II. UN CADRE JURIDIQUE QUI DOIT ÊTRE MIS EN CONFORMITÉ AVEC LE DROIT EUROPÉEN
Le tunnel sous la Manche est régi à la fois par des accords bilatéraux franco-britanniques et par les normes communautaires applicables au transport ferroviaire, le trafic dans le tunnel étant exclusivement ferroviaire.
La transposition des directives européennes à la liaison fixe transmanche, notamment les trois paquets ferroviaires adoptés respectivement en 2001, 2004 et 2007, s'est opérée à la fois par la prise de dispositions législatives et réglementaires nationales et par l'adoption de règlements binationaux.
Les services du ministère des affaires étrangères et du développement international 7 ( * ) interrogés ont rappelé à votre rapporteur que les principales modifications entraînées jusqu'à maintenant par l'application des directives au tunnel sous la Manche sont relatives à :
- la définition de droits d'accès au réseau ferroviaire du tunnel, à la mise en oeuvre des dispositions relatives aux capacités d'infrastructure ainsi qu'à la tarification de l'infrastructure ;
- l'installation de la Commission intergouvernementale comme autorité de sécurité pour le tunnel au sens des directives européennes ainsi qu'à l'adoption de la règlementation relative aux certificats de sécurité ;
- la mise en place de dispositions relatives à l'interopérabilité conformément aux règles européennes ;
- et à la régulation des activités ferroviaires par des organismes de contrôles indépendants.
La directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen devait être transposée dans les droits nationaux avant le 16 juin 2015. Constituant une refonte du premier paquet ferroviaire, elle abroge les trois anciennes directives sur l'accès aux infrastructures et la gouvernance ferroviaires (la directive 91/440/CEE du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires, la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires et la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire, la tarification de l'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité) qui étaient transposées dans le règlement binational de 2009 . Elle confirme et complète les règles relatives à l'accès aux infrastructures et à la gouvernance ferroviaires élaborées précédemment. Elle renforce également les principes de transparence et d'accès non discriminatoire aux infrastructures ferroviaires.
En France, le travail de transposition de la directive a été réalisé pour l'essentiel , alors même que le paysage ferroviaire connaissait des évolutions importantes liées à la réforme ferroviaire visant à réformer en profondeur la gouvernance du système de transport ferroviaire français afin d'améliorer son efficacité et ses équilibres financiers.
Répondant par écrit aux questions de votre rapporteur, les services du ministère des affaires étrangères et du développement international 8 ( * ) lui ont fait savoir que les textes suivants avaient été publiés :
- la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire , qui a notamment organisé l'indépendance juridique, décisionnelle et organisationnelle du gestionnaire d'infrastructure SNCF Réseau (article 7 de la directive 2012/34/UE), a défini le cadre d'élaboration de la stratégie indicative de développement de l'infrastructure ferroviaire (article 8 de la directive 2012/34/UE), a fixé les principaux paramètres du contrat État-gestionnaire d'infrastructure (article 30 de la directive 2012/34/UE) et a renforcé les moyens et l'indépendance de l'organisme de contrôle, l'Arafer (articles 55 et 56 de la directive 2012/34/UE).
- l'ordonnance n° 2015-855 du 15 juillet 2015 prise en application de l'article 38 de la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire , qui constitue le principal texte de transposition et qui porte notamment sur :
• le renforcement des règles de séparation comptable (article 6 de la directive 2012/34/UE) ;
• la définition des règles d'accès à l'infrastructure linéaire et aux installations de service (chapitre IV et article 13 de la directive 2012/34/UE) ;
• la coopération entre gestionnaires d'infrastructure (articles 37 et 40 de la directive 2012/34/UE) ;
• le renforcement des moyens et de l'indépendance de l'Arafer et l'organisation de sa coopération avec les autres acteurs ferroviaires (articles 55, 56 et 57 de la directive 2012/34/UE).
- le décret n° 2015-1040 du 20 août 2015 relatif à l'accès au réseau ferroviaire , qui rassemble les dispositions applicables aux gestionnaires d'infrastructure et relatives aux conditions d'accès à l'infrastructure linéaire et aux services qui y sont délivrés (articles 8, 10 et 13 et chapitre IV de la directive 2012/34/UE) ;
- plusieurs autres décrets , sur des sujets particuliers :
• le décret n° 2015-960 du 31 juillet 2015 relatif à la licence d'entreprise ferroviaire et portant diverses dispositions en matière de transport apporte quelques modifications aux dispositions régissant la délivrance des licences d'entreprise ferroviaire (chapitre III de la directive 2012/34/UE) et complète le dispositif organisant la coopération entre l'Arafer, l'autorité nationale de sécurité et l'autorité responsable de la délivrance des licences (article 56 de la directive 2012/34/UE) ;
• le décret n° 2015-1167 du 22 septembre 2015 relatif aux nouveaux services internationaux de transport ferroviaire de voyageurs a mis le droit national en conformité avec le règlement d'exécution (UE) n° 869/2014 de la Commission du 11 août 2014 relatif à de nouveaux services de transport ferroviaire de voyageurs ;
• les décrets n° 2015-138 du 10 février 2015 relatif aux missions et aux statuts de SNCF Mobilités et n° 2015-140 du 10 février 2015 relatif aux missions et aux statuts de SNCF Réseau précisent les modalités de mise en oeuvre des règles de séparation comptable au sein de l'entreprise ferroviaire SNCF Mobilités et du gestionnaire d'infrastructure SNCF Réseau (article 6 de la directive 2012/34/UE) ;
• les décrets n° 2015-137 du 10 février 2015 relatif aux missions et aux statuts de la SNCF et à la mission de contrôle économique et financier des transports, n° 2015-140 du 10 février 2015 relatif aux missions et aux statuts de SNCF Réseau et n° 2015-139 du 10 février 2015 relatif à la confidentialité des données détenues par le gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire et à la commission de déontologie du système de transport ferroviaire, complètent les dispositions législatives organisant l'indépendance juridique, décisionnelle et organisationnelle des fonctions essentielles des gestionnaires d'infrastructure (article 7 de la directive 2012/34/UE).
Un projet de décret , portant sur l'accès aux installations de service, et deux projets d'arrêtés , portant sur les licences d'entreprise ferroviaire, sont en préparation, afin de compléter le dispositif de transposition.
Concernant le cas particulier du tunnel sous la Manche , les textes de transposition de la directive en droit français - essentiellement l' ordonnance n° 2015-855 du 15 juillet 2015 et le décret n° 2015-1040 du 20 août 2015 relatif à l'accès au réseau ferroviaire - contiennent les mentions nécessaires pour que leurs dispositions s'appliquent à la liaison fixe transmanche, mais celles-ci ne s'appliqueront qu'à l'abrogation du règlement binational de 2009 et ce, afin d'éviter tout conflit de normes. En outre, les gouvernements français et britannique ont décidé d'un commun accord, qu'à partir de la transposition de la directive 2012/34/UE , les principales dispositions des directives européennes seraient prises par les droits nationaux, et non plus par un règlement binational.
* 7 Source : réponses au questionnaire par écrit de la commission.
* 8 Source : réponses au questionnaire par écrit de la commission.