EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. DES MESURES CONTESTABLES SUR LE PRINCIPE COMME SUR LEURS MODALITÉS D'APPLICATION
L'objet de la proposition de loi déposée par le groupe CRC est circonscrit. Il tend à supprimer deux mesures qui lui paraissent incompatibles avec le principe qui fonde notre système d'assurance maladie, celui de la solidarité entre bien-portants et malades. En effet, la participation forfaitaire de 1 euro sur les consultations médicales, mise en place en 2004, et les franchises dites « médicales », même si elles ne portent pas en fait sur des actes médicaux, ne peuvent être couvertes par les contrats « responsables » d'assurance maladie complémentaire qui représentent 90 % des contrats des particuliers et demain la quasi-totalité des contrats collectifs d'entreprise.
Les franchises sont de 50 centimes par boîte de médicament, 50 centimes sur les actes pratiqués par les auxiliaires médicaux et 2 euros pour les transports sanitaires. Il existe un plafond journalier pour les actes des auxiliaires médicaux et les transports - mais non pour les médicaments - et - pour l'ensemble des franchises - un plafond annuel de 50 euros ; des plafonds s'appliquent également pour la participation forfaitaire.
Ces deux mesures représentent pour la sécurité sociale une moindre dépense de l'ordre de 1,47 milliard d'euros en 2013, dont 870 millions au titre des franchises et 600 millions au titre de la participation forfaitaire. En 2014, le montant cumulé des franchises et de la participation forfaitaire devrait atteindre 1,65 milliard. Cette somme est importante pour la sécurité sociale, mais les principes qui fondent ces mesures, autant que les moyens mis en oeuvre pour la recouvrer, sont contestables.
A. UNE MESURE D'ECONOMIE QUI NE DIT PAS SON NOM
Dans son rapport annuel de 2013, la Cour des comptes a inséré une analyse de la politique de lutte contre la maladie d'Alzheimer. Elle a jugé que « le lien ainsi fait entre la mise en place des franchises et leur affectation à des actions de santé publique apparaît artificiel . » De fait, les franchises constituent une moindre dépenses pour l'assurance maladie, mais rien n'indique que les sommes ainsi dégagées soient effectivement fléchées vers les mesures du plan de lutte contre les maladies neuro-dégénératives.
Reste donc l'autre objectif, celui de responsabiliser les patients. Comme l'a indiqué Marisol Touraine, ministre de la santé, « les personnes malades ne le sont pas par choix et ne consomment pas des soins par plaisir ». Responsabiliser les malades n'a donc guère de sens dans la mesure où ils ne sont pas prescripteurs de leurs soins et où, soumis au parcours de santé, ils ne multiplient pas les consultations inutiles.
D'autant que le nombre de personnes concernées par les participations et les franchises ne cesse de décroître. Tout d'abord des exceptions sont prévues :
• les enfants et les jeunes de moins de 18 ans ;
• les bénéficiaires de la couverture
maladie universelle complémentaire (CMU-C) ou de l'aide médicale
de l'Etat (AME) et, depuis la loi de financement de la sécurité
sociale pour 2015, de l'aide à la complémentaire santé
(ACS), ce qui représente 5 millions de personnes ;
• les femmes prises en charge dans le cadre de la
maternité ;
• les titulaires d'une pension visés à
l'article L. 115 du code des pensions militaires d'invalidité et
des victimes de guerre, dispensés de l'acquittement de la participation
forfaitaire mais uniquement pour les soins délivrés gratuitement
par l'Etat et nécessités par les infirmités donnant lieu
à pension.
Dès lors, sur 3,6 milliards d'actes qui entreraient dans le champ de la franchise, 2 milliards en sont exonérés.
Par ailleurs les personnes ayant souscrit des contrats non « solidaires et responsables » (10 %) ne supportent pas les franchises et restes à charge, qui sont couverts par leur assurance complémentaire.