2. Les dispositifs particuliers
Dans le cadre de la réforme, le dispositif de départ anticipé pour carrière longue a été adapté.
Le tableau ci-après résume les nouvelles conditions d'âge, de durée d'assurance cotisée et de durée d'assurance validée (incluant des périodes non cotisées (maladie, service national ...) selon les générations.
Modifications des conditions de départ anticipé pour carrière longue
Source : annexe 1 au PLFSS pour 2012 - Programme de qualité et d'efficience « retraites »
Les modifications des conditions d'accès à ce dispositif opérées avant puis lors de la réforme de 2010 auront une forte incidence sur les flux de départ et sur les caractéristiques des bénéficiaires.
Pour le régime général, le départ anticipé pour carrière longue concernait plus de 100 000 assurés par an de 2004 à 2008, avant de chuter à 20 000 départs en 2009 et 40 000 en 2010 du fait des modifications des conditions d'accès. Avec la réforme de 2010, le flux annuel de départs anticipés devrait croître jusqu'en 2017, où il atteindrait son maximum avec plus de 94 000 assurés bénéficiant d'un départ avant l'âge légal. Mais pour 90 % d'entre eux, ces départs auraient lieu à soixante ans ou après . Les départs anticipés concerneront donc quasi exclusivement des salariés qui seraient partis dans des conditions normales, en l'absence de réforme des retraites. Cela signifie aussi que ces départs ne représentent aucun surcoût par rapport à la situation antérieure à la réforme. Au-delà de 2017, le flux diminuerait en lien avec la hausse de l'âge de fin d'études pour les générations plus jeunes.
Projection des flux de départs anticipés
pour carrière longue
dans le régime
général
Source : Cnav
3. Les mesures d'âge et la question de l'emploi des seniors
Il est aujourd'hui prématuré d'évaluer l'impact du relèvement progressif de l'âge de la retraite sur les seniors .
Le Gouvernement espère une amélioration du taux d'emploi des seniors qui, d'une part, permettrait d'éviter une augmentation du chômage des plus de cinquante-cinq ans, d'autre part, procurerait aux régimes de retraites des ressources supplémentaires. Le plan national d'action concerté pour l'emploi des seniors 2006-2010 s'est notamment attaché à restreindre le recours aux préretraites. Par ailleurs, depuis 2010, les entreprises d'au moins cinquante salariés doivent être couvertes par un accord de branche ou d'entreprise ou, à défaut, d'un plan d'action unilatéral en faveur de l'emploi des seniors. La loi de 2010 portant réforme des retraites comporte deux mesures incitatives au recrutement et au maintien en emploi des seniors : une aide de 2 000 euros accordée aux entreprises embauchant un demandeur d'emploi de plus de quarante-cinq ans en contrat de professionnalisation ; la déduction du coût du tutorat jeune-senior de la participation au financement de la formation professionnelle.
Le Gouvernement table également sur une modification des comportements des entreprises et des salariés, liée à un « effet horizon » du report de l'âge légal de départ en retraite. Les entreprises engageraient plus volontiers des efforts de formation pour leurs salariés les plus âgés dès lors qu'elles auraient l'assurance de pouvoir amortir cet investissement sur une durée plus longue. Les salariés seraient incités à demeurer en activité si leur travail est plus motivant et mieux rémunéré.
Les statistiques présentées dans les documents annexes au PLFSS pour 2012 retracent les évolutions intervenues entre 2003 et 2009 . Sur cette période, le taux d'emploi des 55-59 ans passe de 54,4 % à 60,6 % et celui des 60-64 ans de 13,3 % à 17,9 %, cette progression étant plus marquée pour les femmes que pour les hommes. On constate par ailleurs que depuis 2003, l'âge moyen de cessation d'activité (entre 59 et 60 ans) et l'âge moyen de départ en retraite (entre 61 et 62 ans) ont peu évolué, l'écart entre ces deux échéances se maintenant à deux ans.
Il est difficile, à partir de ces éléments, d'extrapoler l'évolution du taux d'emploi des seniors à l'issue du relèvement de l'âge légal de départ à soixante-deux ans.
Toutefois, la dégradation de la situation économique justifie les inquiétudes qui avaient été exprimées lors du débat sur la réforme des retraites.
Les dernières données publiées par Pôle emploi fin octobre 2011 font apparaître une augmentation de 15,2 % sur un an du nombre de demandeurs d'emploi de cinquante ans et plus , alors que la progression est de 4,5 % sur un an pour l'ensemble des demandeurs d'emploi.
Cette évolution inquiétante amène de nouveau à soulever la question de la garantie de ressources des seniors privés d'emploi avant d'avoir atteint l'âge légal de départ en retraite.
La loi de finances pour 2009 avait supprimé, à compter du 1 er janvier 2009, l' allocation équivalent retraite (AER) , qui garantissait un niveau minimum de ressources aux demandeurs d'emploi qui ne pouvaient percevoir leur pension de retraite, faute d'avoir soixante ans, alors qu'ils avaient validé 160 trimestres au titre de l'assurance vieillesse.
Sous la pression de la forte hausse du chômage enregistrée début 2009 et de l'aggravation de la situation personnelle de nombreux demandeurs d'emploi en fin de droits, le Gouvernement a décidé de rétablir l'AER, par décret, et « à titre exceptionnel pour l'année 2009 » . L'AER a de nouveau été prorogée, toujours à titre exceptionnel, pour l'année 2010.
L'AER a donc pris fin au 1 er janvier 2011, mais à l'initiative de la commission des affaires sociales, le Sénat a adopté un amendement, devenu l'article 106 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, prévoyant que les demandeurs d'emploi bénéficiant de l'AER au 31 décembre 2010 continuent de la percevoir au-delà de soixante ans, jusqu'au nouvel âge de départ en retraite qui leur est applicable.
Notre commission s'était ainsi montrée soucieuse de protéger les chômeurs en fin de droits proches de l'âge de la retraite des effets du relèvement progressif de l'âge légal de départ.
Le Gouvernement vient d'annoncer l'institution, par un décret à paraître, d'une allocation transitoire de solidarité (ATS) qui prendra rétroactivement effet au 1 er juillet 2011 et a vocation à disparaître fin 2014.
D'après les indications fournies par le Gouvernement, l'ATS sera plus restrictive que l'AER, puisqu'elle ne concernera que les demandeurs d'emploi dont la situation vis-à-vis de l'assurance chômage et de l'assurance vieillesse a évolué en raison de la loi portant réforme des retraites, à savoir ceux d'entre eux nés entre le 1 er juillet 1951 et le 31 décembre 1953 .
Le Gouvernement estime à 11 000 personnes le nombre de bénéficiaires potentiels de ce dispositif, alors que l'AER avait été versée à plus de 40 000 demandeurs d'emploi en 2010.
La mise en place de cette ATS illustre d'une certaine manière les dures réalités auxquelles se heurte l'ambition de relever le taux d'emploi des seniors. Mais elle ne paraît pas pour autant apporter une réponse suffisante à la situation de nombreux demandeurs d'emploi en fin de droits qui seront confrontés dans les années à venir à l'entrée en vigueur de la réforme des retraites.