TITRE III
DISPOSITIONS
RELATIVES A L'OUTRE-MER
ARTICLE 23 A
(Art. L. 711-4 du code monétaire
et financier)
Gestion par la Banque de France des comptes des
établissements de crédit dans les départements
d'outre-mer
Commentaire : le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, propose de supprimer la mention selon laquelle les comptes ouverts par les établissements de crédit dans huit collectivités d'outre-mer sont tenus par l'Institut d'émission des départements d'outre-mer.
I. L'IEDOM, RELAIS DE LA BANQUE DE FRANCE
L'article L. 711-2 du code monétaire et financier dispose que dans les quatre départements d'outre-mer et à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui ont l'euro pour monnaie, la Banque de France exerce au titre de sa participation au Système européen de banques centrales (SEBC) les missions fondamentales qui lui sont confiées par les articles L. 122-1 et L. 141-1 à L. 141-5 du même code (assurer le cours légal des billets de banque, participer à l'accomplissement des missions du SEBC, veiller au bon fonctionnement et à la sécurité des systèmes de paiement...).
L'exécution de ces missions dans les collectivités territoriales concernées est assurée par l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM), banque centrale déléguée créée le 7 janvier 1959 et qui a notamment repris les activités d'émission jusque là exercées par la Caisse centrale de la France d'outre-mer.
L'IEDOM assure aujourd'hui la continuité territoriale en matière monétaire et agit au nom et pour le compte de la Banque de France, en exerçant des missions similaires à celles du réseau des succursales en métropole : émission des billets et pièces, tenue du compte des établissements de crédit et du Trésor public, suivi de la conjoncture, analyse de la situation financière des entreprises, traitement du surendettement, gestion des fichiers d'incidents de paiement, droit au compte, suivi de la situation des établissements de crédit, médiation du crédit...
En 2000, du fait du passage à l'euro et pour satisfaire aux exigences de la Banque centrale européenne, le rapprochement entre la Banque de France et l'IEDOM a été accentué et la gouvernance de ce dernier a été modifiée pour garantir que, dans l'exécution des missions qui ressortissaient du SEBC (émission monétaire et tenue des comptes des établissements de crédit), l'IEDOM agissait bien pour le compte et sous l'autorité de la Banque de France.
L'IEDOM est juridiquement distinct de l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM), qui met en oeuvre, en liaison avec la Banque de France, la politique monétaire de l'Etat en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna ( cf . commentaire de l'article 23 B du présent projet de loi). Son siège est néanmoins commun avec celui de l'IEOM et les deux instituts demeurent encore en forte synergie avec l'Agence française de développement (AFD), qui est également un des héritiers de la Caisse centrale de la France d'outre-mer. Le comité central d'entreprise du groupe AFD est ainsi commun aux trois entités, de même que les régimes complémentaires de retraite et de santé, et une large partie du personnel des instituts est constituée d'agents mis à disposition de l'AFD 311 ( * ) .
L'article L. 711-4 du code monétaire et financier dispose que pour l'exercice de ces missions, les établissements de crédit établis sous la forme d'une succursale ou ayant leur siège dans ces collectivités d'outre-mer ouvrent des comptes à la Banque de France, qui sont tenus par l'IEDOM . Pour l'exercice des autres missions de l'Institut 312 ( * ) , le Trésor public, La Poste et les établissements de crédit peuvent y être titulaires de comptes.
L'IEDOM reçoit une dotation de l'Etat (33,54 millions d'euros en 2009) et est administré par un conseil de surveillance composé de sept membres . Un comité économique consultatif , composé de douze membres, est également chargé d'étudier les questions relatives à la conjoncture et au développement économiques des huit départements et collectivités d'outre-mer situés dans le champ d'intervention de l'institut.
II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le présent article, adopté par la commission des finances de l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, propose de supprimer , dans le I de l'article L. 711-4 précité, la mention selon laquelle les comptes ouverts par les établissements de crédit dans les huit collectivités d'outre-mer précitées sont tenus par l'IEDOM , agissant au nom et pour le compte de la Banque de France.
En effet depuis le 28 septembre 2009, la Banque de France gère elle-même tous les comptes des établissements de crédit de métropole et d'outre-mer ouverts dans ses livres, au moyen d'une application informatique centralisée. Il n'y a donc plus de tenue de compte dans les agences de l'IEDOM.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission est favorable à cette disposition technique qui adapte le droit à la réalité et témoigne des efforts de rationalisation des moyens et fonctions dévolus à l'IEDOM.
Votre rapporteur s'est interrogé sur l'utilité de maintenir dans les collectivités d'outre-mer deux structures distinctes de la Banque de France - IEDOM et IEOM - alors que leurs missions sont souvent communes. Il apparaît cependant, outre le caractère particulier, sur le plan monétaire, des trois collectivités du Pacifique dont la monnaie est distincte de l'euro, que d'importants efforts de synergies et de limitation des doublons ont été réalisés , en particulier :
- le recours systématique à l'expertise des services centraux de la Banque de France plutôt que la constitution d'une expertise interne au siège des deux instituts, notamment en matière de monnaie fiduciaire, d'analyse financière des entreprises et de traitement du surendettement ;
- l'utilisation, le plus souvent possible et en tenant compte des difficultés liées au décalage horaire, des applications informatiques développées par la Banque de France pour l'exécution des missions communes aux trois institutions ;
- l'augmentation progressive du nombre d'agents du siège des instituts mis à disposition par la Banque de France ;
- la fusion des sièges de l'IEOM et de l'IEDOM en 2006 et la simplification de la gouvernance de l'IEDOM, dont le nombre de membres du conseil de surveillance a été ramené de seize à sept.
Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.
ARTICLE 23 B
(Art.
L. 712-4-1 du code monétaire et financier)
Extension des
missions de l'Institut d'émission d'outre-mer
Commentaire : le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, propose d'élargir les missions de l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM) dans les trois collectivités d'outre-mer du Pacifique. L'IEOM reçoit ainsi compétence pour le traitement du surendettement en Polynésie française, exercer par délégation les pouvoirs de contrôle et d'enquête de l'Autorité des marchés financiers, et réaliser des prestations de services pour compte de tiers.
I. LES MISSIONS DE L'IEOM, RELAIS DE LA BANQUE DE FRANCE DANS LES COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER DU PACIFIQUE
L'institut d'émission d'outre-mer (IEOM), dont les missions et statuts sont régis par les articles L. 712-4, L. 712-4-1 et L. 712-5 du code monétaire et financier, exerce les fonctions de banque centrale dans les collectivités d'outre-mer du Pacifique , soit la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis et Futuna. Contrairement aux autres collectivités d'outre-mer dont la politique monétaire est assurée par l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM, cf . commentaire de l'article 23 A du présent projet de loi), ces collectivités n'appartiennent pas à la zone euro et le Franc Pacifique y a cours.
L'IEOM a été créé par une loi de finances en 1966 pour exercer le privilège de l'émission monétaire, précédemment dévolu dans les territoires français du Pacifique à la Banque de l'Indochine. Pour mener à bien ses missions, l'IEOM dispose de services centraux situés à Paris et de trois agences implantées à Nouméa, Papeete et Mata'Utu. Sa dotation budgétaire annuelle s'élève à environ 10 millions d'euros et ses bénéfices nets sont intégralement reversés au budget général de l'Etat.
Au titre de ses missions de banque centrale , l'IEOM assure la mise en circulation et l'entretien de la monnaie fiduciaire, la tenue des comptes des établissements de crédit et des offices postaux territoriaux, le relais des autorités bancaires nationales, et la conduite d'une politique monétaire (dont la fixation du taux et de l'assiette des réserves obligatoires constituées par les établissements de crédit) visant à favoriser le développement économique des collectivités concernées.
L'Institut remplit également des missions de service public telles que la mise en circulation des monnaies divisionnaires, la gestion des comptes du Trésor public et l'établissement de la balance des paiements de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française. Il assure également la centralisation des incidents de paiement, contrôle la sécurité des moyens de paiement autres que la monnaie fiduciaire et la pertinence des normes applicables en la matière (article L. 712-5), et, sauf en Polynésie française, remplit les missions imparties à la Banque de France en métropole relatives au traitement du surendettement des particuliers (article L. 712-4-1).
L'IEOM joue un rôle d'observatoire des entreprises des collectivités du Pacifique pour éclairer les différents acteurs économiques et sociaux (établissements bancaires, pouvoirs publics, instituts de statistiques, organisations professionnelles, entreprises, etc .). A ce titre, il collecte, analyse et diffuse de nombreuses informations, telles que les documentations comptables et annonces légales, la centralisation des crédits bancaires, les incidents de paiement sur effets, les crédits douteux et les arriérés de cotisations sociales. Certaines de ces données ne sont toutefois accessibles qu'aux établissements de crédit, sur la partie sécurisée du site Internet de l'IEOM.
Il procède enfin à des enquêtes semestrielles sur le coût du crédit aux entreprises , assure la médiation du crédit dans le cadre du plan de financement de l'économie, et réalise, comme la Banque de France, une cotation de la situation financière des entreprises, dont la validité est limitée à 21 mois maximum à compter de la date d'arrêté du bilan, sauf évènements particuliers survenus entre-temps.
II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, complète l'article L. 712-4-1 du code monétaire et financier pour étendre les missions de l'IEOM dans trois domaines.
En premier lieu, le troisième alinéa du présent article habilite l'IEOM à apporter son concours à la Polynésie française en matière de traitement du surendettement , comme c'est déjà le cas en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna. Il pourra ainsi assurer le secrétariat de la commission de surendettement qui devra être créée par les autorités territoriales, compétentes en matière de droit civil en vertu de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.
En deuxième lieu, le quatrième alinéa prévoit que l'institut pourra exercer, au nom et pour le compte de l'Autorité des marchés financiers, le pouvoir de contrôle et d'enquête de celle-ci dans les trois collectivités du Pacifique. En particulier, cette habilitation permettra à l'IEOM de contrôler le respect des prescriptions relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme dans ces collectivités. Le pouvoir de sanction demeure logiquement assuré par la commission des sanctions de l'AMF.
Enfin l'IEOM est autorisé, dans le sixième alinéa, à fournir dans les trois territoires de sa zone d'intervention des prestations de services pour le compte de tiers , après accord de son conseil de surveillance. Cette habilitation est similaire à celle conférée à l'IEDOM.
L'ensemble de ces nouvelles missions fera l'objet de conventions , signées avec le gouvernement de la Polynésie française, l'AMF ou des tiers selon le cas, et qui définiront notamment les conditions d'exercice et de rémunération de l'Institut.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve ces dispositions qui viennent opportunément combler des lacunes, telles que le traitement du surendettement en Polynésie française, ou procéder à un alignement sur certaines missions de l'IEDOM.
Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.
* 311 Soit 90 % du personnel du siège et le personnel d'encadrement (directeurs et leurs adjoints) des agences.
* 312 Soit, aux termes de l'article L. 711-3, mettre en circulation les monnaies métalliques, exercer les missions d'intérêt général qui lui sont conventionnellement confiées par l'Etat (ces conventions définissent en particulier la nature de ces prestations et les conditions de leur rémunération), et assurer toute prestation d'étude ou de service pour le compte de tiers, après accord de la Banque de France.