4. Les perspectives
De nouveaux progrès juridiques sont attendus dans le domaine de la coopération transfrontalière entre collectivités locales.
Le Conseil de l'Europe a élaboré le 2 août 1995 un protocole additionnel à la convention de Madrid afin de donner un nouvel élan à la coopération transfrontalière. Il pose le principe du droit des collectivités de conclure, dans les domaines communs de compétence, des accords de coopération transfrontalière. Il reconnaît les possibilités de créer des organismes de coopération transfrontalière, dotés ou non de la personnalité juridique, et précise les éléments principaux du statut de ces organismes et de leurs décisions.
Ce protocole a été pour l'instant signé par l'Allemagne, le Luxembourg, la Suède et la France, qui a pris une part active à son élaboration.
Il devrait permettre aux États européens de mieux mettre au point les instruments juridiques nécessaires à la coopération entre collectivités locales.
D'autre part, les actions concrètes de coopération butant encore souvent sur la difficulté, voire l'impossibilité, de constituer des organes communs capables de gérer des projets, la réflexion sur la recherche d'instruments appropriés se poursuit.
En effet, la loi française ne prévoit pour l'instant que deux types d'organismes de coopération dont on doit souligner les limites.
La création d'une société d'économie mixte locale accueillant des capitaux de collectivités étrangères est possible mais la participation de ces dernières doit obligatoirement être minoritaire. L'objet social de ces sociétés est limité à l'exploitation de services publics d'intérêt commun, ce qui rend la formule moins facilement utilisable pour les opérations d'aménagement.
Le groupement d'intérêt public obéit quant à lui aux règles de la comptabilité publique et nécessite la présence d'un contrôleur économique et financier français, ce qui présente l'avantage d'apporter des garanties en matière de suivi et de contrôle mais peut se révéler en revanche assez lourd dans la gestion.
Certaines collectivités se sont tournées vers une structure de droit communautaire, le groupement européen d'intérêt économique (GEIE), mais la légalité de leur participation à ce type d'organisme est discutée. En effet, la loi française pose l'interdiction de principe, pour les collectivités, d'appartenir à des sociétés commerciales ou à des organismes à but lucratif, ce qui est le cas du GEIE. Seul un décret en Conseil d'État peut lever cette interdiction.
Aussi, la structure répondant parfaitement aux aspirations des partenaires de la coopération transfrontalière reste-t-elle à inventer.
Le groupement local de coopération transfrontalière prévu par l'accord de Karlsruhe constitue à ce titre une avancée.
Dans une réponse à une question écrite à notre collègue Georges Gruillot (JO Sénat, Questions du 21 novembre 1996), le ministre délégué aux affaires européennes précise que « la traduction juridique de ce nouvel instrument de coopération transfrontalière nécessitera une modification de la partie du code général des collectivités territoriales relatives au syndicat mixte », ce groupement étant « soumis au droit interne applicable aux établissements publics de coopération intercommunale ». Il estime que « cette modification permettra d'intégrer d'emblée le groupement local de coopération transfrontalière dans les dispositions d'éventuels accords antérieurs ».
Ainsi se dessine peu à peu, sous l'impulsion de la France, l'émergence d'un outil de coopération qui pourrait s'étendre à d'autres pays européens.
Encore faudra-t-il apprécier concrètement les vertus du groupement local de coopération transfrontalière dans le cadre de la mise en oeuvre de l'accord de Karlsruhe, avant de savoir s'il répondra efficacement, tel quel ou moyennant des adaptations, aux nécessités de la coopération entre collectivités.