à cette occasion

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés

9

Suppression de la limitation dans le temps de la période de prise en charge par l'Etat des indemnités majorées de licenciement de salariés d'avoués

Rejeté

Mme Des Esgaulx et M. Couderc

14 rect.

Attribution aux salariés d'avoués licenciés d'une indemnité s'élevant à 1 mois de salaire par année d'ancienneté dans la profession

Adopté avec modification

M. Gélard, rapporteur

29 rect.

Versement direct par le fonds d'indemnisation des indemnités de licenciement majorées

Adopté avec modification

M. Gélard, rapporteur

40

Versement aux salariés informés de leur probable licenciement et engageant leur propre reconversion, d'une indemnité exceptionnelle de reconversion

Adopté

Article additionnel après l'article 14

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

58

Exonération de charges sociales patronales pour les salariés des anciens avoués recrutés par d'autres professions judiciaires et juridiques

Adopté

Article 15 Remboursement aux intéressés des sommes versées pour les licenciements

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

25

Versement direct par le fonds d'indemnisation des indemnités de licenciement

Satisfait

M. Gélard, rapporteur

41

Coordination avec l'amendement n° 29 rectifié

Adopté

M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés

10

Versement sans délai des indemnités de licenciement par l'employeur à son salarié

Satisfait

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

20

Paiement direct par le fonds d'indemnisation des indemnités dues aux salariés

Satisfait

Article 16 Organisation et fonctionnement de la commission chargée de statuer sur les demandes de versement ou de remboursement d'indemnités

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

42

Coordination

Adopté

M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés

11

Suppression du délai dans lequel l'avoué doit former sa demande d'indemnisation

Rejeté

Article 17 Possibilité d'obtenir le versement d'un acompte ou le remboursement du capital restant dû sur un prêt pendant la période transitoire

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

43

Précision rédactionnelle relative au dispositif de remboursement du capital restant dû par les avoués et garantie pour l'avoué de la possibilité de percevoir un acompte

Adopté

Article 18 Modalités de présentation de la demande effectuée au titre des articles 13, 15 et 17

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

44

Coordination

Adopté

Article 19 Création, organisation et fonctionnement du fonds d'indemnisation chargé du paiement des sommes dues aux avoués

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

45

Coordination

Adopté

M. Gélard, rapporteur

46

Coordination

Adopté

Article 20 Modalités de mise en oeuvre

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

47

Coordination

Adopté

M. Patrice Gélard , rapporteur, rappelant que l'article 24 du projet de loi prévoyait qu'à partir du 1er janvier 2010 les avoués pourraient exercer simultanément, et jusqu'au 1er janvier 2011, leur profession et celle d'avocat, a indiqué que le calendrier d'examen du texte conduisait à penser qu'il ne serait pas définitivement adopté avant les premiers mois de l'année 2010. Soulignant que cette période transitoire visait à permettre aux avoués de se constituer une clientèle dans leur nouvelle profession et de gérer la liquidation de leur office, il a jugé que les conditions d'entrée en vigueur du dispositif leur permettant d'être également avocat devaient être adaptées. Il a estimé que cette période transitoire devrait par conséquent commencer à compter de la publication de la loi, ce qui ne lui donnerait qu'une durée de six à huit mois. M. Jean-Jacques Hyest , président, a estimé que ce dispositif permettant aux avoués d'exercer pendant une courte durée leur profession et celle d'avocat était nécessaire pour assurer une transition convenable vers la nouvelle profession.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx a considéré que ce dispositif entraînerait une rupture d'égalité défavorable aux avocats, qui seraient soumis à une concurrence déloyale, puisque les avoués seraient en mesure de conserver, dans leur nouvelle profession d'avocat, une part importante de leur clientèle institutionnelle.

M. Nicolas Alfonsi , estimant que le cumul des deux professions était susceptible de poser des problèmes de déontologie, a relevé qu'une solution alternative consisterait à reporter l'entrée en vigueur de la disparition des offices d'avoués. M. Patrice Gélard , rapporteur, rappelant que l'idée d'une période transitoire avait immédiatement suscité l'opposition des représentants de la profession d'avocat, a estimé que si les avoués devaient être en mesure de se préparer à la disparition de leur profession et à leur reconversion, les avocats se préparaient sans doute à exercer leur nouvelle activité en matière de procédure d'appel. Il a jugé qu'une période transitoire d'une durée raccourcie devait être maintenue afin de permettre une bonne application de la loi.

M. Elie Brun , faisant référence à un article de presse évoquant la mise en oeuvre de la réforme de la carte judiciaire, a indiqué que les avocats affectés par la suppression d'un tribunal de grande instance devraient recevoir une aide dont le montant maximum était bien inférieur au montant des indemnités allouées aux avoués. Il a estimé que si l'application de la loi était susceptible de présenter des difficultés et si la définition de sa date d'entrée en vigueur se révélait problématique, le Parlement n'était pas tenu d'adopter le texte.

Article 24 Exercice simultané, pendant la période transitoire, de la profession d'avocat par les avoués

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

50

Report au 1er janvier 2013 de la date à partir de laquelle les avoués peuvent également exercer la profession d'avocat

Retrait

M. Gélard, rapporteur

49

Report au 1er janvier 2012 de la date à partir de laquelle les avoués peuvent également exercer la profession d'avocat

Retrait

M. Gélard, rapporteur

48

Report au 1er janvier 2011 de la date à partir de laquelle les avoués peuvent également exercer la profession d'avocat

Retrait

M. Gélard, rapporteur

51

Report à la date de publication de la loi du départ du délai durant lequel les avoués peuvent également exercer la profession d'avocat

Adopté

M. Béteille

55

5

Suppression de l'article

Sans objet

Mme Des Esgaulx

17

Suppression de l'article

Sans objet

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

21

Possibilité pour la partie intéressée de renoncer à l'assistance de son avocat au profit de l'avoué devenu avocat

Adopté

Article 26 Conditions, pour les avoués, de leur renonciation à l'exercice de la profession d'avocat ou de leur inscription à un barreau autre que celui de leur cour d'appel d'origine

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

26

Possibilité pour les avoués quittant leur fonction avant la fin de la période transitoire préalable à la suppression des offices, de bénéficier du dispositif d'indemnisation

Rejeté

Article 27 Sort des instances d'appel en cours au moment de la disparition de la profession d'avoué

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

28

Possibilité pour l'avoué antérieurement constitué et devenu avocat de renoncer à représenter une partie après le 1er janvier 2011

Rejeté

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

27

Suppression de l'obligation pour l'avoué renonçant à devenir avocat, lorsqu'il exerce en société et qu'un de ses associés devient avocat, d'en aviser son client

Rejeté

Article 29 Maintien jusqu'au 31 décembre 2014 de la chambre nationale des avoués près les cours d'appel Suppression de la bourse commune des chambres

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

22

Election d'un ancien président de la chambre nationale des avoués parmi les membres du Conseil national des barreaux

Rejeté

Article 31 Coordinations textuelles

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

52

Coordinations relatives aux références aux avoués près les tribunaux de grande instance et aux avoués près les cours d'appel

Adopté

Article 32 Suppression des références faites aux avoués

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

53

Coordinations relatives aux références aux avoués près les tribunaux de grande instance et aux avoués près les cours d'appel

Adopté

Article 33 Abrogation des dispositions contraires au présent texte

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

54

Liste des dispositions abrogées

Adopté

Article 34 Entrée en vigueur différée de la suppression de la profession d'avoué

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Gélard, rapporteur

57

Report de trois ans de la suppression de la profession d'avoué

Retiré

M. Gélard, rapporteur

56

Report de deux ans de la suppression de la profession d'avoué

Retiré

M. Gélard, rapporteur

55

Report d'un an de la suppression de la profession d'avoué

Retiré

M. Détraigne et plusieurs de ses collègues

23

Report de deux ans de la suppression de la profession d'avoué

Retiré

M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés

12

Report d'un an de la suppression de la profession d'avoué

Retiré

ANNEXE 1 COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE MME MICHÈLE ALLIOT-MARIE, MINISTRE D'ETAT, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTÉS

_______

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a entendu Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux , ministre de la justice et des libertés , sur le projet de loi n° 16 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme de la représentation devant les cours d'appel.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés , a tout d'abord indiqué que le projet de loi s'inscrivait dans la poursuite du mouvement de simplification de la justice et visait à fusionner les professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel au 1er janvier 2011. Elle a souligné non seulement que les règles de représentation devant les cours d'appel paraissaient complexes et coûteuses aux yeux des justiciables, mais que les règles d'accès à la profession d'avoué étaient incompatibles avec la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Elle a ajouté que la fusion était d'autant plus facile à mettre en place que les avoués bénéficiaient des mêmes diplômes et des mêmes qualifications que les avocats.

Elle a déclaré que la réforme proposée par le Gouvernement modernisait la procédure d'appel en :

- recentrant la représentation sur l'avocat, ce qui permet au justiciable de s'adresser à un professionnel unique, habilité à le conseiller, à le représenter en justice et à plaider son dossier devant les deux degrés de juridiction ;

- réduisant les coûts du procès, le justiciable n'ayant plus à acquitter le tarif de la postulation devant la cour d'appel, tarif qui rémunère l'intervention des avoués ; d'une manière générale, elle a souhaité que la partie succombante supporte davantage les frais de justice engagés par l'autre partie, afin d'encourager à des solutions amiables ;

- prévoyant, dans un décret à paraître, l'obligation, sous peine d'irrecevabilité, d'introduire l'instance par voie électronique devant les juridictions d'appel, généralisant ainsi les expérimentations actuellement conduites. La réforme intervient en effet à un moment où les techniques de communication ouvrent la voie à la dématérialisation des actes de procédure, des expérimentations étant conduites à cet égard dans les cours d'appel de Versailles et de Douai. Elle a précisé que le projet de loi créait un interlocuteur unique des cours d'appel en la personne de l'un des bâtonniers du ressort de la cour, désigné parmi eux pour les représenter, afin de traiter des questions d'intérêt commun, en particulier la postulation et la communication électronique.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a ensuite souligné que le projet de loi, tel qu'amélioré par l'Assemblée nationale, comportait trois mesures principales d'accompagnement en faveur des offices d'avoués :

- en premier lieu, il favorise la reconversion professionnelle des avoués et de leurs salariés ; en effet, sauf renonciation de leur part, les avoués deviendront avocats du seul fait de la loi et pourront, s'ils le souhaitent, s'inscrire dans un autre barreau que celui dans le ressort duquel leur office est situé. De même, le projet de loi reconnaît aux avoués qui auraient renoncé à entrer dans la profession d'avocat ou à y rester la possibilité d'accéder à l'ensemble des professions juridiques et judiciaires libérales réglementées (notaire, avocat aux conseils, administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, huissier de justice, commissaire-priseur judiciaire, greffier de tribunal de commerce) dans un délai de cinq ans, dans des conditions dérogatoires qui seront fixées par décret en Conseil d'État, s'engageant au passage sur la publication de ce décret, comme de l'ensemble des décrets d'application de la loi, dès la promulgation de cette dernière. De même, elle a souligné, d'une part, que des passerelles vers ces mêmes professions seraient également offertes aux collaborateurs juristes, non titulaires du diplôme d'avoué, d'autre part, que le projet de loi de finances pour 2010 prévoyait la création de 380 emplois dans les services judiciaires, destinés aux salariés des avoués. Elle a précisé que, afin de tenir compte des caractéristiques de cette population, souvent féminine, âgée et peu mobile, et de faciliter l'accès à ces 380 postes, ceux-ci étaient répartis dans les catégories A, B et C de la fonction publique ;

- en second lieu, le projet de loi prévoit l'indemnisation des avoués et de leurs collaborateurs. Elle s'est tout d'abord réjouie que l'examen par l'Assemblée nationale ait permis de porter l'indemnisation des avoués à hauteur de la totalité de la valeur de leur office, alors que le projet de loi initial limitait l'indemnisation aux deux tiers de cette valeur. Elle a également souligné qu'une attention toute particulière était accordée aux avoués titulaires d'un prêt contracté en vue de l'acquisition de leur office ou de parts de société. Pour leur éviter une situation financière délicate, l'État se substituera à eux dans le remboursement du capital restant dû et prendra en charge les frais du remboursement anticipé des emprunts. En outre, il est prévu qu'en toute hypothèse l'indemnisation soit au moins égale au montant de l'apport personnel consenti pour financer l'acquisition de l'office, le cas échéant majoré du montant du capital restant dû au titre des emprunts en cours et que les avoués puissent demander rapidement le versement d'un acompte équivalant à 50 % du montant de leur dernier chiffre d'affaires. Seront également prises en charge les indemnités de licenciement que les avoués auront à verser à leurs salariés au titre des licenciements qui seraient la conséquence directe de la loi. S'agissant de l'indemnisation des salariés, elle a précisé qu'une convention entre l'Etat et les représentants des avoués serait signée dès la promulgation de la loi et prévoirait des aides à la mobilité, y compris pour les salariés recrutés par le ministère de la justice, des allocations destinées à compenser les pertes des revenus ainsi que des actions de formation.

Après avoir précisé que les députés avaient opportunément décidé d'améliorer l'indemnisation des salariés en prévoyant une augmentation du taux d'indemnisation par tranche de cinq ans et sans plafonnement, elle a rappelé que les indemnités de licenciement n'étaient pas soumises à l'impôt sur le revenu ;

- enfin, elle a souligné que le projet de loi prévoyait une période transitoire jusqu'au 1er janvier 2011, période destinée en particulier à faciliter la reconversion des avoués. Elle a relayé les craintes de la profession d'avocat estimant que, pendant cette période, la possibilité pour les avoués de cumuler leur profession avec celle d'avocat créait une « concurrence déloyale ». Elle a toutefois jugé raisonnable la durée de la période transitoire envisagée, considérant qu'elle ne devait pas être limitée dans le temps afin de ne pas prolonger une période d'incertitude.

M. Jean-Jacques Hyest , président, a rappelé les tentatives, en 1971 et 1991, de fusion entre les professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel et souligné qu'à l'époque les premiers présidents des cours d'appel avaient présenté l'intervention comme un gage de sécurité pour la procédure civile applicable devant les cours. Il a relevé que les premiers présidents n'avaient plus aujourd'hui une position aussi unanime.

M. Patrice Gélard , rapporteur, s'est déclaré peu convaincu que la réforme aboutisse à une réduction du coût de l'accès à la justice d'appel pour les justiciables, les avocats risquant d'augmenter leurs honoraires eu égard à leur charge nouvelle en matière de postulation devant les cours d'appel.

Concernant les exigences du droit communautaire, il a reconnu que la directive de 2006 relative aux services dans le marché intérieur (dite « directive Bolkestein ») ne permettait pas de maintenir en l'état le statut des avoués, titulaires d'un office, nommés par le garde des sceaux et soumis à un tarif, les entraves à la libre prestation des services ne pouvant être justifiées que pour les activités participant à l'exercice de l'autorité  publique. Il a toutefois déclaré que cette directive aurait pu conduire à une simple modernisation des règles de représentation devant les cours d'appel, et non à une suppression de la profession d'avoués, ajoutant que d'autres professions du droit, telles que les huissiers, les notaires et les avocats aux conseils, étaient soumises à un régime spécifique, dans le respect du droit communautaire.

Il a jugé que le texte adopté par les députés, en dépit d'améliorations, restait peu satisfaisant, pour les raisons suivantes :

- la date du 1er janvier 2011 pour la fusion entre avoués et avocats lui est apparue prématurée et de nature à perturber le fonctionnement de certaines cours d'appel, d'autant que la loi ne devrait pas être définitivement adoptée par le Parlement avant le printemps 2010. Il a estimé que la plupart des cours et des avocats ne seraient pas en mesure de mettre en oeuvre d'ici à un an la communication dématérialisée en matière d'appel ;

- les conditions selon lesquelles les caisses de retraite des avoués et des avocats assumeront leurs obligations à l'égard des anciens avoués sont imprécises et problématiques ;

- les salariés des avoués, actuellement bien rémunérés, sont moins bien traités que ne l'ont été par le passé ceux des commissaires-priseurs et des courtiers interprètes et conducteurs de navires. Soulignant que ces salariés, bénéficiant aujourd'hui d'une rémunération supérieure à celle qu'ils percevraient dans d'autres secteurs à qualifications égales, subiraient une perte de revenus, il a souhaité que leur indemnité soit portée à un mois de salaire par année d'ancienneté. Indiquant que, par rapport au dispositif demandé par les salariés, les améliorations apportées par l'Assemblée nationale ne bénéficiaient qu'à une vingtaine de salariés totalisant plus de 37 ans d'ancienneté, il a jugé indispensable de soutenir par une aide à la reconversion ceux qui feraient l'effort de trouver rapidement un nouvel emploi. Précisant que les avocats employaient cinq fois moins de collaborateurs que les avoués, il a estimé que les perspectives d'emploi des salariés d'avoués par des avocats étaient limitées ;

- la plus-value éventuellement réalisée par les avoués après perception de l'indemnisation est en soi imposable. Par ailleurs, l'indemnisation pourrait être soumise à des prélèvements supplémentaires dans la mesure où elle serait versée non pas directement aux avoués mais aux sociétés civiles professionnelles qu'ils ont généralement constituées ; enfin, l'indemnisation est très insuffisante pour la cinquantaine de jeunes avoués qui n'ont que quelques années d'ancienneté : en effet, elle ne couvre pas la réparation du préjudice né de la suppression de leur profession ;

- la suppression des offices d'avoués et de leur monopole constitue juridiquement une expropriation pour cause d'utilité publique ; cette suppression se distingue en effet de la suppression des avoués près les tribunaux de grande instance ou de celle du monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires. Les avoués près les tribunaux de grande instance disposent en effet d'une clientèle, qu'ils aiguillent vers les avocats, alors que ce sont les avocats qui orientent leurs clients vers les avoués près les cours d'appel. Les avoués près les cours d'appel perdront par conséquent leur activité et leur clientèle. Seuls certains avoués possèdent une clientèle institutionnelle. M. Patrice Gélard , rapporteur, soulignant que les jeunes avoués ne détenant que des parts sociales en industrie au sein d'un office ne percevraient aucune indemnité, a estimé que cette situation ne paraissait pas conforme aux exigences du droit. Il a jugé que le régime d'indemnisation des avoués devait réparer un préjudice d'ordre patrimonial, fondé sur l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et non une rupture d'égalité devant les charges publiques fondée sur l'article 13 de cette déclaration. En conséquence, les dommages doivent faire l'objet d'une indemnisation intégrale.

M. Jean-Jacques Hyest , président, a regretté que la question essentielle du financement de l'indemnisation soit abordée dans un texte distinct, le projet de loi de finances rectificatives pour 2009, qui relève, en outre, de la compétence de la commission des finances.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a présenté comme une solution équitable la prise en compte de l'ancienneté pour l'indemnisation des salariés et estimé que cette indemnisation devait s'appuyer sur une analyse de chaque situation individuelle.

Indiquant avoir rencontré certains avoués de la cour d'appel de Reims, M. Yves Détraigne a relayé les inquiétudes des avocats au sujet de la période transitoire, jugée trop longue mais a estimé nécessaire, au contraire, de prévoir une entrée en vigueur de la loi suffisamment lointaine pour permettre l'adaptation des avoués et de leurs salariés au nouveau contexte juridique. Il a considéré peu attractif pour les avoués l'accès à la profession d'avocat confrontée actuellement à des difficultés économiques et estimé insuffisantes les possibilités de reconversion pour les salariés. Il s'est demandé si les avocats étaient techniquement prêts à reprendre les fonctions procédurales des avoués, rappelant que la communication par voie électronique deviendrait bientôt une condition de recevabilité des recours en appel. Par ailleurs, il s'est déclaré, pour les mêmes raisons que le rapporteur, sceptique quant à la réduction escomptée du coût supporté par le justiciable en appel. En outre, il a jugé étonnant que le projet de loi prévoie le versement des indemnités de licenciement par les avoués eux-mêmes, et non par le fonds d'indemnisation créé par le texte. Enfin, il a mis en avant que, pour les jeunes avoués, la réforme ne faisait que rétablir leur situation matérielle antérieure à leur prise de fonctions, organisant ainsi une réparation insuffisante de leur préjudice.

M. Jean-Pierre Vial a salué les améliorations apportées par l'Assemblée nationale au texte initial du Gouvernement. A son tour, il a douté que la suppression des avoués aboutisse à un moindre coût de la justice d'appel, eu égard à l'augmentation probable des honoraires des avocats. A cet égard, il a espéré que les juridictions d'appel intègrent cette nouvelle donne dans leur appréciation des frais répétibles de l'article 700 du code de procédure civile. Il a également mis en avant la nécessité de prévoir une période transitoire suffisamment longue afin que les cours d'appel puissent se préparer dans les meilleures conditions au nouveau contexte juridique.

Sur la question de l'indemnisation, il a approuvé les propos du rapporteur et de M. Yves Détraigne concernant respectivement l'analyse sous l'angle de l'expropriation pour cause d'utilité publique et le versement des indemnités de licenciement par le fonds d'indemnisation et estimé que, au regard d'une évaluation faite dans le ressort de la cour d'appel de Chambéry, les améliorations apportées lors de la première lecture à l'Assemblée nationale paraissaient très limitées. Il a également mis en avant la nécessité de clarifier les conditions selon lesquelles les caisses de retraite des avoués et des avocats assumeront leurs obligations à l'égard des anciens avoués.

Mme Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, s'est déclarée prête à demander à ses services des simulations afin d'évaluer le caractère suffisant ou non de l'indemnisation envisagée par le Gouvernement.

Après avoir rappelé que la réforme de 1971 n'avait supprimé que les avoués de première instance, M. Pierre Fauchon a mis en avant l'intérêt de la présente réforme, préférant le système concurrentiel propre aux professions libérales au maintien de situations protégées. A cet égard, il a estimé que la concurrence entre avocats devrait permettre de contenir une augmentation trop forte des honoraires, en particulier pour les clients les plus modestes. Sur la question de l'indemnisation, il a rejoint l'analyse du rapporteur sur l'expropriation et appelé à une réparation plus juste du préjudice subi par les avoués.

M. Jacques Mézard a déclaré que l'Assemblée nationale avait permis de passer d'une « spoliation totale » à une « spoliation partielle » des avoués. Il a jugé que la réforme de 1971 avait été une réussite mais celle de 1991 un échec. Il a mis en avant la compétence des avoués en matière de procédure civile ainsi que leur rôle de conseil, qui conduit parfois les parties à renoncer à interjeter appel. Il a estimé que la suppression des avoués risquait d'entraîner une augmentation du taux d'appel. Considérant que l'indemnisation des salariés devait leur permettre de recevoir un mois de salaire par année d'ancienneté, il a souligné que, compte tenu de l'impréparation des cours d'appel en matière de dématérialisation, la réforme risquait de provoquer un ralentissement de la justice d'appel. Il a déclaré partager l'analyse du rapporteur concernant l'expropriation et redouté que de nombreux avoués ne puissent être intégrés dans des cabinets d'avocat, notamment en province, faute de besoins suffisants. Enfin, il a demandé si le Gouvernement avait l'intention de revaloriser l'aide juridictionnelle.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx a jugé faible le montant moyen des émoluments d'avoués en appel, à savoir 900 euros, annoncé par le ministère de la justice ; elle s'est demandé, en conséquence, si ce montant n'intégrait pas l'aide juridictionnelle, auquel cas il lui est apparu souhaitable que le Gouvernement fasse connaître le montant hors aide juridictionnelle.

Elle a par ailleurs souhaité que soit améliorée l'indemnisation des avoués mais a jugé inacceptable que, pendant la période transitoire, les avoués puissent poursuivre leur activité tout en exerçant les fonctions d'avocat.

Enfin elle a redouté les conséquences de la réforme sur le fonctionnement des cours d'appel.

M. Jean-René Lecerf a souhaité savoir si le Gouvernement avait l'intention de remettre en cause le statut des avocats aux conseils.

Après avoir rappelé que certains avoués jouent un rôle essentiel de conseil juridique, M. François Pillet a considéré excessives les craintes concernant les conséquences de la réforme sur le fonctionnement de la justice, rappelant que dans les matières où l'intervention des avoués n'est pas obligatoire, c'est-à-dire en matière sociale et pénale, les cours d'appel ne souffrent pas de l'absence de monopole des avoués. Il a estimé que les avocats pourraient assumer sans difficultés l'obligation d'assignation par voie électronique. Il a également appelé de ses voeux une indemnisation plus juste des avoués et de leurs salariés.

Relevant que l'obligation, sous peine d'irrecevabilité, de présenter les recours en appel constituerait une novation par voie électronique, M. Jean-Jacques Hyest , président, s'est demandé si cette condition de recevabilité était une première et si l'ensemble des avocats et des cours d'appel pourraient être prêts à cette nouvelle règle de procédure au 1er janvier 2011.

Mme Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a :

- jugé important de fixer une période transitoire pour permettre l'adaptation des avoués et de leurs salariés au nouveau contexte juridique ;

- maintenu que le système concurrentiel conduirait à une baisse du coût de la justice d'appel pour le justiciable ;

- reconnu que la directive relative aux services dans le marché intérieur n'imposait pas la suppression des avoués, mais que cette dernière était souhaitée par le Gouvernement à des fins de simplification ;

- convenu que la question de l'équilibre des caisses de retraite devrait être résolue ;

- jugé réaliste l'entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2011, les cours d'appel et les avocats étant pleinement capables de faire face à la dématérialisation à cette date et les avoués se préparant déjà aujourd'hui aux conséquences du projet de loi, même si le texte ne sera pas définitivement adopté avant plusieurs mois. Elle a indiqué que le Conseil national des barreaux participait à la mise en oeuvre de la dématérialisation ;

- concernant les inquiétudes des avocats, elle a estimé souhaitable d'autoriser les avoués à cumuler leurs fonctions avec celles d'avocat pendant la période transitoire afin de les aider à se constituer une clientèle, ajoutant que les avoués ne représenteraient qu'environ 1 % du nombre d'avocats en France ;

- estimé que l'entrée en vigueur de la loi ne devait pas être différée, parce que les acteurs concernés s'y préparent depuis plusieurs mois ;

- insisté, sur la question de l'indemnisation, sur la nécessité de privilégier la reconversion professionnelle des avoués et de leurs salariés et fait valoir que les salariés disposant d'une très grande ancienneté seraient mieux traités que les salariés des commissaires priseurs et des courtiers maritimes. Elle a jugé que les avocats pourraient avoir un intérêt à recruter des salariés disposant d'une grande expérience de la procédure d'appel. Par ailleurs, s'agissant des jeunes avoués, elle a estimé que l'inscription d'office au barreau constituait une solution équitable ; enfin, elle a considéré que, conformément au code du travail, il revenait aux avoués, en tant qu'employeurs, d'engager la procédure de licenciement de leurs salariés mais qu'il pourrait, en effet, être envisagé que les indemnités de licenciement soient directement versées aux salariés par le fonds d'indemnisation.

M. Jean-Jacques Hyest , président, a jugé souhaitable de reprendre, sur ce point, la procédure retenue pour les commissaires-priseurs. Il a souligné que la majorité des salariés avaient entre 11 et 30 ans d'ancienneté et devraient poursuivre une activité pendant plusieurs années avant d'atteindre l'âge de la retraite.

Sur la question de la fiscalité applicable aux indemnités versées aux avoués, Mme Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a signalé que seules trois sociétés civiles professionnelles étaient soumises à l'impôt sur les sociétés, les autres étant soumises à l'impôt sur le revenu, soulignant que le système retenu était le plus avantageux pour la plupart des avoués.

Enfin, concernant les avocats aux conseils, elle a indiqué qu'ils n'étaient pas soumis à la directive « services » mais à une directive spécifique ; elle ajouté que le Gouvernement n'avait pas l'intention de remettre en cause leur statut mais simplement d'en augmenter le nombre.

ANNEXE 2 LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR _______

Ministère de la justice

- M. Alexandre Jevakhoff , directeur adjoint du cabinet de la garde des sceaux

- Mme Aude Ab-Der-Halden , conseillère pour les questions de droit civil, économique et relatives aux professions juridiques et judiciaires

- Mme Pascale Fombeur , directrice des affaires civiles et du sceau

Conférence nationale des premiers présidents

- M. Hubert Dalle , premier président à la cour d'appel de Rouen

- Mme Elisabeth Linden , premier président à la cour d'appel d'Angers

Cour d'appel de Paris

- M. Jean-Claude Magendie , premier président

- Mme Marguerite-Marie Marion , conseiller de la mise en état

Avocats

- Me Didier Couret , membre du Conseil national des barreaux et ancien bâtonnier du barreau de Poitiers

- Me Hélène Bornstein , membre du Conseil de l'ordre du barreau de Paris

- Me Pierre Chatel , membre de la Conférence des bâtonniers, ancien Bâtonnier de Montpellier

Association des avocats et praticiens des procédures et de l'exécution

- Me Alain Provansal , avocat, président

- Me Gilles Antoine Sillard , avocat

- Me Emmanuel Joly , avocat

- Me Vincent Rieux , avocat

Chambre nationale des avoués

- M. François Grandsard , président

- Mme Caroline Bommart-Forster , membre du bureau

- Me Jean-Pierre Goutet , membre du bureau

- Me Bernard de Froment , avocat conseil

- Me Pascal Mornay , secrétaire général

Association syndicale des avoués

- Me Annick de Foucroy , présidente

- Me Jean-Jacques Fanet , ancien président de la Chambre nationale des avoués.

- Me Anne-Laure Gerigny-Frenaux , membre du bureau exécutif

Association des jeunes avoués

- Me Sarra Jougla-Ygouf , présidente

- Me Maurice Bencimon , collaborateur d'avoué

- Me Fabrice Hongre-Boyeldieu , avoué

Avoués

- Me Gilles Argellies et Me Fabien Watremet , avoués à Montpellier, mandatés par les chambres départementales des avoués du grand sud, accompagnés de M. Dominique Rousseau , professeur de droit

- Me Gaël Balavoine , avoué à Caen

- Me Guillaume Baufumé , avoué à Lyon

- Me Yannick Enault , avoué à Rouen

- Me Valérie Gray , avoué à Rouen

- Me Bruno Leroux , avoué à Besançon

- Me Caroline Leroux, avoué à Besançon

Association nationale du personnel des avoués non syndiqués (ANPANS)

- M. Franck Nunes , président

- Mme Anne-Cécile Guignard

- M. Loïc Bussy

- Mme Claudine Lesimple

Syndicats des salariés d'avoués

CFDT

- M. Laurent Caron , clerc d'avoué à Douai

- Mme Lise Verdier , chargée de mission

CGT des sociétés d'étude

- M. Xavier Burot , secrétaire fédéral en charge du secteur des avoués

- Mme Joëlle Larcier , salarié d'avoué

- M. Curtis Chumbley , membre

CFTC

- M. Michel Charbonnier , directeur du service juridique

- M. Patrick Le Moigne , secrétaire nationale

- M. Olivier Gourlé , secrétaire général

CFE-CGC - M. Thierry Blaise , négociateur de la convention collective nationale de branche - M. Kléber Didier , négociateur de la convention collective nationale de branche

Caisse nationale des barreaux français

- M. Jean-Pierre Forestier , président

Caisse de retraite du personnel des avocats et avoués près les cours d'appel (CREPA)

- Me François Toucas , président

- M. Pierre Laversanne , actuaire

- M. Richard Kaczorowski , directeur

Caisse d'assurance vieillesse des officiers ministériels des compagnies judiciaires (CAVOM)

- Me Roland Bayard , président

- M. Gérard Verdun , avoué, ancien président

- M. Guy Duvelleroy , président de la chambre nationale des huissiers

- M. Jacques Escourrou , président de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL)

- M. Bernard de Froment , avocat-conseil de la CNAVPL et de la CAVOM

* 1 M. Jean-Jacques Fanet, La représentation devant les cours d'appel en question, Gazette du Palais, 9 octobre 2007, n° 282, p. 2.

* 2 Voir le rapport de la commission pour la libération de la croissance française, présidée par M. Jacques Attali, dont la proposition n° 213 porte sur la suppression de la profession d'avoué près les cours d'appel et la possibilité pour les avoués de devenir avocats, et le rapport de la commission sur les professions du droit présidée par M. Jean-Michel Darrois, qui recommande la fusion des professions d'avocat et d'avoué près la cour.

* 3 Voir l' étude d'impact jointe au projet de loi n° 1709 , Assemblée nationale, juin 2009, p.3.

* 4 Décret n° 75-1123 du 5 décembre 1975.

* 5 Le décret du 12 mai 2003 a porté la valeur de l'unité de base de 1,68 euro à 2,70 euros.

* 6 En Alsace-Moselle, en l'absence d'avoué, la postulation est confiée aux avocats du barreau de la ville où se situe la cour d'appel et qui sont inscrits sur un tableau particulier.

* 7 Dans le cadre du présent rapport, les termes charge, office et étude sont employés avec la même signification, même si l'étude désigne généralement les locaux occupés par l'office ministériel.

* 8 CJCE, Aff. 2/74, Reyners.

* 9 L'article 14 de la directive dispose que « Les Etats membres ne subordonnent pas l'accès à une activité de services ou son exercice sur leur territoire au respect de l'une des exigences suivantes : [...] l'application au cas par cas d'un test économique consistant à subordonner l'octroi de l'autorisation à la preuve de l'existence d'un besoin économique ou d'une demande du marché, à évaluer les effets économiques potentiels ou actuels de l'activité ou à évaluer l'adéquation de l'activité avec les objectifs de programmation économique fixés par l'autorité compétente. »

* 10 Les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d'autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d'atteindre le même résultat.

* 11 Les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ont le monopole de la représentation et de la plaidoirie devant ces deux hautes juridictions. Depuis 1817, le nombre de cabinets d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation était resté fixé à 60, chaque cabinet pouvant avoir au maximum trois associés. L'article 15 du décret n° 2009-452 du 22 avril 2009 a toutefois supprimé la limitation à 60 du nombre de charges d'avocats aux conseils. Il autorise le garde des sceaux à créer, par arrêté, de nouveaux offices d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation en fonction des besoins de ces hautes juridictions. Peuvent devenir avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation les avocats justifiant d'une année au moins d'expérience et admis à suivre une formation théorique et pratique de trois ans, sanctionnée par un examen d'aptitude.

Le garde des sceaux peut ainsi créer, par simple arrêté, autant de charges que nécessaire.

* 12 CJCE, 25 février 1988, Commission/ République Fédérale d'Allemagne 427/85.

* 13 Dans son considérant 11, cette disposition est ainsi explicitée : « pour assurer le bon fonctionnement de la justice, il y a lieu de laisser aux Etats membres la faculté de réserver, par des règles spécifiques, l'accès à leurs plus hautes juridictions à des avocats spécialisés, sans faire obstacle à l'intégration des avocats des Etats membres qui rempliraient les conditions requises ».

* 14 Rapport sur les professions du droit, la Documentation française, 2009, p. 30.

* 15 Exposé des motifs du projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, n° 1709, p. 4.

* 16 L'article 696 du code de procédure civile dispose que « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie ».

* 17 Célérité et qualité de la justice. La gestion du temps dans le procès, la documentation française, 2004.

* 18 L'intimé est la partie contre laquelle a été engagée une procédure d'appel d'un jugement de première instance, par opposition à l'appelant.

* 19 Aux termes du projet de loi, à compter du 1 er janvier 2011, les avocats assureront la postulation en appel. Les anciens avoués devenus avocats continueront également à effectuer cette mission.

* 20 M. Luc Dejoie, rapports de première et de deuxième lecture n° 366 (1998-1999) et n° 211 (1999-2000) faits au nom de la commission des lois sur le projet de loi portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

* 21 Mme Nicole Feidt, rapport n° 2026 fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur le projet de loi portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, 15 décembre 1999.

* 22 Article 40 de la loi du 10 juillet 2000.

* 23 Conseil constitutionnel, décision n° 2000-440 DC du 10 janvier 2001 sur la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports.

* 24 Voir en annexe la liste des personnes entendues par votre rapporteur et, pour une analyse détaillée du dispositif d'indemnisation, le commentaire de l'article 13 du projet de loi.

* 25 L'article 1 du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui stipule que « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut-être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou amendes. »

* 26 CEDH, affaire Lallement contre France n° 46044/99 - 12 juin 2003.

* 27 Paragraphe 10 de l'arrêt en satisfaction équitable du 12 juin 2003, résumant l'arrêt du 11 avril 2002.

* 28 Voir, parmi beaucoup d'autres, l'arrêt Saints monastères c/ Grèce du 9 décembre 1994, Série A n° 301-A, § 70.

* 29 Voir, notamment, l'arrêt James et autres c. Royaume-Uni, du 21 février 1986, série A n° 98, p. 34, § 50.

* 30 Ibidem, § 54 ; voir également, par exemple, l'arrêt Saints monastères précité, § 71.

* 31 Une personne peut entrer au capital d'une société en apportant son industrie, c'est-à-dire son savoir-faire, son travail et son temps au service de la société. Cet associé détient alors des parts sociales en industrie. Les parts d'intérêts correspondant aux apports en industrie sont incessibles et doivent être annulées lorsque leur titulaire quitte la société pour quelque cause que ce soit, y compris la dissolution de celle-ci.

* 32 Pour des exemples de violation, CEDH, 21 févr. 1997, Guillemin c/ France : aucun commencement d'indemnisation n'était intervenu malgré la durée - 14 ans - de l'ensemble des instances engagées par la requérante dans le cadre d'une expropriation. - CEDH, 14 nov. 2000, Piron c/ France.

* 33 Etude d'impact jointe au projet de loi n° 1709 déposé le 3 juin 2009, à l'Assemblée nationale, p. 32.

* 34 L'article 1 er du décret n° 72-784 du 25 août 1972 modifié parle décret n° 75-785 du 21 août 1975.

* 35 Voir le commentaire de l'article 7 du projet de loi, modifiant l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

* 36 Toutefois, les notaires et huissiers peuvent également réaliser des ventes judiciaires de meubles aux enchères publiques.

* 37 CC, n° 2000-440 DC du 10 janvier 2001, cons. 5.

* 38 La Cour de cassation estime ainsi que « les offices, institués dans un intérêt public, ne sont pas des propriétés privées et que le seul élément du patrimoine de leurs titulaires, susceptible de faire l'objet d'une convention intéressée consiste dans la valeur pécuniaire du droit de présentation » (arrêt du 9 décembre 1946).

* 39 CE, SCP Machoïr et Bailly, 25 mars 2005, n° 263944.

* 40 Même décision, cons. 7.

* 41 CEDH, Lallement c/ France, 11 avril 2002, n° 46044/99.

* 42 M. Gilles Bourdouleix, rapport n° 1931 (XIIIe législature) au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale sur le projet de loi portant fusion des professions d'avocat et d'avoué près les cours d'appel, p. 34-35.

* 43 Art. 39 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000, portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

* 44 Art. 4 de la loi n° 2001-43 du 16 janvier 2001, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports.

* 45 Le produit demi-net est obtenu en déduisant des produits bruts de l'office, le loyer des locaux professionnels, les salaires et charges sociales et la taxe professionnelle.

* 46 Art. 2 de la loi n°65-1002 du 30 novembre 1965, portant réforme des greffes des juridictions civiles et pénales.

* 47 Art. 29 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

* 48 CE, SCP Machoïr et Bailly, 25 mars 2005, n° 263944.

* 49 Affaire Lallement contre France n° 46044/99 - 12 juin 2003.

* 50 Soit 1 029 240 euros en 2009.

* 51 Article 49 de cette loi.

* 52 Voir le I, C, 3 de l'exposé général.

* 53 M. Gilles Bourdouleix, rapport n° 1931 (XIIIe législature), préc., p. 85.

* 54 Un dispositif similaire a été prévu pour l'indemnisation des courtiers interprètes et conducteurs de navire. En revanche, pour tenir compte de la situation particulière de chaque office, la loi prévoyant l'indemnisation des commissaires-priseurs a accordé à la commission chargée d'établir cette indemnisation la possibilité de majorer ou de minorer la valeur de l'office de 20 %.

* 55 Il s'agit en particulier des décrets suivants :

- décret n° 45-0118 du 19 décembre 1945 modifié relatif au statut des avoués ;

- décret n° 73-0609 du 5 juillet 1973 modifié relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire ;

- décret n° 73-541 du 19 juin 1973 modifié relatif à la formation professionnelle des commissaires priseurs judiciaires et aux conditions d'accès à cette profession ;

- décret n° 75-770 du 14 août 1975 modifié relatif aux conditions d'accès à la profession d'huissier de justice ainsi qu'aux modalités des créations, transferts et suppressions d'offices d'huissier de justice et concernant certains officiers ministériels et auxiliaires de justice ;

- décret n° 91-1125 du 28 octobre 1991 modifié relatif aux conditions d'accès à la profession d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;

- décret n 91-1197 du 27 novembre 1991 modifié organisant la profession d'avocat.

* 56 Aux termes de l'article premier de l'arrêté du 23 décembre 2006 pris en application de l'article 12 du décret n°45-0118 du 19 décembre 1945 pris pour l'application du statut des avoués, l'organisation matérielle de l'examen d'aptitude professionnelle aux fonctions d'avoué est confié à la Chambre nationale des avoués près les cours d'appel.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page