Section 2 - Fabrication et distribution des produits de thérapies génique et cellulaire
La section 2 de la proposition de loi, qui comprend les articles 3, 4 et 5, a pour objet de prévoir un régime d'autorisation unique pour la fabrication, la conservation, la distribution, l'importation et l'exportation des produits de thérapies génique et cellulaire.
L'article 3 précise les modalités d'attribution de cette autorisation.
L'article 4 tire les conséquences de cet article en élargissant les missions de l'inspection de l'Agence du médicament.
L'article 5 procède de même en rectifiant l'article du code de la santé publique qui définit les compétences de l'Établissement français des greffes.
Art. 3.- Procédure d'agrément par l'Agence du médicament des organismes fabriquant ou distribuant des produits de thérapies génique et cellulaire
(Art. L. 672-11 du code de la santé publique)
Il est indispensable d'assurer l'unité du régime d'autorisation de fabrication et de distribution des produits de thérapies génique et cellulaire et de garantir l'application des bonnes pratiques.
L'article 3 de la proposition de loi y procède en opérant une réécriture de l'article L. 672-11 du code de la santé publique instituant deux des régimes juridiques des produits de thérapie génique et cellulaire.
Le nouvel article L. 672-11 confirme, dans son premier alinéa, que la fabrication, la conservation et la distribution de ces produits devront respecter les principes généraux applicables au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain qui ont été définis par la loi bioéthique du 29 juillet 1994. Si le prélèvement n'est plus mentionné dans la rédaction proposée par l'article 3, ce n'est pas pour le soustraire au champ d'application de ces principes, mais parce qu'ils ont une valeur générale, qui s'applique à tous les éléments du corps humain : une telle mention eut été redondante et eut pu laisser à penser que les principes de consentement, de gratuité du don ou de sécurité sanitaire n'avaient pas la portée générale que leur à conférée ladite loi.
Dans son second alinéa, l'article premier réserve la fabrication, la conservation, la distribution, l'importation et l'exportation de tous les produits de thérapie génique et cellulaire aux seuls établissements ou organismes agréés et prévoit la procédure d'agrément.
Cette procédure d'agrément est originale. Elle répond en effet à la difficulté de contrôler les produits de thérapies génique et cellulaire tout au long de leur préparation et jusqu'au lit du malade.
L'Agence du médicament devra ainsi vérifier, avant de délivrer l'agrément, que sont respectés :
- les principes généraux applicables au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain ;
- les bonnes pratiques de fabrication ;
- le cas échéant, si ces produits utilisent des organismes génétiquement modifiés, la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 relative au contrôle de l'utilisation et de la dissémination des organismes génétiquement modifiés, dite loi « OGM » ;
Elle vérifiera aussi que les autorisations ministérielles d'administration des produits et, s'il y a prélèvement de cellules, de prélèvement, ont bien été obtenues (voir infra).
Il va de soi que l'Agence ne pourra agréer un établissement ou un organisme que si les protocoles d'essais cliniques (voir infra) mis en oeuvre avant la fabrication ont, eux aussi été autorisés et que les dispositions du Livre II bis du code de la santé publique sur la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales ont été respectées.
L'Agence du médicament est donc placée comme responsable de l'ensemble de la chaîne thérapeutique : son agrément est subordonné, non seulement à la vérification du respect des bonnes pratiques, mais aussi à celle de l'obtention préalable des autorisations ministérielles qui interviennent en amont (prélèvement) ou en aval (administration) de la fabrication.
Elle devient le guichet unique auquel devront s'adresser les établissements ou organismes qui souhaitent fabriquer, conserver, distribuer, importer ou exporter des produits de thérapie génique ou cellulaire ; à charge pour elle de s'entourer de l'expertise nécessaire et, le cas échéant, de consulter des commissions compétentes (pour la vérification de l'application de la loi OGM, par exemple).
La procédure d'agrément prévue par l'article 3 de la proposition de loi déroge au régime de droit commun du médicament.
En effet, aux termes de l'article L. 596 du code de la santé publique, « la fabrication, l'importation, l'exportation et la distribution en gros des médicaments (...), ne peuvent être effectués que dans des établissements pharmaceutiques (...) ».
Il n'apparaît pas souhaitable que seuls les établissements pharmaceutiques et donc l'industrie pharmaceutique puissent fabriquer, conserver, distribuer, importer et exporter des produits de thérapies génique et cellulaire.
Il faut tenir compte, en effet, que la recherche dans ces domaines est aujourd'hui conduite par des chercheurs provenant d'horizons beaucoup plus larges que cette seule industrie.
Par ailleurs, cette dernière ne s'intéresse pas à toutes les thérapies génique et cellulaire, dont certaines ne disposent que d'un marché potentiel fort étroit.
Il s'agit ici en particulier des thérapies géniques visant à traiter les maladies dites « génétiques » rares, qui ne font pas l'objet d'une attention suffisante de la part de l'industrie.
Si donc la fabrication comme la distribution, la conservation, l'importation et l'exportation des produits de thérapies génique et cellulaire ne doivent pas être réservés aux établissements pharmaceutiques, il importe cependant que ces opérations se déroulent dans le respect des bonnes pratiques de fabrication.
C'est l'objet de l'article 3 de la proposition de loi, qui garantit la sécurité sanitaire grâce au respect des bonnes pratiques et aux inspections de l'Agence sans conférer de monopole à l'industrie pharmaceutique.
Art. 4.- Nouvelles missions des inspecteurs de l'Agence du médicament
(Art. L. 567-9 et art. L. 567-10 du code de la santé publique)
Afin que l'Agence ait les moyens d'assumer cette nouvelle compétence, l'article 4 de la proposition de loi confie de nouvelles compétences à ses Inspecteurs.
Ayant déjà, en vertu de l'article L. 567-9 du code de la santé publique, compétence pour vérifier l'application des bonnes pratiques et, pour les essais cliniques, celle des dispositions du Livre II bis sur la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales, ils auront désormais aussi compétence pour vérifier l'application des principes généraux applicables à l'utilisation des éléments et produits du corps humain.
L'article 4 leur donne, en outre, les mêmes missions et les mêmes pouvoirs que les officiers et agents chargés par la loi OGM de rechercher les infractions à ses dispositions en ayant accès aux installations.
Bien entendu, les compétences nouvelles de l'Inspection de l'Agence, qu'il s'agisse des principes généraux applicables à l'utilisation des éléments et produits du corps humain ou de la loi OGM, ne valent que pour les produits de thérapies génique et cellulaire.
Art. 5.- Conséquences quant aux compétences de l'Établissement français des greffes
(Art. L. 673-8 du code de la santé publique)
L'article 5 de la proposition de loi tire les conséquences de l'article 3 sur l'article du code de la santé publique définissant les compétences de l'Établissement français des greffes.
L'article L. 673-8 du code de la santé publique dispose en effet que l'Établissement français des greffes est chargé de préparer les règles de bonnes pratiques qui doivent s'appliquer au prélèvement, à la conservation, au transport et à la transformation de l'ensemble des parties et produits du corps humain.
Or, dans la mesure ou la « transformation » des cellules est une étape de la thérapie cellulaire et de certaines thérapies géniques, elle sera désormais soumise au respect des bonnes pratiques de fabrication, sous le contrôle de l'Agence du médicament.
La nouvelle rédaction de l'article L. 673-8 en tient compte en aménageant en conséquence les compétences de l'Établissement français des greffes.
Concernant les cellules, celui-ci demeure bien entendu responsable de l'élaboration des bonnes pratiques de prélèvement, de conservation et de transport. Il faut noter cependant que des bonnes pratiques de prélèvement spécifiques, plus sévères, sont prévues pour le prélèvement de cellules destinées aux thérapies génique et cellulaire.
L'Établissement français des greffes comme l'Agence du sang sont chargés du prélèvement, de la conservation et du transport des cellules « brutes », qu'elles soient destinées ou non à ces thérapies, en prenant toutefois des précautions particulières lorsque tel est le cas.
Dès lors qu'il y a transformation des cellules, le régime juridique du médicament s'applique.