N° 743
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2020-2021
Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juillet 2021
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2020 ,
Par M. Jean-François HUSSON,
Rapporteur général,
Sénateur
TOME II
CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
ANNEXE N° 9
Défense
Rapporteur spécial :
M. Dominique de LEGGE
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Mme Nadine Bellurot, M. Christian Bilhac, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : |
4090 , 4195 et T.A. 628 |
Sénat : |
699 (2020-2021) |
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU
RAPPORTEUR SPÉCIAL
1. Pour la mission « Défense » en 2020, le niveau de consommation est inférieur de 22,9 % en AE et de 0,1 % en CP à celui prévu en loi de finances initiale. La crise sanitaire a eu un effet limité sur les dépenses de la mission. Les dépenses supplémentaires générées par la crise, soit 1,14 milliard d'euros, se décomposent entre d'une part, les dépenses courantes supplémentaires et, d'autre part, le soutien au secteur industriel (766 millions d'euros). La totalité des dépenses supplémentaires dues à la crise équivaut à 2,3 % des crédits de la mission « Défense » exécutés en 2020. Inversement, l'arrêt de certaines activités de préparation opérationnelle ou les retards pris par les industriels ont engendré de moindres dépenses. Au total, la crise sanitaire a donc entrainé une « économie » de 48 millions d'euros.
2. Les mesures de relance et de soutien ont été portées par le programme 146 « Équipement des forces ». Ce dernier représente 70 % des surcroits de dépenses et a notamment permis de financer le plan de soutien à la filière aéronautique. Le rapporteur spécial estime toutefois regrettable que ces mesures aient été financées dans l'enveloppe globale prévue par la loi de programmation militaire (LPM). L'annuité budgétaire 2020 n'a, ainsi, pas été augmentée à due concurrence des commandes réalisées, ni des paiements dus en 2020 (185 millions d'euros). À titre de comparaison, pour le seul exercice 2009, la mission « Défense » avait bénéficié de 1,1 milliard d'euros en AE et de 625 millions d'euros de CP liés à la relance
3. La provision totale au surcoût des opérations extérieures (Opex) et aux missions intérieures (Missint) de 850 millions d'euros a été significativement dépassée , la dépense s'élevant in fine à 1,44 milliard d'euros, dont 1,28 milliard d'euros pour les Opex et 164 millions d'euros pour les Missint. Pour la troisième année consécutive, les besoins de financements additionnels, soit la différence entre les surcoûts constatés et la dotation destinée à les couvrir (soit 240 millions d'euros en 2020), ont été financés par des ouvertures à hauteur de 200 millions d'euros entièrement gagées par des annulations de crédits mis en réserve. Cette modalité de financement est contraire à l'article 4 de la LPM, qui prévoit un financement interministériel en cas de dépassement du surcoût initialement prévu.
I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2020
En 2020, contribution au CAS (compte d'affectation spéciale) « Pensions » comprise, les dépenses de la mission « Défense » se sont élevées à 50,86 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 46,7 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit un niveau de consommation inférieur de 22,9 % en AE et de 0,1 % en CP à celui prévu en loi de finances initiale. Il convient de relever que les dotations prévues en loi de finances initiale sont identiques à celles prévues par la loi de programmation des finances publiques.
Évolution des crédits de la mission « Défense » en 2020
(en millions d'euros et en pourcentage)
2019 |
2020 |
Exécution / prévision 2020 |
Exécution 2020 / 2019 |
||||||||
Prévision |
Exécution |
Prévision |
Exécution |
en volume |
en % |
en volume |
en % |
||||
144 - Environnement et prospective de la politique de défense |
AE |
1 629,1 |
1 550,8 |
- 4,8 % |
1 766,1 |
1 784,5 |
+ 18,5 |
+ 1,0 % |
+ 233,7 |
+ 15,1 % |
|
CP |
1 476,4 |
1 459,1 |
- 1,2 % |
1 548,1 |
1 541,4 |
- 6,6 |
- 0,4 % |
+ 82,3 |
+ 5,6 % |
||
146 - Équipement des forces |
AE |
11 650,7 |
11 378,5 |
- 2,3 % |
25 419,0 |
13 699,4 |
- 11 719,7 |
- 46,1 % |
+ 2 320,9 |
+ 20,4 % |
|
CP |
9 989,0 |
9 954,9 |
- 0,3 % |
12 654,6 |
12 623,4 |
- 31,2 |
- 0,2 % |
+ 2 668,4 |
+ 26,8 % |
||
178 - Préparation et emploi des forces |
AE |
15 318,9 |
13 600,3 |
- 11,2 % |
16 534,9 |
13 266,5 |
- 3 268,4 |
- 19,8 % |
- 333,8 |
- 2,5 % |
|
CP |
9 119,9 |
9 427,2 |
+ 3,4 % |
10 290,2 |
10 540,0 |
+ 249,8 |
+ 2,4 % |
+ 1 112,8 |
+ 11,8 % |
||
212 - Soutien de la politique de la défense |
AE |
23 669,1 |
23 182,8 |
- 2,1 % |
22 257,2 |
22 110,5 |
- 146,7 |
- 0,7 % |
- 1 072,3 |
- 4,6 % |
|
CP |
23 464,8 |
23 152,8 |
- 1,3 % |
22 212,7 |
21 970,8 |
- 241,9 |
- 1,1 % |
- 1 182,0 |
- 5,1 % |
||
Total mission |
AE |
52 267,7 |
49 712,4 |
- 4,9 % |
65 977,2 |
50 860,9 |
- 15 116,3 |
- 22,9 % |
+ 1 148,5 |
+ 2,3 % |
|
CP |
44 050,1 |
43 994,0 |
- 0,1 % |
46 705,6 |
46 675,6 |
- 30,0 |
- 0,1 % |
+ 2 681,6 |
+ 6,1 % |
AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. Prévision : prévision en loi de finances initiale, y compris les prévisions de fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les CP et les AE du programme 146 « Équipement des forces » pour 2020, en hausse par rapport à 2019 respectivement de 1,7 et 10,8 milliards d'euros, expliquent une bonne part des évolutions de la mission entre les projets de loi de finances initiales. C'est également ce programme qui connaît l'écart le plus important en exécution par rapport à la prévision.
Le niveau des autorisations d'engagements du programme devait augmenter de 75 % par rapport à la loi de finances initiale précédente, pour s'établir à 25,5 milliards d'euros, en raison des investissements importants réalisés au profit de la modernisation des équipements. 2020 constituait en effet une année clef de la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 1 ( * ) , avec la contractualisation de nombreuses opérations d'armement 2 ( * ) . La poursuite de la modernisation de la dissuasion se traduisait dans la loi de finances pour 2020, avec 3,8 milliards d'euros de crédits dédiés (développement en particulier du SNLE 3G).
Évolution des crédits du programme 146
« Équipement des forces »
de la mission
« Défense » en 2020
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
L'exécution 2020 du programme 146 « Équipement des forces » s'est toutefois caractérisée par une proportion importante d'AE affectées (sans être engagées) à des tranches dites fonctionnelles de programmes d'armement et représentant 11,65 milliards d'euros sur 25,48 milliards d'euros d'AE ouvertes en loi de finances initiale, les 13,83 milliards d'euros d'AE restantes ayant été engagées. Cette situation s'explique à hauteur de 8,2 milliards d'euros par le décalage au premier trimestre 2021 de plusieurs programmes d'armement, notamment du fait de négociations prolongées avec les partenaires européens ou de retards pris par ces derniers, sans lien avec la crise sanitaire 3 ( * ) .
Contrairement à l'année précédente, les crédits de la mission n'ont pas été modifiés en loi de finances rectificative. Les CP non consommés s'expliquent en partie par les effets de la crise sanitaire (voir infra ).
Mouvements de crédits intervenus en
gestion
pendant l'exercice 2020
(en CP, en millions d'euros, CAS « Pensions » inclus)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
* 1 Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.
* 2 La loi de finances initiale prévoyait le lancement de nouveaux programmes structurants comme le système de combat aérien futur (SCAF, inscrit pour 1,4 milliard d'euros en AE), ou le remplacement des capacités essentielles vieillissantes, en particulier par l'avion de surveillance et d'intervention maritime (AVSIMAR - 0,8 milliard d'euros) et le successeur de l'avion de guet aérien avancé embarqué E2C Hawkeye (futur E2D - 1 milliard d'euros).
* 3 Hélicoptères Tigres standard 3, drone MALE européen, achat de Rafale neufs pour compenser les 12 Rafale d'occasion vendus à la Grèce, SNLE de nouvelle génération.