N° 743
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2020-2021
Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juillet 2021
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2020 ,
Par M. Jean-François HUSSON,
Rapporteur général,
Sénateur
TOME II
CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
ANNEXE N° 29a
Sécurités
(Programmes 152 « Gendarmerie nationale » et 176 « Police nationale » ; Programme 207 « Sécurité et éducation routières »)
COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : CONTRÔLE DE LA
CIRCULATION ET
DU STATIONNEMENT
ROUTIERS
Rapporteur spécial :
M. Philippe DOMINATI
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Mme Nadine Bellurot, M. Christian Bilhac, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : |
4090 , 4195 et T.A. 628 |
Sénat : |
699 (2020-2021) |
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR
SPÉCIAL
1. Les taux d'exécution des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent à 97,2 % en AE et 99,61 % en CP , alors qu'ils s'établissaient respectivement à 101,05 % et 100,85 % en autorisations d'engagement (AE) et à 101,48 % en crédits de paiement (CP). Les dépenses de rémunération (17,67 milliards d'euros en exécution) ont ainsi été inférieures à celles programmées (17,81 milliards d'euros ouverts en loi de finances initiale). Le confinement et la mise en oeuvre des protocoles sanitaires ont conduit à réduire l'activité opérationnelle des forces de sécurité intérieure pendant la première partie de l'année et à décaler les incorporations vers la fin d'année.
2. Cette évolution n'empêche pas la mission « Sécurités » de dépasser la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 . En 2019, la mission « Sécurités » était déjà au-dessus de l'objectif normé, d'environ 146 millions d'euros. Depuis 2019, le dynamisme du schéma d'emploi et l'importance des mesures de revalorisation salariale, ont conduit à un dépassement systématique de ce plafond qui avait été anticipé par le rapporteur spécial dès 2017.
3. En 2020, la sous-consommation des dépenses de personnel est en partie imputable au retard des incorporations lié à la crise sanitaire et devrait entrainer un rebond des dépenses de personnel en 2021. Le rapporteur spécial relève donc que les faibles taux d'exécution des dépenses de personnel des deux programmes ne traduisent aucunement une amélioration de leur soutenabilité, mais un phénomène conjoncturel lié à la crise sanitaire qui devrait amplifier les tensions structurelles des deux programmes sur l'exercice 2021.
4. La loi de finances initiale pour 2020 a prévu une dotation exceptionnelle de 26,5 millions d'euros au titre de l'indemnisation du flux des heures supplémentaires dans la police nationale. En gestion, plus de 2,2 millions d'heures ont été indemnisées pour un montant total de 27,1 millions d'euros. Le rapporteur spécial estime que le stock d'heure supplémentaire, qui représente un montant indemnisable de 825,5 millions d'euros CAS « Pensions » compris, constitue une charge financière de nature à obérer significativement la marge de manoeuvre de la police nationale sur les années à venir. L'apurement de ce stock devra inévitablement s'accompagner d'efforts en matière d'organisation du temps de travail visant à limiter l'augmentation du flux.
5. La gestion de l'année 2020, marquée par des économies conjoncturelles en dépenses de personnel, a permis aux forces de sécurité d'investir dans des équipements pour leurs personnels dans le cadre du plan de relance . Le montant total des dépenses d'équipement réalisées en 2020 pour les deux forces s'élève ainsi à 401 millions d'euros, contre 332 millions d'euros en 2019. La loi de finances pour 2021 a prévu d'importants efforts en matière d'équipements portés par la mission « Plan de relance », mais qui devront impérativement s'inscrire dans la durée pour avoir de réels effets.
6. S'agissant du programme 207 « Sécurité et éducation routières », les taux d'exécution demeurent élevés tant en autorisations d'engagement (AE) qu'en crédits de paiement (CP), avec des taux qui s'établissent respectivement à 97,28 % et 97,18 %.
7. Pour la troisième année consécutive, le CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » enregistre, au terme de l'exercice 2020, un solde négatif . Ce dernier (- 182 millions d'euros) est plus élevé qu'en 2019 (- 40,40 millions d'euros) et en 2018 (- 3,55 millions d'euros). La baisse du trafic routier lié à la crise sanitaire est à l'origine de cette sous-réalisation.
8. L'architecture du CAS est devenue trop complexe . Non seulement le circuit d'affectation des amendes de la circulation a perdu toute lisibilité, mais de surcroît le CAS ne reflète pas l'effort fourni au titre de la sécurité routière puisque l'essentiel de ces dépenses (3,7 milliards d'euros en 2020 d'après le document de politique transversale annexé au PLF 2020) lui échappe.
I. LES PROGRAMMES « POLICE NATIONALE » ET « GENDARMERIE NATIONALE »
A. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2020
Les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » regroupent plus de 97 % des crédits de paiement (CP) consommés en 2020 au sein de la mission « Sécurités ».
Pour ces deux programmes, l'année 2020 est marquée par la crise sanitaire, dont les effets sur le budget des deux institutions ont été particulièrement marqués. Les dépenses de rémunération (17,67 milliards d'euros en exécution) ont ainsi été inférieures à celles programmées (17,81 milliards d'euros ouverts en loi de finances initiale). Le confinement et la mise en oeuvre des protocoles sanitaires ont conduit à réduire l'activité opérationnelle des forces de sécurité intérieure pendant la première partie de l'année et à décaler les incorporations vers la fin d'année.
Alors que les crédits des programmes exécutés connaissaient une augmentation tendancielle, ces derniers sont en baisse de 1,35 % en AE et n'augmentent que de 0,68 % en CP.
Exécution des crédits des programmes
« Gendarmerie nationale »
et « Police
nationale » en 2020
(en millions d'euros)
Programme |
Crédits exécutés 2018 |
Crédits exécutés 2019 |
Crédits votés 2020 |
Crédits exécutés 2020 |
Évolution des crédits exécutés (2019-2020) |
Exécution 2019 / LFI 2019 |
|
Police nationale |
AE |
10 808,82 |
11 073,78 |
11 092,90 |
10 895,20 |
- 1,61% |
98,22% |
CP |
10 595,74 |
10 902,96 |
10 990,90 |
10 915,90 |
0,12% |
99,32% |
|
Gendarmerie nationale |
AE |
8 916,24 |
9 618,26 |
9 907,50 |
9 517,50 |
- 1,05% |
96,06% |
CP |
8 734,98 |
8 977,38 |
9 103,20 |
9 100,30 |
1,37% |
99,97% |
|
Total |
AE |
19 725,06 |
20 692,04 |
21 000,40 |
20 412,70 |
- 1,35% |
97,20% |
CP |
19 330,72 |
19 880,34 |
20 094,10 |
20 016,20 |
0,68% |
99,61% |
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
Les taux d'exécution des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent ainsi à 97,2 % en AE et 99,61 % en CP, alors qu'ils s'établissaient respectivement à 101,05 % et 100,85 % en autorisations d'engagement (AE) et à 101,48 % en crédits de paiement (CP) en 2019 en raison des tensions importantes dans l'exécution des dépenses de personnel.
Évolution des crédits des programmes
« Police nationale »
et « Gendarmerie
nationale »
(en CP, en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
Cette évolution n'empêche pas la mission « Sécurités » de dépasser la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 1 ( * ) . En 2019, la mission « Sécurités » était déjà au-dessus de l'objectif normé, d'environ 146 millions d'euros. Depuis 2019, le dynamisme du schéma d'emploi et l'importance des mesures de revalorisation salariale, ont conduit à un dépassement systématique de ce plafond qui avait été anticipé par le rapporteur spécial dès 2017 2 ( * ) .
Pour l'ensemble de la mission « Sécurités », déduction faite des fonds de concours et des attributions de produits, l'exécution atteint 14,058 milliards d'euros, dépassant l'objectif de dépenses de la mission fixé par la LPFP de 328,7 millions d'euros.
Évolution des crédits de la mission « Sécurités » par rapport à la LPFP
(en CP, en millions d'euros)
Norme LPFP pour 2020 |
13 730 |
Exécution 2020 hors fonds de concours et |
14 058,77 |
Écart entre l'exécution et le plafond de dépenses |
328,7 |
Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes et la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022)
Pour les programmes 152 « Gendarmerie nationale » et 176 « Police nationale », l'intégralité des crédits de la réserve de précaution des dépenses de personnel, respectivement 38,4 millions d'euros et 49,7 millions d'euros, a été annulée ainsi qu'une partie des crédits de la réserve sur les autres dépenses, respectivement 32,1 millions d'euros et 28,2 millions d'euros.
En revanche, les deux forces ont bénéficié d'ouvertures d'AE et de CP en 3 ème loi de finances rectificative 3 ( * ) dans le cadre du plan de relance 4 ( * ) .
La gendarmerie nationale a bénéficié d'ouvertures au titre du plan de relance pour l'achat d'hélicoptères H160 (200 millions d'euros en AE et 20 millions d'euros en CP), pour la commande de véhicules et de bornes électriques (37,7 millions d'euros et 30,1 millions d'euros en CP), pour financer des équipements du quotidien et pour le reliquat des voitures commandées précédemment (20,6 millions d'euros en CP). Les AE et les CP pour l'achat d'hélicoptères ont été en partie reportés en 2021.
La police nationale a quant à elle obtenu une ouverture de crédits de 37,65 millions d'euros en AE et 30,10 millions d'euros en CP au titre du plan de relance pour l'acquisition de véhicules.
Mouvements de crédits intervenus en gestion sur
l'année 2020
sur la mission
« Sécurités »
(en millions d'euros)
* : fonds de concours et attributions de produits
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
* 1 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
* 2 Rapport général n° 108 (2017-2018) de M. Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2017.
* 3 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.
* 4 Ces ouvertures, concernant des dépenses pluriannuelles pour la gendarmerie et la sécurité civile, ont donné lieu à des reports sur 2021.