AUDITION DE M. MANUEL VALLS,
MINISTRE D'ÉTAT, MINISTRE DES OUTRE-MER

MARDI 13 MAI 2025

Mme Muriel Jourda, présidente. - Monsieur le ministre d'État, nous vous accueillons aujourd'hui dans le cadre de nos travaux sur les projets de loi organique et ordinaire pour la refondation de Mayotte. Vous le savez, ces textes attendus de longue date par nos concitoyens mahorais sont rendus encore plus indispensables en raison des dégâts occasionnés par le cyclone Chido.

Ces deux textes mobilisent quatre commissions : outre notre commission des lois, dont Agnès Canayer et Olivier Bitz ont été nommés rapporteurs, la commission des affaires économiques et la commission des affaires sociales se sont saisies de ces textes, désignant respectivement Micheline Jacques et Christine Bonfanti-Dossat comme rapporteurs pour avis, ainsi que la commission des finances, qui a choisi nos collègues Georges Patient et Stéphane Fouassin pour assurer ce rôle. Avant que notre commission ne se réunisse demain matin pour examiner les amendements et adopter ses textes, il nous est apparu indispensable que vous puissiez nous éclairer sur l'ambition de ces deux textes. Je vous laisserai la parole pour une intervention liminaire d'une quinzaine de minutes, avant de donner aux rapporteurs puis à nos collègues le soin de vous interroger, mais permettez-moi auparavant de formuler quelques interrogations.

Certains de nos collègues mahorais ont posé la question du bilan humain du passage du cyclone Chido. En application de l'article 35 de la loi du 24 février 2025 d'urgence pour Mayotte, le Gouvernement a remis le 27 mars dernier un rapport sur le sujet, qui dénombre quarante décès et une quarantaine de disparitions s'apparentant à des décès supplémentaires. Ces chiffres, très en deçà des premières estimations faites alors par le préfet, vous paraissent-ils robustes ? Comment le Gouvernement compte-t-il améliorer les dispositifs de prévention et d'alerte ?

Les services de l'État à Mayotte rencontrent les plus grandes difficultés pour faire face à l'afflux des demandes de titre de séjour et pour exécuter les décisions d'éloignement. L'accès au bureau des étrangers de la préfecture est en outre régulièrement bloqué par un collectif d'habitants qui réclame notamment la fin du visa territorialisé. Quels moyens l'État prévoit-il de mobiliser pour reprendre en main la situation migratoire à Mayotte ?

On estime qu'entre 5 000 et 10 000 mineurs isolés se trouvent à Mayotte, souvent livrés à eux-mêmes. Leur poids dans la délinquance est très élevé. Alors que les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) sont évidemment saturés par le nombre exceptionnellement élevé de ces mineurs non accompagnés , le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte ne comporte aucune disposition à ce sujet : que compte-t-on faire de ces mineurs, dont beaucoup ont de la famille aux Comores, à 70 kilomètres de là ? N'aurait-il pas été opportun de prévoir dans le projet de loi un mécanisme de remise de ces mineurs non accompagnés aux autorités comoriennes ? À défaut, cela ne pourrait-il pas faire l'objet d'une convention bilatérale avec les Comores ?

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer. - Il y a moins de quatre mois, lors de mon audition par la commission des affaires économiques du Sénat sur le projet de loi d'urgence pour Mayotte, j'avais indiqué que la situation de l'archipel s'était imposée dès ma nomination comme une urgence immédiate et constituait la priorité de mon action. Elle l'est restée et elle l'est encore, même si les défis demeurent immenses : je le dis sans détour, nous n'avons pas laissé tomber Mayotte.

Ainsi, je me suis rendu sur place à quatre reprises en quatre mois, dont la dernière fois aux côtés du Président de la République. Par ailleurs, le Parlement a adopté à l'unanimité le projet de loi d'urgence pour Mayotte, promulgué le 24 février dernier. En outre, je réunis très régulièrement l'ensemble des élus du territoire - vos collègues Salama Ramia et Saïd Omar Oili peuvent en témoigner. De plus, la mission dirigée par le général Pascal Facon rattachée à mon cabinet est quotidiennement à la tâche, au ministère ou sur place, pour accélérer la reconstruction de l'île et penser sa refondation. Cette mission travaille actuellement à une stratégie quinquennale, qui me sera présentée la semaine prochaine. J'ai également demandé au général Facon de mener aux côtés du préfet Bieuville des concertations au sujet de la convergence sociale, travail qui peut compter sur l'engagement et la vigilance de la sénatrice Salama Ramia, placée en mission à mes côtés.

Depuis ma prise de fonctions, j'ai identifié trois phases de réponse à la crise : premièrement, la gestion des urgences vitales ; deuxièmement, la reconstruction ; troisièmement, la refondation. L'engagement sans faille des services de l'État et des élus - je tiens à le souligner, au-delà des critiques - a permis de stabiliser la première phase de réponse à la crise, celle des urgences vitales. Je vous confirme le nombre de décès que vous avez indiqué, madame la présidente, très éloigné de celui qui a été avancé durant les premières heures. Ce nombre ne devrait pas augmenter : il n'y a pas eu de disparus, de charnier ou de corps revenus par la mer. Nous sommes donc très loin des rumeurs et des fantasmes sur ce sujet. L'île de La Réunion, plus souvent touchée par les cyclones, a une culture de la prévention, ce qui n'est pas le cas à Mayotte, qui a été détruite : il faut mieux se préparer à ce risque.

Dans les premiers jours et les premières semaines, nous avons rétabli les capacités en eau, en électricité et en télécommunication. Plus spécifiquement, en ce qui concerne l'eau, le taux de remplissage des deux retenues collinaires s'est amélioré à la fin de la saison des pluies. Deux millions de bouteilles d'eau ont été livrées. Deux millions de litres seront acheminés par voie maritime au cours de ce mois de mai et feront l'objet d'une distribution organisée par la préfecture, en lien avec les centres communaux d'action sociale (CCAS), des associations et les mosquées. Nous avons récupéré notre capacité de production habituelle de 38 000 mètres cubes par jour. Pour les mois qui viennent, avec l'arrivée de la saison sèche, l'eau est le premier sujet de préoccupation. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation, car, depuis l'avant-Chido, persiste un écart entre l'offre et la demande de la population.

Avant même que ce projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte ne soit déposé, nous commencions à voir plus loin. Plus de 900 fuites d'eau ont été réparées par le génie militaire, mais il nous faut encore définir un mode opératoire pour résorber les fuites dans les foyers. La première pierre de la future station d'épuration de Mamoudzou Sud a été posée le 7 mai, et l'arrêté d'autorisation des travaux pour la partie terrestre du chantier de construction de l'usine de dessalement d'Ironi Bé a été signé par le préfet il y a quelques jours. Nous engageons également une réflexion sur des dispositifs innovants, et nous lancerons bientôt un appel à projets pour trouver des solutions nouvelles, mobilisant par exemple l'eau atmosphérique. Avant de disposer de toutes les infrastructures en matière d'usine ou de retenues, nous devons nous reposer sur ces dispositifs durant environ deux ans pour ne pas revivre la crise de l'eau de 2023.

Nous tiendrons l'objectif de résorption complète des déchets dus au passage de Chido d'ici au mois d'août 2025, qui constituait une autre de mes préoccupations. Grâce au second casier d'enfouissement de l'installation de stockage de déchets non dangereux inauguré au début du mois d'avril, nous évacuons plus de 800 tonnes de déchets par jour. Je salue à ce titre l'action des collectivités territoriales et du syndicat intercommunal d'élimination et de valorisation des déchets de Mayotte (Sidevam), qui bénéficiera d'ici à la fin de la semaine de crédits d'amorçage pour faire face à ses problèmes de trésorerie.

En matière de santé, plus de 1 000 professionnels ont été projetés sur place. L'hôpital, que j'ai visité il y a quelques semaines aux côtés du chef de l'État, fonctionne à 80 % de ses capacités. Il connaîtra d'importants travaux de réparation et de sécurisation, qui s'ajouteront à ceux qui étaient prévus avant Chido, pour s'achever au cours de l'année 2026. Sept dispensaires sur huit sont ouverts, celui de Sada, très endommagé par le cyclone, étant en travaux. Tous les centres médicaux de référence sont également ouverts, la question étant de savoir si les médecins, les aides-soignants et les infirmiers sont capables de recevoir le public.

Les rentrées scolaires de mars et de ce lundi ont eu lieu, ce qui n'était pas évident. Dans le premier degré, 95 % des élèves sont rescolarisés dans les mêmes conditions très insatisfaisantes que celles d'avant-Chido. Tous les établissements du second degré sont ouverts, mais des rotations ont lieu dans deux lycées, le temps d'achever les travaux d'ici l'automne prochain. Plusieurs parlementaires m'avaient légitimement alerté sur la question des fournitures et des mobiliers scolaires, pour lesquels trois navires ont été affrétés. Deux d'entre eux sont déjà arrivés, le 21 avril et le 12 mai ; le dernier arrivera le 26 mai. Tout comme sur l'eau, nous sommes revenus à la situation d'avant-Chido. La phase de gestion de crise est terminée mais nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation. Les rotations scolaires sont inacceptables en République ; le rapport annexé au projet de loi fixe l'objectif d'y mettre fin à l'horizon de 2031.

Moins de cinq mois après le passage du cyclone Chido, l'impression générale renvoyée par le territoire est celle d'une stabilisation, voire d'une amélioration de la situation sur certains points, malgré les remarques des élus et des médias, lesquels soulignent ce qui ne va pas - c'est bien normal dans une démocratie. Ceux qui se sont récemment rendus dans l'archipel constatent que la végétation se régénère rapidement. Les axes routiers ont été rapidement rétablis, les commerces ont rouvert progressivement, et la chaîne portuaire et logistique fonctionne de nouveau. Pour autant, même dans les domaines que je viens d'évoquer, tout n'est pas parfait, loin de là : les enjeux de l'eau, de la gestion des déchets, de l'école et des déplacements entre Petite-Terre et Grande-Terre restent criants, mais la première phase de réponse, celle de gestion des urgences vitales, est clairement terminée. Tous ceux qui y ont participé - services de l'État, élus, parlementaires - peuvent et doivent le dire.

La mission dirigée par le général Facon puis la promulgation de la loi d'urgence pour Mayotte le 24 février dernier ont ensuite permis de déployer les premiers outils et les premières actions concrètes de la deuxième phase de réponse à la crise et de commencer la reconstruction. Ainsi, malgré les critiques relatives à l'absence de l'État, un bataillon de 326 militaires est mobilisé au quotidien pour réparer et rebâtir les bâtiments publics. Il participe activement au déblaiement des routes et des cours d'eau, à la sécurisation des bâtiments et au soutien logistique, ayant notamment oeuvré pour les écoles ou les équipements sportifs. Des chantiers de reconstruction d'immeubles d'habitation sortent déjà de terre, en mobilisant le concours d'entreprises mahoraises, comme la loi d'urgence le prévoyait, même s'il reste possible de progresser sur ce point.

Le soutien financier est également au rendez-vous, avec 100 millions d'euros du fonds d'amorçage ainsi qu'avec le déploiement du fonds de secours pour l'outre-mer, qui comporte notamment 15 millions d'euros destinés à la filière agricole. Je pense également aux mesures pour l'activité partielle votées dans le cadre de la loi d'urgence : 1 311 demandes d'indemnisation ont été validées, ce qui représente 996 138 heures et 9,1 millions d'euros. Enfin, je pense aux prêts à taux zéro (PTZ), désormais lancés dans l'ensemble des établissements bancaires pour aider les particuliers à reconstruire leur toit. Aux côtés de Mme Salama Ramia, le Président de la République et moi-même nous inquiétions de l'attitude des banques, mais aujourd'hui la dynamique est lancée. Toutes les banques instruisent les dossiers, à l'exception de la Banque Postale, qui sera opérationnelle à la mi-mai une fois ses équipes formées. Un suivi du déploiement du PTZ avec les banques de Mayotte est réalisé par la préfecture, en lien avec la direction générale du Trésor et la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP). Par ailleurs, Raffaele Fitto, vice-président de la Commission européenne, s'est rendu sur place et m'a confirmé que la France recevrait bientôt une avance de 23,7 millions d'euros au titre du fonds de solidarité de l'Union européenne pour financer des opérations d'urgence et de remise en état.

Avec les deux projets de loi que vous allez examiner, nous entamons donc la troisième phase de réponse au cyclone : celle de la refondation. Si le cyclone a ravagé Mayotte, il a surtout exacerbé les calamités, les problèmes et les défis qui existaient déjà. Le sous-développement des infrastructures économiques et des services publics est entretenu par les deux fléaux qui rongent l'île depuis des années : l'habitat illégal et l'immigration clandestine. Je l'ai indiqué dès le départ, il est hors de question de se contenter d'un travail de reconstruction qui ferait au mieux revenir à la situation très insatisfaisante de l'avant-Chido. Cela reviendrait à ne pas honorer la promesse républicaine attendue depuis la départementalisation. Dès le 30 décembre 2024, le Premier ministre s'engageait ainsi, au moment de la présentation du plan Mayotte debout à ce qu'un projet de loi plus structurel soit déposé pour redéfinir l'avenir de l'archipel. Le Gouvernement tient parole avec ce projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte, que je suis heureux de présenter au Sénat.

Avant de revenir sur ses principales mesures, un mot de la méthode. Ainsi que François Bayrou l'a demandé, ce projet de loi a été élaboré en concertation avec les élus et la société civile. Je me suis rendu à quatre reprises à Mayotte, à la fin du mois de décembre, à la fin du mois de janvier, et deux fois au mois d'avril ; j'ai reçu les parlementaires mahorais à plusieurs reprises à Paris ; dès la fin du mois de février, j'ai écrit à tous les élus, au président du Conseil économique, social et environnemental de Mayotte et aux présidents des chambres consulaires pour recueillir leurs propositions. Enfin, les 20 mars et 26 mars derniers, j'ai réuni tous les élus du territoire en visioconférence. Le Président de la République l'a évoqué dans la salle du conseil départemental il y a quelques semaines, nous avançons ensemble, même quand il y a - et c'est normal - des désaccords. Ces échanges ont permis d'enrichir et de modifier le texte. Par rapport à la version initialement transmise au Conseil d'État, nous avons notamment largement restreint le champ de l'article 19, qui facilite la prise de possession anticipée des terrains pour accélérer la réalisation des infrastructures essentielles, sur la demande des élus.

Ce projet de loi comprend trente-quatre articles, répartis en six titres. Le titre I comporte un article unique, visant à approuver le rapport annexé au projet de loi : il présente l'ensemble des politiques publiques qui constituent les priorités de l'État pour garantir la reconstruction et la refondation du territoire. Il comprend notamment les engagements du Gouvernement qui ne nécessitent pas directement de mesures législatives ou des précisions au sujet des infrastructures à réaliser de manière prioritaire. Il comporte également des éléments de programmation financière, à hauteur de 3,7 milliards d'euros pour sept ans. Au regard des travaux de la mission inter-inspections chargée d'évaluer les dégâts et de nos échanges avec les élus, il faudra sans doute affiner et compléter cette programmation financière au cours des débats parlementaires, pour que les chiffres correspondent davantage à la réalité des besoins en matière de reconstruction, même si le débat sur les finances publiques et les engagements de l'État pour les années à venir ne vous auront pas échappé. Le Gouvernement sera sûrement en mesure de vous proposer une réévaluation de ces sommes la semaine prochaine, lors de la séance publique.

Puisque nous évoquons les infrastructures, permettez-moi d'évoquer un instant le dossier de l'aéroport. Lors de son déplacement officiel du 21 avril dernier, le Président de la République a écarté l'option de le situer sur Petite-Terre, pour privilégier la construction d'une longue piste d'atterrissage sur Grande-Terre, suivant l'hypothèse technique privilégiée par la direction générale de l'aviation civile (DGAC). Un plan d'attractivité sera nécessaire pour valoriser les nombreux atouts de Petite-Terre. Le Gouvernement proposera des amendements lors de l'examen du texte en séance publique pour tirer les conséquences de ce choix, qui recueille l'assentiment d'une large majorité des élus. J'ai demandé que la prochaine réunion du comité de pilotage ait lieu le 28 mai prochain. J'ai également demandé que les études de la DGAC, très complètes, soient transmises à l'ensemble des élus mahorais ainsi qu'à vos rapporteurs. En outre, à ma demande, les résultats de la mission inter-inspections chargée d'évaluer les dégâts ont été transmis aux mêmes personnes.

Le titre II regroupe les mesures de lutte contre l'immigration clandestine et l'habitat illégal. En ce qui concerne le volet migratoire, l'article 2 durcit les conditions d'accès au séjour pour l'immigration familiale en les adaptant à la situation particulière de Mayotte. Aux articles 3 à 5, le texte améliore les dispositifs de lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité. L'article 6 étend quant à lui l'aide au retour volontaire à Mayotte, tandis que l'article 7 prévoit la possibilité de placer un étranger accompagné d'un mineur dans un lieu adapté à la rétention des familles. L'article 8 prévoit le retrait des titres de séjour des parents lorsque leurs enfants constituent une menace pour l'ordre public. Enfin, l'article 9 conditionne les flux financiers depuis le département à la vérification préalable de la régularité du séjour du client par les intermédiaires chargés d'opérer les transferts. Je le sais, les rapporteurs de la commission des lois, Agnès Canayer et Olivier Bitz, proposeront des améliorations de ces dispositifs, que nous regarderons avec bienveillance et intérêt.

Madame la présidente, j'ajoute que le blocage du bureau des étrangers de la préfecture est contre-productif. Les mouvements à l'origine de ce blocage dénoncent l'immigration clandestine, mais comment les fonctionnaires peuvent-ils traiter les obligations de quitter le territoire français (OQTF) s'ils ne peuvent accéder à leurs bureaux ? Ce blocage est également néfaste pour l'économie locale : comment traiter les dossiers des travailleurs étrangers en situation régulière, dont la présence est nécessaire pour Mayotte ? Je condamne ce mouvement, et le préfet est fortement mobilisé pour lever ce blocage. Les services du ministère de l'intérieur ont été saisis pour renforcer les services de la préfecture en matière de gestion des étrangers.

Pour ce qui concerne les mineurs comoriens non accompagnés, des discussions doivent se tenir sur ce sujet sensible. Encore faut-il démontrer que ces mineurs disposent d'une famille aux Comores. Le projet de loi ne comporte certes pas de mesure spécifique sur ce sujet, mais la création de lieux spécialement adaptés à la prise en charge des besoins de l'unité familiale, pour reprendre le relais des centres de rétention administrative (CRA) en 2027, peut fournir une première réponse à cette préoccupation.

J'imagine que nous reviendrons sur le sujet des titres de séjour territorialisés. Avec les ministres de l'intérieur et de la justice, nous avons été extrêmement fermes pour maintenir ces titres qui rencontrent, il est vrai, l'opposition de l'immense majorité des élus et des collectifs. Nous avons aussi avancé sur le sujet de l'immigration sans attendre ce projet de loi : la loi visant à renforcer les conditions d'accès à la nationalité française à Mayotte, récemment promulguée, établit désormais qu'un enfant né à Mayotte de parents étrangers ne pourra accéder à la nationalité française que si, à sa naissance, ses deux parents résident régulièrement en France depuis au moins un an, le Conseil constitutionnel ayant déclaré cette disposition conforme à la Constitution.

L'article 10 permet de mieux lutter contre les bidonvilles en facilitant les opérations de résorption de l'habitat informel. Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, proposera un amendement pour conforter la constitutionnalité du dispositif sans lui faire perdre sa dimension opérationnelle, sur lequel le Gouvernement émettra un avis favorable.

Au sujet de la lutte contre l'immigration irrégulière et l'habitation illégale, permettez-moi d'ajouter trois points fondamentaux. Le combat est d'abord une question d'effectifs et de moyens pour les forces de sécurité intérieure. Nous montons déjà en puissance, et continuerons de le faire. J'ai choisi d'informer les parlementaires et de les associer aux décisions prises, raison pour laquelle cette question est abordée dans le rapport annexé. Ensuite, la lutte contre l'immigration irrégulière à Mayotte est conditionnée à un rapport plus ferme envers les Comores. Là encore, j'ai voulu associer les parlementaires à cette dimension diplomatique, en évoquant la question dans le rapport annexé.

Enfin, le resserrement de notre arsenal juridique ne doit pas laisser croire que l'État n'agirait pas déjà. Ainsi, début avril, nous avons démoli soixante-treize constructions illégales à Dzoumogné, mettant fin à des conditions de vie indignes et libérant des terrains destinés à la construction d'une nouvelle école communale.

Le titre III du projet de loi revêt une dimension sécuritaire. Les articles 11 et 12 renforcent le contrôle des armes, tandis que l'article 13 facilite la lutte contre l'emploi d'étrangers sans titre, notamment en simplifiant la traversée des bidonvilles.

Le titre IV comprend une série de mesures économiques, sociales et d'aménagement durable du territoire. L'article 15, cher à Christine Bonfanti-Dossat, habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour accélérer la convergence sociale, avec une effectivité prévue au plus tard en 2031, selon une trajectoire progressive et soutenable. Cette mesure, attendue depuis des années par les Mahorais, permettra - enfin ! - de progresser vers l'égalité réelle.

J'ai missionné le préfet Bieuville et le général Facon pour mener les concertations indispensables à cette avancée. Le rapport annexé fournit les premières indications, et un rapport sera prochainement remis au Parlement, conformément à l'article 36 de la loi d'urgence pour Mayotte.

L'article 19, dont le champ a été restreint après concertation avec les élus mahorais, facilitera la prise de position anticipée de terrains pour accélérer la construction d'infrastructures essentielles. Nous avons besoin de cet article.

Le titre IV prévoit également la création d'une zone franche globale à Mayotte à l'article 22, conformément à l'engagement du Premier ministre. Un chapitre entier est consacré à l'accompagnement de la jeunesse mahoraise, dans lequel sont prévues, à l'article 26, la prise en charge des mineurs par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom) et, à l'article 27, et la création d'un fonds de soutien au développement des activités périscolaires.

Les articles 28 et 29 visent à renforcer l'attractivité du territoire pour les fonctionnaires, en prévoyant une bonification d'ancienneté et une extension de la priorité légale de mutation.

Le titre V consolide le statut de collectivité unique de Mayotte, qui prendra le nom de « Département-Région de Mayotte », et révise le mode de scrutin pour prévoir l'élection des conseillers à l'assemblée de Mayotte à la représentation proportionnelle dans une circonscription électorale unique composée de cinq sections. L'article 30 est actuellement une habilitation à légiférer par ordonnance ; le Gouvernement, si vous en êtes d'accord, déposera en commission des amendements pour inscrire le dispositif directement dans le projet de loi.

Le titre VI prévoit les dispositions transitoires et l'entrée en vigueur.

Le projet de loi organique procède à une série de coordinations pour accompagner la modification des dispositions institutionnelles électorales prévues par le projet de loi ordinaire.

Ces projets de loi constituent une étape déterminante pour engager la refondation de Mayotte. Ils sont attendus depuis des années - mes prédécesseurs y ont travaillé - et témoignent de l'engagement du Gouvernement envers l'archipel. Nous le devons aux Mahorais, qui ont maintes fois exprimé leur attachement à la France. Je suis convaincu que vos travaux en commission et en séance permettront d'améliorer ce texte.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'ambition de cet acte III pour Mayotte se lit dans l'intitulé du projet de loi de « programmation pour la refondation de Mayotte ». Votre feuille de route se décline principalement dans le rapport annexé, sur lequel nous serons particulièrement vigilants, notamment en ce qui concerne la déclinaison pluriannuelle des engagements financiers et le suivi de leur mise en oeuvre.

Le texte contient également un certain nombre de réformes structurelles. Vous avez accepté d'inscrire directement dans le projet de loi la modernisation du statut institutionnel de Mayotte, plutôt que de procéder, comme le prévoit actuellement l'article 30, par une habilitation à légiférer par ordonnance - ce que nous apprécions peu au Sénat. Pourriez-vous nous présenter les grandes lignes de l'amendement que vous déposerez demain en commission ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le choix de procéder par ordonnance a été arrêté en réunion interministérielle pour des raisons de légistique. Cependant, ce mode opératoire a été contesté lors des échanges avec les élus, ce que nous comprenons parfaitement. La direction générale des outre-mer a donc élaboré un amendement pour inscrire directement dans le projet de loi les dispositions de l'article 30. Cette rédaction, initialement partagée avec les élus mahorais, est dense - près de 22 pages ! - et avait été écartée dans un premier temps par le cabinet du Premier ministre.

L'amendement codifie au sein du code général des collectivités territoriales les dispositions relatives à la collectivité de Mayotte. Il définit l'organisation et le fonctionnement de la collectivité, les compétences de ses organes et précise les règles applicables à l'assemblée de Mayotte. Les organes du futur Département-Région comprendront l'assemblée de Mayotte et son président, assistés du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation de Mayotte. L'amendement consacrera également le nom de Département-Région.

Il réaffirme la compétence de Mayotte en matière de coopération régionale, conformément aux attentes des élus.

Les amendements aux articles 32 et 34 permettront de mettre en cohérence ces dispositions avec celles de l'article 30.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je me réjouis que vous ayez annoncé la levée de deux irritants : la communication du rapport inter-inspections à tous les élus concernés et son intégration dans le débat public, ainsi que la réunion du comité de pilotage et des études de la DGAC sur la piste longue.

Par ailleurs, nous soutenons le maintien du titre territorialisé ; pourriez-vous nous expliquer davantage les raisons qui conduisent le Gouvernement à ne pas proposer sa suppression ? Nous proposerons un amendement au rapport annexé visant à établir un point d'étape sur la situation migratoire à mi-mandat, dans trois ans, afin d'évaluer la pertinence du maintien de ce titre spécifique à Mayotte.

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je suis conscient que ces irritants subsisteront dans le débat en séance publique. J'incite les services de l'État et les différents cabinets à faire preuve de la plus grande transparence, notamment dans le cadre d'une relation de confiance avec le Parlement. Le rapport inter-inspections, de grande qualité, est en cours de finalisation. Nous avons également besoin de tous les éléments concernant l'aéroport, car le passage de Petite-Terre à Grande-Terre soulève de nombreuses questions.

Pourquoi le Gouvernement n'envisage-t-il pas de revenir sur les dispositions dérogatoires ? L'article L. 441-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) prévoit la délivrance à Mayotte de titres de séjour d'exception, valables uniquement sur ce territoire - ils ne donnent donc pas accès à d'autres parties du territoire national ou de l'espace Schengen. Cette spécificité vise à réduire l'attractivité de Mayotte et à limiter la pression migratoire locale.

Des aménagements existent toutefois. Cette limitation ne concerne pas l'ensemble des titres de séjour, notamment les cartes de résident. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour limité peuvent solliciter une autorisation spéciale pour circuler dans l'espace Schengen. Par ailleurs, les conjoints, partenaires liés par un pacte civil de solidarité, descendants directs de moins de 21 ans ou à charge, et ascendants directs à charge de citoyens français sont dispensés de cette autorisation spéciale.

Nous devons évaluer ce dispositif en fonction de l'évolution de la reconstruction de Mayotte et de nos relations avec les Comores, dont nous avons récemment constaté les limites lors de la réunion de la commission de l'océan Indien à Madagascar. Pour le moment, une telle évolution n'est pas possible, le ministère de l'intérieur est très clair sur ce sujet. Cependant, il est nécessaire de disposer des moyens d'évaluation de ce dispositif.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'article 7 prévoit que, à partir du 1er janvier 2027, date d'entrée en vigueur de l'interdiction de placement en rétention des mineurs, les enfants accompagnés pourront néanmoins être placés dans des unités adaptées aux familles en vue de leur éloignement. Cette mesure nous paraît indispensable, compte tenu de la situation propre à Mayotte.

Toutefois, le délai de 48 heures fixé par l'article 7 peut s'avérer trop court en cas de circonstances imprévisibles - intempéries, état de la mer, etc. Nous proposerons donc par amendement d'ajouter une prorogation possible de 24 heures dans de telles circonstances. Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement souscrit à votre objectif de clarification. La prorogation de 24 heures que vous proposez, en cas d'impossibilité matérielle d'éloignement liée à des facteurs extérieurs, notamment météorologiques, paraît effectivement pertinente. L'autorité judiciaire serait immédiatement informée d'une telle prolongation.

Je précise que la durée moyenne de rétention à Mayotte est particulièrement courte : environ 24 heures. Le recours à la prorogation resterait donc exceptionnel, comme le prévoit d'ailleurs la rédaction de votre amendement. Le Gouvernement y est favorable et en assume la charge.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - J'en viens à un autre sujet touchant à la charge des collectivités cette fois-ci : la centralisation à Mamoudzou de l'enregistrement des actes de reconnaissance de paternité. Cela représentera une charge supplémentaire pour la commune, assumée pour l'ensemble de Mayotte. Nous souhaiterions donc proposer un amendement prévoyant une compensation financière pour la commune de Mamoudzou : quelle serait la position du Gouvernement sur une telle compensation ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'article 3 du projet de loi prévoit cette centralisation ; notre objectif est clair : dissuader les reconnaissances frauduleuses. Cela devrait mécaniquement réduire le nombre de reconnaissances.

Pour autant, cette centralisation accroîtra l'activité de la commune de Mamoudzou. Toutefois, dans la mesure où les maires agissent ici en qualité d'agents de l'État, le droit à compensation des transferts de compétences ne s'applique pas.

Nous examinerons néanmoins votre amendement avec attention, afin de voir comment organiser au mieux cette nouvelle charge pour la commune.

Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, je m'exprimerai sur les articles 15 à 18.

Tout d'abord, vous avez évoqué à juste titre l'attente forte des Mahorais en matière de convergence sociale. Quelle est, dans ce contexte, l'intention du Gouvernement concernant l'extension de l'aide médicale de l'État (AME) ?

Ensuite, je m'interroge sur les moyens de financer cette convergence. En 2023, le taux d'emploi à Mayotte s'établissait à seulement 23 %, soit environ 50 000 personnes en activité. Dans un tel contexte, comment assurer le financement durable des mesures prévues ?

Les pharmaciens sont totalement opposés à l'article 17 ; ils proposent d'attendre le recensement de 2026. Ils estiment que l'économie pharmaceutique est aujourd'hui trop fragile. Ils soulignent, notamment, que l'hôpital fournit aussi des médicaments aux assurés sociaux, ces derniers refusant parfois de payer le reste à charge en pharmacie. Comment inciter ces personnes à se tourner vers les officines ?

Enfin, les syndicats de pharmaciens regrettent l'absence de concertation ; que peut-on leur répondre pour les rassurer ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Une proposition de loi d'Estelle Youssouffa, du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (Liot), visant à étendre l'AME à Mayotte, sera examinée jeudi à l'Assemblée nationale. Le Gouvernement, à ce stade, y est opposé. Nous partageons donc la logique que vous défendez par votre amendement.

Concernant l'article 17, l'incitation à fréquenter les officines passe par le développement de l'offre de soins de ville. Il faut effectivement vérifier que les syndicats de pharmaciens ont bien été consultés. Peut-être l'ont-ils été via le conseil économique, social et environnemental de Mayotte ou les chambres consulaires ; nous le vérifierons. J'ajoute que cette mesure a été soutenue par les élus locaux.

Concernant le financement du chantier de convergence sociale, vous avez raison : la faiblesse du taux d'emploi complique les choses. C'est précisément pour cette raison que nous avons prévu une trajectoire entre 2026 et 2031, avec le temps nécessaire pour négocier et mettre en oeuvre les dispositifs sans créer de fausses promesses. Ce sujet reviendra assurément lors du débat en séance.

M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Nous avons rendu un avis favorable sur six articles en commission des finances, mais plusieurs points appellent notre attention.

L'article 9 nous préoccupe : il confie aux banques un rôle de contrôle renforcé des titres de séjour, ce qui nous a semblé constituer un transfert de compétences régaliennes. Nous l'avons néanmoins validé.

Nous saluons en revanche l'extension des zones franches d'activité nouvelle génération à Mayotte, une mesure attendue.

Sur la piste longue, le montant de 1,2 milliard d'euros nous interpelle. Aucune étude fine ne semble avoir été menée sur les infrastructures aéroportuaires périphériques nécessaires. Or ce montant couvre uniquement la construction de l'aéroport et d'une piste pour gros porteurs. Il est indispensable qu'un comité de pilotage soit mis en place, mais il faut aussi que les dépenses soient programmées annuellement. Aujourd'hui, nous connaissons l'enveloppe globale de 3,2 milliards d'euros, sans visibilité sur les échéances. Une programmation pluriannuelle serait donc indispensable.

M. Manuel Valls, ministre d'État. - S'agissant de l'article 9, la mesure vise à lutter contre le travail illégal et l'immigration irrégulière à Mayotte, en encadrant plus strictement les conditions d'envoi d'argent à un tiers à l'étranger. Ce dispositif répond à un problème bien identifié : les circuits financiers organisés entre Mayotte et l'extérieur. Il s'agit non pas d'un transfert de compétences, mais d'une obligation de vérification renforcée confiée aux établissements bancaires.

Concernant la piste longue, des vérifications - techniques et financières - s'imposent. J'espère que le comité de pilotage et les éléments transmis aux élus permettront d'avancer concrètement.

Je l'ai indiqué précédemment, lors des débats de la semaine prochaine, nous devrions être en mesure de fournir davantage de précisions sur la pluriannualité des engagements financiers et sur les montants mobilisés. Dans le contexte budgétaire actuel, que chacun connaît, je reste extrêmement prudent. Chaque projet de loi de finances devra évidemment prendre en charge une part de ces engagements.

Il est néanmoins essentiel, et vous avez raison de le rappeler, que la présentation du texte s'accompagne d'une visibilité claire, non seulement sur les projets, mais aussi sur leur calendrier de mise en oeuvre et sur les montants alloués. Cette exigence s'impose au vu des dégâts causés par le cyclone Chido et des retards structurels que Mayotte connaissait bien avant cette catastrophe.

Ces précisions devront être apportées progressivement. Je vous remercie, en tout cas, du travail accompli et du soutien que vous avez exprimé.

Mme Cécile Cukierman. - Comme plusieurs de mes collègues, je m'interrogeais sur la frilosité du projet de loi, qui prévoyait, à l'article 30, de légiférer par ordonnance sur l'uniformisation des règles applicables aux collectivités territoriales. Cette méthode contraste fortement avec la volonté manifeste d'avancer rapidement sur les titres II et III.

En lisant le texte, nous avons l'impression que vous vous souciez davantage de la question des étrangers que de celles qui touchent les citoyens français de Mayotte, lesquels apparaissent relégués au second plan. Or, rappelons-le, plus de 77 % des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté. L'objectif d'harmonisation des droits est fixé à l'horizon 2030-2031, alors même que l'urgence sociale est patente.

Le cyclone Chido a - malheureusement - montré à la France entière, si ce n'est au monde entier, l'extrême précarité des conditions de vie à Mayotte.

Vous avez annoncé que l'article 30 ne relèverait plus d'une ordonnance : c'est une bonne chose. Il demeure cependant un certain déséquilibre dans les rythmes d'intervention : la célérité sur les titres II et III contraste avec la lenteur sur les titres IV et V.

Pour ma part, et au nom du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky (CRCE-K), je n'oppose pas ces priorités. Elles doivent être traitées de manière globale, et c'est d'ailleurs tout l'intérêt d'un projet de loi de refondation.

Enfin, en l'état actuel du texte, et sauf modification substantielle, notre groupe s'abstiendra.

Mme Corinne Narassiguin. - L'ambition globale de ce projet de loi s'inscrit dans la continuité du texte d'urgence adopté à la suite du cyclone Chido. Cela pointe une distinction essentielle entre, d'une part, ce qui relève de l'urgence conjoncturelle, et d'autre part, ce qui relève des enjeux structurels de long terme, liés à l'objectif d'égalité réelle.

Cette égalité réelle est un objectif fixé depuis la départementalisation de Mayotte. Or force est de constater que les gouvernements successifs, depuis l'origine, ont sous-estimé l'ampleur des efforts nécessaires. Le cyclone Chido a été un révélateur brutal du niveau de précarité, et de la profondeur des carences accumulées.

Il est donc indispensable que ce projet de loi, qui se veut un texte de refondation, s'inscrive dans une vision de long terme. Cela suppose des garanties solides sur le financement de sa mise en oeuvre. Or nous examinons un projet de loi de programmation sans programmation financière. Comment, dès lors, s'assurer que les mesures prévues ne resteront pas lettre morte ? S'agira-t-il de crédits inscrits dans les prochains projets de loi de finances ? De quelle manière les engagements seront-ils suivis dans la durée ?

Je ne passerai pas en revue tous les dispositifs du texte, mais je souhaite insister sur deux points spécifiques.

Le premier concerne les dispositions liées au contrôle des flux migratoires et à l'immigration irrégulière. Le projet de loi s'inscrit dans une logique déjà bien connue : restreindre davantage les droits des étrangers à Mayotte afin, théoriquement, de réduire l'attractivité du territoire. C'est la même logique que celle qui est portée par la récente proposition de loi sur la restriction du droit du sol à Mayotte.

Or cette stratégie repose sur une hypothèse - celle de l'attractivité juridique - qui n'a jamais été démontrée. Aucun rapport, aucune statistique n'étaye l'idée que les dispositifs spécifiques du Ceseda ou les règles relatives à la nationalité expliqueraient l'ampleur des flux migratoires.

Les visas territorialisés, en vigueur depuis des années, n'ont pas produit l'effet escompté. La levée de ce dispositif reste pourtant une demande unanime, transpartisane, portée par les élus locaux depuis longtemps. Or, plutôt que d'y répondre, le projet de loi ajoute de nouvelles restrictions, notamment sur les parents d'enfants français, ce qui risque de précariser encore davantage ces familles - sans les rendre expulsables ni régularisables. Cela ne résoudra rien.

Ne conviendrait-il pas d'envisager la dimension européenne des accords migratoires ? La migration vers Mayotte ne concerne plus uniquement les Comores, mais également des pays de la Corne de l'Afrique, avec lesquels la France a moins de liens historiques que d'autres pays européens. L'intégration de Mayotte dans une approche migratoire européenne, via une éventuelle déterritorialisation des visas, pourrait permettre de construire des outils plus adaptés, plus efficaces et plus solidaires.

Mon second point concerne le foncier. L'article 19 suscite de nombreuses inquiétudes, notamment quant à la facilitation des procédures d'expropriation.

Certes, la nécessité de construire des infrastructures impose parfois le recours à l'expropriation. Toutefois, à Mayotte, l'État est déjà propriétaire d'une part importante du foncier. Avant d'envisager d'exproprier, encore faudrait-il optimiser l'usage de ce foncier public. Par ailleurs, toute politique foncière ambitieuse suppose de résoudre, en amont, le problème ancien et massif de la régularisation des propriétés. Ce problème, plus que centenaire, n'a jamais été réglé. Il s'impose aujourd'hui avec une acuité redoublée dans le contexte post-Chido.

De nombreux Mahorais se trouvent confrontés à une situation dramatique : ils ont souscrit des assurances pour leur logement, mais, n'ayant jamais eu de titre de propriété formel, se voient refuser toute indemnisation après la destruction de leur maison. Comment accepter, dans ces conditions, qu'on leur impose demain des procédures d'expropriation facilitées ?

Tant que ce problème fondamental de la régularisation foncière n'est pas traité, il sera politiquement et humainement très difficile d'imposer ces mesures d'expropriation.

Enfin, sur l'article 30, même si je salue le fait que vous ne souhaitiez plus passer par voie d'ordonnance - une méthode que les parlementaires apprécient rarement -, je tiens à soulever un problème de méthode : l'amendement que vous proposez est extrêmement dense, et nous ne l'avons reçu qu'hier. Cela ne permet pas un travail parlementaire de qualité. Or cet article visait initialement à consulter la collectivité et à recueillir l'avis du Conseil d'État. Aujourd'hui, nous avons un amendement de 22 pages, sans avis du Conseil d'État...

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Madame Cukierman, ce texte important vient après un premier projet de loi, dit d'urgence, adopté à l'unanimité par le Sénat, et après l'action déjà déployée par l'État. Il s'agit d'un texte équilibré, comme j'ai essayé de le démontrer tout à l'heure. Il contient évidemment des mesures de lutte contre l'immigration illégale : c'est un préalable nécessaire. Il n'y a là aucune obsession particulière, mais on constate, sur place, dans les discussions avec les élus, avec les collectifs et avec les Mahorais en général, que ce thème est incontestablement un sujet de préoccupation.

On ne peut pas dire, néanmoins, que ce projet de loi ne contient pas de mesures sociales. Dès l'article 1er portant approbation du rapport annexé et par toutes les mesures relatives à l'école, à la jeunesse ou à l'économie qui y sont inscrites, il porte la convergence sociale tant attendue.

Je préfère que nous fassions les choses bien, en nous donnant le temps nécessaire de la concertation et du dialogue social et en privilégiant la convergence du Smic sur celle des prestations sociales, afin de favoriser le travail - et je n'oublie pas la remarque qui a été faite tout à l'heure sur le taux d'emploi.

Ce texte de loi, au-delà des articles concernant les questions de sécurité et d'immigration, est bel et bien le texte de la convergence sociale et d'un chemin tracé vers l'objectif difficile - très difficile - d'égalité.

Madame Narassiguin, j'ai distingué trois phases. L'ambition de ce texte est structurelle, beaucoup plus large que la seule gestion du post-Chido. Pour ce qui est du financement, j'irai dans votre sens : je me bats, comme les rapporteurs, pour que nous soyons plus précis et plus complets le plus vite possible, en associant les élus à ce travail. Dans le domaine scolaire ou dans celui de l'eau, en effet, il est temps de donner des perspectives à Mayotte.

Sur les questions d'immigration, j'ajoute à ce que j'ai déjà dit que la problématique de la lutte contre l'immigration clandestine doit s'apprécier dans sa globalité.

L'article 2 rend opposable l'entrée régulière sur le territoire national pour l'obtention des titres « parents d'enfants français » et « liens privés et familiaux » et il porte de trois à cinq ans le délai de résidence habituelle. Quant à nos capacités de surveillance, de détection et d'interception, elles sont en cours de reconstitution, ce qui mobilise des financements très importants, l'objectif étant de passer de 25 000 à 35 000 éloignements par an. Il y a là une demande unanime des élus, qu'expriment très fortement les Mahorais.

Cela dit, tant que nous n'aurons pas réglé la question de notre rapport avec les Comores - coopération, équilibre nécessaire, rapports de force, développement de ce pays voisin -, une réelle difficulté demeurera, qui est liée à l'histoire. Au-delà de ce que peut faire l'État - fermeté, « rideau de fer », éloignements -, la proximité même d'Anjouan - quand il fait beau, on voit très bien cette île depuis Mayotte - oblige à une coopération régionale. Cela vaut aussi, du reste, pour la côte est de l'Afrique : de véritables défis se posent à toute la région.

J'en viens à l'article 19 : cette disposition vise à accélérer la construction des infrastructures essentielles à Mayotte. Elle tient compte des difficultés d'identification des propriétaires qui peuvent intervenir sur ce territoire et permet de prendre possession des terrains dans des conditions telles que les travaux ne sont pas bloqués, tout en garantissant, bien sûr, les droits attachés à la propriété privée.

Cette procédure n'est pas une nouveauté : elle est déjà prévue par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pour les travaux intéressant la sécurité nationale et pour un certain nombre d'infrastructures routières. Elle est élargie, à Mayotte, à d'autres cas jugés stratégiques pour la refondation du territoire. Elle est mise en oeuvre de manière très précise et protectrice des propriétaires ou des personnes qui pourraient revendiquer la propriété des terrains concernés. Elle vise les projets déclarés d'utilité publique, et la prise de possession est autorisée uniquement en cas de difficultés d'exécution des travaux, par un décret pris sur l'avis conforme du Conseil d'État. Le juge peut de surcroît attribuer une indemnisation spéciale aux personnes intéressées qui justifient d'un préjudice causé par la rapidité de la procédure. Une indemnité provisionnelle d'expropriation est versée au propriétaire ou, en cas d'obstacle au paiement - je pense au cas de l'identification non certaine du propriétaire -, consignée. Cette disposition est valable dans un délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

Nous avons donc là, juridiquement parlant, une mesure extrêmement encadrée, garantissant les droits des personnes concernées, assortie d'un contrôle du juge intervenant à plusieurs étapes - contrôle de la déclaration d'utilité publique, contrôle des conditions de la prise de possession anticipée, prononcé d'une indemnité spéciale -, et circonscrite dans le temps. Je souligne que les élus du territoire ont été entendus, à juste titre, les projets pouvant faire l'objet de cette procédure ayant été strictement définis.

Nous travaillons sur la régularisation de la propriété foncière pour accélérer la rénovation de l'habitat dégradé : tel est l'objet de l'article 20, dont la rédaction a été travaillée avec la sénatrice Salama Ramia. Si l'on veut refonder Mayotte, il faut prendre en compte ce point essentiel qu'est la maîtrise du foncier. À défaut, la réalisation des infrastructures essentielles - nous parlions tout à l'heure de la construction du nouvel aéroport à Grande-Terre - se heurtera à un vrai frein. Cela vaut aussi pour la troisième retenue collinaire : la phase de maîtrise du foncier va prendre une année, une année perdue pour agir et répondre à la situation de stress hydrique que connaît d'ores et déjà le territoire.

Au regard de l'urgence, je ne comprends pas les amendements de suppression de l'article 19.

L'amendement que nous avons déposé à l'article 30 vise à répondre à la demande légitime de vos rapporteurs.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je le confirme !

M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'ordonnance dont il est question dans le texte initial serait de facto passée devant le Conseil d'État, car telle est la procédure. En tout état de cause, un travail aura lieu en séance publique au Sénat, puis à l'Assemblée nationale, jusqu'à la réunion de la commission mixte paritaire, avant que, le cas échéant, le Conseil constitutionnel ait à se prononcer. Sans dévoiler les secrets des réunions interministérielles, je peux vous dire que notre intention était d'aller vite. Je suis satisfait néanmoins que le débat ait lieu, à la demande des rapporteurs. Le sujet des institutions n'est sans doute pas celui qui passionne le plus les Mahorais, mais il est important. Nous avons voulu le maintenir dans le texte : si nous ne saisissons pas cette occasion pour faire évoluer les institutions de Mayotte, nous n'y arriverons pas plus tard.

Mme Cécile Cukierman. - Je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas dans ce texte de volonté sociale, de volonté de convergence des droits ; j'ai simplement souligné une différence de calendrier de mise en oeuvre entre les différents titres du projet de loi.

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Dont acte, madame la sénatrice.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Un grand merci, monsieur le ministre d'État, pour les éléments que vous nous avez apportés ce soir et pour la préparation du débat en séance - nous aurons encore un certain nombre d'échanges d'ici à la semaine prochaine.

Il est un autre sujet qui préoccupe beaucoup la commission des lois, sur lequel je souhaitais vous interroger à l'occasion de votre audition, qui était prévue jeudi matin, par la délégation aux outre-mer ; mais, l'agenda du Gouvernement ayant évolué, un conseil des ministres se tiendra à la même heure. Ce sujet est celui de la situation en Nouvelle-Calédonie : j'aimerais connaître votre lecture de ce qui s'est passé ces dernières semaines. Je vous saisis au pied de l'avion pour vous poser la question suivante : et maintenant, que faire ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je serai présent devant le groupe de contact sur la Nouvelle-Calédonie, qui se réunira mercredi prochain autour du président Larcher. Et je reste évidemment disponible auprès de la commission des lois comme de la délégation présidée par Micheline Jacques. Je me suis entretenu avec le président du Sénat ce week-end sur ce sujet, et je ne doute pas que j'aurai demain à répondre à des questions d'actualité sur la Nouvelle-Calédonie, au Sénat comme à l'Assemblée nationale.

La situation économique et sociale reste très préoccupante du fait, vous le savez, des destructions occasionnées par les émeutes d'il y a tout juste un an : plus de 2 milliards d'euros de dégâts. La machine a du mal à repartir, même si tous les dossiers de reconstruction des infrastructures scolaires et sportives ont commencé d'être instruits, le montant de l'enveloppe que vous avez votée dans le cadre du projet de loi de finances étant de 200 millions d'euros - c'est plutôt une bonne nouvelle pour le secteur du BTP. 15 % à 20 % du PIB ont été détruits, le moral des entrepreneurs et des entreprises est extrêmement bas et le risque de départs, de non-reconstruction ou de non-investissement est au plus haut.

La situation d'une partie de la jeunesse et les problèmes de chômage - le chômage partiel va s'arrêter le 30 juin - et de logement - le nombre de personnes sans domicile fixe a doublé à Nouméa - emportent un risque d'explosion ou d'implosion sociale. Cette dégradation du climat est préoccupante. Comment attirer les investisseurs - je pense notamment au secteur du nickel -, dans une telle situation d'instabilité politique ? C'est pourquoi j'avais posé l'alternative : « un accord ou le chaos », non pour faire peur, mais tout simplement parce que l'instabilité politique ne permet pas la reconstruction économique dans de bonnes conditions.

La situation sécuritaire me semble, à ce stade, relativement maîtrisée, mais je reste extrêmement prudent. Sur place sont mobilisés une vingtaine d'escadrons de gendarmerie mobile, des forces de la police nationale, des unités d'élite, Raid et groupe d'intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). Je note beaucoup d'appels au calme, mais nous ne sommes jamais à l'abri d'un accident, d'un incident, d'une provocation. Je sens une population inquiète, meurtrie, qui espérait sans doute un accord, pour retrouver de l'espoir, mais qui n'a pas envie - c'est normal - de reconnaître ce qui s'est passé il y a un an.

Sur le plan politique, les débats que nous avons eus depuis quatre mois, et encore ces derniers jours, ont été utiles. Je serai franc : il y a eu échec, dès lors qu'il n'y a pas eu d'accord. Pour autant, il y a beaucoup de points de convergence, bien que les divergences soient profondes entre l'aspiration à la souveraineté pleine et la volonté de rester dans la République, dans la France. Il y a des points de convergence, disais-je, sur l'idée d'une loi fondamentale, sur la citoyenneté, sur la composition et le rôle du congrès et du gouvernement, et sur les six engagements que j'ai proposés : il faut reconstruire la société et l'économie calédoniennes ; des réformes institutionnelles, financières et budgétaires importantes sont indispensables ; les questions de la sécurité et de la démocratie doivent être réglées. Mais la « clé de voûte », comme je l'ai appelée, rend difficile, à ce stade, un accord et un apaisement durable.

Cependant, je veux nuancer immédiatement ce que je viens de dire : les discussions continuent entre partenaires politiques et avec l'État. Je suis revenu dans l'Hexagone, nous avons constaté un échec, mais, au-delà des prises de position des uns et des autres, qui présentent toujours un caractère un peu définitif, il reste une marge de discussion.

Cette discussion pourrait-elle aboutir vite à un accord qui permettrait une réforme du corps électoral et un report des élections provinciales ? Je vous parle avec franchise : je ne sais pas - je l'espère. Des initiatives seront-elles prises en ce sens ? C'est le rôle du Président de la République et des présidents des assemblées - et c'est évidemment mon rôle - que de s'y atteler. Nous allons nous concerter pour voir comment avancer.

Le chemin est difficile, car les partis politiques sont entrés dans la perspective des élections provinciales. Faute d'accord, je vois mal comment on peut envisager que ces élections n'aient pas lieu avant la fin de l'année. Refaire une réforme du corps électoral sans l'accord d'une partie des protagonistes serait prendre des risques que, pour ma part, j'inviterais à ne pas prendre. J'ai mis un texte sur la table, qui a fait couler beaucoup d'encre, mais qui me paraît une base susceptible, demain, de rapprocher les points de vue. Ma conviction est que, contrairement à ce que l'on croit, cela est possible. En tout cas, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) et les organisations indépendantistes ont accepté un projet qui n'était pas le leur.

Et je ne crois pas avoir proposé que la France abandonne la Nouvelle-Calédonie : je pense avoir proposé une méthode qui permettrait au contraire de maintenir un lien fort entre la France et la Nouvelle-Calédonie. Dans le contexte géopolitique international comme dans le contexte financier et politique national, le moment est venu, en effet, de créer les conditions d'un lien très fort, en posant un premier principe : la situation de la Nouvelle-Calédonie est profondément différente de celle des autres territoires ultramarins.

On ne relèvera pas le défi considérable auquel est exposée la société calédonienne, au-delà des questions économiques et sociales, sans régler, premièrement, le problème de la fin du processus de décolonisation, c'est-à-dire sans sortir la Nouvelle-Calédonie de la liste des territoires à décoloniser de l'ONU.

Il convient, deuxièmement, de répondre à la question suivante : quelle doit être la forme de l'exercice du droit à l'autodétermination ? Certes, il y a eu trois référendums ; le troisième a laissé un goût d'inachevé, mais j'ai réussi, ces dernières semaines, à remettre tout le monde autour de la table. Si l'on veut éviter la confrontation et les blocages, il ne faut pas perdre ce bien précieux !Chacun en est conscient, on ne peut pas faire de référendum sans les Kanaks ou sans les indépendantistes et on ne peut pas réformer le corps électoral contre les Kanaks ou contre les indépendantistes. Mais on ne peut pas non plus envisager l'avenir sans tous les Calédoniens : le chemin est étroit.

Je résume : il reste bien sûr une possibilité de discuter. Pour ce qui est de faire évoluer les choses dans les prochaines semaines, la porte n'est pas totalement fermée : nous allons essayer. Cela permettrait de régler beaucoup de problèmes. Pourrait-on passer un accord plus large ? Je le souhaite, mais cela promet d'être difficile. Il le faudrait, néanmoins, car les échéances électorales vont arriver vite : provinciales, municipales, présidentielles, législatives. Cela prendra plusieurs années d'élaborer un statut définitif ou quasi définitif - nous n'avons jamais proposé, du reste, de le faire en six mois. Mieux vaudrait, donc, que le travail soit engagé dès maintenant. Je compte sur la sagesse du Sénat et de son président pour nous y aider.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Je vous remercie, monsieur le ministre d'État, d'avoir répondu à nos questions.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

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