N° 461
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020
Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 mai 2020 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la
proposition de loi
,
adoptée par l'Assemblée
nationale, visant à
répondre
à
la
demande
des
patients
par la
création
de
Points
d'
accueil
pour
soins
immédiats
,
Par Mme Élisabeth DOINEAU,
Sénatrice
(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; MM. René-Paul Savary, Gérard Dériot, Mme Colette Giudicelli, M. Yves Daudigny, Mmes Michelle Meunier, Élisabeth Doineau, MM. Michel Amiel, Guillaume Arnell, Mme Laurence Cohen, M. Daniel Chasseing , vice-présidents ; M. Michel Forissier, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, Corinne Féret, M. Olivier Henno , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mmes Martine Berthet, Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Jean-Noël Cardoux, Mmes Annie Delmont-Koropoulis, Catherine Deroche, Chantal Deseyne, Nassimah Dindar, Catherine Fournier, Frédérique Gerbaud, M. Bruno Gilles, Mmes Michelle Gréaume, Nadine Grelet-Certenais, Jocelyne Guidez, Véronique Guillotin, M. Xavier Iacovelli, Mme Victoire Jasmin, M. Bernard Jomier, Mme Florence Lassarade, M. Martin Lévrier, Mmes Monique Lubin, Viviane Malet, Brigitte Micouleau, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Mmes Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, MM. Jean Sol, Dominique Théophile, Jean-Louis Tourenne, Mme Sabine Van Heghe . |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : |
2226 , 2428 et T.A. 358 |
|
Sénat : |
164 et 462 (2019-2020) |
L'ESSENTIEL
Le 28 novembre 2019, l'Assemblée nationale a adopté, à l'unanimité et avec l'avis favorable du Gouvernement, une proposition de loi présentée par Cyrille Isaac-Sibille et des députés du groupe Modem visant à la création de points d'accueil pour soins immédiats (PASI).
Ce texte, substantiellement modifié lors de son examen par l'Assemblée nationale, ouvre la possibilité aux directeurs généraux des agences régionales de santé de labelliser , sur la base d'un cahier des charges national, des structures destinées à prendre en charge, avec un plateau technique léger, des soins non programmés en dehors de toute urgence vitale, dans l'objectif de soulager les urgences hospitalières.
Cette initiative, fondée sur des expériences de terrain, a pour ambition d'apporter une réponse aux urgences ressenties des patients , qui peuvent les conduire à se tourner, à défaut d'une offre mieux adaptée, vers les services d'urgence. Elle vise à donner de la visibilité à des structures qui existent pour certaines d'ores et déjà , en permettant leur identification par le biais d'une signalétique spécifique.
Comme le souligne l'auteur de la proposition de loi dans le rapport qu'il a établi au nom de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, les PASI forment une « réponse ambulatoire » à la problématique des soins non programmés et s'inscrivent selon lui en complémentarité du « pacte de refondation pour les urgences » présenté par la précédente ministre en charge de la santé en septembre 2019.
Cette initiative répond à un objectif partagé. Les PASI offrent un outil parmi d'autres dont les acteurs de santé pourront se saisir.
Suivant des observations unanimes entendues par la rapporteure, les PASI devront cependant s'inscrire impérativement dans un projet de santé de territoire cohérent pour ne pas « surajouter » de la complexité et de la confusion à notre système de soins, au moment même où l'offre de soins ambulatoire est en voie de se structurer, notamment dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
Avec des amendements proposés par sa rapporteure en ce sens, la commission des affaires sociales a adopté la proposition de loi ainsi modifiée.
I. MIEUX ORGANISER LA PRISE EN CHARGE DES SOINS NON PROGRAMMÉS : UN OBJECTIF PARTAGÉ
A. LE CONSTAT BIEN ETABLI D'UN RECOURS CROISSANT ET PARFOIS INAPPROPRIÉ AUX SERVICES D'URGENCE
En 2017, 21,4 millions de passages aux urgences sont recensés dans les 713 structures publiques ou privées d'urgences 1 ( * ) , alors que ce nombre était de 10 millions en 1996.
De nombreux travaux ont mis en avant un nombre important, quoique délicat à appréhender, de recours inappropriés, qui auraient pu donner lieu à une prise en charge en ville. En se fondant sur la classification clinique des malades aux urgences (CCMU), la Cour des comptes 2 ( * ) a ainsi estimé que les 10 à 20 % de patients n'ayant besoin d'aucun acte complémentaire (CCMU 1) pouvaient être dans ce cas.
Le rapport du Sénat sur les urgences hospitalières 3 ( * ) a établi une analyse détaillée de ce phénomène en notant qu'il est « difficile de distinguer l'urgence médicalement justifiée de l'urgence ressentie, ou simplement de l'urgence constituée par l'absence de solution identifiée de prise en charge alternative » .
Ainsi, une enquête nationale conduite par la Drees en 2013 révélait qu' un patient sur cinq fréquentant un service d'urgence le justifie par l'absence d'autre solution de prise en charge : 6 % pointent l'absence de leur médecin traitant et 5 % l'impossibilité d'obtenir rapidement un rendez-vous pour des examens complémentaires. En outre, 59 % des personnes interrogées évoquent la commodité du recours aux urgences.
Ces services proposent en effet, en un seul lieu et à toute heure du jour et de la nuit, une prise en charge complète permettant de réaliser des examens complémentaires (accès à des actes d'imagerie et de biologie ou à un médecin spécialiste), le tout sans avance de frais .
Tâcher de détourner des urgences des patients qui pourraient être pris en charge en ville, pour éviter l'engorgement de ces services et réduire les coûts pour l'assurance maladie, a donné lieu à des mesures nombreuses.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 4 ( * ) a introduit une expérimentation de « forfait de réorientation des urgences » à laquelle le Sénat s'était unanimement opposé.
Une autre voie, plus pertinente, s'appuie sur l'organisation de l'« amont », pour améliorer l'accès à des soins non programmés en ville.
* 1 Drees, Panorama des établissements de santé, édition 2019.
* 2 « Les urgences hospitalières : des services toujours trop sollicités », Cour des comptes, rapport public annuel 2019.
* 3 « Les urgences hospitalières, miroir des dysfonctionnements de notre système de santé », rapport d'information n° 685 (2016-2017) de Laurence Cohen, Catherine Génisson et René-Paul Savary, fait au nom de la commission des affaires sociales, Sénat, 26 juillet 2017.
* 4 Loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 (art. 43).