B. UNE PROPOSITION DE LOI, ÉTROITEMENT DÉLIMITÉE ET CONFORME, DE CE FAIT, AUX EXIGENCES CONSTITUTIONNELLES ET CONVENTIONNELLES

Le texte adopté par l'Assemblée nationale, qui ne diffère de la proposition de loi d'origine, comme du texte déposé par notre collègue Gérard Collomb, que par deux amendements rédactionnels, enserre la validation dans de strictes limites. Ce faisant, il répond aux exigences constitutionnelles et conventionnelles précédemment évoquées.

En premier lieu, non seulement il vise à garantir la sécurité juridique d'un projet d'aménagement important, qui devrait permettre le développement d'un pôle de compétence biomédical d'envergure national, mais il tend aussi à remédier à une irrégularité formelle qui menace la propriété acquise, de bonne foi, depuis près de trente ans, par de nombreuses personnes privées. La validation proposée, dont l'objet est à la fois de permettre le développement d'un nouveau programme d'aménagement de la zone concerné, et d'éviter la remise en cause de situations acquises depuis plus de trente ans, apparaît donc bien justifiée par un motif impérieux d'intérêt général.

La proposition de loi réserve bien le cas des éventuelles décisions passées en force de chose jugée. Les services de la ville de Lyon ont à cet égard formellement attesté devant votre rapporteur, que l'irrégularité évoquée n'avait donné lieu, jusqu'à présent, à aucun recours contentieux. La mise en cause éventuelle d'une décision de justice par la présente validation semble donc improbable non seulement en droit, mais aussi en fait.

La validation envisagée ne peut être assimilée à une sanction. Ce faisant, la question de sa conformité au principe de non-rétroactivité des peines ne se pose pas.

L'article unique de la proposition de loi ne semble pas non plus mettre en cause un quelconque principe de valeur constitutionnelle. En effet, d'une part, le Conseil constitutionnel n'a jamais expressément reconnu une telle valeur à la règle d'inaliénabilité du domaine public 20 ( * ) . D'autre part, la désaffectation des terrains cédés n'a pas mis en cause l'exigence constitutionnelle de continuité des services publics, puisque les abattoirs furent réimplantés dans une autre commune de l'agglomération.

Le champ de la mesure de validation est, quant à lui, étroitement délimité, en ce qui concerne :

- l'opération d'aménagement. Il s'agit exclusivement des terrains situés dans les limites de la ZAC du quartier central de Gerland, créée par arrêté du préfet du Rhône du 16 février 1983 ;

- les actes validés. Il s'agit des contrats passés dans le cadre de cette opération, qui répondent à deux caractéristiques. Ils doivent d'une part avoir été conclus par la ville de Lyon et d'autre part avoir entraîné un transfert partiel ou total de propriété sur les terrains concernés (contrats de cession de terrain, de location, de bail ou de concession d'usage assortie de droits réels) ;

- sa portée. La validation ne concerne les actes précités que dans la mesure où leur légalité serait contestée sur le fondement de l'absence de déclassement du domaine public. Elle ne concerne donc pas tous les autres motifs pour lesquels ils pourraient être contestés.

En conclusion, votre rapporteur formule trois observations.

La validation ne saurait valoir pour l'avenir : elle n'affectera que les actes antérieurs à la promulgation de la loi. À défaut, sa portée pourrait être jugée imprécise. En revanche, les actes légalement adoptés à partir de décisions validées 21 ( * ) ne pourront, eux, faire l'objet d'aucune contestation.

Par ailleurs, si la proposition de loi régularise les actes conclus en dépit de l'absence de déclassement, elle ne vaut pas déclassement des terrains en cause , pour ceux qui demeurent dans le patrimoine de la collectivité parce que seul un bail ou une concession d'usage a été consenti sur eux à l'époque 22 ( * ) . Ce déclassement devra donc être réalisé par la ville de Lyon. En tout état de cause, il sera nécessaire qu'elle y procède avant tout renouvellement, à leur échéance, de ces baux ou concessions d'usage. À défaut, le nouvel acte serait vicié par la même illégalité qui affecte aujourd'hui les précédents. Interrogés sur ce point par votre rapporteur, les représentants de la ville de Lyon ont assuré qu'ils entendaient bien procéder ainsi.

Enfin, l'illégalité couverte par le présent texte est une irrégularité formelle, jamais contestée en trente ans. Ce faisant, sa validation s'apparente à une simple régularisation , peu susceptible de nuire aux intérêts des justiciables .

Rien ne semble ainsi s'opposer à ce que la présente proposition de loi, tout à fait justifiée dans son objet, soit adoptée en l'état.

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Votre commission a adopté le présent texte sans modification .


* 20 En revanche, le Conseil constitutionnel rappelle que le patrimoine des personnes publiques ne doit pas être aliéné ou durablement grevé de droits réels au profit d'une personne privée sans une contrepartie appropriée (CC, n° 2008-567 DC du 24 juillet 2008).

* 21 Comme, par exemple, la vente, par leurs propriétaires actuels, des terrains acquis auprès de la ville de Lyon.

* 22 En revanche, cette question ne se pose pas, par définition, pour ceux qui ont été cédés, puisqu'ils sont sortis, de ce fait, du patrimoine de la collectivité.

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