C. LA COMMISSION EUROPÉENNE PROPOSE UN DISPOSITIF AMBITIEUX ET MULTI-SECTORIEL

La proposition de directive présentée le 22 juin 2011 par la Commission européenne remplace la directive 2004/8/CE sur la cogénération et la directive 2006/32/CE relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques, aucun de ces deux textes n'ayant, selon Bruxelles, permis d'exploiter pleinement le potentiel d'économies d'énergie.

Le texte comprend 24 articles et 15 annexes, qui seront présentés ici de manière synthétique.

Les objectifs généraux

Comme il est d'usage dans les textes législatifs européens, l'article 1 er présente la directive et l'article 2 définit les termes employés.

L'article 3 prévoit que chaque État doit fixer un objectif national d'efficacité énergétique exprimé sous la forme d'un niveau absolu de consommation d'énergie primaire en 2020.

La Commission évaluera, à la mi-2014, si l'Union est susceptible d'atteindre l'objectif de 20 % d'économies d'énergie primaire d'ici à 2020, ce qui nécessite, selon cet article, une réduction de la consommation d'énergie primaire de l'Union européenne de 368 Mtep (méta-tonnes équivalent pétrole) en 2020 18 ( * ) .

Les règles concernant les organismes publics

L'article 4 prévoit que 3 % de la surface au sol totale des bâtiments détenus par les organismes publics seront rénovés chaque année de manière à satisfaire au moins des exigences minimales en matière de performance énergétique. Ce taux concerne les bâtiments ayant une surface au sol utile totale supérieure à 250 m² qui ne satisfont pas aux exigences nationales minimales en matière de performance énergétique fixées en application de l'article 4 de la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments 19 ( * ) .

Chaque État doit publier, d'ici à 2014, un inventaire des bâtiments détenus par les organismes publics, en indiquant la surface au sol et la performance énergétique de chaque bâtiment.

Par ailleurs, les États membres doivent encourager les organismes publics à adopter un plan en matière d'efficacité énergétique et un plan de gestion de l'énergie.

L'étude d'impact considère que :

- la rénovation des bâtiments publics ne permettrait pas de réaliser des économies d'énergie particulièrement élevées (environ 9 Mtep), mais qu'elle aurait une forte visibilité dans l'espace public et aurait donc un effet d'entrainement ;

- les économies d'énergie attendues devraient compenser le coût des investissements nécessaires.

L'article 5 contraint les organismes publics à n'acquérir que des produits, services et bâtiments à haute performance en matière d'efficacité énergétique.

Les mécanismes d'obligations en matière d'économies d'énergie

L'article 6 prévoit l'instauration, dans chaque État membre, d'un mécanisme garantissant des économies d'énergie de 1,5 % en volume chaque année.

Ces obligations pèsent soit sur les distributeurs d'énergie, soit sur les entreprises de vente d'énergie au détail, qui doivent obtenir ces économies d'énergie auprès des clients finals. Elles ne concernent pas l'énergie utilisée dans les transports.

Toutefois, les États membres peuvent, au lieu d'instaurer un tel mécanisme de « certificats blancs », adopter d'autres mesures pour obtenir le même volume d'économies d'énergie auprès des clients finals. Ces mesures sont notifiées à la Commission européenne, qui peut les refuser.

L'article 7 exige que les États membres favorisent la réalisation d'audits énergétiques à destination des clients finaux, notamment les ménages et les PME.

Les entreprises autres que les PME devront faire l'objet d'un audit énergétique indépendant, au plus tard le 30 juin 2014 puis tous les trois ans.

Le comptage et la facturation de l'énergie

L'article 8 prévoit l'installation de compteurs individuels chez les clients finals en matière d'électricité, de gaz naturel, de chauffage ou refroidissement urbains et d'eau chaude urbaine à usage domestique.

Ces compteurs doivent afficher la consommation énergétique réelle et fournir de nombreuses informations sur le moment où l'énergie a été utilisée. Ils doivent être connectés à une interface capable de fournir de façon sécurisée au client final des informations détaillées sur sa consommation.

Lorsqu'il est physiquement impossible d'utiliser des compteurs individuels de la consommation de chaleur, des répartiteurs seront utilisés afin de mesurer la consommation de chaleur de chaque radiateur.

Au plus tard le 1 er janvier 2015, la facturation doit être précise et fondée sur la consommation réelle, sur une base mensuelle ou bimestrielle selon la catégorie d'énergie.

L'article 9 prévoit l'instauration d'un régime de sanctions permettant d'assurer l'application des articles 6 à 8. Ce régime de sanctions, qui doit être effectif, proportionné et dissuasif, est déterminé au niveau des États membres.

Le développement de la cogénération et des réseaux

L'article 10 prévoit que chaque État membre doit établir, d'ici au 1 er janvier 2014, un plan national en matière de chaleur et de froid, mis à jour par la suite tous les cinq ans.

Ce plan doit favoriser le développement de la cogénération à haut rendement et de systèmes efficaces de chauffage et de refroidissement urbains. Il doit être pris en compte dans les plans de développement locaux et régionaux, notamment les plans d'aménagement du territoire urbain et rural.

Des unités de cogénération à haut rendement récupérant la chaleur perdue doivent équiper :

- les nouvelles installations de production d'électricité thermique de puissance supérieure à 20 MW, qui doivent être situées à proximité d'un point de demande de chaleur ;

- les installations existantes de production d'électricité d'une puissance thermique absorbée nominale supérieure à 20 MW, lors de leur réaménagement substantiel ou lorsque leur autorisation est actualisée, si la chaleur produite peut être utilisée localement :

- aux installations industrielles d'une puissance thermique absorbée supérieure à 20 MW génératrices de chaleur perdue, lors de leur construction ou de leur réaménagement. Ces installations doivent être raccordées à des réseaux de chauffage et de refroidissement urbains.

Enfin, les États membres établiront des garanties d'origine de l'électricité produite par cogénération à haut rendement. Ces garanties seront reconnues mutuellement entre États membres.

L'article 11 prévoit la réalisation, dans chaque État membre, d'un inventaire concernant d'une part les installations pratiquant la combustion de combustibles avec une puissance thermique supérieure à 50 MW, d'autre part les installations de raffinage d'huiles minérales et de gaz.

L'article 12 dispose que les autorités de régulation de l'énergie tiennent compte de l'objectif d'efficacité énergétique dans leurs décisions relatives à l'exploitation des infrastructures de gaz et d'électricité.

Par ailleurs, les gestionnaires de réseau devront offrir une priorité ou une garantie d'accès au réseau pour l'électricité issue de la cogénération à haut rendement.

Dispositions diverses et finales

L'article 13 prévoit la mise en place de systèmes de certification ou de qualification pour les fournisseurs de services énergétiques, d'audits énergétiques et de mesures visant à améliorer l'efficacité énergétique.

L'article 14 favorise le développement du marché des services énergétiques et l'accès des petites et moyennes entreprises à ce marché, notamment par l'élaboration de contrats types dans le secteur public, l'amélioration de l'information et le développement de labels de qualité.

L'article 15 dispose que les États doivent supprimer certaines entraves réglementaires susceptibles de dissuader des acteurs de procéder à des investissements d'efficacité énergétique. Ces entraves peuvent concerner :

- le fractionnement des incitations entre les propriétaires d'un bâtiment ou entre le propriétaire et le locataire ;

- la réglementation et les pratiques en matière de marchés publics et de budgétisation et comptabilité.

L'article 16 fixe des coefficients de conversion permettant de comparer les économies d'énergie selon les produits (par exemple, 1 kg de coke fournit 7,9 kWh alors que 1 kg de gaz naturel fournit 13,10 kWh, etc.).

Les articles 17 et 18 habilitent la Commission à adopter des actes délégués afin :

- d'établir un système de reconnaissance mutuelle des économies d'énergie obtenues dans le cadre des mécanismes nationaux (voir l'article 6) ;

- de définir une méthodologie d'analyse coûts/bénéfices permettant d'exempter certaines installations de l'obligation de cogénération fixée par l'article 10 ;

- de réviser périodiquement les valeurs de référence qui permettent d'établir le rendement effectif de la production séparée de chaleur et d'électricité afin de comparer celle-ci avec un système de cogénération ;

- d'adapter au progrès technique certaines valeurs et méthodes de calcul.

L'article 19 prévoit que chaque État rendra compte chaque année des progrès enregistrés dans la réalisation des objectifs nationaux d'efficacité énergétique, ainsi que du développement de la production nationale d'électricité et de chaleur issues de la cogénération à haut rendement.

Des rapports additionnels, rendus tous les trois ans, devront décrire l'ensemble des politiques et actions menées en matière d'efficacité énergétique dans chaque État membre.

La Commission évaluera le degré d'avancement des États membres dans la réalisation de leurs objectifs nationaux d'efficacité énergétique et pourra formuler des recommandations à leur attention.

La Commission pourra, en 2014, proposer le cas échéant la mise en place d'objectifs nationaux obligatoires en matière d'efficacité énergétique.

Un autre point d'étape est prévu en 2018 concernant les mécanismes d'obligations en matière d'efficacité énergétique.

L'article 20 indique que la Commission sera assistée par un comité dans son travail.

L'article 21 abroge la plupart des dispositions de deux directives, dont les dispositions sont reprises par le présent texte :

- directive 2006/32/CE du 5 avril 2006 relative à l'efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques ;

- directive 2004/8/CE du 11 février 2004 concernant la promotion de la cogénération sur la base de la demande de chaleur utile dans le marché intérieur de l'énergie.

L'article 22 précise que les États membres doivent transposer la directive dans un délai de douze mois à compter de son entrée en vigueur.

Enfin, l'article 23 prévoit l'entrée en vigueur de la directive le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne, et l'article 24 dispose que les États membres sont destinataires de la directive.


* 18 À titre de comparaison, le Livre vert sur l'efficacité énergétique, publié par la Commission européenne le 22 juin 2005, estimait que les 25 États membres de l'Union européenne consommaient près de 1 725 Mtep et proposait des mesures dont elle estimait l'effet à 360 Mtep d'énergie économisée.

* 19 L'article 4 de la directive 2010/31/UE a prévu l'instauration, dans chaque État, d'exigences minimales en matière de performance énergétique, applicables aux bâtiments neufs lors de leur construction et aux bâtiments existants lors de leur rénovation, mais n'exigeait pas le lancement de tels programmes de rénovation.

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