B. LES MODIFICATIONS DE LA DÉCISION D'ASSOCIATION RÉSULTANT DE LA PROPOSITION D'ACTE COMMUNAUTAIRE
Sur les deux cent quarante deux articles constituant la décision d'association, trente et un sont modifiés ou complétés et cinq sont supprimés. La proposition de décision du Conseil prévoit également d'insérer seize nouveaux articles.
Les principales modifications proposées concernent essentiellement cinq thèmes : le partenariat Commission - État membre - pays et territoires d'outre-mer, le régime commercial, le régime applicable à l'établissement et aux services, l'éligibilité des ressortissants des pays et territoires d'outre-mer à certains programmes communautaires et les modalités de répartition de la dotation accordée aux pays et territoires d'outre-mer au titre du VIIIème FED.
1. Le renforcement de la procédure de partenariat
Il est proposé de renforcer la procédure de concertation entre la Commission, les États membres et les pays et territoires d'outre-mer instaurée en 1991.
Aux termes de l'exposé des motifs, il s'agit de consulter les pays et territoires d'outre-mer selon un rythme régulier sur les questions les concernant.
La nouvelle rédaction de l'article 234 prévoit que l'action communautaire s'appuie, et non « s'appuie autant que possible », sur une concertation étroite.
Toutefois, malgré cette volonté affichée de systématiser les consultations, les réunions des groupes de travail permanents doivent désormais avoir lieu selon « un rythme si possible annuel » et non « au moins une fois par an ».
En revanche, les moyens consacrés au développement du partenariat sont accrus : les frais résultant de l'organisation des réunions, jusqu'alors assumés par les pays et territoires d'outre-mer, peuvent désormais « faire l'objet d'une contribution financière du Fonds (FED) , au titre des programmes indicatifs territoriaux ou régionaux selon le cas , sur demande des autorités compétentes du ou des pays et territoires d'outre-mer concernés ».
2. Les adaptations du régime commercial
La décision d'association de 1991 a accordé le libre accès au marché communautaire à tous les produits originaires des pays et territoires d'outre-mer et a instauré un système dit du cumul permettant aux produits des pays ACP d'être considérés comme provenant des pays et territoires d'outre-mer dès lors qu'ils font l'objet de transformations, même simples, dans ces pays ou territoires.
Ces facilités, tendant à favoriser le développement des relations commerciales entre les pays et territoires d'outre-mer et la Communauté européenne ont généré en 1992 et 1993 de graves perturbations sur le marché communautaire du riz. La Commission a ainsi été conduite en 1993 à adopter des mesures de sauvegarde qui, depuis lors, ont été assouplies puis abrogées.
Mais l'année 1995 a permis de constater que l'utilisation des possibilités offertes par le régime commercial applicable aux pays et territoires d'outre-mer se concentrait sur les produits agricoles les plus sensibles pour la Communauté (riz, viande bovine, sucre et produits laitiers).
Tout en affirmant la nécessité de maintenir ce régime commercial, la Commission souligne le risque de conflit entre la politique agricole commune et le libre accès accordé aux produits originaires des pays et territoires d'outre-mer soumis, dans la Communauté, à une organisation commune de marché (OCM).
Aussi propose-t-elle d'instaurer un mécanisme de prix minimum à l'importation pour les produits faisant l'objet d'une organisation commune de marché et de supprimer le caractère automatique du cumul ACP/Pays et territoires d'outre-mer pour les produits agricoles, avec la possibilité d'accorder des dérogations ponctuelles.
3. Le régime applicable en matière de droit d'établissement
La proposition de décision du Conseil procède à une réécriture complète de l'article 232 de la décision d'association. Cependant, les modifications introduites sont d'une portée limitée.
Dans sa nouvelle rédaction, cet article se réfère à l'article 132 paragraphe 5 du Traité de Rome qui énonce le principe de non-discrimination en matière de droit d'établissement des ressortissants et des sociétés. Il précise que si ce principe s'impose aux autorités compétentes des pays et territoires d'outre-mer, il s'applique également aux États membres qui doivent « traiter sur une base non discriminatoire les ressortissants , sociétés et entreprises des pays et territoires d'outre-mer ».
Le principe de non discrimination en matière de libre établissement est donc réaffirmé et explicité.
Concernant les dérogations susceptibles d'être accordées par la Commission à la demande des autorités compétentes d'un pays ou territoire d'outre-mer, il est proposé qu'elles fassent désormais l'objet d'une publication au Journal officiel des Communautés européennes.
Au total, les mentions supplémentaires introduites à l'article 232 ne semblent pas d'une importance de nature à justifier sa réécriture intégrale : celle-ci résulte en réalité des négociations qui ont conduit la Commission à retirer, à la demande du Gouvernement français, des dispositions tendant à autoriser la libre circulation des travailleurs salariés de l'Union dans les pays et territoires d'outre-mer.
4. L'éligibilité des ressortissants des pays et territoires d'outre-mer à certains programmes communautaires
Bien que les pays et territoires d'outre-mer ne fassent pas partie du territoire communautaire, leurs ressortissants possédant la citoyenneté de l'État membre auquel ils sont liés sont citoyens de l'Union.
Afin de valoriser cette citoyenneté européenne des ressortissants des pays et territoires d'outre-mer et de marquer la différence entre le régime d'association de ces pays et territoires et le statut conventionnel des États ACP, il est proposé de les faire bénéficier de vingt-deux programmes communautaires.
Ces programmes concernent cinq domaines : l'éducation et la formation ; l'emploi et les affaires sociales ; les entreprises ; la recherche, le développement technologique et l'innovation ; la culture et l'audiovisuel.
5. La répartition de la dotation accordée aux pays et territoires d'outre-mer au titre du VIIIème FED
Pour la seconde période quinquennale d'application de la décision d'association, le Conseil européen qui s'est tenu à Cannes le 27 juin 1995 a fixé à 165 millions d'écus le montant de la dotation accordée aux pays et territoires d'outre-mer au titre du VIIIème FED. Cela représente une augmentation de 17,9 % par rapport au VIIème FED. Les sommes allouées au titre des interventions de la BEI s'élèvent à 35 millions d'écus.
La dotation du VIIIème FED est répartie entre d'une part la masse dite « non programmable » (capitaux à risques, Sysmin, Stabex, aides d'urgence, bonifications d'intérêts) et la masse dite « programmable » (programmes indicatifs et coopération régionale). La proposition de décision fixe à 50 millions d'écus le montant de la masse non programmable pour la période 1995-2000 qui s'élevait à 36,5 millions d'écus pour la première période quinquennale. Le montant de la masse programmable passe quant à elle de 97,5 à 115 millions d'écus.
S'agissant des programmes indicatifs du FED, représentant la part la plus importante de la masse programmable, la Commission propose d'opérer une répartition entre les pays et territoires d'outre-mer français, néerlandais et britanniques en appliquant aux montants fixés par le VIIème FED un coefficient de pondération prenant en compte les taux de variation de leurs populations respectives sur la période 1990-1995. Ces évolutions financières sont retracées dans le tableau suivant :
PTOM |
VIIème FED |
Proposition VIIIème FED |
||
en millions d'écus |
en % |
en millions d'écus |
en % |
|
France |
40,2 |
46,7 |
50,3 |
47,9 |
Pays-Bas |
30,3 |
35,2 |
35,5 |
33,8 |
Royaume-Uni |
15,5 |
18,1 |
19,2 |
18,3 |
TOTAL programmes indicatifs |
86 |
105 |
L'application de critères économiques, et en particulier de ratios démographiques, bénéficie, depuis 1991, aux pays et territoires d'outre-mer français. La répartition était auparavant effectuée de façon forfaitaire.
Cependant, le Gouvernement français, au cours des négociations, a considéré que l'importance du critère démographique dans l'évaluation des dotations allouées aux pays et territoires d'outre-mer français, néerlandais et britanniques restait encore insuffisante. La population totale des vingt pays et territoires d'outre-mer étant estimée à 850.000 habitants, le poids démographique des pays et territoires d'outre-mer français s'élève à 58,2 %. Or, la part des crédits correspondant aux programmes indicatifs du FED qui leur est attribuée s'élève à 47,9 %.
Une telle distorsion aboutit à des disparités importantes en termes de montant moyen d'aide par habitant : aussi la France a-t-elle demandé une réévaluation de sa dotation. Cette question fait encore aujourd'hui l'objet de négociations au sein du Conseil, où la demande française rencontre l'opposition des britanniques.