Avis n° 79 - Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 adopté par l'Assemblée nationale
M. Jacques OUDIN, Sénateur
Commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation - Avis n° 79 - 1997/1998
Table des matières
- INTRODUCTION
-
EXPOSE GENERAL
- I. LE CONTEXTE DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SECURITE SOCIALE
- II. L'ÉCONOMIE GENERALE DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT : LE CHOIX FACILE DE L'AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS
- III. LE BASCULEMENT DES COTISATIONS SUR LA CSG ET L'AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LE PATRIMOINE : LA PERVERSION D'UNE BONNE IDÉE
-
IV. LES POSITIONS DE VOTRE COMMISSION
- A. PAS D'AGGRAVATION DU DÉFICIT PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
- B. PRÉSERVATION DE LA POLITIQUE FAMILIALE
- C. MODÉRATION DE LA PROGRESSION DES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE
- D. COHÉRENCE DE LA POLITIQUE D'IMPOSITION SUR LE REVENU
- E. COHÉRENCE DE LA POLITIQUE DE TAXATION DE L'ÉPARGNE
- F. COHÉRENCE DANS LES IMPOSITIONS SOCIALES AFFECTÉES
- G. DEFIANCE A L'EGARD DU RECOURS A L'EMPRUNT
-
EXAMEN DES ARTICLES
-
ARTICLE PREMIER
Approbation du rapport annexé - ARTICLE 2
-
ARTICLE 3
Augmentation des taux de la CSG et diminution des cotisations d'assurance maladie -
ARTICLE 5
Création de taxes de santé publique sur les tabacs -
ARTICLE 9
Validation des taux de majoration de la cotisation d'accidents du travail -
ARTICLE 14
Suppression du régime spécial de l'ancienne
chambre de commerce et d'industrie de Roubaix -
ARTICLE 15
Prévision des recettes par catégories -
ARTICLE 19
Mise sous conditions de ressources des allocations familiales -
ARTICLE 20
Réduction du taux de l'allocation de garde d'enfant à domicile -
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 23
Gel des dépenses de gestion administrative du régime général -
ARTICLE 24
Ratification du décret relevant le plafond d'avances de trésorerie du régime général pour 1997 -
ARTICLE 26 (nouveau)
Plafonds de trésorerie des régimes autorisés à s'endetter
-
ARTICLE PREMIER
- TRAVAUX DE LA COMMISSION
- AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
N° 79
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 5 novembre 1997
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
Par M. Jacques OUDIN,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Christian Poncelet,
président
; Jean Cluzel, Henri Collard,
Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini,
René Régnault,
vice-présidents
; Emmanuel
Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Alain Lambert,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré,
René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot,
Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël
Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon
Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut,
Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel
Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann,
Henri Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
303
,
385
,
386
et T.A.
22.
Sénat
:
70
,
73
(1997-1998).
Sécurité sociale.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Avec l'examen de la présente loi de financement de la
sécurité sociale, nous mesurons désormais pleinement
l'intérêt des réformes engagées par le Gouvernement
de M.Alain Juppé dans le domaine de la protection sociale.
Trois constats s'imposent à votre rapporteur pour avis.
Premier constat, le Parlement est maintenant bien informé sur
l'évolution et les structures de nos dépenses et de nos recettes
sociales. La réforme constitutionnelle du 22 février 1996 a
créé la loi de financement de la sécurité sociale.
Nous avions à l'époque longuement débattu de sa nature
juridique. Si le débat n'est pas clos sur ce sujet, le Parlement a
désormais tous les moyens d'être éclairé sur ce
domaine qui intéresse au premier chef tous nos concitoyens.
La Cour des comptes, dont la compétence a été
élargie à tous les aspects de la protection sociale, assiste le
Parlement dans son contrôle du fonctionnement de la myriade d'organismes
qui gère notre protection sociale. Ses rapports sont d'une grande
qualité et elle possède désormais une chambre
spécialement compétente pour le domaine de la
sécurité sociale.
L'évolution des comptes est confiée à la commission des
comptes de la sécurité sociale qui pourra davantage affiner ses
analyses lorsque les réformes comptables longtemps demandées par
votre Assemblée auront toutes été mises en oeuvre.
Enfin, le rapport du Gouvernement annexé au présent projet de loi
nous permet de mieux apprécier les contours de sa politique, et
présente l'avantage de pouvoir être amendé par le Parlement.
Deuxième constat, l'évolution des comptes sociaux reste
préoccupante. En effet, ces derniers continuent à augmenter
à un rythme supérieur à l'inflation.
Si cela s'explique pour certains postes liés à des facteurs
démographiques, comme ceux concernant la vieillesse, il n'en demeure pas
moins qu'une plus grande rigueur s'impose pour les évolutions d'autres
branches, et notamment la branche maladie.
Dans ce domaine, la réforme Juppé, dont aucun des grands
principes n'a été remis en cause par l'actuel Gouvernement, donne
à celui-ci, comme aux organismes sociaux, les moyens de mieux
contrôler, de mieux évaluer et de mieux répartir les masses
financières en jeu.
Toutes les analyses menées par les organismes les plus divers et les
plus compétents font apparaître des dysfonctionnements
considérables, des gaspillages non négligeables, un niveau moyen
de dépenses de santé par habitant largement supérieur
à la moyenne européenne sans que, pour autant, les
critères sanitaires soient meilleurs.
Les inégalités régionales, les surcapacités
existantes dans certains secteurs, soulignent qu'une meilleure
répartition de l'effort existant contribuerait à une gestion plus
efficace de l'ensemble de la branche maladie.
Nous devons malheureusement constater que, si le Gouvernement dispose de tous
les moyens d'une meilleure maîtrise des dépenses de santé,
il n'a pas fait preuve dans la présente loi de financement de la
sécurité sociale de l'effort que l'on pouvait attendre de lui.
Troisième constat, des incohérences peuvent être
relevées dans la politique des prélèvements obligatoires
sous-jacente au présent projet de loi.
D'une manière générale, chacun sait que la France
possède deux caractéristiques. La première est d'avoir un
niveau de prélèvements parmi les plus élevés des
pays européens et des pays développés. La deuxième
est d'avoir le triste privilège de détenir un taux de
chômage parmi les plus importants de ces mêmes pays. Votre
commission des finances se préoccupe de mieux cerner les liens qui
peuvent exister entre le niveau des prélèvements obligatoires et
le niveau de chômage. Certaines études menées à la
demande de la commission, et qui seront développées dans son
rapport général sur le budget, font apparaître
l'étroite corrélation qui existe entre ces données.
Ceci explique la position constante et ferme de votre commission des finances,
qui ne souhaite pas que le niveau moyen des prélèvements
obligatoires soit augmenté et estime que la maîtrise de leur
évolution passe par une meilleure cohérence au sein même
des assemblées parlementaires pour l'examen des décisions dans ce
domaine. Il n'est pas rationnel que plusieurs pôles de décision
puissent faire apparaître des divergences de politique dans une
matière aussi importante.
En outre, au-delà de ces considérations de procédure,
votre commission des finances estime qu'une cohérence plus forte doit
être assurée pour les prélèvements sur les revenus
des personnes physiques. Il s'agit notamment de l'articulation entre
l'impôt sur le revenu et la CSG. Il s'agit également de la
fiscalité de l'épargne, qui est d'autant plus importante que
celle-ci sera particulièrement mobile dans une Europe dotée d'une
monnaie unique. Il s'agit enfin de la position de principe consistant à
refuser toute création de taxe nouvelle et à utiliser au mieux
les dispositifs existants.
Enfin, votre commission des finances attire solennellement votre attention sur
les dangers d'une politique de facilité consistant à maintenir
certains déficits sociaux qui viendront grever la dette cantonnée
au sein de la CADES, avec pour conséquence l'allongement de la
durée ou le relèvement du taux du prélèvement qui
lui est affecté. De même, elle refuse la solution de
facilité consistant à autoriser la CNRACL à s'endetter. Le
recours à l'emprunt est, dans un système fondé sur la
répartition, une aberration qui consiste à faire payer aux
générations futures les turpitudes issues de nos propres
errements.
EXPOSE GENERAL
I. LE CONTEXTE DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SECURITE SOCIALE
A. LES LIMITES DU CADRE TECHNIQUE DES LOIS DE FINANCEMENT
Avant d'aborder le détail du présent projet de loi, votre rapporteur pour avis estime indispensable de bien rappeler quelles sont les limites du cadre technique des lois de financement de la sécurité sociale, qui sont très loin d'offrir au Parlement les mêmes garanties de précision dans la présentation et de suivi dans l'exécution que les lois de finances. Pour ces aspects techniques, il s'appuiera sur les trois rapports sur la sécurité sociale adressés par la Cour des Comptes au Parlement depuis 1995.
1. Un système comptable perfectible
La réforme du passage d'un système de
comptabilité en encaissements/décaissements à un
système en droits constatés, que votre rapporteur pour avis a
toujours personnellement défendu, a accompli de grands progrès
depuis deux ans.
Le décret n° 96.448 du 23 mai 1996, établi à la suite
des travaux du groupe de travail présidé par M. Etienne
Delaporte, Conseiller-maître à la Cour des comptes, a mis en
oeuvre la comptabilisation en droits constatés dans les organismes du
Régime général à compter du 1er janvier 1996.
Des textes complémentaires (circulaire interministérielle du 3
juillet 1996, lettre commune aux ministères des finances et des affaires
sociales du 4 juin 1996) ont précisé les conditions de
comptabilisation en fin de gestion des opérations de
régularisation (charges à payer, produits à recevoir,
provisions) et les modalités de leur contrôle, et demandé
que pour les résultats de l'exercice 1996 le résultat courant
soit soigneusement distingué du résultat exceptionnel lié
aux lignes de charges et produits exceptionnels sur opérations
antérieures au 1er janvier 1996, mais payées ou encaissées
en 1996.
Le groupe de travail, à la tête duquel M. Alain Deniel,
Conseiller-maître à la Cour des comptes, a succédé
à M. Etienne Delaporte, s'est attaché à clarifier les
conditions dans lesquelles les résultats 1996 du régime
général pourraient être déterminés à
la fois en droits constatés et en encaissements/décaissements
afin de garantir la continuité des informations comptables. Il s'est
efforcé également d'arrêter de manière
coordonnée les solutions à apporter aux problèmes
techniques posés par la mise en oeuvre de la réforme, de
manière à dégager une unité de doctrine pragmatique.
L'année 1996 est donc la première où il est possible de
comparer les résultats comptables du régime général
dans les deux systèmes de comptabilité. Le tableau
ci-après permet cette comparaison pour les quatre branches.
On observe que les résultats courants sont un peu plus
dégradés que les résultats de caisse, ceci pour chacune
des quatre branches du régime général. Mais l'importance
des résultats exceptionnels, qui dégagent un solde global positif
de plus de 35 milliards de francs, rend difficile l'interprétation de
l'ensemble.
C'est la raison pour laquelle le rapport de la commission des
comptes de la sécurité sociale s'est encore contenté cette
année d'une présentation en comptes de caisse.
Par ailleurs, trois décrets du 18 mars 1997 ont étendu le
principe des droits constatés aux organismes d'assurance maladie et
maternité des travailleurs salariés des professions non
agricoles, aux organisations d'assurance vieillesse de ces professions
(ORGANIC, CANCAVA et CNAVPL notamment) et aux organismes tels que la Caisse
mutuelle d'assurance maladie des cultes (CAMAC), la Caisse mutuelle d'assurance
vieillesse des cultes (CAMAVIC), la Caisse des français à
l'étranger (CFE), la Caisse de retraite et de prévoyance des
clercs et employés de notaires (CRPCEN) ou la Caisse autonome nationale
de sécurité sociale dans les mines (CANMSS) qui appliquent les
dispositions comptables du régime général. Enfin, un
décret du 31 mai 1997 étend le principe au régime
agricole. La mise en vigueur de ces dispositions est fixée au 1er
janvier 1997.
Votre rapporteur pour avis se réjouit des progrès rapides
accomplis sur la voie d'une réforme qui lui avait été
présentée comme excessivement difficile il y a trois ans
lorsqu'il avait demandé au Sénat d'adopter un amendement tendant
à en accélérer le cours, dans le cadre de la discussion de
la loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité
sociale.
Il relève néanmoins que les comptes fournis à l'appui du
présent projet de loi de financement sont encore établis en
comptabilité de caisse, et que cela est de nature à fausser leur
interprétation, voire à porter atteinte à leur
sincérité.
Par ailleurs,
aucun progrès n'a été fait sur la voie de
la consolidation des comptes des organismes de sécurité
sociale.
Votre rapporteur pour avis veut simplement rappeler les
conclusions de la Cour des comptes dans son rapport au Parlement sur la
sécurité sociale de septembre 1996.
"Improprement qualifiée de consolidation, l'agrégation des
données fournies par la comptabilité des organismes de
sécurité sociale répond à la même
nécessité et doit satisfaire aux mêmes exigences que celles
des sociétés commerciales appartenant à un même
groupe. Les principes qui président à l'élaboration de
leurs comptes consolidés, qui doivent être "réguliers et
sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la
situation financière ainsi que du résultat de l'ensemble
constitué par les entreprises comprises dans la consolidation" (art.
357-6 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les
sociétés commerciales), sont en effet également valables
pour l'agrégation des données comptables dans le domaine de la
sécurité sociale. De même, les exigences
d'intelligibilité, de pertinence, de fiabilité et de
comparabilité définies par la normalisation comptable
internationale (normes IAS) devraient servir de référence.
Les analyses qui précèdent, prolongeant les observations
formulées par la Cour dans son précédent rapport, montrent
que la situation est très loin de satisfaire à ces principes et
exigences, qu'il s'agisse de la façon dont sont comptabilisées
les opérations réciproques entre régimes ou des
méthodes d'agrégation des données comptables d'organismes
appartenant à un même ensemble significatif.
Le Parlement ne dispose pas en matière de sécurité
sociale d'informations comptables comparables à celles qui lui
permettent d'exercer sa mission en ce qui concerne le budget de l'Etat. Cette
situation s'explique par l'organisation spécifique du système de
sécurité sociale, qui produit des comptes nombreux et
disparates."
2. Des conventions de présentation contestables
Dans son rapport sur la sécurité sociale de
cette année, la Cour des comptes s'est attachée à examiner
la cohérence des données comptables présentées
à l'appui du projet de loi de financement. Elle a ainsi relevé un
certain nombre de convention de présentation qu'elle juge contestables.
La Cour des comptes relève ainsi que les comptes du projet de loi
de financement sont présentés en opérations courantes. Or,
les comptes du régime général sont établis en
emplois et ressources, aussi bien en capital qu'en fonctionnement, afin de
déterminer par différence la variation du fonds de roulement
entre deux exercices, couramment assimilé au "déficit de la
sécurité sociale".
Elle en conclut que
"de ce fait, les comptes annexés au projet de loi
de financement ne correspondent pas, pour le régime
général, à ceux qui sont commentés par la
commission des comptes de la sécurité sociale. Aussi, l'annexe C,
qui décrit les recettes et les dépenses des régimes
complète-t-elle le solde des opérations courantes du
régime général en y ajoutant celui des opérations
en capital. Le résultat traditionnel du régime
général est ainsi retrouvé, mais au terme d'une
procédure qui rompt avec la présentation des comptes faite
à la commission. Quant aux autres régimes, la présentation
de leurs opérations financières limitée aux
opérations courantes les éloigne de leurs propres comptes."
Deuxième exemple, la Cour des comptes observe que
"les recettes
des départements d'outre-mer ont cependant été
portées dans la catégorie des "autres ressources" à
l'annexe D, pour le régime général, le régime des
exploitants agricoles et la caisse nationale d'assurance maladie et
maternité des travailleurs non salariés des professions non
agricoles (CANAM). Les autres régimes ne distinguent pas de recettes
pour la métropole et pour les DOM dans leurs comptes. Les recettes des
DOM seraient ainsi à intégrer dans leurs catégories
respectives, comme dans les comptes des organismes."
Troisième exemple, la Cour des comptes observe que
"les
transferts internes ne sont pas éliminés de la branche qui a
supporté la dépense, mais portés en diminution de
l'objectif de dépenses de celle qui a reçu la recette. L'objectif
d'une branche est, en effet, calculé net des transferts reçus :
il est estimé que la contrepartie des recettes pour la branche
correspond à des prestations, bien qu'il s'agisse de charges
calculées conventionnelles.
Cette présentation permet d'éliminer les doubles comptes, mais
elle présente des inconvénients : l'excès de
dépenses d'une branche peut être compensé par le transfert
de recettes d'une branche qui n'aurait pas dépassé son objectif.
Pour une large part, en effet, les transferts peuvent voir leur montant
modifié par de simples décisions réglementaires. De plus,
ce traitement des transferts ne donne pas une présentation fidèle
de la masse des prestations effectuées. Il paraîtrait dès
lors plus logique d'exclure plutôt les transferts versés de
l'objectif de dépenses de la branche qui verse ces transferts."
Ces différents exemples démontrent amplement les progrès
qui doivent encore être accomplis pour parvenir à une
comptabilité fiable et sincère. Votre commission des finances
souhaite que le Gouvernement puisse donner les instructions nécessaires
pour remédier rapidement aux critiques formulées par la Cour des
comptes.
B. L'ÉVOLUTION TENDANCIELLE DES COMPTES SOCIAUX
1. L'impact de la loi de financement pour 1997
Pour la première fois cette année, le projet de
loi de financement de la sécurité sociale -le deuxième de
son espèce à être présenté au Parlement- est
accompagné de l'annexe prévue au II de l'article L.O. 111-4 du
code de la sécurité sociale,
"rendant compte de la mise en
oeuvre des dispositions des lois de financement de la sécurité
sociale de l'exercice précédent."
Cette annexe B montre que les prévisions révisées des
recettes de la sécurité sociale pour 1997 sont supérieures
de 1,6 milliard de francs seulement par rapport aux prévisions initiales
de la loi de financement de l'an dernier, tandis que les objectifs de
dépenses révisés sont supérieurs de
12,4 milliards de francs aux objectifs de dépenses initiaux.
Toutefois, ces écarts par rapport aux prévisions
initiales intègrent la décision politique prise par le
Gouvernement de quadrupler en 1997 l'allocation de rentrée scolaire.
Cette mesure, d'un coût de 6,5 milliards de francs, apparaît
à la fois dans les dépenses de la branche famille et dans les
recettes, sur la ligne "contributions publiques" puisqu'elle fait
l'objet d'un
remboursement par l'Etat à la CNAF.
Si l'on fait abstraction de cette mesure décidée pour ne
prendre en compte que les évolutions spontanées, le solde de la
sécurité sociale en 1997 apparaît dégradé de
10,8 milliards de francs, par rapport aux prévisions de la loi de
financement qui l'avaient établi à -34 milliards de francs.
Cette dégradation résulte de - 5,1 milliards de francs de
moindres recettes et de - 5,7 milliards de francs de dépenses
supplémentaires,
Concernant les recettes
, les principaux écarts entre les
prévisions initiales et les prévisions révisées
sont les suivantes :
Une diminution de - 800 millions de francs des
cotisations
effectives
, qui recouvre deux mouvements de sens contraire :
- une moins-value de - 1,6 milliard de francs sur les cotisations du
régime général, qui atteindrait même - 3 milliards
de francs si elle n'était pas partiellement compensée par le
versement à la CNAMTS par la CANAM de 1,4 milliard de francs au titre de
la prise en charge par le régime général des
médecins du secteur II ;
- des plus-values de + 1,1 milliard de francs sur les cotisations des autres
régimes de salariés du fait de la sous-estimation initiale de
l'évolution du point de la fonction publique, et de + 1,2 milliard de
francs sur les cotisations des régimes de non-salariés, du fait
de la révision de la base 1996 de la prévision 1997.
Une diminution de - 600 millions de francs des
cotisations
fictives
, qui est la contrepartie du surplus des cotisations effectives des
régimes spéciaux de salariés par rapport aux
prévisions.
Une diminution de - 3 milliards de francs des
impôts et
taxes
affectées
, qui recouvre de nombreuses moins values de
recettes :
- la révision de baisse de - 800 millions de francs du rendement de la
CSG ;
- la révision en baisse de - 300 millions de francs du rendement des
droits sur les alcools, de - 200 millions de francs du rendement des droits de
consommation sur les tabacs affectés à la CNAMTS, de - 200
millions de francs du rendement de la taxe sur les boissons alcooliques et des
taxes pharmaceutiques ;
- la révision en baisse de - 1,3 milliard de francs du produit de la C3S
répartie en 1997, du fait d'une régularisation négative au
titre de 1996 et de l'actualisation des déficits comptables des
régimes de non-salariés.
Concernant les dépenses
, les principaux écarts entre les
objectifs initiaux et les objectifs révisés sont les suivants :
La révision en hausse de + 600 millions de francs des
dépenses de
l'assurance maladie
, non pas du fait d'un
dépassement des prestations incluses dans l'ONDAM, mais
du fait d'un
dépassement de + 300 millions de francs des frais de gestion
et de
300 millions de francs des dépenses des DOM ;
La révision en hausse de + 1,3 milliard de francs des
dépenses de
l'assurance vieillesse
, qui recouvre trois
phénomènes distincts :
- un dépassement des dépenses de prestations de - 1,6 milliard de
francs, du fait d'une sous-évaluation initiale de l'effet volume pour le
régime général et de la revalorisation des pensions pour
les régimes spéciaux des fonctionnaires ;
- un dépassement des frais de gestion de + 500 millions de francs
;
- une plus-value de + 800 millions de francs sur le solde des transferts
versés et reçus par les régimes d'assurance-vieillesse.
La révision en hausse de + 3,7 milliards de francs des
dépenses de la
branche famille
, qui recouvre trois
évolutions distinctes :
- un dépassement de + 1,4 milliard de francs des dépenses de
prestations, dont 1,1 milliard de francs imputable aux dispositions de la loi
relative à la famille de 1994 ;
- un dépassement et des frais de gestion de + 300 millions de francs
;
- une révision en hausse des transferts de + 2 milliards de francs, en
raison de l'augmentation des versements à la CNAVTS au titre de
l'assurance vieillesse des parents au foyer.
2. La persistance d'une situation déficitaire à l'horizon 2000
Conformément aux prescriptions du paragraphe II de
l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale, l'annexe C
du projet de loi de financement présente les perspectives
d'évolution des recettes et des dépenses des régimes
obligatoires de base pour les deux années postérieures.
Cette projection pluriannuelle constitue une innovation appréciable
pour l'information du Parlement
. Jusqu'à présent, aucun
document relatif aux comptes sociaux ne comportait de prévisions
à moyen terme.
Ces perspectives à l'horizon 2000 sont fondées sur les
mêmes hypothèses macro-économiques que celles du projet de
loi de finances et de la commission des comptes de la sécurité
sociale.
La projection des recettes repose sur un taux de croissance du PIB de + 3 % en
volume et de 1,4 % en prix, soit un taux de croissance du PIB en valeur de +
4,2 %, pour chacune des deux années 1999 et 2000.
L'amélioration du marché du travail entraînerait une
stabilisation de la part des salaires dans la valeur ajoutée, et la
masse salariale croîtrait un peu moins vite que le PIB, à un
rythme annuel de + 4 %.
Les cotisations sociales progresseraient ainsi chaque année au taux de 4
%, les impôts et taxes affectés étant conventionnellement
supposés croître selon un taux identique.
Perspectives du régime général
Certaines dispositions du présent projet de loi de financement
concourant au redressement des comptes en 1998 affectent l'évolution de
ces postes en 1999 : en particulier, la substitution entre les cotisations
maladie et la CSG affectée à ce risque (dont le taux est
majoré de 4,1 point) n'aura d'effets en année pleine qu'à
compter de 1999, de même que l'extension d'assiette des
prélèvements de 1 % sur les revenus des capitaux affectés
à la CNAVTS et à la CNAF.
En sens inverse, d'autres dispositions du présent projet de loi de
financement ne sont pas reconductibles : recyclage au profit de la CNAVTS de
l'excédent de C3S constaté en 1997, transfert des
disponibilités de la CAMAVIC au titre de son intégration
financière au régime général. La progression des
ressources des différentes branches du régime
général prend en compte ces effets.
Au total, les dépenses du régime général
s'accroîtraient de + 2,6 % en 1999 et + 2,7 % en 2000, ce taux global
recouvrant des évolutions différenciées selon les branches
:
+ 2,1 % les deux années pour les branches maladie et accidents du
travail, taux sensiblement supérieur à celui de l'inflation ;
+ 3,7 % à + 3,8 % pour la branche vieillesse, taux conforme aux
évolutions démographiques prévisibles et aux effets
attendus de la réforme des pensions de 1993 ;
+ 2,2 % et + 2,4 % pour la branche famille, taux compatible avec la
revalorisation annuelle de la base mensuelle des allocations familiales en
fonction des prix, et qui table à la fois sur la fin de la montée
en régime de la loi famille de 1994 et sur l'effet de la mise sous
conditions de ressources des allocations familiales.
Globalement, les recettes du régime général
progresseraient chaque année plus vite que les dépenses, cet
écart positif étant de 1 % en 1990 comme en 2000.
Appliquée à des masses de l'ordre de 1.200 milliards de francs,
ces écarts se traduiraient par une amélioration du solde du
régime général d'une douzaine de milliards de francs
chaque année.
Ainsi, le régime général serait encore
déficitaire de - 12 milliards de francs en 1998, quasiment à
l'équilibre en 1999 avec un solde positif d'environ 500 millions de
francs, et excédentaire de 12,9 milliards de francs en 2000.
Les autres principaux régimes
Sur la base des mêmes hypothèses macro-économiques, les
projections relatives aux autres régimes de sécurité
sociale montrent que ceux-ci seraient quasiment tous en déficit en 1999
et en 2000, à l'exception de ceux qui sont par définition
équilibrés.
En effet, les régimes spéciaux de salariés sont par
construction équilibrés par une subvention de l'Etat
(régime des fonctionnaires et des agents de l'Etat, SNCF), ou une
contribution de l'entreprise de rattachement (EDG-GDF).
Le principal régime déficitaire à l'horizon de la
projection serait celui des agents des collectivités locales
. La
CNRACL a bénéficié en 1997 du transfert d'une partie des
réserves du Fonds d'allocation temporaire d'invalidité des agents
des collectivités locales. En raison de la dégradation rapide de
son rapport démographique, la CNRACL serait en déficit de
3,3 milliards en 1999, puis de 4,3 milliards de francs en 2000.
Le déficit de l'ORGANIC
, comblé en 1998 par l'augmentation
de la compensation et de la C3S,
réapparaît en 1999 et 2000.
C. L'ARTICULATION AVEC LA LOI DE FINANCES
1. La cohérence des données communes aux deux lois
Dans son rapport au Parlement sur la sécurité
sociale de septembre 1997, la Cour des comptes s'est attachée à
examiner l'articulation de la loi de financement de la sécurité
sociale avec la loi de finances, qui doit être parfaite dans la mesure
où ces deux lois financières se recoupent tant en recettes qu'en
dépenses.
En effet, un certain nombre des ressources et des emplois de la
sécurité sociale apparaissent en loi de finances, en tant
qu'elles sont constituées :
- de crédits affectés par l'Etat à la protection sociale
des fonctionnaires civils et militaires, qui figurent à la fois en
cotisations fictives ou effectives et dans les dépenses des
régimes de base ;
- de transferts de l'Etat aux régimes de sécurité sociale
(cotisations prises en charge et compensations d'exonérations de
cotisations, remboursements de prestations et subventions d'équilibre,
transferts de compensation), qui se répartissent entre cotisations
effectives, contributions publiques et transferts.
Quant aux impôts et taxes affectés, ils font l'objet d'un partage
entre les deux lois.
Ainsi, la CSG figure dans la loi de financement de la
sécurité sociale pour ce qui concerne l'élargissement de
son assiette et l'augmentation de son taux, mais la déductibilité
du surcroît de CSG ainsi créé relève de la loi de
finances de l'Etat
. Il en va de même des droits de consommation sur
les tabacs, dont une fraction est affectée à la Caisse nationale
de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) à
partir de 1997 : c'est la loi de finances qui fixe le taux de cette fraction
(6,39 %), mais c'est la loi de financement de l'an dernier qui a modifié
le code de la sécurité sociale pour y intégrer cette
nouvelle ressource de la branche maladie.
La Cour des comptes relève que la cohérence des
évaluations des données communes aux deux lois est assurée
grâce à un travail de concertation qui obéit à un
calendrier rigoureux.
Les premières évaluations des différents transferts pour
l'année n+1 sont établies, à législation constante,
par la direction du budget au 1er trimestre ou au début du printemps.
Elles sont discutées au cours des conférences budgétaires.
Le cas échéant, elles sont ensuite révisées en
fonction des informations nouvelles, des arbitrages ou des décisions
gouvernementales.
Les évaluations sont faites en concertation avec le ministère de
l'emploi et de la solidarité et avec les autres ministères
concernés. En cas de désaccord sur un poste important,
l'arbitrage du Premier ministre peut être nécessaire, comme en
1996 sur l'évaluation du coût pour l'Etat de la ristourne
dégressive sur les bas salaires.
A la fin du mois de juillet ou au début du mois d'août, une
version actualisée des transferts est établie, prenant en compte
les arbitrages des lettres plafonds.
A peu près au même moment, il est procédé à
un nouveau calcul des transferts de compensation, mais l'information disponible
reste très incomplète à cette date puisque les
compensations définitives de l'année n-1 ne sont
arrêtées par la commission de compensation qu'en novembre de
l'année n, à partir de données recueillies vers le mois de
septembre.
Enfin, la fixation définitive au mois d'août des hypothèses
macro-économiques du projet de loi de finances peut donner lieu à
de nouvelles mises à jour des évaluations de transferts et de
prélèvements affectés. De nombreux postes sont sensibles
à l'hypothèse retenue pour la hausse des prix ; en pratique,
cette hypothèse est estimée suffisamment tôt (à 0,1
ou 0,2 % près) pour qu'il ne soit pas nécessaire de
réviser les évaluations au milieu de l'été.
La Cour des comptes conclut ainsi les développements
précédents :
"En résumé, la cohérence
des données retenues pour la loi de finances de l'Etat et la loi de
financement de la sécurité sociale est assurée par une
bonne coopération entre les services concernés. Un certain nombre
d'évaluations sont faites au printemps et finalement peu
révisées par la suite. Ce caractère relativement ancien de
l'information intégrée dans la loi de financement est le prix
à payer pour la cohérence des deux exercices."
Votre rapporteur tient à souligner qu'une telle concertation entre les
commissions des Affaires sociales et des Finances au sein de chacune des deux
assemblées serait particulièrement souhaitable.
Il serait même préférable que, dans un souci de
cohérence et de rigueur, la partie des recettes puisse relever
exclusivement des commissions des Finances, des dépenses relevant de la
compétence des commissions des affaires sociales.
2. Les concours budgétaires et fiscaux à la sécurité sociale
Deux documents de nature budgétaire, qui ne figurent
pas parmi les annexes au projet de loi de financement
énumérés dans la loi organique, décrivent les
transferts financiers entre l'Etat et la sécurité sociale, ainsi
que les impôts et taxes affectés.
Ces documents ont tous les deux été créés à
l'initiative de votre commission des finances, dans la perspective d'abord du
simple débat annuel prévu par la loi du 25 juillet 1994 relative
à la sécurité sociale, puis de la discussion du projet de
loi de financement de l'année.
L'article 18 de la loi du 5 juillet 1996 portant règlement
définitif du budget 1994 a prévu
"qu'à compter du
projet de loi de finances pour 1997, le produit pour l'exercice en cours et
pour l'exercice suivant de chacune des impositions de toutes natures
affectées à des organismes de sécurité sociale fait
l'objet d'une évaluation dans une annexe du projet de loi de finances de
l'année."
Le "jaune" budgétaire correspondant a été établi
pour la première fois dans le cadre du projet de loi de finances pour
1997 sur le produit des impositions affectées à des organismes de
sécurité sociale.
Cette nouvelle annexe fournit une description de chacune des impositions et la
liste de ses bénéficiaires. Elle contribue à clarifier le
financement de la sécurité sociale en présentant une vue
d'ensemble de prélèvements très disparates dans leur
nature et leur destination.
Par ailleurs, un état récapitulatif des concours de l'Etat
au financement de la sécurité sociale est prévu par
l'article 33 de la loi de finances rectificative du 4 août 1995,
modifié par l'article 3.-V de la loi organique du 22 juillet 1996.
Ce document présente, pour les deux derniers exercices, l'exercice en
cours et le projet de loi de finances de l'année suivante, les montants
constatés, estimés ou prévisionnels :
- des crédits inscrits au budget général et aux budgets
annexes,
- des dépenses des comptes spéciaux du Trésor,
- des impositions de toute nature affectées à des organismes de
sécurité sociale,
- des dépenses fiscales à finalité sociale,
qui constituent l'effort financier de l'Etat en faveur de la protection
sociale. Les crédits correspondants sont présentés par
titre et par chapitre.
Les tableaux ci-après sont extraits du document présenté
cette année en application de ces dispositions.
Les crédits budgétaires consacrés au financement de la
sécurité sociale s'élèvent donc à
220,5
milliards de francs
pour 1998, en augmentation de 0,7 % seulement. La
modération de ce taux de progression s'explique par l'érosion
spontanée des subventions d'équilibre aux régimes
spéciaux de retraite.
Toutefois, la conception des contributions budgétaires de l'Etat au
financement de la sécurité sociale retenu pour ce document
apparaît singulièrement restrictive, puisqu'il ne présente
que les cotisations effectives des agents de l'Etat.
Or, les dépenses réelles de protection sociale des
fonctionnaires doivent être définies sur la base des prestations
versées, à partir desquelles les cotisations effectives sont
calculées.
L'inclusion des charges de pension de l'Etat dans ce
document aboutirait à majorer le montant des crédits
budgétaires contribuant au financement de la sécurité
sociale de 157,5 milliards de francs pour 1998.
Au regard de cette masse de crédits budgétaires, les
dépenses au profit de la sécurité sociale des comptes
spéciaux du Trésor apparaissent négligeables, puisqu'elles
s'élèvent à
1,1 milliard de francs
. Leur forte
progression en 1998 s'explique par la création du fonds pour l'aide
personnelle au logement bénéficiant aux propriétaires,
doté de 500 millions de francs.
En revanche, les impositions de toute nature affectées à des
organismes de sécurité sociale dépassent largement les
crédits budgétaires, puisqu'elles s'élèveront en
1998 à
426,5 milliards de francs. Leur forte progression, de + 72 %,
s'explique par le relèvement du taux de la CSG proposé par le
présent projet de loi de financement
.
Enfin, la partie la moins visible des contributions de l'Etat au financement de la protection est constituée par les dépenses fiscales à finalité sociale, qui sont extrêmement nombreuses et variées.
Leur montant total s'élèverait à
71,9 milliards de
francs
en 1997. Il convient toutefois de relever que ces dépenses
fiscales n'incluent pas les effets du quotient familial, qui serait
considéré à compter de cette année
"comme partie
intégrante de la législation fiscale française."
Pourtant, son incidence avait été estimée dans
l'annexe des voies et moyens du projet de loi de finances de l'an dernier
à 72 milliards de francs : c'est-à-dire qu'il égale
à lui seul la totalité des autres dépenses fiscales
à finalité sociale.
II. L'ÉCONOMIE GENERALE DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT : LE CHOIX FACILE DE L'AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS
Votre commission des finances constate que le Gouvernement a choisi, pour les finances sociales comme pour les finances de l'Etat, d'emprunter la voie de la facilité, c'est-à-dire celle de l'augmentation des prélèvements. En effet, l'équilibre du présent projet de loi de financement repose essentiellement sur des recettes supplémentaires, et s'inscrit ainsi dans le mouvement général de hausse des prélèvements obligatoires qu'il a engagé par ailleurs et que votre commission des finances conteste vigoureusement.
A. UN ÉQUILIBRE FONDÉ PRINCIPALEMENT SUR DES RECETTES NOUVELLES
1. Des recettes nouvelles prédominantes
Les recettes nouvelles proposées par le présent
projet de loi de financement s'élèvent
à + 11,8
milliards de francs,
selon le détail suivant :
- substitution de la CSG aux cotisations d'assurance maladie (article 3),
qui dégage un excédent net de 4,6 milliards de francs ;
- déplacement complet des cotisations d'allocations familiales des
non-salariés (article 4) : 300 millions de francs ;
- création d'une taxe de santé publique sur les tabacs (article
5) : 1,3 milliards de francs ;
- extension des assiettes et fusion des prélèvements de 1 % CNAF
et 1 % CNAVTS sur l'épargne (article 6) : 4,5 milliards de francs ;
- relèvement de la taxe sur la publicité pharmaceutique (article
7) : 300 millions de francs ;
- création d'une taxe sur les ventes directes de médicaments
(article 8) : 300 millions de francs.
- relèvement de 6 à 8 % du taux de la taxe sur les contrats de
prévoyance complémentaire (article 10) : 500 millions de francs ;
- modification des règles de compensation bilatérale maladie
entre le régime des employés et clercs de notaires et le
régime général (article 12) : 200 millions de francs.
2. Des économies limitées
Au regard de ces prélèvements nouveaux massifs,
les économies proposées apparaissent à la fois
limitées et exclusivement concentrées sur une seule branche de la
sécurité sociale, la branche famille, pour un montant total
de
4,9 milliards de francs
:
- mise sous condition de ressources des allocations familiales
(article 19) : 4 milliards de francs ;
- réduction du taux de l'allocation de garde d'enfants à domicile
(article 20) : 900 millions de francs.
3. Des validations douteuses
Le présent projet de loi comporte deux mesures de
validation dont l'impact financier apparaît douteux, s'agissant de
validation préventives, qui sont demandées au Parlement avant
l'intervention des décisions de justice dont elles cherchent à
parer les conséquences financières.
Elles ne sont d'ailleurs
pas comptabilisées dans le bilan financier du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998
présenté par le Gouvernement.
Celui-ci estime néanmoins qu'elles devraient permettre de
prévenir des moindres recettes et des dépenses
supplémentaires estimées au total à 2,3 milliards de
francs, selon le détail suivant :
- validation des taux de cotisations d'accidents du travail fixés
réglementairement pour 1997 (article 5) : 1,7 milliard de francs de
moindres recettes potentielles ;
- validation des cotisations applicables aux actes de scanographie (article 23)
: 600 millions de francs de dépenses supplémentaires
évitées.
4. Des mesures de trésorerie non renouvelables
Enfin, l'équilibre du présent projet de
financement de la sécurité sociale est bouclé par un
certain nombre de mesures de trésorerie, par nature non reconductibles,
pour un montant total de
5,5 milliards de francs
, selon le détail
suivant :
- reprise de la dette cumulée 1997-1998 du régime
général par la CADES (article 25) : 3 milliards de francs de
charges d'intérêt épargnées au régime
général ;
- affectation de l'excédent de contribution sociale de solidarité
des sociétés (C3S) au régime général
(article 11) : 2,2 milliards de francs ;
- intégration financière du régime des cultes au
régime général (article 13) : 300 millions de francs.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 1997
votée par la précédente majorité comportait
également des mesures de trésorerie. Mais celles-ci
étaient parfaitement justifiées dans leur principe, qu'il
s'agisse de l'intégration financière du régime d'assurance
maladie des militaires au régime général, du
prélèvement sur le fonds d'invalidité et d'accidents du
travail des agents des collectivités locales au profit de la CNRACL, ou
du report de l'excédent de C3S de 1996 au bénéfice des
régimes de non-salariés.
Il n'en va pas de même pour les deux principales mesures de
trésorerie du présent projet de loi de financement.
En effet,
l'affectation de l'excédent de C3S de 1997 au régime
général constitue une aberration, s'agissant d'une taxe
conçue à l'usage exclusif des régimes de non
salariés, tandis que la réouverture de la CADES financée
par sa prolongation de cinq années constitue un précédent
fâcheux qu'il conviendrait, en aucun cas, de renouveler.
5. Des dépenses supplémentaires
Enfin, l'équilibre du présent projet de loi de
financement de la sécurité sociale comporte un certain nombre de
dépenses supplémentaires, qui ne relèvent pas toutes de la
loi, pour un montant total de
1,1 milliard
de francs, selon le
détail suivant :
- relèvement de l'Objectif national d'assurance maladie au-delà
de son évolution tendancielle (article 17) : 500 millions de francs ;
- généralisation du versement des allocations familiales
jusqu'à l'âge de 19 ans, par voie réglementaire : 300
millions de francs ;
- création d'un fonds d'accompagnement social pour la modernisation des
hôpitaux (article 21) : 300 millions de francs ;
- développement des actions de prévention de la CNAMTS :
300 millions de francs.
Le tableau ci-après récapitule l'ensemble des mesures du plan de
redressement financier de la sécurité sociale proposé par
le Gouvernement dans le cadre du présent projet de loi de financement de
la sécurité sociale.
Par rapport à son évolution tendancielle, le déficit
des régimes de base de sécurité sociale pour 1998 serait
réduit de 33 milliards de francs à 12 milliards de francs,
soit un effort de redressement portant sur 21 milliards de francs.
B. UNE ACCENTUATION DE LA HAUSSE CONTINUE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
1. L'impact de la loi portant mesures urgentes d'ordre fiscal et financier
La loi portant mesures urgentes d'ordre fiscal et financier
adoptée définitivement par le Parlement le 23 octobre dernier et
en instance de promulgation, a alourdi l'impôt sur les
sociétés d'un montant estimé par le Gouvernement à
21 milliards de francs
: 14,4 milliards de francs au titre de la
majoration exceptionnelle de 5 % du taux de l'impôt sur les
sociétés ; et 6,7 milliards de francs au titre de
l'inclusion dans son assiette des plus-values à long terme, hors titres
de participation.
Le rendement officiellement attendu de ces deux mesures pour 1998 est
estimé à 18 milliards de francs. Votre commission, pour sa part,
estime que son impact en 1997 est vraisemblablement sous-estimé, et
serait plus proche de
24 milliards de francs
.
2. L'impact du projet de loi de finances pour 1998
L'incidence de la partie recettes du projet de loi de
finances
pour 1998, actuellement en cours de discussion au Parlement, est une
augmentation des prélèvements de
43,5 milliards de francs
.
Ce montant inclut les produits attendus de l'abandon de la réforme de
l'impôt sur le revenu engagée par la loi de finances pour 1997,
soit 16,1 milliards de francs.
L'abandon de la réforme de l'impôt sur le revenu constitue,
certes, moins un prélèvement supplémentaire que la
suppression d'un allégement fiscal attendu par les ménages. Il
s'agit néanmoins d'une facilité financière que se donne le
Gouvernement en renonçant à assumer la contrainte d'une
réduction de l'imposition des revenus des ménages voulue par la
précédente majorité. Votre commission des finances vous
proposera d'ailleurs, dans le cadre de la discussion budgétaire, de
rétablir cette baisse programmée de l'impôt sur le revenu.
3. Une augmentation totale des prélèvements obligatoires de 80 milliards de francs
Le total des recettes fiscales et sociales nouvelles
résultant des projets initiaux du gouvernement, y compris le
présent projet de loi de financement de la sécurité
sociale, s'élèverait ainsi en 1998 à
56,23 milliards de
francs.
Cette somme, qui représente 0,66 % du PIB estimé pour 1998, se
décompose, en recettes fiscales, pour 43,5 milliards et, en recettes
sociales, pour 12,7 milliards.
S'agissant des recettes sociales, le surcroît de
prélèvement proposé par le Gouvernement est minoré
du fait de la prolongation de la Caisse d'amortissement de la dette sociale de
5 ans
prévue par l'article 25 du présent projet de loi de
financement.
Cette prolongation, qui conduit à faire supporter aux
générations futures la charge des déficits
constatés en 1997 et le déficit prévu pour 1998, à
hauteur de 12 milliards, permet d'éviter de procéder au
rehaussement du taux de la contribution au remboursement de la dette sociale
qui, sans elle, aurait été nécessaire.
Une
"économie" de prélèvements s'ensuit, qui
s'élève à 10 milliards de francs.
Le tableau ci-après récapitule le détail de cet
accroissement important des prélèvements obligatoires:
A la demande de votre commission des finances, l'institut de prévisions
économiques REXECODE a présenté le 6 novembre dernier une
étude sur l'incidence des charges fiscales et sociales sur la
localisation d'activité.
Cette étude met en évidence le lien entre ce qu'il est convenu
d'appeler le "coin fiscalo-social", c'est-à-dire l'effet
déformant des prélèvements obligatoires sur le coût
du travail, et la progression du chômage. Le graphique ci-après
montre que la corrélation entre la courbe de progression des
prélèvements fiscaux et sociaux et la courbe de progression du
chômage est presque parfaite depuis 1970 jusqu'à aujourd'hui.
COLLER GRAPHIQUE
C. DES ORIENTATIONS DANGEREUSES POUR LES DEPENSES
1. La branche vieillesse : un attentisme érigé en système
La réforme des retraites du régime
général de 1993 continue de produire ses effets, mais reste
insuffisante pour rétablir l'équilibre de la CNAMTS. Par
ailleurs, les régimes spéciaux poursuivent, sans aucune
réforme, leur dérive financière et démographique
qui pèse de plus en plus lourdement sur les dépenses de l'Etat,
à travers les charges de pension et les subventions d'équilibre,
ainsi que sur les dépenses des collectivités locales, qui portent
à bout de bras la CNRACL.
Face à cette situation préoccupante, qui se dégradera
brutalement avec le ressaut démographique prévu pour 2005, le
Gouvernement se donne le temps de la réflexion.
Dans le rapport annexé au présent projet de loi de financement de
la sécurité sociale, il indique :
"la situation
financière de la branche vieillesse reste
déséquilibrée. Cette situation devrait perdurer dans les
années à venir à législation constante, sans
connaître cependant une aggravation significative jusqu'en 2005. Cette
situation appelle une réflexion approfondie sur l'évolution des
prestations et des ressources des systèmes de retraite que le
Gouvernement entend conduire en prenant en compte l'évolution des
conditions du vieillissement, de la durée et du mode de vie.
L'observation continue de la situation et des perspectives du système de
retraite n'est aujourd'hui pas possible. Pour disposer d'une projection
à long terme des régimes de retraite, une réflexion sera
engagée sur la mise en place d'un observatoire des retraites."
Votre rapporteur pour avis estime que cette attitude est purement dilatoire.
Toutes les données du problème des retraites sont parfaitement
connues : il suffit maintenant de décider.
2. La branche famille : des mesures d'économies brutales
Dans le rapport annexé, le Gouvernement avance le souci
de mettre
"davantage de justice dans les transferts financiers vers les
familles"
pour motiver la mise sous condition de ressources des
allocations
familiales et la restriction de l'AGED.
Cet argument dissimule mal le caractère brutal de mesures
d'économies qui n'ont pas d'autre raison d'être que de
rétablir l'équilibre financier de la branche famille. Par
ailleurs, il ressort d'un égalitarisme simpliste, qui ignore le fait
fondamental que la politique familiale a pour objet d'assurer une
redistribution horizontale, à même niveau de revenu, entre ceux
qui ont des enfants et ceux qui n'en ont pas, et non pas une redistribution
verticale des familles aisées vers les familles modestes.
Le Gouvernement reconnaît d'ailleurs qu'il agit un peu à
l'aveuglette lorsqu'il déclare qu'il
"souhaite que la politique
à l'égard des familles fasse l'objet d'un réexamen
d'ensemble, en ce qui concerne tant la fiscalité, notamment par
l'étude de la révision du quotient familial et de
l'intégration des allocations familiales dans le revenu imposable, que
les prestations familiales et l'ensemble des actions publiques qui y
concourent."
Votre rapporteur estime qu'il aurait sans doute été
préférable que le Gouvernement procède à ce
réexamen d'ensemble avant de proposer les deux mesures contenues dans le
présent projet de loi de financement, qui ne semblent pas emporter
l'adhésion complète de sa majorité.
3. La branche maladie : un relâchement irresponsable
Votre rapporteur pour avis est parfaitement d'accord avec le
Gouvernement lorsque celui-ci indique, toujours dans le rapport annexe, que
"les comparaisons menées avec les pays voisins montrent que la
dépense de santé est relativement élevée dans notre
pays malgré un taux de remboursement moyen parmi les plus bas. Il
existe, à l'évidence, des marges de manoeuvre pour que, tout
à la fois, notre système de santé réponde, dans les
meilleures conditions, à des besoins croissants de la population, tout
en améliorant son efficience globale. C'est la volonté forte du
Gouvernement de mener à bien ce double objectif en s'appuyant sur
l'engagement des professionnels et des populations sans lequel rien de profond
ni de durable n'est possible."
Toutefois, à partir de ce constat auquel votre rapporteur pour avis
souscrit sans réserve, le Gouvernement propose d'augmenter l'objectif
national de dépenses d'assurance maladie de 2,2 % en 1998 pour le porter
à 613,6 milliards de francs, alors que le taux de progression
n'était que de 1,7 % en 1997. Ce relâchement de l'ONDAM
apparaît à la fois inconséquent et irresponsable, alors que
le remarquable dispositif de maîtrise des dépenses d'assurance
maladie mis en place par le Gouvernement précédent est encore
loin d'être pleinement opérationnel.
4. La branche accidents du travail : des excédents injustifiés
Enfin, le Gouvernement propose d'obliger la branche des
accidents du travail de dégager des excédents financiers,
à la fois en demandant au Parlement de valider les taux de cotisations
fixés réglementairement pour cette année et en proposant
pour cette branche un excédent de 1,4 milliard de francs en 1998. Ces
excédents n'ont pas d'autre intérêt que celui de
réduire optiquement le déficit de la sécurité
sociale.
Votre rapporteur pour avis reconnaît que le Gouvernement actuel, sur ce
point, ne fait que s'inscrire dans la continuité de ses
prédécesseurs. Mais il déplore cette politique de court
terme, qui aboutit à faire peser sur les entreprises des charges indues
au risque de décourager leurs efforts de prévention des accidents
du travail.
D. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a apporté des
modifications limitées au projet de loi de financement de la
sécurité sociale, qui laissent globalement inchangé
l'équilibre du plan de réduction du déficit de la
sécurité sociale présenté par le Gouvernement.
La plupart des ces modifications portent sur la CSG.
Ainsi, l'Assemblée nationale a maintenu les cotisations d'assurance
maladie pour les personnes travaillant en France mais domiciliées
à l'étranger (travailleurs frontaliers) : en effet, en l'absence
de cette précision, celles-ci auraient vu quasiment disparaître
leurs cotisations maladie, sans pour autant être assujettis à la
CSG majorée. Le gain de cotisations procuré par cette mesure est
estimé à 400 millions de francs.
En revanche, l'Assemblée nationale a exonéré de CSG : la
fraction de l'avoir fiscal qui se trouve par ailleurs plafonnée en loi
de finances, pour un coût estimé à 100 millions de francs ;
l'assurance-vie destinée aux personnes handicapées, pour un
coût estimé à 25 millions de francs ; les indemnités
journalières maladie, pour un coût estimé à 200
millions de francs ; les rentes d'accidents du travail en capital, pour un
coût jugé non significatif par les services de la direction de la
sécurité sociale.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a modulé la limitation de
l'AGED, soit une dépense supplémentaire estimée à
120 millions de francs, et créé une taxe spécifique sur le
tabac à rouler, soit une recette supplémentaire estimée
à 100 millions de francs.
Enfin, les modifications apportées par l'Assemblée nationale
à la taxe sur la publicité pharmaceutique sont
considérées comme globalement neutres, puisque le
relèvement de l'abattement au titre des médicaments
génériques et la franchise de 3 millions de francs de chiffre
d'affaires seraient compensées par le relèvement du barème
de la taxe.
Le tableau ci-après, qui récapitule l'ensemble de ces mesures,
fait même apparaître un solde légèrement positif,
sous réserve du caractère inévitablement approximatif des
évaluations précédentes.
III. LE BASCULEMENT DES COTISATIONS SUR LA CSG ET L'AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX SUR LE PATRIMOINE : LA PERVERSION D'UNE BONNE IDÉE
Le basculement des cotisations d'assurance maladie sur la
cotisation sociale généralisée (CSG) ainsi que
l'élargissement de l'assiette des deux prélèvements
sociaux de 1 % sur les revenus du patrimoine vont bien au-delà du simple
"bouclage" du déficit de la sécurité sociale.
Ces mesures constitueraient, si elles étaient adoptées, un
événement majeur dans l'évolution de notre
fiscalité directe : l'institution d'un impôt sur le revenu
bis
dont le produit pour 1998, soit 316 milliards de francs,
serait supérieur à celui de l'actuel impôt sur le revenu,
soit 296 milliards.
Ce nouvel impôt, de type cédulaire et
proportionnel, aurait un taux (CRDS incluse) de 6,8 % sur les revenus de
remplacement, de 8 % pour les revenus d'activité et de 10 % pour les
produits d'épargne.
Ces mesures pourraient constituer une réforme d'ensemble pertinente si
toutefois leurs modalités de mise en oeuvre n'étaient pas aussi
désastreuses.
A. UNE RÉFORME INTRINSÈQUEMENT PERTINENTE
1. Les mesures proposées par le gouvernement
a) Le doublement du taux de la CSG
L'article 3 du présent projet de loi de
financement prévoit de majorer de 4,1 points le taux du
prélèvement sur les revenus d'activité, de placement, du
patrimoine et des jeux, qui passerait ainsi de 3,1 % à 7,5 %. Les
revenus de remplacement feraient l'objet d'une moindre augmentation puisque le
taux spécifique qui leur est applicable n'augmenterait que de 2,8 points.
En compensation, les cotisations maladies des travailleurs salariés
ainsi que, dans une moindre mesure, celles des travailleurs non salariés
seraient diminuées. C'est le principe du "basculement".
b) L'extension de l'assiette des prélèvements sociaux sur l'épargne
L'article 6 du présent projet prévoit de regrouper le prélèvement social de 1 % institué en 1984 au profit de la CNAF et celui de 1 % institué en 1987 au profit de la CNAV dans un nouveau prélèvement dont le taux serait de 2 % et l'assiette identique à celle de la CSG.
2. La position de votre commission
a) Une acceptation de principe
Conformément à ses prises de position
antérieures, votre commission des finances persiste à penser que
la montée en puissance de la CSG, couplée à la
disparition des autres cotisations sociales et à la réduction des
taux de l'impôt sur le revenu constitue la réforme de
l'avenir
.
De ce point de vue, le commentaire fait lors de la discussion du projet de loi
de finances pour 1995 par M. Jean Arthuis, alors rapporteur
général du Sénat, mérite d'être
rappelé
1(
*
)
:
"Contrairement à ce qui se passe aujourd'hui, le "nouvel"
impôt sur le revenu ne pourra faire abstraction d'une CSG
calculée à un taux substantiellement plus élevé que
ce qu'il est actuellement. Refuser cette évidence reviendrait à
adopter un système comportant une dose difficilement acceptable de
double imposition
"Dès lors, la seule solution envisageable reste la "fusion" de
ces deux
instruments pour constituer un dispositif de prélèvements sur les
revenus cohérent, neutre au regard des situations individuelles et des
choix économiques, mais également lisible pour le
contribuable."
Aujourd'hui cette augmentation de la CSG est toujours
justifiée :
- d'une part, parce qu'elle corrige l'un des défauts majeurs de
l'impôt sur le revenu français : l'étroitesse de sa base.
Ainsi disparaîtrait l'une des spécificités les plus
contestables de notre système de prélèvements sur les
revenus.
- d'autre part, parce qu'il s'agit d'un impôt simple, moderne
(assiette large, taux bas)
prélevé en grande partie
à la source, relativement bien accepté par les ménages et
qui permet de surcroît une transmission plus rapide des impulsions de
politique fiscale à l'économie.
Défendre le système actuel des cotisations sociales et de
l'impôt sur le revenu serait faire le choix des anciens contre les
modernes. Votre commission des finances se range dans le camp des seconds.
b) Des conditions sine qua non
L'augmentation de la CSG, et avec elle des
prélèvements sociaux sur le patrimoine, suppose que, dans le
même temps, certaines réformes soient
impérativement
engagées, notamment :
- la réduction des taux de l'impôt sur le revenu
, sauf
à surtaxer les revenus par une augmentation concomitante des taux et un
élargissement de l'assiette. Or, le gouvernement actuel a
décidé d'interrompre la réduction progressive des taux de
l'impôt sur le revenu, programmée sur cinq ans par le
précédent gouvernement ;
- la déductibilité intégrale de l'ensemble des
prélèvements sociaux
; faute de quoi les contribuables
paieraient un impôt sur l'impôt ; de ce point de vue, il convient
de rappeler les propos tenus par le précèdent ministre du budget
lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1997 devant
l'Assemblée nationale :
"L'objectif est de poursuivre le transfert progressif du financement de
la
sécurité sociale des cotisations assises seulement sur les
revenus d'activité vers la contribution sociale
généralisée (...). Cela suppose d'arriver, à terme,
à une déductibilité totale de la CSG."
- le basculement des cotisations maladie vers la CSG, sans augmentation de
la pression fiscale
;
- la maîtrise des dépenses sociales et l'étatisation
des décisions de dépenses
qui seule peut mettre fin à
un système profondément déséquilibré dans
lequel les décideurs ne sont pas les payeurs.
En outre, il eût été sans doute de bonne politique de
procéder par étapes au lieu de doubler, en une seule fois, le
poids de cet impôt.
Dès lors que les conditions de mise en oeuvre ne respectent aucun de
ces préalables, la réforme proposée constitue une
perversion et reflète l'incapacité du gouvernement à
maîtriser les dépenses sociales.
B. DES CONDITIONS DE MISE EN OEUVRE DÉSASTREUSES
Les mesures proposées paraissent en effet composer les éléments d'une partition inachevée et mal construite. Combinées aux dispositions du projet de loi de finances, leur adoption aurait de surcroît des conséquences néfastes pour l'épargne.
1. Une réforme inachevée
a) La non réforme de l'impôt sur le revenu
D'un point de vue fiscal, l'augmentation des
prélèvements sociaux est concevable mais suppose, pour rester
économiquement cohérente, une diminution des taux de
l'impôt sur le revenu.
En effet, très schématiquement
deux politiques fiscales sont possibles :
La première consiste à augmenter les taux et à
rétrécir l'assiette
:
c'est la position interventionniste.
Plus les taux sont élevés, plus les "
niches fiscales
"
sont efficaces, et plus il est possible d'orienter l'épargne là
où on le souhaite (logement social, PME, cinéma, outre-mer...).
La seconde consiste à réduire les taux et à
élargir l'assiette : c'est la position défendue par votre
commission des finances
. Elle repose sur deux principes : l'impôt ne
doit pas décourager la production de richesses ; l'impôt doit
être neutre (ce qui n'est pas le cas avec des taux élevés,
puisque les niches fiscales ont précisément pour objet d'orienter
les choix des agents économiques).
Or, si l'on considère à la fois le projet de loi de financement
et le projet de loi de finances, on se rend compte que
les mesures
proposées par le gouvernement actuel
n'empruntent aucune des ces
deux voies.
Elles
consistent au contraire à augmenter les taux
et à élargir l'assiette. C'est tout simplement de la surtaxation.
Les agents économiques privés d'échappatoires,
risquent d'être découragés ou de partir à
l'étranger.
Cette politique fiscale n'est donc pas économiquement
cohérente et comporte de graves risques récessifs.
b) La non réforme du système de protection sociale
D'un point de vue social, la réforme proposée
aboutit à faire financer une part croissante des dépenses
sociales par l'impôt. Un tel choix est tout à fait envisageable,
et même dans une certaine mesure souhaitable
. Mais il suppose, pour
être cohérent, que soient également réformées
les structures qui déterminent les dépenses, ce qui n'est pas le
cas.
Or, l'adaptation aux perspectives démographiques des régimes
de retraite, et notamment des régimes spéciaux, ne semble
toujours pas à l'ordre du jour, tandis que le Gouvernement utilise les
outils de maîtrise des dépenses d'assurance maladie dont il a
hérité pour porter l'ONDAM au-delà de sa progression
spontanée pour 1998.
Tant que le gouvernement sera incapable de maîtriser les
dépenses sociales, et notamment les dépenses de santé, le
Parlement sera condamné à consentir des hausses de
prélèvements.
Or, cette augmentation des
prélèvements renchérit le coût du travail et
contribue, ce faisant à aggraver, le chômage. Elle incite les
entreprises à délocaliser leur production, ou, dans le meilleur
des cas, à arbitrer le capital contre le travail.
Cette politique sociale constitue une fuite en avant qui ne permettra pas
de résoudre le problème du chômage.
2. Une réforme mal construite
a) La non déductibilité des prélèvements sociaux
Si l'on ne peut qu'approuver la déductibilité
annoncée des nouveaux points de CSG, qui reste cependant encore à
confirmer puisqu'elle n'apparaît pas dans le projet de loi de finances,
il n'en reste pas moins que les deux premiers points de la CSG ainsi que le
nouveau prélèvement social de 2 % continueront de ne pas
être déductibles.
Or, en dehors de considérations historiques, qui s'expliquent sans
doute mais qui ne justifient pas, il n'y a plus désormais aucune raison,
autre que budgétaire, pour qu'une moitié des
prélèvements sociaux soit déductible et que l'autre ne le
soit pas.
b) Une hausse brutale et inégalement compensée
Le Gouvernement précédent avait fait part de son
souhait de poursuivre le basculement des cotisations maladie sur la CSG.
Toutefois, il avait l'intention de procéder progressivement, par
étapes, afin d'éviter des effets économiques perturbants.
La hausse brutale de 4,1 points proposée par le Gouvernement actuel
ne respecte pas le même principe de prudence. Elle aura des effets
néfastes pour tous les agents économiques dont les anticipations
se trouveront ainsi démenties
. Cela sera notamment le cas pour
toutes les opérations financières en situation de report
d'imposition qui se trouvent soumises à la CSG lors de leur
dénouement.
La forte hausse de la CSG aura également un effet perturbant sur le
secteur d'activité des jeux. C'est d'ailleurs pourquoi le Gouvernement
propose de réduire l'assiette de la CSG sur les sommes misées sur
les jeux exploités par la Française des jeux, sur les sommes
engagées auprès du PMU et sur le produit brut de certains jeux
réalisés dans les casinos. Mais cette diminution de l'assiette ne
compensera que très partiellement la hausse du taux de la CSG.
Votre commission des finances renouvelle à cette occasion les
réserves que lui avait déjà inspirées l'an dernier
l'assiette de la CSG sur les casinos
. En effet, celle-ci pèse non
pas sur les gains nets des joueurs, mais sur le produit brut des casinos, qui
est la part des mises des joueurs leur revenant. Ce mécanisme
anti-économique aboutit à faire peser la CSG sur le
bénéfice des établissements, dont certains se trouvent de
ce fait dans une situation critique. Il est par ailleurs contraire à la
nature de la CSG, qui est une imposition sur les personnes et pas sur les
sociétés. A titre de comparaison, la CSG précomptée
par les établissements financiers sur les revenus des produits de
placement qu'ils versent s'impute bien sur les revenus de leurs clients, et non
pas sur leurs propres bénéfices.
Enfin, la compensation de la hausse de la CSG par une diminution des
cotisations maladie apparaît inégale selon les catégories
de revenus : elle dégagerait un gain de pouvoir d'achat pour les
salariés, serait neutre pour les titulaires de revenus de placement et
les fonctionnaires, et semble incomplète pour une grande partie des
non-salariés.
Sans vouloir entrer dans des querelles de chiffrage, votre rapporteur pour
avis observe simplement que, dans le cas le plus favorable des salariés
du régime général, le "taux de change" proposé par
le Gouvernement actuel entre les cotisations maladie et la CSG n'est que de
1,16 (4,75 points de cotisations contre 4,1 point de CSG), alors que celui
proposé l'an dernier par le Gouvernement précédent
était de 1,3 (1,3 point de cotisations contre 1 point de CSG).
A cet égard, il convient de rappeler que la réforme de la CSG
votée l'an dernier ne dégageait un excédent qu'en raison
de l'extension de l'assiette, mais que le basculement cotisations/CSG
proprement dit devait dégager pour 1997 un solde négatif de - 1,7
milliard de francs.
c) La non neutralité du basculement en termes de prélèvements obligatoires
Si le gouvernement avait été capable d'assurer
la maîtrise des dépenses sociales, le basculement du financement
des cotisations maladie sur la CSG aurait dû normalement ne pas
entraîner d'augmentation globale de la pression fiscale. Mais la
tentation était sans doute trop forte de s'exonérer d'un exercice
difficile et peu populaire de maîtrise des dépenses en
opérant un prélèvement plus important que
nécessaire.
Ainsi, les travailleurs salariés et non salariés verront leurs
cotisations maladies diminuer de 16 milliards de francs, alors que les
épargnants voient leurs prélèvements sociaux augmenter de
plus de 20 milliards. A l'issue de ce tour de "passe-passe", l'État
augmente de 4 milliards la pression fiscale sur les ménages, au seul
titre des prélèvements sociaux.
Si l'on prend en compte les
mesures contenues dans la loi de finances, c'est, au total, plus de
7 milliards de francs d'impôts supplémentaires que les
ménages seront amenés à supporter.
d) La non prise en compte du prélèvement social de 1 % sur les revenus du capital et la pénalisation des placements en actions
Erreur, omission ou volonté
délibérée, le projet de loi de financement de la
sécurité sociale comme le projet de loi de finances pour 1998
laissent subsister la contribution complémentaire à l'impôt
sur le revenu perçue au profit de l'État, instituée en
1985.
On rappelle que cette contribution, instituée en 1985, a pris la forme
d'un prélèvement de 1 % complémentaire à
l'impôt sur le revenu en ce qui concerne les revenus de capitaux
mobiliers soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu et
d'une augmentation de 15 % à 16 % du taux d'imposition proportionnel des
plus-values de cession de valeurs mobilières et assimilées.
Le fait d'aligner l'assiette du nouveau prélèvement de 2 % sur
celle de la CSG conduit à obtenir une structure de taxation bancale qui,
comme le montrent les tableaux ci-après, pénalise les placements
en actions par rapport aux autres types de placement.
3. Des conséquences néfastes pour l'épargne
En se plaçant du seul point de vue des
épargnants et en considérant à la fois le projet de loi de
finances et celui de financement de la sécurité sociale, les
mesures fiscales les affectant se traduiraient, si elles étaient
adoptées, par une augmentation des prélèvements de 23
milliards de francs. Près de 90 % de ces mesures résultent du
seul projet de loi de financement de la sécurité sociale : 16
milliards pour l'augmentation de la CSG et 4,5 milliards pour l'extension de
l'assiette des deux prélèvements sociaux de 1 %.
Cette surtaxation massive de l'épargne comporte des risques
récessifs non négligeables
. En outre, elle aboutit à
une hiérarchie fiscale des placements aux antipodes de la
rationalité économique.
a) une surtaxation massive qui engendre des risques récessifs
L'augmentation massive des prélèvements sur
l'épargne (près de quatre fois le prélèvement
opéré par le gouvernement précédent lors de la loi
de finances pour 1996) est susceptible de provoquer deux effets
récessifs :
- d'une part, la réduction de l'épargne disponible pourrait
inciter les ménages à épargner davantage afin de
reconstituer leur patrimoine au niveau désiré. Cet effort
supplémentaire d'épargne aurait un effet dépressif sur la
consommation et donc sur la demande intérieure ;
- d'autre part, on peut craindre des phénomènes de
délocalisation de l'épargne susceptibles de rendre plus
difficiles l'ajustement épargne-investissement, notamment en ce qui
concerne le marché obligataire. Or, toutes choses égales par
ailleurs, une diminution de la demande de titres, non compensée par des
entrées de capitaux, pourrait avoir pour effet d'exercer des pressions
à la hausse sur les taux d'intérêt français.
b) une hiérarchie fiscale aux antipodes de la rationalité économique
En effet, le simple bon sens voudrait que les placements
fiscalement avantagés soient ceux qui sont les plus utiles à
l'économie. A cet égard, la communauté des
économistes s'accorde à penser que l'épargne longue est
plus utile au financement de l'économie que l'épargne liquide.
Or, telle que projetée par la loi de financement de la
sécurité sociale et par la loi de finances, l'imposition des
différents produits d'épargne aboutira à ce que
l'épargne longue soit la plus taxée, alors que l'épargne
liquide demeurera exonérée de tout prélèvement,
aussi bien social que fiscal.
Assurément, cette situation ne contribue pas au bon fonctionnement de
notre économie.
Imposition des produits d'épargne
IV. LES POSITIONS DE VOTRE COMMISSION
L'examen du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale amène votre commission des finances à prendre position sur sept points qui encadrent sa réflexion à long terme et la guide dans ses propositions d'amendements.
A. PAS D'AGGRAVATION DU DÉFICIT PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT
La France souffre gravement de l'accumulation permanente de
déficits qui grèvent son développement économique
et social.
Le présent projet de loi de financement propose de ramener le
déficit des régimes de base de sécurité sociale de
33 milliards de francs à 12 milliards de francs pour 1998.
En y apportant des modifications, l'Assemblée nationale a veillé
à ne pas dégrader le solde de la loi de financement. Mais, cela
lui était d'autant plus facile qu'elle n'a apporté que des
modifications de détail.
Votre commission des finances, bien qu'elle vous propose des modifications
radicales du plan de redressement financier de la sécurité
sociale présenté par le Gouvernement et approuvé par
l'Assemblée nationale, s'impose également de ne pas
dégrader significativement le solde de la loi de financement, de
même qu'elle ne vous proposera pas de dégrader le solde
budgétaire résultant de la loi de finances pour 1998.
Cette position de principe la conduira à trouver des économies
alternatives et à accepter certaines des hausses de
prélèvements proposées. Votre commission prend par
ailleurs acte de l'intention de la commission des affaires sociales, saisie au
fond du présent projet de loi de financement de la
sécurité sociale, de proposer au Sénat de relever de
0,1 % le taux de la CSG affectée à la CNAF.
Ce relèvement de la CSG ne lui paraît devoir être
accepté que dans la mesure où il permet d'éviter un gel
pur et simple de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie.
B. PRÉSERVATION DE LA POLITIQUE FAMILIALE
Lors de la discussion devant l'Assemblée nationale, le
Gouvernement a clairement manifesté son propre manque d'assurance sur le
sujet en faisant part de son intention de "remettre à plat" l'ensemble
de la politique familiale dès l'an prochain, dans le cadre de la
conférence nationale de la famille, et en insistant sur le
caractère provisoire des mesures d'économies qu'il propose.
Mais au-delà des mesures d'économie, les mesures proposées
par le gouvernement touchent aux fondements même de la politique
familiale.
Pour sa part, votre commission des finances refuse toute restriction des
prestations familiales, considérant que le Gouvernement ferait mieux de
s'abstenir s'il n'est pas sûr de bien faire, surtout s'agissant d'une
réforme aussi lourde de conséquences que la mise sous conditions
de ressources des allocations familiales.
C. MODÉRATION DE LA PROGRESSION DES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE
Votre commission des finances vous propose de limiter
l'augmentation de l'ONDAM pour 1998 au taux prévisionnel de progression
des prix hors tabac, soit + 1,3 %.
Votre rapporteur pour avis estime d'ailleurs, compte tenu de l'ampleur des
dépenses inutiles au sein des dépenses d'assurance maladie,
attestée tant par les comparaisons internationales que par les
disparités régionales, qu'un gel pur et simple de l'ONDAM au
niveau atteint en 1997, aurait pu être proposé sans
inconvénient pour la santé des Français.
D. COHÉRENCE DE LA POLITIQUE D'IMPOSITION SUR LE REVENU
La majorité précédente avait
programmé la diminution sur cinq ans, à compter de 1997, du
barème de l'impôt sur le revenu et envisagé, sans
calendrier précis, l'augmentation progressive de la CSG affectée
à l'assurance maladie.
Ce double mouvement aurait eu pour effet de corriger un défaut de
l'impôt personnel en France, à savoir son excessive concentration,
puisqu'un foyer sur deux ne paie pas d'impôt sur le revenu.
Dès lors que le Gouvernement actuel ne poursuit pas la baisse de
l'impôt sur le revenu amorcée l'an dernier, votre commission des
finances ne peut pas accepter la hausse massive de la CSG proposée dans
le cadre du présent projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Elle vous proposera par ailleurs, dans le cadre du projet de loi de finances,
de reprendre le mouvement interrompu de diminution de barème de
l'impôt sur le revenu.
E. COHÉRENCE DE LA POLITIQUE DE TAXATION DE L'ÉPARGNE
Votre commission des finances ne nie pas la
nécessité de faire contribuer l'ensemble des revenus au
financement de la protection sociale, et non pas les seuls revenus du travail.
Elle récuse néanmoins l'opposition artificielle qui est faite
entre les titulaires de revenus d'activité et les titulaires de revenus
de l'épargne, toutes les études montrant que l'immense
majorité des Français perçoivent des revenus des deux
sources.
Dans la mesure où elle refuse par ailleurs la hausse de 4,1 points
de la CSG proposée par le présent projet de loi de financement de
la sécurité sociale, votre commission admet l'extension de
l'assiette des deux contributions sociales spécifiques existantes sur
les revenus de l'épargne, à condition que le taux en soit
réduit de 2 % à 1,5 %.
Ainsi redéfinie, la nouvelle contribution sociale fusionnée sur
les revenus de l'épargne correspondra assez bien à la
définition d'un impôt à assiette large et à taux
réduit, seule forme d'impôt qui permettent d'atteindre à
l'optimum de l'efficacité économique et du rendement fiscal.
F. COHÉRENCE DANS LES IMPOSITIONS SOCIALES AFFECTÉES
Le même souci de cohérence qui guide votre
commission des finances en matière de taxation de l'épargne la
conduit à refuser la plupart des mesures du présent projet de loi
de financement relatives aux impositions sociales affectées.
Ainsi, votre commission des finances entend supprimer la taxe de 6 % sur
les contributions de prévoyance complémentaire instaurée
par voie d'ordonnance en 1996. En effet, cette taxe apparaît
particulièrement absurde, puisqu'elle revient à asseoir une
imposition sociale sur des sommes par nature destinés à financer
des dépenses de protection sociale. Toutefois, compte tenu de la
nécessité de ne pas trop dégrader le solde de la loi de
financement pour 1998, la suppression de cette taxe n'interviendrait
qu'à compter de 1999.
De même, votre commission s'oppose au bouleversement de la
fiscalité applicable au secteur de la distribution du médicament
qui résulterait de la majoration de la taxe sur les dépenses de
publicité pharmaceutique et de la création d'une taxe sur les
ventes directes des laboratoires pharmaceutiques aux officines.
Votre commission des finances refuse également l'affectation de
l'excédent du produit de la C3S au régime général,
considérant que cette contribution est par nature exclusivement
réservée aux régimes de non salariés.
Enfin, votre commission refuse la création d'une taxe additionnelle sur
les tabacs affectée à la CNAMTS.
Non pas qu'elle juge inopportun d'affecter le produit de la fiscalité du
tabac à l'assurance maladie, qui supporte les coûts des
dépenses de soins liées au tabagisme et doit financer des actions
de prévention pour lutter contre celui-ci.
Mais il lui paraît plus logique de relever simplement la fraction du
produit des droits de consommation sur les tabacs qui a été
affectée l'an dernier à la CNAMTS par la loi de finances pour
1997. Les taux des droits de consommation sur les tabacs pourraient être
parallèlement relevés, de manière à doubler le
montant de la fraction du produit de ces droits affectée à
l'assurance maladie. Toutefois, seule la loi de finances peut procéder
à ces opérations, s'agissant de l'affectation d'une ressource de
l'Etat.
G. DEFIANCE A L'EGARD DU RECOURS A L'EMPRUNT
L'Etat, par son action et ses investissements matériels
ou immatériels, peut contribuer à la croissance du pays. Il est
donc économiquement légitime qu'il puisse recourir à
l'emprunt pour couvrir ses dépenses, sous réserve que cela ne
débouche pas sur un processus cumulatif d'accroissement des emprunts
nouveaux pour faire face au remboursement des dettes antérieures.
En revanche, la sécurité sociale est un système de
solidarité fondé sur une logique de répartition
instantanée. Il est donc économiquement nécessaire qu'elle
soit en permanence strictement équilibrée, sauf à reporter
la charge de son financement sur les générations futures.
Ce report des charges actuelles de protection sociale sur les
générations futures est admissible dans un contexte de forte
croissance démographique. Il est irresponsable dans un contexte de
vieillissement de la population, qui fera peser sur les
générations futures des charges de pensions et de protections
sociales considérablement plus lourdes que celles d'aujourd'hui.
Votre commission des finances vous propose donc sans aucun enthousiasme
d'accepter la réouverture et la prolongation de cinq ans de la Caisse
d'amortissement de la dette sociale créée par voie d'ordonnance
en 1996, afin que lui soit transféré le nouveau déficit
cumulé du régime général au titre des années
1997 et 1998, soit 87 milliards de francs
Elle tient toutefois à ce que le nouveau terme fixé pour
l'extinction de la CADES, à savoir le 31 janvier 2014, soit
expressément inscrit dans les textes
. Cette reprise de dette ne
constitue qu'un pis aller par rapport aux solutions alternatives qui seraient
soit le maintien d'un déficit directement à la charge du
régime général, soit le relèvement de la CRDS de
0,5 à 0,7 points.
Enfin, votre commission des finances s'oppose vigoureusement au projet du
Gouvernement d'autoriser la CNRACL à s'endetter de 2,5 milliards de
francs en 1998, pour couvrir son déficit tendanciel
. Elle rappelle
que la CNRACL est un régime de sécurité sociale
intrinsèquement équilibré, qui n'est chroniquement
déficitaire qu'en raison de l'importance de sa contribution au
système des transferts de surcompensation entre régimes
spéciaux de retraite.
Il n'y a aucune raison que la CNRACL, régime par répartition,
s'endette et fasse ainsi les frais de l'immobilisme du Gouvernement, qui refuse
tant de réformer des régimes spéciaux excessivement
favorables par rapport au régime général que de diminuer
le taux arbitraire de la surcompensation.
EXAMEN DES ARTICLES
ARTICLE PREMIER
Approbation du rapport
annexé
Commentaire : cet article a pour objet d'approuver le
rapport annexé présentant les orientations de la politique de
santé et de sécurité sociale et les objectifs qui
déterminent les conditions générales de l'équilibre
financier de la sécurité sociale.
Ce rapport, présenté en annexe du présent projet de loi de
financement, comporte trois parties distinctes :
- la première partie expose les orientations de la politique de
santé publique et d'assurance maladie ;
- la deuxième partie expose les objectifs de la politique de
sécurité sociale du Gouvernement en matière de famille, de
vieillesse et de handicap ;
- la troisième partie présente l'économie
générale du projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Votre rapporteur pour avis avait d'abord estimé, compte tenu du
désaccord de la commission des finances sur presque tous les points avec
les orientations du Gouvernement, que le présent article devait
être rejeté.
Toutefois, puisque le rapport est amendable, il
pourrait être entièrement réécrit de manière
à pouvoir être approuvé par le Sénat.
Votre rapporteur reste néanmoins réservé sur la
portée normative de cet exercice. Par comparaison, le rapport
économique et financier qui accompagne chaque projet de loi de finances
initiale, en application de l'article 32 de l'ordonnance organique n° 59-2
du 2 janvier 1959, n'est pas amendable et n'est pas soumis au vote du
Parlement. Il s'agit d'un document simplement destiné à
éclairer le Parlement sur l'analyse de la situation économique et
financière du pays par le Gouvernement et sur les choix qui en
découlent.
La séparation des pouvoirs, qui veut que le
Gouvernement conduise la politique de la Nation tandis que le Parlement vote
des lois pleinement normatives, est ainsi respectée
pour les lois
de finances
.
La distinction n'est pas aussi claire pour le rapport annexé au
présent projet de loi de financement de la sécurité
sociale. La confusion est même aggravée par l'intitulé du
rapport, qui précise qu'il s'agit d'un rapport
"du
Gouvernement".
Cette précision n'est nullement prévue par le texte de la loi
organique du 22 juillet 1996, qui précise simplement que
"le projet
de loi de financement de l'année est accompagné d'un rapport
présentant etc..."
(article LO 111-4 du code de la
sécurité sociale).
Dès lors que ce rapport est
amendé puis approuvé par le Parlement, il ne s'agit plus
juridiquement d'un rapport du seul Gouvernement, mais d'un rapport commun aux
pouvoirs législatif et exécutif.
En dépit des réserves qu'elle inspire, la
réécriture complète du rapport, dont la commission des
affaires sociales propose de se charger, devrait rendre celui-ci enfin digne
d'être approuvé par le Sénat.
Décision de la commission : votre commission a donné un avis
favorable à l'adoption de cet article, sous réserve de la
réécriture complète du rapport annexé.
ARTICLE 2
Modification du critère d'exonération de CSG pour les titulaires de revenus de remplacement non imposables
Commentaire : le présent article a pour objet de
modifier la base de référence utilisée pour
déterminer le seuil d'exonération de CSG pour les titulaires de
revenus d'allocations de chômage et de préretraite ainsi que de
pensions de retraite et d'invalidité.
A cette fin, le présent article prévoit
d'aligner la base de
référence retenue pour déterminer le seuil
d'exonération de CSG
pour les titulaires de revenus d'allocations de
chômage et de préretraite, ainsi que de pensions de retraite et
d'invalidité,
sur le système défini en loi de finances
pour 1997 pour la détermination des allégements dans le domaine
de la fiscalité locale
.
En effet, la politique de diminution progressive de l'impôt sur le revenu
engagée par le précédent Gouvernement avait notamment pour
corollaire d'accroître le nombre de foyers fiscaux se trouvant en
situation de non-imposition.
Or, un grand nombre d'allégements de fiscalité locale
étaient liés à la situation de non-imposition, ce qui
aurait conduit mécaniquement à faire bénéficier les
" nouveaux non-imposables " à l'impôt sur le revenu de
ces allégements de taxes locales. Afin de
dissocier la baisse de
l'impôt sur le revenu de la situation des contribuables au regard des
allégements d'impôts locaux
, l'article 8 de la loi de finances
pour 1997 comporte un dispositif de " conversion " destiné
à
transcrire en niveaux de revenu
les différents seuils
déterminés jusqu'alors par référence à
des montants de cotisations à l'impôt sur le revenu
.
Bien que l'actuel Gouvernement ait choisi de mettre un terme au programme de
diminution de l'impôt sur le revenu prévu par l'article 81 de
la loi de finances pour 1997, cet article retient la référence en
niveaux de revenu décrite ci-dessus pour déterminer le seuil
d'exonération de CSG pour les titulaires de revenus d'allocations de
chômage et de préretraite, ainsi que de pensions de retraite et
d'invalidité.
I. RAPPEL DU DISPOSITIF DE " CONVERSION " ADOPTÉ EN LOI
DE
FINANCES POUR 1997
La réforme de l'impôt sur le revenu aurait dû
entraîner, sur cinq ans, une
progression de l'ordre de
1,5 million du nombre de foyers fiscaux non imposables à
l'impôt sur le revenu
.
Or,
de nombreux avantages en matière de fiscalité locale,
étaient liés à la
situation de non-imposition
ou de
faible imposition au titre des revenus.
Il s'agissait en particulier
d'exonérations de taxe d'habitation et de taxe foncière sur les
propriétés bâties, d'abattements à la base ou de
dégrèvement d'office en matière de taxe d'habitation en
faveur de personnes non-imposables ou de contribuables dont la cotisation
d'impôt sur le revenu est inférieure à certains montants.
L'article 8 de la loi de finances pour 1997 a donc
pour objet de
neutraliser l'effet de la réforme de l'impôt sur le revenu au
regard de ces allégements.
Ainsi, les contribuables dont le niveau
de revenu se traduisait par une imposition à l'impôt sur le revenu
et à la taxe d'habitation et à la taxe foncière sur les
propriétés bâties,
restaient assujettis à ces
deux impôts locaux nonobstant le fait qu'ils puissent devenir non
imposables à l'impôt sur le revenu du fait de la réforme
" Juppé ".
La commission des finances avait souligné que cet article ne comporte
aucune restriction à des mesures existantes d'allégement de
fiscalité locale et qu'il ne comporte pas non plus d'abaissement des
seuils qui permettent de bénéficier d'allégements
.
Il s'agissait de maintenir les conditions antérieures
d'imposition aux impôts locaux pour les contribuables qui cesseraient, du
fait de la réforme de l'impôt sur le revenu, d'être
imposables à l'impôt sur le revenu ou qui viendraient à
acquitter une cotisation d'impôt sur le revenu dont le moindre montant
aurait induit -à droit constant- un allégement de taxe
d'habitation ou de taxe foncière sur les propriétés
bâties.
A cette fin, l'article 8 prévoit de
remplacer les
références à des montants de cotisations à
l'impôt sur le revenu
, qui déterminaient antérieurement
les seuils en dessous desquels un contribuable bénéficiait
d'allégements de fiscalité locale,
par des
références au montant du revenu du redevable
.
La nouvelle rédaction de l'article 1417 du code
général des impôts, résultant de l'article 8 de la
loi de finances pour 1997,
a déterminé pour chaque part de
quotient familial, les niveaux de revenu (relevés de 1,9 % pour
tenir compte de l'évolution prévue pour 1996 des prix à la
consommation hors tabac), qui, en application du barème de l'impôt
sur le revenu antérieur à la réforme
" Juppé ", permettaient de bénéficier
d'allégements de fiscalité locale
.
II. LA TRANSPOSITION DE CE DISPOSITIF À LA DÉTERMINATION DU
SEUIL D'EXONÉRATION DE CSG POUR CERTAINS REVENUS DE REMPLACEMENT
Avant d'analyser cette transposition, il convient de rappeler que la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1997 avait aligné
les critères d'exonération de la CSG sur le système de
détermination des allégements d'impôts locaux.
A. LA RÉVISION DES CRITÈRES D'EXONÉRATION DE LA CSG
EN 1997
A l'occasion de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1997, les seuils retenus aux articles L. 136-2 III 1° et 2° et
L. 136-8 II du code de la sécurité sociale
avaient
" intégré " le système de la cotisation de
référence utilisée avant le 1
er
janvier 1997
pour les allégements d'impôts locaux.
Permettant une
meilleure prise en compte de la capacité
contributive réelle des contribuables,
ce système
avait ainsi pour objet de " déconnecter ", à
l'instar du régime applicable aux allégements d'impôts
locaux, le montant de cotisation d'impôt sur le revenu ouvrant droit
à l'exonération de la CSG du seuil de non-imposition applicable
en matière d'impôt sur le revenu
.
Cette
cotisation de référence était en effet distincte
de la cotisation effective d'impôt sur le revenu
, dans la mesure
où elle était calculée, d'une part,
avant imputation de
certaines réductions
d'impôts (articles 199
quater
B
à 200 du CGI), de crédits d'impôt et des
prélèvements ou retenues à la source non
libératoires et, d'autre part,
avec les majorations
du montant
des prélèvements libératoires sur les revenus mobiliers
(article 125 A du CGI) et des revenus exonérés d'impôt sur
le revenu en application de conventions fiscales internationales.
L'article 10 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1997 a donc aligné la détermination du seuil
d'exonération de la CSG sur la cotisation de référence
retenue en matière de taxes locales antérieurement au
1er janvier 1997. Auparavant, l'exonération de la CSG
découlait de la simple situation de non-imposition à
l'impôt sur le revenu.
De ce fait, l'exonération de la CSG n'est plus seulement acquise en
raison de la non imposition à l'impôt sur le revenu, mais du fait
que
le montant de la cotisation de référence se situe en
deçà du seuil minimal de perception fixé à 400
francs par le 1
bis
de l'article 1657 du CGI
.
Par ailleurs, l'article 17 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997 prévoit que les contribuables
dont la cotisation d'impôt sur le revenu se situe en dessous de ce
minimum de perception de 400 francs, mais dont le montant de la cotisation de
référence dépasse ce montant, se trouvent assujettis
à un taux réduit de CSG de 1 %, et non au taux de 3,4 %.
Ainsi, l'impact individuel que pouvait entraîner le passage de la
référence à une situation de non imposition à
l'impôt sur le revenu à une référence à une
cotisation d'impôt sur le revenu de référence se trouvait
lissée.
B. LA TRANSPOSITION DES RÉFÉRENCES
DÉFINIES PAR L'ARTICLE 8 DE LA LOI DE FINANCES POUR 1998
Il convient cependant de souligner que l'incidence des nouvelles
références, en montant de revenu, pour les allégements de
taxe d'habitation est complexe en raison des
trois
" étages "
que comporte ce dispositif.
Ces allégements correspondaient en effet à trois
montants de
cotisation d'impôt sur le revenu
: respectivement celles
inférieures à 400 francs (seuil minimal de recouvrement de
l'impôt sur le revenu), à 1.782 francs, et à
13.300 francs.
L'an passé, la commission des finances
avait donc voulu s'assurer de
la neutralité de la "conversion" en montant de revenu de ces trois
seuils retenus
pour bénéficier des différents
allégements de taxe d'habitation. Sur ce point, elle avait reçu
du service de la législation fiscale une analyse statistique mettant en
lumière que
98,56 % de l'ensemble de la population des
redevables de la taxe d'habitation (bénéficiaires ou non
d'allégements de cette taxe) ne connaîtraient aucun changement de
leur situation du fait de cette nouvelle référence
.
Cette statistique faisait ressortir un bilan positif pour le solde de cette
population, puisque la
quantité potentielle de situations qui
s'amélioreraient
(en passant par exemple d'un
dégrèvement de 50 % à un dégrèvement de
100 %)
s'élève à 0,90 %,
tandis que la
quantité potentielle de situations qui seraient moins favorables
(en passant par exemple d'un dégrèvement de 50 % à un
simple plafonnement de la taxe)
ne représentait " que "
0,55 %.
Le tableau ci-après présente cette analyse statistique :
LES BENEFICIAIRES DES ALLEGEMENTS |
||||||||||||||
Nombre de bénéficiaires |
||||||||||||||
Nature de l'allégement |
Avant
|
Après |
Différence |
|||||||||||
Exonération
totale TH
|
||||||||||||||
. métropole |
4 090 030 |
4 138 040 |
48 010 |
|||||||||||
. total |
4 160 428 |
4 210 353 |
49 925 |
|||||||||||
Dégrèvement partiel TH
|
||||||||||||||
. métropole |
1 738 730 |
1 723 663 |
-15 067 |
|||||||||||
. total |
1 755 597 |
1 739 790 |
-15 807 |
|||||||||||
Dégrèvement partiel 50 % TH
|
||||||||||||||
. métropole |
546 885 |
529 545 |
-17 340 |
|||||||||||
. total |
549 093 |
531 520 |
-17 573 |
|||||||||||
Plafonnement TH
|
||||||||||||||
. métropole |
3 272 434 |
3 287 314 |
14 880 |
|||||||||||
. total |
3 280 360 |
3 295 252 |
14 892 |
|||||||||||
Exonération
totale TF
|
||||||||||||||
. métropole |
625 584 |
632 592 |
7 008 |
Votre commission avait pris acte de ces informations, mais
elle avait cependant indiqué au Gouvernement qu'elle resterait
très vigilante au regard de la neutralité effective de cette
transposition. Or, cette neutralité ne pourra être
vérifiée qu'à partir de l'analyse des rôles
d'imposition aux taxes locales qui viennent d'être envoyés par
l'administration fiscale.
S'agissant du présent article, la transposition d'une
référence exprimée en niveau de revenu à une
référence en montant de cotisation d'impôt sur le revenu,
ne semble pas devoir comporter d'incidence.
En effet, il convient de remarquer que
le seul élément de
référence concerné par cette transposition est le montant
du minimum de perception de l'impôt sur le revenu correspondant à
une cotisation inférieure à 400 francs
.
Or, d'après les chiffres fournis par le service de la
législation fiscale à la fin de l'année 1996 (cf. le
tableau ci-dessus), il apparaît
qu'au regard de la taxe d'habitation,
le nombre de personnes bénéficiant d'une exonération
complète était susceptible de progresser de façon
significative
.
En outre, il convient de rappeler que ce seuil défini en niveau de
revenu est indexé sur celui de la première tranche du
barème de l'impôt sur le revenu, c'est à dire sur le niveau
prévisionnel des prix hors tabac. Ainsi, ce montant de revenu
s'élevait à 43.080 francs pour les revenus de 1996 pour la
première part de quotient familial, avec une majoration de ce montant de
11.530 francs pour chaque demi-part supplémentaire. Pour les revenus de
1997, compte tenu d'une inflation hors tabac prévisionnelle de
+ 1,1, ces montants sont respectivement portés à 43.550
francs pour la première part de quotient familial et à 11.660
francs pour chaque demi-part supplémentaire.
A cet égard, votre commission avait noté, qu'en retenant le
principe d'une
majoration constante
pour l'actualisation du revenu
imposable de 1996
pour chaque demi-part supplémentaire à
partir d'un certain niveau de revenu
, plutôt que de s'en tenir
à la stricte actualisation du revenu imposable en 1996, le Gouvernement
de l'époque avait choisi la
solution la plus favorable aux
contribuables
.
Bien que la transposition proposée soit le corollaire d'une politique
de diminution du barème de l'impôt sur le revenu qui ne concernera
que les revenus de 1997 en raison de l'abandon de la réforme
" Juppé ", cet article procède d'une démarche
logique.
Décision de la commission : votre commission a donné un avis
favorable à l'adoption de cet article sans modification.
ARTICLE 3
Augmentation des taux de la CSG et
diminution des cotisations d'assurance maladie
Commentaire : cet article tend, d'une part, à
relever les taux de la CSG et, d'autre part, à réduire les taux
des cotisations d'assurance-maladie.
Le présent article constitue la disposition centrale du
présent projet de loi de financement. Il aurait pour effet de porter de
147,5 milliards de francs en 1997 à 334 milliards de francs en 1998
le produit de la CSG, la diminution corrélative des cotisations
d'assurance maladie laissant un gain net de 4,6 milliards de francs pour le
financement de la branche maladie.
Le
paragraphe I
modifie les taux de la CSG de la façon suivante :
- le taux actuel de 4,1 % est porté à 7,5 % (+ 4,1 points)
pour les revenus d'activité et de remplacement, les revenus du
patrimoine, les produits de placement et les jeux ;
- le taux actuel de 3,4 % est porté à 6,2 % (+ 2,8
points) pour les revenus soumis au taux dérogatoire créé
par la loi de financement de l'an dernier au profit de certains revenus
"sensibles" pensions de retraite et d'invalidité des personnes
imposables, allocations de chômage et de préretraite des personnes
imposables ; indemnités ou allocations de maladie, maternité et
accidents du travail ;
- un second taux dérogatoire de 3,8 % est créé pour
les personnes qui deviendraient imposables du seul fait du nouveau
critère d'exonération de la CSG.
Les taux d'affectation du produit de la CSG à l'assurance maladie sont
modifiés en conséquence.
Le
paragraphe II
réduit les assiettes de la CSG sur les jeux,
afin d'atténuer l'impact du relèvement de son taux pour les
entreprises concernées :
- l'assiette de la CSG sur les sommes misées auprès de la
Française des jeux est réduite de 29 % à 23 % ;
- l'assiette de la CSG sur les sommes engagées au PMU est
réduite de 28 % à 14 % ;
- l'assiette de la CSG sur le produit brut des jeux dans les casinos,
c'est-à-dire sur la part des mises restant à
l'établissement, est réduite de 100 % à 75 %.
Votre commission des finances relève que le Gouvernement, en
proposant ces réfactions des assiettes de la CSG sur les jeux
reconnaît lui-même que l'alourdissement de la contribution est
problématique pour l'équilibre économique d'un secteur
d'activité déjà soumis à de fortes contributions de
la part de l'Etat et des collectivités locales, mais qu'il ne tire pas
toutes les conclusions de ce constat en ne compensant que très
partiellement l'impact de la hausse du taux de la CSG par la diminution des
assiettes.
Le
paragraphe III
pose le principe de la suppression totale des
cotisations d'assurance maladie lorsqu'elles sont inférieures ou
égales à 2,8 % pour les revenus de remplacement et à
4,75 %, pour les revenus d'activité.
En effet, le détail des diminutions de cotisations relève du
pouvoir réglementaire, mais seule la loi peut supprimer effectivement
les cotisations lorsque la compensation envisagée aurait pour effet de
les réduire à 0.
Enfin, le
paragraphe IV
fixe la date d'entrée en vigueur du
présent article.
L'Assemblée nationale a apporté des modifications sur les quatre
points suivants :
A l'initiative du Gouvernement, elle a adopté des dispositions tendant
à compenser les effets du relèvement du taux de la CSG pour les
indemnités journalières maladie au-delà de six mois, en
prévoyant leur majoration par voie réglementaire ;
A l'initiative de M. Bernard Perrut, et contre l'avis du gouvernement, elle a
exonéré de CSG les revenus tirés d'une assurance-vie
spécifique destinée aux handicapés ;
A l'initiative de sa commission des affaires culturelles, familiales et
sociales, elle a adopté des dispositions tendant à maintenir les
cotisations d'assurance maladie pour les personnes travaillant en France sans y
être domiciliées, car elles ne sont pas assujetties à la
CSG ;
A l'initiative de sa commission des finances, elle a exonéré de
CSG la fraction de l'avoir fiscal qui ne pourrait pas être perçue
par son bénéficiaire du fait du plafonnement de la restitution de
l'avoir fiscal prévu par l'article 15 du projet de loi de finances pour
1998.
Votre commission des finances, pour les raisons évoquées dans
l'exposé général du présent rapport, est tout
à faire défavorable à l'adoption des dispositions de cet
article tendant à majorer les taux de la CSG et, par voie de
conséquence, à l'adoption de ses dispositions tendant à en
atténuer ou en compenser les effets néfastes.
Elle vous propose donc de ne retenir du présent article que deux
dispositions relatives à l'assiette de la CSG, qui paraissent tout
à fait indépendantes du relèvement de son taux :
Les dispositions relatives à l'exonération de la fraction hors
plafond de l'avoir fiscal, parce qu'il est logique de ne pas percevoir de CSG
sur des revenus qui ne seront pas effectivement perçus ;
Les dispositions relatives à l'exonération des "
revenus
tirés d'une assurance-vie spécifique destinées aux
personnes handicapées
" parce que cette exonération de CSG
semble cohérente avec l'exonération déjà
prévue pour les rentes d'accidents du travail et de l'allocation aux
adultes handicapés.
Votre rapporteur pour avis vous soumet par la même occasion, pour la
seconde de ces exonérations, une rédaction qu'il croît plus
précise juridiquement que celle adoptée par l'Assemblée
nationale. Le gage, que le Gouvernement n'a pas levé, s'y trouve
maintenu.
Décision de la commission : votre commission est favorable à
l'adoption de cet article, dans la rédaction restreinte qu'elle vous
propose.
ARTICLE 4
Déplafonnement des cotisations personnelles
d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants
Commentaire : cet article tend à supprimer le
plafonnement résiduel, à hauteur de 0,5 point de
cotisations, de l'assiette des cotisations personnelles d'allocations
familiales des non-salariés.
Les cotisations personnelles des employeurs et travailleurs indépendants
sont assises sur leur revenu professionnel pris en compte pour le calcul de
l'impôt sur le revenu. Alors que les cotisations d'allocations familiales
dues par les employeurs au titre de leurs salariés sont totalement
déplafonnées depuis 1990, les cotisations personnelles des
non-salariés sont demeurées partiellement plafonnées afin
d'éviter une progression trop brutale du prélèvement.
Ce plafonnement, qui a été réduit en 1991 lors de la
création de la CSG, ne porte plus actuellement que sur 0,5 point :
le taux des cotisations est égal à 5,4 % sur la part du
revenu professionnel inférieure au plafond annuel de la
sécurité sociale (164.640 francs en 1997), et à
4,9 % sur la part supérieure à ce plafond.
La suppression du plafonnement résiduel des cotisations d'allocations
familiales des non-salariés est présenté par le
Gouvernement, dans l'exposé des motifs du présent article, comme
l'achèvement d'une évolution déjà engagée et
comme une harmonisation avec la situation des salariés.
L'impact financier de cette mesure est par ailleurs modeste, puisqu'elle se
traduirait pas un surcroît de cotisations estimé à
300 millions de francs.
La mesure proposée par le Gouvernement achèverait en effet le
vaste mouvement de déplafonnement des cotisations amorcé depuis
trente ans.
En effet, jusqu'en 1967, le principe du plafond s'appliquait
à l'ensemble des cotisations
. Le déplafonnement des
cotisations sociales s'est fait en vingt-trois ans, de 1967 à 1991, pour
les branches maladie, famille et accidents du travail.
La branche vieillesse est la seule où subsiste le mécanisme du
plafond, parce qu'il s'agit de la branche où la logique contributive est
la plus forte et, surtout, parce que la part des revenus supérieure au
plafond constitue l'assiette des régimes de retraite
complémentaire. Il ne serait pas possible de déplafonner la base
de branche vieillesse sans porter atteinte au financement de son étage
complémentaire.
Les conséquences du déplafonnement des cotisations sociales ne
sont pas négligeables. A l'origine, la sécurité sociale
reposait sur une logique assurantielle, selon laquelle des prestations
définies sont financées par des cotisations elles-mêmes
limitées. Le déplafonnement des cotisations sociales a eu pour
effet de substituer à cette logique contributive une logique de
solidarité, chacun contribuant au financement de la
sécurité sociale sur la totalité de ses revenus.
Ce
renforcement de la solidarité n'est politiquement admissible que si le
caractère universel de la sécurité sociale est
préservé. Or, tel n'est pas le cas dans le présent projet
de loi de la sécurité sociale
.
Votre commission s'oppose donc à cette mesure par principe,
considérant qu'il est provocant, de la part du Gouvernement, de proposer
le déplafonnement total des cotisations alors même qu'il envisage
de mettre les allocations familiales sous conditions de ressources.
Décision de la commission : votre commission vous propose de
supprimer cet article.
ARTICLE 5
Création de taxes de
santé publique sur les tabacs
Commentaire : cet article tend à créer
deux taxes additionnelles de santé publique, l'une de 2,5 % sur le
tabac en général et l'autre de 7 % sur le tabac à
rouler,
prélevées selon les mêmes règles de
perception et d'assiette que la taxe sur la valeur ajoutée, dont le
produit serait affecté à la Caisse nationale d'assurance maladie
des travailleurs salariés.
L'évaluation du produit de ces nouvelles taxes est de 1,4 milliard
de francs, dont 1,3 milliard de francs pour la taxe générale
sur le tabac et 100 millions de francs pour la taxe spécifique sur
le tabac à rouler.
1. L'AGGRAVATION DE LA FISCALITE DU TABAC EST LEGITIME EN TERMES DE
SANTE PUBLIQUE
A. UN FACTEUR DÉTERMINANT DE LA MORTALITÉ
PRÉMATURÉE
Le tabagisme est responsable de 600 000 décès par an.
Malgré les campagnes de prévention et l'augmentation de
l'imposition des tabacs, la consommation de tabac reste préoccupante,
particulièrement du fait de sa progression chez les adolescents (25% des
15-18 ans sont des fumeurs réguliers) et chez les femmes (plus de 80 %
des femmes de 50 à 90 ans déclarent n'avoir jamais fumé,
contre moins de 50 % des 20-30 ans).
Le tabagisme entraîne un surcoût très important pour notre
système d'assurance-maladie puisque le tabagisme, avec l'alcool, est
responsable de plus des deux tiers des cancers mortels dans les pays
industrialisés. Le cancer des poumons est à lui seul responsable
de 23 930 décès par an.
B. UNE CONSOMMATION TRÈS SENSIBLE AUX PRIX
Entre septembre 1991 et décembre 1996, l'indice des prix du tabac a
pratiquement doublé (+ 96,5%) et l'on a observé sur la même
période que la quantité de tabac vendue a baissé de 8,5%.
Il est donc légitime de poursuivre l'augmentation de la fiscalité
des tabacs, afin d'orienter son produit vers l'assurance-maladie et
d'entraîner une chute significative de la consommation.
Consommation journalière de tabac comparée à l'évolution du prix du tabac
COLLER GRAPHIQUE
II - LA CRÉATION DE TAXES NOUVELLES EST NEANMOINS INUTILE POUR
ATTEINDRE CET OBJECTIF
A. UNE SOLUTION INUTILEMENT, COMPLIQUEE ET JURIDIQUEMENT DOUTEUSE
Votre rapporteur pour avis rappelle que la fiscalité des tabacs comprend
déjà une superposition de taxes :
-
le droit de consommation sur les tabacs manufacturés
(articles 575 et suivants du code général des
impôts) ;
-
la taxe de 0,74 % affectée au BAPSA
(article 1609 unvicies du code général des
impôts) ;
-
la taxe à la valeur ajoutée
, dont la base
d'imposition est constituée du prix de vente au détail (y compris
le droit de consommation, la taxe BAPSA et y compris la remise allouée
aux débitants).
La création de taxes additionnelles rendrait le système encore
plus complexe et aboutirait à une fiscalité des tabacs
dispersée entre la loi de finances et la loi de financement de la
sécurité sociale.
Par ailleurs, la création de taxes additionnelles
pourrait être contraire à la directive 92-12 CEE du 25
février 1992.
Portant sur les produits soumis à accises, cette directive autorise les
Etats membres à créer des taxes supplémentaires aux droits
de consommation sur les tabacs, à deux conditions :
- que ces taxes soient perçues comme les droits d'accises ou la TVA
(base d'imposition, calcul, exigibilité et contrôle de
l'impôt) ;
- qu'elles poursuivent une finalité spécifique.
Or, la spécificité des taxes additionnelles proposées
n'est pas avérée, puisque leur effet dissuasif sur la
consommation n'est pas différent de celui des autres impositions
existantes sur le tabac. Leur affectation à la CNAMTS ne constitue pas
non plus une spécificité, puisqu'une fraction des droits de
consommation sur les tabacs est déjà affectée à
celle-ci.
B. UNE MÉTHODE SIMPLE : LE RELÈVEMENT DE LA FRACTION DES
DROITS DE CONSOMMATION SUR LES TABACS AFFECTEE À LA CNAMTS
Au regard des difficultés posées par l'instauration de nouvelles
taxes sur les tabacs, il apparaît plus cohérent d'accroître
les taxes sur le tabac au profit de la CNAMTS
par l'augmentation de la part
du produit des droits de consommation qui lui est affectée
. Pour
cela, il suffit de :
- relever les droits de consommation sur les tabacs, en
prévoyant une part forfaitaire spécifique au tabac à
rouler ;
- relever la part de ces recettes affectée à la CNAMTS,
à due concurrence de l'augmentation globale.
Ainsi, dans l'hypothèse retenue par le présent projet de loi d'un
relèvement de 1,4 milliard de francs de la fiscalité du tabac
affectée à la CNAMTS, il faudrait :
- relever de 3,26 % le volume global des droits de consommation sur
les tabacs manufacturés ;
- relever de 6,39 % à 9,35 % la fraction du produit des
droits de consommation affecté à la Caisse nationale d'assurance
maladie.
Votre rapporteur pour avis serait favorable à un relèvement
allant au-delà de la taxation proposée et doublant la fraction
affectée à la CNAMTS, qui s'élève à 2,8
milliards de francs.
Votre commission des finances vous propose donc de rejeter les taxes
additionnelles proposées, et de préparer le relèvement de
la fraction des droits de consommation affectée à la CNAMTS, qui
ne pourra intervenir qu'en loi de finances.
Pour cela, il convient de modifier la rédaction de l'article L. 241-2 du
code de la sécurité sociale, définissant les ressources
clés de la CNAMTS, qui dispose que celles-ci
"sont en outre
constituées par une fraction du produit des droits de consommation
prévu à l'article 575 du code général des
impôts, dans les conditions fixées par la loi de finances pour
1997."
L'amendement proposé par votre commission tend à supprimer la
référence à l'année 1997, de façon à
ce que cette ressource puisse être aisément ajustée dans
les lois de finances ultérieures, sans qu'il soit nécessaire de
modifier à chaque fois le code de la sécurité sociale.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
cet article ainsi modifié.
ARTICLES 6 et 6 BIS (nouveau)
Institution d'un nouveau
prélèvement sur les revenus du patrimoine par regroupement et
extension de prélèvements existants
Commentaire : l'article 6 fusionne les deux
prélèvements sociaux perçus sur les produits du patrimoine
au profit de la CNAF et de la CNAVTS et aligne l'assiette du nouveau
prélèvement ainsi créé sur celle de la contribution
sociale généralisée ; l'article 6 bis, introduit à
l'initiative de l'Assemblée nationale, relève le seuil de non
recouvrement des prélèvements sociaux.
I. LA SITUATION ACTUELLE
Outre la contribution sociale généralisée (CSG) et la
contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), il existe
actuellement trois prélèvements "sociaux" ou assimilés
s'appliquant aux revenus du patrimoine :
A. LE PRÉLÈVEMENT CNAF
La contribution sociale de 1 % prévue à l'article 1600-0 A du
code général des impôts (CGI) au profit de la Caisse
nationale d'allocation familiale (CNAF). Cette contribution était, lors
de son institution par la loi de finances pour 1984, applicable à
l'ensemble des revenus. Depuis sa pérennisation par la loi de finances
pour 1985, elle ne s'applique plus qu'aux revenus de capitaux mobiliers soumis
à un prélèvement libératoire.
Le champ d'application de cette contribution est identique à celui du
prélèvement libératoire de l'impôt sur le
revenu : elle n'est donc pas due lorsque les revenus du patrimoine
financier en sont exonérés.
Elle est retenue à la source en addition du prélèvement
libératoire et n'est pas déductible de l'impôt sur le
revenu.
B. LE PRÉLÈVEMENT CNAVTS
Le prélèvement social de 1 % prévu à l'article
1600-0 F du CGI est perçu au profit de la Caisse nationale d'allocation
vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS). Il a été
institué de façon temporaire en 1987 et reconduit à
différentes reprises, et en dernier lieu jusqu'au 31 décembre
1997.
Il s'applique à l'ensemble des revenus du patrimoine, à
l'exception des comptes sur livrets défiscalisés, ainsi que des
comptes d'épargne logement et plans d'épargne logement, c'est
à dire :
- aux revenus de capitaux mobiliers soumis au barème progressif de
l'impôt sur le revenu et aux plus-values de cession de valeurs
mobilières et assimilés imposées à l'impôt
sur le revenu à un taux proportionnel, ainsi qu'aux revenus fonciers,
rentes viagères à titre onéreux, plus-values
immobilières et plus-values professionnelles à long terme ;
- aux revenus de capitaux mobiliers soumis au prélèvement
libératoire prévu à l'article 125 A du CGI.
Le champ d'application de ce prélèvement est identique à
celui de l'impôt sur le revenu de sorte qu'il n'est pas dû lorsque
les revenus du patrimoine en sont exonérés.
Il est mis en recouvrement par voie de rôle en même temps que
l'impôt sur le revenu ou est retenu à la source en addition du
prélèvement libératoire. Il n'est pas déductible de
l'impôt sur le revenu.
C. LE PRÉLÈVEMENT ÉTAT
La contribution complémentaire à l'impôt sur le revenu
perçue au profit de l'État, qui n'est donc pas à
proprement parler un prélèvement social, a été
instituée par la loi de finances pour 1985. Elle a pris la forme :
- d'une contribution de 1 % complémentaire à l'impôt sur
le revenu en ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers soumis au
barème progressif de l'impôt sur le revenu (article 204 A du CGI)
;
- d'une augmentation de 15 % à 16 % du taux d'imposition proportionnel
des plus-values de cession de valeurs mobilières et assimilées
(il en est de même pour les plus-values professionnelles à long
terme).
Pour les revenus considérés, le champ d'application de cette
contribution est le même que celui de l'impôt sur le revenu :
elle n'est donc pas exigible lorsque les revenus sont exonérés.
Cette contribution est mise en recouvrement par voie de rôle en
même temps que l'impôt sur le revenu. Elle n'est pas
déductible de l'impôt sur le revenu.
II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT ET LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A. LE PROJET DU GOUVERNEMENT
L'article 6 du présent projet de loi prévoit de fusionner les
actuels prélèvements de 1 % CNAF et 1 % CNAVTS en un
prélèvement unique de 2 %, dont le produit serait
affecté pour une moitié à la CNAF et pour l'autre à
la CNAVTS. On observera que le projet de loi laisse en revanche inchangé
le prélèvement de 1 % au profit de l'État.
Par ailleurs,
l'assiette du nouveau prélèvement de 2 % serait
sensiblement élargie, puisqu'elle serait alignée sur celle de la
CSG,
notamment en ce qui concerne les revenus de placements
exonérés d'impôt sur le revenu.
L'article 6 du projet comprend trois paragraphes :
- le paragraphe I prévoit les règles d'assiette et de mise en
recouvrement, ainsi que le taux et l'affectation du nouvel impôt. On
observera que, à l'instar de la CSG, ce regroupement s'opère par
l'insertion de trois articles nouveaux (L. 245-14 à L. 245-16) dans
le code de la sécurité sociale et non pas dans le code
général des impôts ;
- le paragraphe II précise les règles d'entrée en vigueur
;
- enfin, le paragraphe III prévoit la mise en extinction des
prélèvements CNAF et CNAVTS existants.
1. Règles d'assiette
Elles sont fixées par les nouveaux articles L. 245-14 et L. 245-15 du
code de la sécurité sociale, par simple renvoi aux articles
fixant les règles d'assiette de la CSG. On rappelle que l'assiette de
cette cotisation comprend une part perçue par voie de rôle et une
part prélevée au moment du prélèvement
libératoire. De la même façon, le nouveau
prélèvement s'appliquerait :
- d'une part, aux
revenus
du patrimoine financier
soumis à
prélèvement libératoire
prévu à
l'article 125 A du CGI, qui sont actuellement assujettis à la
contribution sociale de 1 % CNAF et au prélèvement 1 %
CNAVTS ;
- d'autre part, aux
revenus
du patrimoine soumis au
barème
progressif de l'impôt sur le revenu
, actuellement assujettis au
prélèvement 1 % CNAVTS et, s'agissant des revenus de
capitaux mobiliers, à la contribution complémentaire
d'État de 1 %, mais qui sont en dehors du champ d'application de la
contribution sociale 1 % CNAF. Pour ces revenus, l'institution du
prélèvement social de 2 % - s'il ne s'agit pas d'une erreur ou
d'une omission - entraînerait un point de prélèvement
supplémentaire par rapport à la situation actuelle ;
Entrent également dans cette catégorie, les
revenus de
placement actuellement exonérés d'impôt sur le revenu
et des actuels prélèvements CNAF et CNAVTS. Tel est le cas
notamment des produits des comptes et plans d'épargne logement (CEL et
PEL), des plans d'épargne populaire (PEP) de plus de huit ans, des
produits des contrats d'assurance-vie de plus de huit ans, des plans
d'épargne en actions de plus de cinq ans, ainsi que des dividendes et
produits de parts sociales exonérés d'impôt sur le revenu
du fait de l'application de l'abattement de 8.000 F ou 16.000 F prévu
à l'article 158-3 du CGI.
Les intérêts des livrets A et assimilés (CODEVI, LEP,
livrets-jeunes) ne seraient en revanche pas visés.
2. Fait générateur et modalités de recouvrement
Le
fait générateur
et les
modalités de
recouvrement
du nouveau prélèvement social de 2 % seraient
identiques à ceux de la CSG telle qu'elle s'applique depuis le
1
er
janvier 1997.
D'après les déclarations du gouvernement, ce
prélèvement ne serait pas déductible de l'impôt sur
le revenu.
3. Entrée en vigueur
Ce nouveau prélèvement social s'appliquerait pour la
première fois en 1998, lors de l'imposition des revenus de 1997, en ce
qui concerne les revenus du patrimoine pour lesquels l'impôt sur le
revenu est mis en recouvrement par voie de rôle.
Il s'appliquerait à compter du 1
er
janvier 1998 en ce qui
concerne les revenus de placement soumis au prélèvement
libératoire. Il en irait de même du prélèvement
dû au titre des revenus de placement exonérés d'impôt
sur le revenu ou de prélèvement libératoire.
Corrélativement, les prélèvements CNAF et CNAVTS
cesseraient de s'appliquer à compter de cette même date.
Pour les produits d'épargne exonérés d'impôt sur le
revenu qui seraient soumis au prélèvement social de 2 % lors du
retrait, du rachat ou du dénouement d'un plan ou d'un contrat (PEA, PEL,
assurance vie en unités de compte...), l'assiette du nouveau
prélèvement social serait constituée, comme pour la CSG,
des produits acquis ou constatés sur ces plans ou contrats depuis le
1
er
janvier 1997.
4. Affectation
Le produit de ce nouveau prélèvement serait affecté pour
moitié à la CNAVTS et pour moitié à la CNAF. Cette
dernière bénéficierait ainsi d'une substantielle
augmentation de ses ressources.
B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE
NATIONALE
L'Assemblée nationale n'a que peu modifié cet article. Outre une
rédaction plus précise des dispositions concernant l'affectation
de ce prélèvement (article L. 214-16), les députés
ont décidé de préciser et d'étendre les
règles relatives à la franchise d'impôt.
En effet, l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale
prévoit que la CSG n'est pas mise en recouvrement lorsque le montant
total par rôle est inférieur à 80 francs.
Le simple renvoi aux règles de mise en recouvrement de la CSG, aurait
conduit à faire entrer le nouveau prélèvement dans cette
limite, et donc à limiter le montant de la franchise par article de
rôle. Afin d'éviter cela, le projet du gouvernement
prévoyait une franchise spécifique de 80 francs pour le nouveau
prélèvement de 2 %.
De façon "élégante", les députés ont
préféré supprimer toute disposition spécifique et
faire passer la franchise d'impôt de la CSG à 160 francs.
C'est
l'objet de l'article 6 bis (
nouveau
)
qui, en outre, aligne sur ce
même montant la franchise qui s'appliquera à la contribution pour
le remboursement de la dette sociale.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Cet article poursuit un triple objectif :
En premier lieu,
il pérennise des recettes qui jusqu'à
maintenant devaient être soumises à l'autorisation du Parlement
à échéances régulières.
En second lieu,
il harmonise les assiettes de ces
prélèvements avec celles de la CSG.
Enfin,
il fait plus que doubler le produit de ces
prélèvements
. Comme le montre en effet le tableau ci-dessous,
le
surcroît d'imposition qui résulterait de l'adoption du
présent article représente près de 4,5 milliards
de francs, qui seront prélevés sur les revenus de
l'épargne.
Votre commission des finances accepte le principe du
regroupement et de la pérennisation de ces deux
prélèvements qui vont dans le sens de la simplification et de
l'unification des prélèvements sociaux sur l'épargne.
Elle confirme ce faisant sa doctrine constante en faveur de
prélèvements à assiette large et à taux
réduits.
Néanmoins, elle ne peut accepter une mesure qui se traduirait par un
prélèvement supplémentaire sur les revenus de
l'épargne de l'ordre de 4,5 milliards de francs.
Elle vous propose donc de réduire le taux de ce
prélèvement à 1,5 %, ce qui limitera le rendement de la
mesure à 2 milliards de francs. Par ailleurs, elle vous proposera,
lors de l'examen de la loi de finances, de rendre le nouveau
prélèvement fusionné déductible de l'impôt
sur le revenu et de supprimer le prélèvement de 1 % au profit de
l'Etat, dans la mesure où il introduit une distorsion fiscale
injustifiée entre les revenus d'actions et ceux d'obligations.
Décision de la commission : votre commission des finances vous
propose d'accepter la fusion et l'extension de l'assiette des
prélèvements sociaux, à un taux moindre de 1,5 %.
ARTICLE 7
Augmentation de la taxe sur la publicité
pharmaceutique
Commentaire :
Cet article tend à
substituer au taux unique de la taxe sur les dépenses de
publicité des laboratoires pharmaceutiques un barème progressif
qui serait fonction de l'importance des dépenses de publicité par
rapport au chiffre d'affaires.
Le présent article entend, par la majoration de la taxe sur la
publicité pharmaceutique, contenir les dépenses de
publicité portant sur les médicaments et freiner la consommation
de ces derniers. La substitution d'un barème progressif à un taux
unique proportionnel vise à renforcer le caractère dissuasif de
la taxe à l'égard des laboratoires les plus prodigues.
A l'heure actuelle, les laboratoires pharmaceutiques acquittent une
contribution de 9 % sur les charges comptabilisées " au titre
des frais de prospection et d'information des praticiens "
afférents à l'exploitation en France des
spécialités pharmaceutiques remboursables. Ces charges
comprennent les frais de visite médicale (70 %), les
dépenses d'échantillonnage, les dépenses de
publicité et les dépenses d'organisation de congrès
médicaux.
Le produit de cette taxe, affecté à la CNAMTS, a
évolué comme suit :
Dans le nouveau dispositif, le taux de la contribution due
par
chaque entreprise serait calculé de la façon suivante :
Le taux le plus faible de la taxe (9,5 % contre 9 % dans le projet de
loi initial) correspondrait à la part des dépenses
promotionnelles inférieure à 10 % du chiffre d'affaires hors
taxes, et le taux le plus élevé (21 % contre 20 % dans
le projet de loi initial) à la part supérieure ou égale
à 14 % du chiffre d'affaires HT.
La part des dépenses comprise entre 10 et 12 % du chiffre
d'affaires HT serait taxée au taux de 15 % et la part comprise entre 12
et 14 % du chiffre d'affaires HT se verrait imposée au taux de
18 %.
Un abattement, initialement fixé à 20 % du montant du
chiffre d'affaires hors taxes réalisé au titre des
médicaments génériques, est par ailleurs prévu sur
le montant des dépenses publicitaires composant l'assiette afin de
promouvoir la vente des génériques.
Sensibles à cet
objectif,
les députés ont porté le taux de
l'abattement à 40 %.
Les députés ont en outre prévu un
abattement
forfaitaire supplémentaire de trois millions de francs
sur
l'assiette de la taxe, afin de limiter le poids de cette contribution pour les
petits laboratoires pharmaceutiques.
Les exemples ci-après illustrent le mécanisme.
1
ère
hypothèse
Soit un laboratoire dont les charges de prospection et d'information sont
égales à 15 millions de francs (il se situe donc dans la
moyenne) et dont le chiffre d'affaires hors taxes atteint 100 millions
de francs.
Dans la
situation actuelle
, il acquitte une taxe de 9 % sur la
totalité de ses dépenses de promotion, soit 15 MF x 9 %
=
1,35 millions de francs
.
Dans, la
situation prévue par le présent projet de loi
tel
qu'amendé par les députés, ses dépenses
promotionnelles se décomposeraient de la façon
suivante, après application de l'abattement forfaitaire de 3
millions de francs :
Tranche de dépenses < 10 % du CAHT 10.000.000 F
Tranche de dépenses comprise entre 10 et 12 % du CAHT 2.000.000 F
Tranche de dépenses comprise entre 12 et 14 % du CAHT 0 F
Tranche de dépenses > 14 % du CAHT 0 F
Total
12.000.000 F
Le laboratoire acquittera donc l'impôt suivant :
Impôt correspondant à la 1
ère
tranche
(9,5 %) 950.000 F
Impôt correspondant à la 2
ème
tranche (15 %)
300.000 F
Impôt correspondant à la 3
ème
tranche
(18 %) 0 F
Impôt correspondant à la 4
ème
tranche
(21 %) 0 F
Total
1.250.000 F
Le montant de sa contribution sera donc diminué de 100.000 francs.
2
ème
hypothèse
Soit un laboratoire dont les charges de prospection et d'information sont
égales à 18 millions de francs et dont le chiffre d'affaires
hors taxes atteint 100 millions de francs.
Dans la
situation actuelle
, il acquitte une taxe de 9 % sur la
totalité de ses dépenses de promotion, soit 18 MF x 9 %
=
1,62 millions de francs
.
Dans, la
situation prévue par le présent projet de loi
tel
qu'amendé par les députés, ses dépenses
promotionnelles se décomposeraient de la façon
suivante, après application de l'abattement forfaitaire de 3
millions de francs :
Tranche de dépenses < 10 % du CAHT 10.000.000 F
Tranche de dépenses comprise entre 10 et 12 % du CAHT 2.000.000 F
Tranche de dépenses comprise entre 12 et 14 % du CAHT 2.000.000 F
Tranche de dépenses > 14 % du CAHT 1.000.000 F
Total
15.000.000 F
Le laboratoire acquittera donc l'impôt suivant :
Impôt correspondant à la 1
ère
tranche
(9,5 %) 950.000 F
Impôt correspondant à la 2
ème
tranche (15 %)
300.000 F
Impôt correspondant à la 3
ème
tranche
(18 %) 360.000 F
Impôt correspondant à la 4
ème
tranche
(21 %) 210.000 F
Total
1.820.000 F
Le montant de sa contribution sera donc accru de 200.000 francs.
Il s'agit donc bien d'un barème progressif calqué sur le
dispositif de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, et non d'un
taux de taxation différencié qui dépendrait du pourcentage
total de dépenses d'information et de prospection engagé par
chaque entreprise par rapport à leur chiffre d'affaires. Un tel
barème a l'avantage d'éviter les effets de seuil.
Les dispositions du présent article entreraient en vigueur pour la
détermination de la contribution due le 1
er
décembre
1998.
Le Gouvernement anticipait
300 millions de francs de recettes
supplémentaires
pour 1998 au titre de l'augmentation de cette taxe,
compte tenu de dépenses promotionnelles évaluées à
10,83 milliards de francs.
Selon le Gouvernement, la majoration des taux opérée par
l'Assemblée nationale devrait compenser le coût de l'abattement
supplémentaire institué par les députés, et du
doublement de l'abattement sur le chiffre d'affaires réalisé au
titre des médicaments génériques. Le tableau
ci-après retrace le calcul opéré par le Gouvernement pour
fonder son estimation :
Cette estimation doit cependant être appréciée avec
prudence, compte tenu de l'impact de la progressivité du taux de la taxe
sur les dépenses promotionnelles des laboratoires.
En effet, en toute logique, l'augmentation du taux de la taxe affectant la
fraction des dépenses publicitaires des laboratoires supérieure
à 10 % de leur chiffre d'affaires hors taxes devrait les inciter
à contenir leurs dépenses, dans la limite de ce pourcentage, ce
qui devrait contribuer à amoindrir l'assiette, donc le rendement attendu
de la présente mesure.
Votre commission approuve l'introduction par l'Assemblée nationale
d'un abattement forfaitaire de 3 millions de francs sur l'assiette de la
taxe
. En effet, sans cet assouplissement, le dispositif risquait de
pénaliser les petits laboratoires qui sont moins susceptibles que les
gros de réaliser des économies d'échelle et pour lesquels
les dépenses promotionnelles pèsent relativement plus lourdement
par rapport à leur chiffre d'affaires.
Votre commission des finances partage tout à fait le souci de contenir
les dépenses de promotion des médicaments engagées par les
laboratoires. Elle estime néanmoins, comme la commission des affaires
sociales, qu'il convient de majorer les tranches du barème
proposé par le présent article afin de limiter l'impact
progressif du dispositif sur les laboratoires. En effet , seuls les
laboratoires dont les dépenses de promotion sont très excessives
par rapport à leur chiffre d'affaires doivent être
pénalisés.
Votre rapporteur pour avis estime par ailleurs que la régulation des
dépenses promotionnelles sur les médicaments pourrait faire
l'objet de négociations entre le Comité économique du
médicament et les professions concernées, dans le cadre de la
politique conventionnelle du médicament
.
Décision de la commission : votre commission vous demande
d'adopter cet article tel que la commission des affaires sociale propose de le
modifier et de le compléter.
ARTICLE 8
Contribution sur les ventes directes de
médicaments
Commentaire : cet article, profondément
amendé par l'Assemblée nationale, tend à instituer une
contribution sur les ventes de médicaments réalisées
directement par les laboratoires aux officines pharmaceutiques, sans passer par
le réseau des grossistes-répartiteurs de
spécialités pharmaceutiques.
I. LE DROIT EXISTANT
Les grossistes-répartiteurs assurent l'essentiel de l'approvisionnement
en médicaments des pharmacies d'officine, et une partie de celui des
hôpitaux. Leurs 200 établissements constituent l'interface
indispensable entre les 320 laboratoires fabricants et les 22.500 pharmacies,
les ventes directes ne constituant que 10 % des ventes totales.
La qualité du service assuré par les
grossistes-répartiteurs est garantie par une réglementation
stricte. Un arrêté du 3 octobre 1962 impose en effet à tout
grossiste-répartiteur :
- de déclarer son secteur d'activité aux pouvoirs publics ;
- de fournir tout médicament à tout pharmacien du secteur
déclaré dans les 24 heures ;
- de disposer en permanence d'un stock correspondant à un mois de vente
et comportant au moins les 2/3 des spécialités commercialisables.
Un décret en Conseil d'Etat actuellement en préparation,
porterait à 90 % des spécialités commercialisables
cette dernière obligation, conformément à la directive
européenne n° 92-25 du 31 mars 1992, relative à la
distribution en gros de médicaments à usage humain.
Ces règles sont assimilables à des obligations de service
public
. En pratique, le délai moyen de délivrance d'un
médicament commandé par un pharmacien est de 2 heures.
En outre, le prix public des médicaments remboursables étant
unique, la marge revenant aux grossistes répartiteurs est fixée
réglementairement. Elle s'élève à 10,74 % du
prix fabricant hors taxe (arrêté du 21 mai 1997).
Les ventes de médicaments assurées par les grossistes se sont
élevées en 1996 à 70 milliards de francs au total,
dont
49,5 milliards de francs
au titre des médicaments
remboursés.
Trois grossistes se partagent 75 % du marché. Il s'agit de :
- OCP, filiale du groupe CEHE => 42 % du marché
- Alliance Santé, filiale du groupe Pessina => 30 % du marché
- Phoenix, ex Schulze-Ratiopharm => 3 % du marché.
Le reste des ventes, soit 25 %, est réalisé par des
coopératives.
Les ventes directes de médicaments ont atteint quant à
elles
5,5 milliards de francs
en 1996, ce qui représente 10 %
du marché.
Sur ces 5,5 milliards, les
laboratoires pharmaceutiques
ont
réalisé
2 milliards de francs
de chiffre d'affaires, le
reste des médicaments ayant été distribué par les
dépositaires pour le compte des fabricants.
Les laboratoires prélèvent donc directement la marge des
grossistes de 10,74 %, sans avoir à supporter les mêmes
obligations de service public.
I. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE PRÉSENT
ARTICLE
Le présent article propose de " rétablir
l'égalité de traitement entre les circuits de distribution en
permettant la récupération
a posteriori
d'une partie de la
marge du grossiste auprès des laboratoires pharmaceutiques ", selon
l'exposé des motifs du projet de loi.
Il propose en conséquence de créer une contribution assise sur
les ventes en gros des seuls laboratoires pharmaceutiques. Il importe de
rappeler à cet égard qu'une contribution sur les ventes en gros
de médicaments existe déjà. L'encadré
ci-après en rappelle les grands principes.
Contribution à la charge des établissements de vente en gros de spécialités pharmaceutiques et des entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques
Cette contribution est acquittée par les grossistes et
par les laboratoires pharmaceutiques
sur leurs ventes en gros de
médicaments
remboursables
. Assise sur le chiffre d'affaires
hors taxes réalisé auprès des pharmacies, cette taxe a
été crée de façon conjoncturelle par la loi portant
diverses dispositions d'ordre social du 31 juillet 1991 et
pérennisée par la loi portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier du 4 avril 1996. C'est, la loi de financement de
la sécurité sociale du 26 décembre 1996 qui a
étendu le champ d'application de cette contribution aux ventes directes
effectuées par les laboratoires pharmaceutiques.
Le taux de cette contribution est, aux termes de l'article L. 138-2 du
code de la sécurité sociale, fixé trimestriellement selon
un barème progressif qui dépend du taux de progression du chiffre
d'affaires par rapport à l'année
précédente :
- 1,5 % si le chiffre d'affaires s'accroît d'au moins 6 % ;
- 1,35 % si la progression de ce CA est comprise entre 5 % et moins
de 6 % ;
- 1,2 % si cette progression est comprise entre 2 % et moins de
5 % ;
- 1,2 % si cette progression est comprise entre 0 % et moins de
2 % ;
- 0,75 % si la diminution du CA est comprise entre 0 % et moins de
3 % ;
- 0,5 % si le chiffre d'affaires diminue de plus de 3 %.
Le produit de cette contribution est réparti entre les régimes
d'assurance maladie qui financent le régime des praticiens et
auxiliaires médicaux conventionnés. Il a atteint 869 millions de
francs en 1996 et est estimé à 881 millions de francs pour 1997.
La contribution prévue par le présent article est strictement
calquée, pour son assiette, son mode de recouvrement et son mode de
versement, sur la contribution présentée ci-dessus. Elle s'en
distingue néanmoins sur deux points :
- son produit est versé à la caisse d'assurance maladie des
travailleurs salariés ;
- son taux est unique.
Initialement fixé à 6,63 %, ce taux a été
porté à 2,5 % par les députés
. Dans son
rapport
2(
*
)
, le rapporteur de la commission des
affaires sociales, M. Claude Evin, fait en effet valoir qu'après
soustraction de cette contribution au taux de 6,63 % et du taux maximum de
remise que les grossistes-répartiteurs sont autorisés à
consentir à leurs clients (2,5 %) au taux limite de marge des
grossistes-répartiteurs (10,74 %), il ne serait resté que
1,61 % du prix fabricant hors taxe pour rémunérer le circuit
de distribution du laboratoire pharmaceutique. Sur cette marge brute, il aurait
fallu de surcroît prélever la contribution sur les ventes en gros.
Une telle mesure aurait risqué, selon M. Evin, de compromettre
sérieusement l'avenir des ventes directes de médicaments
remboursables.
Un taux de 2,5 % préserve en revanche une marge brute de
5,74 % aux laboratoires, avant contribution.
Pour gager la perte de recettes induite par la diminution du taux de la
contribution et maintenir constante le produit attendu de la présente
disposition, soit 300 millions de francs,
les députés ont
majoré de 0,22 % chacun des taux de la première contribution
sur les ventes en gros
de spécialités pharmaceutiques.
Ils ont en outre invité le Gouvernement à engager une
réflexion au cours de l'année qui vient sur l'ensemble du
problème de la distribution du médicament. Le rapporteur du
projet de loi a ainsi estimé qu'une "
remise à plat
était nécessaire pour que la mission de service public soit
garantie et que la distribution se fasse dans de bonnes
conditions
".
Votre commission des finances souscrit entièrement à ce point de
vue. Il apparaît en effet qu'en tentant de répondre au souci
légitime d'égaliser les conditions de concurrence entre les
grossistes-répartiteurs et les laboratoires pharmaceutiques, le
présent article accroît parallèlement la charge pesant sur
les ventes en gros de médicaments, donc sur les
grossistes-répartiteurs, ce qui est en partie contradictoire avec
l'objectif recherché.
En outre, votre rapporteur rappelle, comme il l'avait relevé lors de
l'institution de la contribution sur les ventes en gros, qu'une taxe de ce type
n'est pas intellectuellement satisfaisante. En effet, il ne s'agit pas d'un
outil de régulation des prix, qui sont fixés administrativement,
ni de modération des dépenses de médicaments, qui ne sont
pas prescrits par les redevables de la taxe. Il s'agit en fait de
réinjecter dans le circuit une partie des fonds de l'assurance maladie
gaspillés par la surconsommation pharmaceutique propre à la
France.
Cette taxe risquerait enfin de pénaliser les 27 dépositaires, qui
agissent comme prestataires
3(
*
)
pour le compte
des fabricants, en amenuisant leur commission de prestation.
Il convient donc, avant toute institution d'une taxe sur les ventes
directes, de mettre à plat les conditions de la concurrence, afin
d'évaluer le coût exact de la mission de service public
assurée par les grossistes répartiteurs. Il sera ensuite loisible
au Gouvernement de mettre à la charge des laboratoires un
prélèvement spécifique pour égaliser les conditions
de concurrence.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
défavorable à l'adoption de cet article dans sa rédaction
actuelle et propose d'adopter l'article tel qu'amendé par la Commission
des affaires sociales.
ARTICLE 9
Validation des taux de majoration de la
cotisation d'accidents du travail
Commentaire : cet article tend à valider, de
manière préventive, les décisions individuelles relatives
à la fixation des taux des majorations de la cotisation due au titre des
accidents du travail et des maladies professionnelles, dès lors qu'elles
ont été prises conformément à l'arrêté
du 27 décembre 1996.
I. UNE PROCÉDURE RÉGIE PAR DES TEXTES IMPRÉCIS ET
CONTRADICTOIRES
A. LA PROCÉDURE DE FIXATION DES TAUX DES MAJORATIONS DE COTISATIONS
D'ACCIDENTS DE TRAVAIL
Selon l'article D.242-6-2 du code de la sécurité sociale, le taux
net de cotisation due par un établissement au titre des accidents de
travail et des maladies professionnelles est constitué par le taux brut
affecté de trois majorations.
L'article D.242-6-4 dispose que ces majorations visent à couvrir :
- les accidents de trajet ;
- les frais de rééducation professionnelle, les charges de
gestion administrative et l'action sanitaire et sociale ;
- les dépenses de compensation entre régimes d'accidents du
travail.
Conformément à l'article D.242-6-5 du code de la
sécurité sociale, ces majorations sont fixées par
délibération de la commission des accidents du travail et des
maladies professionnelles. Cette délibération est adressée
au ministre chargé de la sécurité sociale au plus tard le
15 novembre de chaque année. Elle est approuvée par
arrêté du ministre chargé de la sécurité
sociale et du ministre chargé du budget.
Toutefois, si les majorations fixées par la commission des accidents du
travail et des maladies professionnelles ne permettent pas d'assurer
l'équilibre financier de la gestion de la branche, le ministre
chargé de la sécurité sociale, dans les dix jours suivant
la réception de la délibération, met en demeure la
commission de fixer des majorations permettant d'obtenir l'équilibre des
dépenses et des recettes dans les dix jours suivant la réception
de la mise en demeure.
Si cette mise en demeure reste sans effet, les majorations sont fixées
par arrêté du ministre chargé de la sécurité
sociale et du ministre du budget. Or, cette procédure exceptionnelle a
dû être utilisée en 1997.
B. UNE INTERPRÉTATION DIVERGENTE DE LA NOTION D'ÉQUILIBRE
FINANCIER DE LA BRANCHE ACCIDENTS DE TRAVAIL FAVORISÉE PAR LA
COEXISTENCE DE TEXTES CONTRADICTOIRES
L'an dernier, la commission des accidents de travail et des maladies
professionnelles avait fixé, pour 1997, des valeurs de majoration telles
que le taux net moyen qui en résultait conduisait à
présenter un compte de la branche accidents du travail/maladies
professionnelles en déficit de 894 millions de francs pour
l'exercice 1997.
Toutefois, la commission peut s'appuyer sur l'alinéa 3 de l'article
L.242-5 du code de la sécurité sociale qui dispose que "
si les
mesures prises en application du premier alinéa du présent
article ne permettent pas d'assurer la couverture des charges de gestion,
l'équilibre peut être maintenu ou rétabli par un
prélèvement sur les excédents financiers ou, à
défaut, par une modification des éléments de calcul des
cotisations
".
Elle estime donc que les taux de majorations qu'elle avait fixés ne
compromettaient pas l'équilibre financier de la branche, puisque la
prise en compte de l'excédent cumulé depuis 1995, -
1,28 milliards de francs après le transfert d'un milliard de francs
à la branche maladie conformément à l'article 30 de la loi
de financement de la sécurité sociale pour 1997,- permettait de
dégager un excédent de trésorerie de 386 millions de
francs.
Au contraire, le ministère du travail et des affaires sociales a
considéré que la commission des accidents du travail et des
maladies professionnelles ne respectait pas l'équilibre financier
mentionné dans l'alinéa 2 de l'article D.242-6-5 du code de
la sécurité sociale, dans la mesure où cette
dernière n'avait pas tenu compte, lors de la fixation des taux pour
1997, des objectifs de recettes et de dépenses de la branche tels qu'ils
figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 1997 et qui conduisent à un excédent
prévisionnel de 847 millions de francs. Après une mise en
demeure restée infructueuse, le ministre du travail et des affaires
sociales s'est donc substitué à la commission des accidents du
travail et des maladies professionnelles et a fixé par
l'arrêté du 27 décembre 1997 les majorations
visées à l'article D.242-6-4.
Cet arrêté a fait l'objet d'un recours en excès de pouvoir,
actuellement en instance de jugement devant le conseil d'Etat. Il
soulève trois problèmes :
- le conflit entre deux normes, à savoir les articles L.242-5 et
D.242-6-5 du code de la sécurité sociale d'une part, et la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1997 d'autre part ;
- la portée de l'autonomie de la commission des accidents de travail et
des maladies professionnelles ;
- la légalité de l'obligation imposée par le Gouvernement
à la commission des accidents du travail et des maladies
professionnelles de dégager des excédents afin de les affecter
aux autres branches déficitaires de la sécurité sociale.
En prévision d'une éventuelle annulation de
l'arrêté, cet article propose, à titre préventif, de
valider toutes les décisions individuelles prises sur la base de
celui-ci et relatives à la fixation des taux des majorations de la
cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies
professionnelles.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a complété la
validation demandée par le Gouvernement en modifiant les dispositions du
code de la sécurité relatives au mode de détermination des
cotisations d'accidents du travail de façon à préciser que
les décisions de la commission des accidents du travail et des maladies
professionnelles doivent se conformer à la loi de financement de la
sécurité sociale.
Votre rapporteur estime que cette précision rédactionnelle est
à la fois superfétatoire et inefficace.
Superfétatoire, parce que le principe de hiérarchie des normes
impose déjà à la commission des accidents du travail et
des maladies professionnelles de respecter la loi de financement de la
sécurité sociale, comme toute autre loi, lorsqu'elle fixe les
taux de majoration des cotisations.
Inefficace, parce qu'elle n'apporte pas de solution au fond du problème.
La question est en effet de savoir ce que la commission est censée
faire lorsqu'elle se trouve partagée entre l'article L.242-5 du
code de la sécurité sociale qui lui impose de viser le strict
équilibre de la branche et la loi de financement de l'année, qui
lui demande de dégager un excédent annuel.
II. UNE VALIDATION TRÈS CONTESTABLE
A. LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Dans sa décision n °80-119 DC du 22 juillet 1980, le
conseil constitutionnel a reconnu la conformité de principe des lois de
validation à la constitution, qui (sauf en matière
pénale), autorise le législateur à prendredes mesures
rétroactives afin notamment, "
de régler, comme lui seul peut
le faire, les situations nées de l'annulation
" d'un acte
administratif.
L'exercice du pouvoir de validation doit, toutefois, satisfaire à des
exigences constitutionnelles.
D'une part, le législateur doit respecter les exigences du principe de
séparation des pouvoirs et s'abstenir tant de valider les actes
mêmes qui ont été annulés que de faire obstacle
à l'exécution des actes annulés par des décisions
juridictionnelles, "
passées en force de chose jugée
".
D'autre part, la validation doit être justifiée par des raisons
d'intérêt général. A cet égard, le conseil
constitutionnel a estimé dans sa décision du
28 décembre 1995 n° 95-369 DC sur la loi de finances
pour 1996, que "
la seule considération d'un intérêt
financier
" n'a pas pu donner à la validation un motif
d'intérêt général autorisant le législateur
à faire obstacle aux effets d'une décision de justice.
En l'espèce, on peut légitimement se demander si ces deux
conditions sont respectées.
Certes, cet article ne remet pas en cause la séparation des pouvoirs,
puisqu'il prévoit la validation des décisions individuelles de
fixation de taux "
sous réserve des décisions de justice
passées en force de chose jugée
".
Néanmoins, la justification de cette validation par
l'intérêt général n'est pas avérée.
Le Gouvernement prétend que si cette mesure n'était pas
validée, elle entrainerait une perte de plus d'1,7 milliards de
francs pour la sécurité sociale. Pour établir ce calcul,
le Gouvernement prend en compte d'une part le déficit de
894 millions de francs résultant des taux proposés par la
commission des accidents du travail, et d'autre part, l'excédent
prévisionnel prévu par la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997.
Or, ces chiffres sont doublement contestables.
D'abord, même si les taux fixés par la commission des accidents
du travail conduisent à un déficit de 894 millions de
francs, ils ne remettaient pas en cause l'équilibre financier de la
branche
. En effet, compte tenu de l'excédent cumulé depuis
1995, -1,28 milliard de francs après le transfert d'un milliard de
francs à la branche maladie conformément à
l'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1997 -, la branche accident du travail aurait dégagé un
excédent de trésorerie de 386 millions de francs.
En outre, il est pour le moins curieux de comptabiliser dans les pertes de
la sécurité sociale, si cet article n'était pas
validé, les 847 millions de francs d'excédent prévus
pour 1997 à partir des objectifs de dépenses et de recettes de la
loi. En effet, il ne s'agit là que de prévisions et seul le solde
réellement réalisé doit être pris en compte
.
Celui-ci aurait été de -894 millions de francs avec les taux
proposés par la commission des accidents du travail : il s'est
élevé seulement à +151 millions de francs avec les
taux imposés par le Gouvernement. Or, ce dernier reconnaît bien
qu'il y a eu un excédent, et ne parle pas d'un déficit de
696 millions de francs correspondant à la différence entre
847 et 151 millions de francs, reconnaissant par là même le
caractère artificiel du calcul des pertes qui résulteraient, pour
la sécurité sociale, de l'absence de validation de cet article.
B. UNE VALIDATION CONTRAIRE AU PRINCIPE D'AUTONOMIE DES BRANCHES
En fait, cette validation pose une question de principe, à savoir la
réalité de l'autonomie de la branche des accidents du travail.
Cette question oppose les Gouvernements successifs et la branche des accidents
du travail et des maladies professionnelles depuis 1984.
En effet, de 1983 à 1992, la gestion du risque accidents du travail
et maladies professionnelles a permis de dégager un excédent
cumulé de 20,6 milliards de francs, selon la commission des comptes
de la sécurité sociale, qui a toujours été
affecté aux autres branches déficitaires de la
sécurité sociale
. C'est pourquoi de 1984 à 1989, six
recours ont été engagés devant le Conseil d'Etat contre
les arrêtés fixant les majorations des taux de cotisation
d'accidents du travail et de maladies professionnelles, au motif que leurs
montants, anormalement élevés, étaient
déterminés de manière à pouvoir dégager des
excédents indûs au profit des autres branches.
Dans son arrêt du 26 février 1992, le Conseil d'Etat a
annulé les bases réglementaires de la tarification de 1988. Le
Parlement sur la proposition du gouvernement de l'époque, avait
tiré les conséquences de cette annulation en votant
l'article 20 de la loi n °93-121 de 27 janvier 1993 portant
diverses mesures d'ordre social, qui prévoyait un abattement forfaitaire
de 4 % sur les cotisations d'accidents du travail de 1993.
Dans son arrêt du 9 juillet 1993, le Conseil d'Etat a
également annulé les bases réglementaires de la
tarification de 1989. Le Gouvernement a alors obtenu du Parlement la validation
des taux de cotisations d'accidents du travail notifiés aux entreprises
pour 1989, sur la base des textes réglementaires de 1988 annulés
par le Conseil d'Etat, par le vote de l'article 67 de la loi n °94-43
du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et
à la protection sociale.
Le vote de la loi n °94-637 du 25 juillet 1994 relative
à la sécurité sociale laissait penser que le gouvernement
respecterait désormais l'autonomie de la branche accidents du travail et
maladies professionnelles
.
En effet, la loi dispose solennellement dans son article premier que "
le
régime général comprend quatre branches
" et que
"
l'équilibre financier de chaque branche est assuré par la
caisse chargée de la gérer
". En outre, l'alinéa 4
de l'article 10 est parfaitement clair sur les objectifs à
atteindre et les moyens à employer : d'une part la gestion de
la branche doit assurer l'équilibre financier et non pas dégager
un quelconque excédent ; d'autre part, si les taux de
cotisations fixés par la commission des accidents du travail et des
maladies professionnelles ne permettent pas d'assurer la couverture des frais
de gestion, l'équilibre financier doit être maintenu ou
rétabli
en priorité par un prélèvement sur les
excédents financiers
ou, si ceux-ci sont inexistants ou
insuffisants, par une augmentation des taux de cotisation.
Or, les Gouvernements ont continué de nier après 1994
l'autonomie de gestion de la branche des accidents du travail et des maladies
professionnelles.
L'article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1997 institue, à la charge de la branche des accidents du travail
et maladies professionnelles et au profit de la branche maladie du
régime général, un versement annuel pour tenir compte des
dépenses supportées indûment par cette dernière.
Cette mesure est justifiée par la sous-évaluation chronique des
maladies professionnelles. Il est donc logique que le montant de ce versement
soit pris en compte dans la détermination des éléments de
calcul de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies
professionnelles.
En revanche, les Gouvernements ne respectent pas l'autonomie de cette branche
lorsqu'ils lui imposent, outre le versement de cette somme, un objectif
d'excédent. Selon les comptes de la sécurité sociale, cet
excédent s'est élevé, pour 1997, et sans prendre en compte
le versement d'un milliard à la branche maladie, à
1,755 milliard de francs. Pour 1998, il est estimé à
1,448 milliard de francs,
le versement d'un milliard à la
branche maladie ayant été intégré dans ce
calcul.
Or, cette pratique présente deux graves inconvénients.
D'une part, elle risque de décourager les entreprises qui s'impliquent
dans le renforcement de la prévention des risques d'accident du travail.
En effet, dans le dispositif actuel, le taux brut de cotisation dépend
de la valeur du risque dans chaque établissement. Les entreprises sont
donc incitées à diminuer les risques encourus dans leurs
établissements. Toutefois, si cette diminution est compensée par
une augmentation constante des trois majorations de la cotisation réelle
et ce, pour des raisons extérieures à la branche, les efforts
entrepris ne sont pas récompensés. On peut craindre à
terme une remise en cause du système par les entreprises.
D'autre part, cette hausse des trois majorations se répercute
automatiquement sur le coût du travail et pénalise l'emploi.
Décision de la commision : votre commission vous propose de supprimer
cet article.
ARTICLE 10
Augmentation du taux de la taxe sur les contributions
patronales au financement des garanties complémentaires de
prévoyance
Commentaire : cet article vise à augmenter de 6 %
à 8 % le taux de la taxe sur les contributions des employeurs et des
organismes de représentation collective au financement de garanties de
prévoyance complémentaire, et à valider
législativement l'exonération des entreprises de moins de dix
salariés.
I. LA SITUATION ACTUELLE
A. UNE TAXE CRÉÉE PAR VOIE D'ORDONNANCE
Les versements des entreprises au profit de leurs salariés
réalisés dans le cadre de contrats supplémentaires de
prévoyance bénéficiaient, jusqu'en 1996, d'une
exonération totale de cotisations sociales dans la limite de 19 % du
plafond de la sécurité sociale
4(
*
)
.
A cette époque, les primes versées annuellement au titre de ces
contrats étaient de l'ordre de 52 milliards de francs, dont 25 milliards
pour l'assurance maladie complémentaire et 27 milliards pour l'assurance
complémentaire prévoyance. La part des primes à la charge
des entreprises était estimée à environ 80 % de ces
montants.
L'article 8 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 relative aux
mesures urgentes tendant au rétablissement de l'équilibre
financier de la sécurité sociale a institué un
prélèvement, au taux de 6 %, au profit du Fonds de
solidarité vieillesse (FSV) sur les contributions des employeurs et des
organismes de représentation collective du personnel (comités
d'entreprise) versées, à compter du 1
er
janvier 1996,
au bénéfice des salariés pour le financement de
prestations complémentaires de prévoyance.
Ce prélèvement avait pour objet de mettre fin à
"l'
inégalité de traitement existant en matière de
protection sociale complémentaire au profit des salariés des
entreprises qui souscrivent des contrats collectifs, et au détriment des
salariés ou non salariés qui ne peuvent souscrire qu'à des
compléments de couverture sociale facultatifs, sans part patronale
"
5(
*
)
.
Accessoirement, il était indiqué que : "
les contrats
collectifs d'assurance maladie complémentaire favorisent la consommation
de biens médicaux sans que ceux-ci participent aucunement au financement
de notre système de protection sociale.
"
1
B. DES MODALITÉS DE MISE EN OEUVRE PRÉCISÉES PAR
VOIE DE CIRCULAIRES
L'assiette de la taxe est constituée par les contributions à
la prévoyance complémentaire
versées par les
employeurs et les comités d'entreprise ou les comités de gestion
des oeuvres sociales au profit des salariés ou assimilés. Peu
importe le régime de sécurité sociale dont relèvent
ces salariés, pourvu qu'il s'agisse d'un régime français
de sécurité sociale
6(
*
)
.
En application de la circulaire ministérielle n° 96-248 du 11
avril 1996,
il faut entendre par contributions de prévoyance
complémentaire,
les contributions suivantes, versées à
un organisme tiers en vue de financer les prestations complétant celles
servies par les régimes de base de la sécurité sociale :
- les capitaux décès et allocations d'obsèques ;
- les rentes de conjoint survivant ou d'orphelin ;
- les prestations d'incapacité (indemnités journalières
complémentaires) ;
- les rentes d'invalidité ;
- les remboursements de soins de santé.
En sont donc exclues, les contributions de prévoyance
complémentaire en matière de chômage et de retraite.
Les contributions de prévoyance complémentaire sont comprises
dans l'assiette de la taxe indépendamment de leur statut au regard des
cotisations sociales, de la CSG et de la CRDS. Peu importe qu'elles soient
versées à titre obligatoire ou facultatif, aux termes d'un accord
collectif ou d'un contrat individuel, quel que soit le mode de garantie et de
calcul, y compris lorsque le versement prend la forme de subventions globales
et non individualisées par salarié au régime ou organisme
servant les prestations.
Toutefois, sont exclues de l'assiette, en vertu d'une lettre circulaire de
l'ACOSS (n° 97-29 du 19 février 1997),
les contributions
versées en vue d'assurer l'obligation de maintenir le salaire en cas
d'arrêt de travail pour maladie ou accident,
lorsque cette obligation
résulte des dispositions de la loi n° 78-49 du 19 janvier 1978 sur
la mensualisation, d'une convention collective de branche, d'un accord
professionnel ou interprofessionnel, d'une convention ou d'un accord
d'entreprise ou d'établissement.
Par ailleurs, une lettre ministérielle du 31 juillet 1996, a
décidé que
les entreprises de moins de dix salariés
ne seraient pas assujettis au paiement de cette taxe
. Cette
exonération a été décidée au vu des
difficultés rencontrées dans les petites entreprises, alors
même que le montant moyen des contributions est très faible.
Le taux de 6 % s'applique à l'intégralité de
l'assiette ainsi définie par voie de circulaires, sans réfaction
ni abattement.
La taxe est due à raison du versement des contributions versées
depuis le 1
er
janvier 1996, quelle qu'en soit la
périodicité et quelle que soit la période au titre de
laquelle les contributions sont versées. La taxe est exigible à
la première échéance de cotisations suivant le versement
des contributions à l'organisme assureur, quelle que soit la
périodicité de ce versement.
A l'exception des contributions versées au bénéfice des
salariés ou d'anciens salariés relevant du régime des
salariés agricoles et des agents titulaires de l'État, la taxe
est recouvrée par l'URSSAF territorialement compétente pour le
recouvrement des cotisations de sécurité sociale.
Le produit de cette taxe est affecté au FSV, organisme
créé par la loi n° 93-936 relative aux pensions de retraite
et à la sauvegarde de la protection sociale, et dont la mission est de
prendre en charge les avantages d'assurance vieillesse à
caractère non contributif relevant de la solidarité nationale.
II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT
Le paragraphe I
du présent article tend à modifier les
dispositions de l'article L. 137-1 du code de la sécurité sociale
(introduit par l'article 8 de l'ordonnance de 1996 précitée) pour
exonérer du paiement de la taxe "prévoyance" les employeurs
occupant neuf salariés au plus.
Il s'agit d'une validation législative, avec effet rétroactif
au 1
er
janvier 1996, des dispositions contenues dans la lettre
ministérielle du 31 juillet 1996.
Le paragraphe II
prévoit de modifier l'article L. 137-2 du code
de la sécurité sociale, pour porter le taux de cette taxe de 6 %
à 8 %.
Cette mesure devrait permettre d'accroître le rendement de la taxe de
près de 500 millions de francs, de sorte que le FSV percevrait à
ce titre 2.369 millions de francs, au lieu des 1.869 millions de francs qui
résulteraient de la reconduction à droit constant pour 1998
.
On rappellera que cette taxe devait initialement rapporter 2,5 milliards de
francs en 1996. Compte tenu de l'exonération décidée en
cours d'année pour les employeurs de moins de dix salariés, elle
n'a rapporté que 1.803 millions en 1996 et devrait rapporter, selon les
prévisions du gouvernement, 1.800 millions en 1997.
La recette supplémentaire de 500 millions serait intégralement
affectée à une amélioration des conditions de prise en
charge du coût de la validation des périodes de chômage, et
viendrait donc réduire le déficit de la branche vieillesse.
Le paragraphe III
du présent article prévoit que les
dispositions réglementaires applicables au recouvrement et au
contrôle de la taxe "prévoyance" sont celles applicables
"
à la date de publication de la dernière loi de financement de
la sécurité sociale
" et non plus "
à la date de
publication de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996
".
La substitution ainsi opérée permet de garantir une
réactualisation périodique des dispositions applicables au
recouvrement et au contentieux de la taxe sans qu'une modification
législative spécifique soit nécessaire. La même
solution a été retenue par la loi de financement de la
sécurité sociale en ce qui concerne le recouvrement et le
contentieux de la CSG.
Dans les deux cas, il s'agit d'impositions de toute nature dont les
règles régissant le recouvrement et le contentieux doivent
être fixées par la loi. Plutôt que de retranscrire dans la
loi la totalité des dispositions réglementaires applicables au
recouvrement et au contentieux des cotisations, il a été
décidé de renvoyer à ces dispositions dans leur
rédaction en vigueur à la publication de la loi. Cependant, ce
choix a l'inconvénient d'imposer de fréquentes
réactualisations de ces dispositions de renvoi, afin que les
modifications apportées par voie réglementaire aux dispositions
relatives au recouvrement et au contentieux des cotisations puissent
également être appliquées à la CSG et à la
taxe prévoyance.
L'Assemblée nationale a adopté ces dispositions sans aucune
modification.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Ayant été instituée par l'ordonnance de 1996, la taxe sur
la prévoyance complémentaire n'a jamais fait l'objet d'une
délibération du Parlement.
L'adoption du présent article, outre les modifications
proposées, aura donc pour effet de ratifier la création de cette
taxe.
Cet article constitue donc l'occasion de se prononcer explicitement, non
seulement sur les modalités, mais sur le principe même de cette
taxe.
De ce point de vue, votre commission des finances est amenée à
exprimer les plus vives réserves tant sur la régularité
juridique de cette taxe que sur ses justifications économiques.
A. UNE RÉGULARITÉ JURIDIQUE DOUTEUSE
On observera en effet que la définition de l'assiette donnée par
l'article 8 de l'ordonnance de 1996 est particulièrement
imprécise. En effet, cet article vise :
"
les contributions des
employeurs et des organismes de représentation collective du personnel
versées, à compter du 1
er
janvier
1996, au bénéfice des salariés pour le financement de
prestations complémentaires de prévoyance
"
.
Or, il n'existe pas de définition précise des prestations
complémentaires de prévoyance
.
L'article L. 911-2 du code de la sécurité sociale donne bien une
définition de ces prestations.
Mais d'une part, celle-ci est très extensive puisqu'elle comprend
"
notamment
" les risques décès, ceux portant atteinte
à l'intégrité physique de la personne ou liés
à la maternité, les risques d'incapacité de travail ou
d'invalidité, les risques d'inaptitude, les risque chômage, ainsi
que la constitution d'avantages sous forme de pension de retraite,
d'indemnités ou de primes de départ en retraite ou de fin de
carrière.
D'autre part, cette définition n'est pas exhaustive. Comme le fait
justement remarquer le Dictionnaire permanent social :
"
l'utilisation
de l'adverbe "notamment" permet d'inclure dans la notion de garanties
collectives complémentaires des salariés, tous les types de
risques, y compris ceux qui ne font pas l'objet d'une disposition du
régime de base de la sécurité sociale".
1. Les
garanties incapacité et invalidité.
Elles complètent
les prestations du régime général de la
sécurité sociale en cas d'incapacité de travail temporaire
ou permanent, partielle ou totale. Ces garanties viennent compenser la perte de
salaire subie par le salarié du fait de l'impossibilité d'exercer
son activité professionnelle à la suite d'une maladie ou d'un
accident. On rappelle qu'en vertu de l'accord national interprofessionnel du 10
décembre 1977, l'employeur a l'obligation de verser un complément
de salaire en cas de maladie ou d'accident égal, pendant les trente
premiers jours à 90 %, puis à 66 % pendant les trente jours
suivants, de la rémunération brute que le salarié aurait
perçue s'il avait continué à travailler.
On peut en conclure qu'en donnant une définition imprécise de
l'assiette et en se référant à des dispositions
réglementaires pour ce qui est des modalités de recouvrement,
le législateur délégué à méconnu
sa propre compétence
et notamment l'article 34 de la constitution
qui prévoit que la loi fixe les règles concernant :
"
l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions
de toute natures".
Par la suite,
le ministre des affaires sociales en fixant, par voie de
simple circulaire, puis par simple lettre ministérielle, une assiette
plus étroite que celle fixée dans la loi
, puisqu'elle exclut,
notamment, les risques chômage et retraite, et les entreprises de moins
de dix salariés,
a outrepassé sa propre compétence.
Enfin, en ratifiant l'article de l'ordonnance instituant cette taxe,
le législateur d'aujourd'hui méconnaîtrait à son
tour sa propre compétence.
B. UNE JUSTIFICATION ÉCONOMIQUE ABSURDE
Comme on l'a vu,
le fondement théorique de cette taxe repose sur
deux considérations :
- l'inégalité de traitement entre les salariés des
entreprises ayant mis en place une prévoyance complémentaire et
ceux des entreprises ne l'ayant pas fait ;
- l'encouragement que constitue la prévoyance complémentaire
à la consommation de biens médicaux.
Par ailleurs, le présent projet de loi ne contient aucune justification
relative à l'augmentation du taux de cette taxe. Cependant, lors de la
discussion du présent article à l'Assemblée nationale, Mme
Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité a mis en avant
l'argument suivant pour justifier l'augmentation de la taxation :
"L'article 10 vise à faire en sorte que l'exonération de
cotisations patronales, qui bénéficient aux prestations de
retraite et de prévoyance au-dessous d'un certain plafond, aujourd'hui
31.281 francs, n'entraîne pas d'abus, comme on le voit ces temps-ci. Les
entreprises ont en effet intérêt à verser une partie des
rémunérations sous forme d'avantages de prévoyance et de
retraite :
il s'agit là de salaires déguisés qui leur
évitent de payer les cotisations
".
Aucun de ces arguments, pas plus ceux invoqués hier pour créer
la taxe, que celui invoqué aujourd'hui par le Gouvernement n'emporte la
conviction de votre commission.
En premier lieu, l'argument sur l'égalité de traitement
méconnaît profondément la distinction entre la protection
obligatoire et la protection complémentaire
. Seules les garanties
jugées comme étant les plus importantes doivent être
apportées, de façon égale, à tous les travailleurs
salariés. Les garanties complémentaires, jugées moins
importantes, sont laissées à l'initiative des partenaires sociaux
ce qui, par construction, peut se traduire par des inégalités de
situation.
Dans ces conditions, la taxation des entreprises les plus
prévoyantes apparaît proprement absurde
. Elle conduira
vraisemblablement les entreprises à diminuer voire, pour celles qui ne
sont pas liées par des accords collectifs, à supprimer leurs
dépenses de prévoyance. Non seulement une telle diminution
marquera une régression sociale, mais elle se traduira en outre par une
diminution de la matière imposable.
En second lieu, l'argument consistant à dénoncer l'impact
inflationniste des dépenses de prévoyance complémentaire
sur la consommation de biens médicaux ne semble guère plus
convaincant
.
D'une part, parce qu'il ne prend en compte que la partie de la
prévoyance portant sur les dépenses maladie et ignore la
couverture des risques invalidité, incapacité et
décès, ce qui représente près de la moitié
de la prévoyance complémentaire.
D'autre part, parce que même si l'on supposait, pour les besoins de la
démonstration, que la prévoyance complémentaire ne soit
composée que du remboursement complémentaire des frais de
santé, le caractère inflationniste de ce remboursement n'est
guère démontré.
Comme l'écrit excellement notre collègue député M.
Denis Jacquat, dans son rapport au nom de la commission des affaires
culturelles sur l'assurance vieillesse
7(
*
)
:
"Le reproche qui leur est fait de favoriser l'accroissement des
dépenses de santé doit être fortement nuancé,
puisque le traitement des affections à un stade précoce est
susceptible d'éviter dans bien des cas des hospitalisations
ultérieures nécessairement plus coûteuses.
"Si l'on raisonne en terme de santé publique, il est clair que la
généralisation de telles couvertures permet de faciliter
l'accès aux soins, notamment pour les personnes pour lesquelles le
ticket modérateur représente une charge importante. Elle a
également le mérite d'avoir permis d'amortir les
conséquences de la baisse des remboursements des régimes de base
sur le niveau des dépenses de santé laissées à la
charge des ménages.
"Or les couvertures complémentaires partiellement financées par
l'employeur sont sensiblement moins coûteuses que les contrats
individuels. Il faut donc veiller à ce ne pas dissuader les employeurs
d'offrir des garanties complémentaires à leurs salariés,
d'autant que l'inclusion de la prévoyance complémentaire dans le
champ de la négociation collective constitue un facteur non
négligeable de dynamisation de la vie conventionnelle au sein des
entreprises concernées".
Quand bien même admettrait-on, toujours pour les besoins de la
démonstration, que le remboursement à titre complémentaire
des frais de santé a un impact inflationniste sur les dépenses de
santé, alors c'est l'ensemble de la prévoyance
complémentaire qu'il faudrait taxer, y compris celle reposant sur une
base individuelle.
Enfin, l'argument consistant à assimiler à des
rémunérations les contributions patronales de prévoyance
témoigne d'une vision simpliste et dépassée des rapports
sociaux qui s'inscrit dans une logique de régulation étatique.
En effet, l'idée selon laquelle les entreprises choisiraient de
mettre en place des contrats de prévoyance complémentaire,
plutôt que d'augmenter les salaires est sans doute théoriquement
concevable. Elle n'en reste pas moins fausse dans la pratique et ce pour une
raison bien simple : compte tenu de l'importance des charges pesant sur les
salaires, si les entreprises devaient supporter des charges identiques sur les
éléments annexes du salaire, elles ne consentiraient ni
éléments annexes... ni augmentations de salaires.
Or tous les acteurs trouvent un intérêt à voir se
développer la prévoyance complémentaire :
- l'Etat et les organismes de sécurité sociale acceptent une
diminution immédiate de leurs recettes, mais en contrepartie d'un
développement de la protection sociale volontaire qui permet de diminuer
les dépenses de prévoyance financées par la
collectivité publique ;
- les salariés consentent à échanger un gain de pouvoir
d'achat immédiat contre la participation à des contrats de
prévoyance à des tarifs moins onéreux que ceux qu'ils
pourraient souscrire individuellement ;
- les entreprises peuvent consentir à des abondements qu'elles ne
seraient pas autrement disposées à faire, compte tenu des
cotisations sociales pesant sur les salaires.
En réalité, on ne peut trouver d'autre justification à
l'institution de cette taxe, comme à son augmentation, que la
nécessité de s'assurer des recettes "de poche" dans une vision de
court terme peu respectueuse de l'avenir.
Pour ces raisons, votre commission des finances vous propose non seulement de
rejeter l'augmentation, mais aussi de supprimer cette taxe. Toutefois, compte
tenu de la nécessité de contenir le déficit de la
sécurité sociale pour 1998, cette suppression n'interviendrait
qu'à compter de 1999.
Décision de la commission : votre commission des finances vous
propose de supprimer la taxe sur la prévoyance à compter du
1
er
janvier 1999.
ARTICLE 11
Réaffectation des excédents de la
contribution sociale de solidarité des sociétés (CSSS)
Commentaire : cet article tend à affecter au
régime général, à titre exceptionnel,
l'excédent de la contribution sociale de solidarité pour les
sociétés (C3S), et à modifier, à titre permanent,
les ressources de la CANAM.
I. LE DROIT EN VIGUEUR
A. L'AFFECTATION DU PRODUIT DE LA C3S AU FINANCEMENT DES RÉGIMES
D'ASSURANCE MALADIE ET D'ASSURANCE VIEILLESSE DES NON SALARIÉS
Créée par la loi du 3 janvier 1970, la contribution sociale de
solidarité des sociétés (C3S) est une contribution
versée
par les sociétés commerciales et
assimilées
aux régimes d'assurance maladie et d'assurance
vieillesse des non salariés, afin de compenser les pertes de recettes
subies par ces régimes du fait du développement de l'exercice
sous forme sociétaire
des professions artisanales et commerciales.
La loi de finances rectificative du 4 août 1995 a étendu
simultanément le champ de recouvrement, l'assiette et le taux de cette
contribution.
A compter de 1995, le taux de la C3S a ainsi été porté de
0,1 à 0,13 % du chiffre d'affaires des sociétés, ce
qui a accru le rendement de 2,75 milliards de francs. Les encaissements
correspondants ont été effectués en novembre 1995 et
reversés aux régimes attributaires dans le courant du mois de
décembre.
A compter de 1996, deux mesures sont entrées en vigueur :
- le relèvement de 3 à 5 millions de francs du plancher de
chiffre d'affaires entraînant la taxation à la C3S. La perte de
ressources correspondante a été estimée à 300
millions de francs ;
- l'extension du champ des entreprises assujetties à cette contribution
aux sociétés en nom collectif, aux GIE, aux établissements
de crédit, aux entreprises d'assurance, à certaines entreprises
publiques et à la plupart des sociétés
coopératives.
L'impact financier du relèvement du taux de la contribution en 1996 a
été d'environ 5 milliards de francs, soit 2,8 milliards de
francs pour les entreprises déjà assujetties et 2,1 milliards de
francs pour les entreprises nouvellement assujetties.
Au total, le rendement de la C3S a été de 15,3 milliards de
francs en 1996, contre 12 milliards de francs en 1995, ce qui a permis un
accroissement des versements aux régimes de non salariés non
agricoles en 1996.
Par ailleurs, et pour faire suite à l'annulation par le Conseil d'Etat
des arrêtés de répartition du produit de la C3S depuis
1981,
la loi portant DDOEF du 12 avril 1996 a donné une base
légale aux mécanismes de répartition de cette
contribution
.
Cette loi pose le principe d'une répartition au prorata et dans la
limite des déficits comptables des régimes de travailleurs non
salariés. Deux étages de répartition sont prévus
(article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale) :
- la première répartition bénéficie prioritairement
à la CANAM à l'ORGANIC
8(
*
)
et
à la CANCAVA ;
- la seconde répartition, qui ne peut intervenir que si un solde
subsiste après le premier partage, est réalisée entre les
autres régimes de non salariés déficitaires,
c'est-à-dire les régimes d'assurance vieillesse des professions
agricoles (BAPSA) des ministres des cultes (CAMAVIC), des avocats (CNBF) et des
professions libérales (CNAVPL).
En 1996, malgré l'existence d'un solde disponible de 900 millions de
francs après la première répartition,
la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1997 a prévu de ne
pas procéder à la deuxième répartition
afin
de faire face aux besoins de financement prévisibles des régimes
prioritaires.
Votre rapporteur avait alors observé que, si le BAPSA n'avait en effet
nullement besoin des ressources C3S dans la mesure où il devait
connaître un solde positif de 200 millions de francs, en revanche, ces
ressources auraient permis à la CAMAVIC de réduire son
déficit prévisionnel de 52 à 7 millions de francs.
Au demeurant, le dynamisme des encaissements de C3S constaté au cours de
l'année 1997 a largement permis de couvrir les besoins de la CANAM, de
l'ORGANIC, de la CANCAVA, ET DE LA CNREBTP, à tel point que
l'excédent des recettes provenant de la C3S sur les emplois devrait
atteindre 1,6 milliards de francs pour l'année 1997.
Compte tenu du
reliquat disponible fin 1996, la réserve de C3S devrait donc
s'élever à
2,56 milliards de francs
à la fin
1997.
La commission des comptes de la sécurité sociale souligne dans
son dernier rapport le caractère paradoxal de cette situation :
"
les trois régimes de non salariés disposent
potentiellement de ressources supérieurs à leurs besoins propres,
alors même que les dépenses de l'ensemble des régimes de
base excèdent significativement leurs ressources
. "
Les déficits de la CNAVTS et de la CNAMTS devraient en effet atteindre
respectivement 8,4 et 14 milliards de francs pour 1998.
Le présent article propose de tirer les conséquences de cette
observation en attribuant l'excédent de la C3S au régime
général.
B. L'ATTRIBUTION D'UNE PARTIE DE LA CSG ET DU DROIT DE CONSOMMATION SUR
LES ALCOOLS À LA CANAM
L'article 18 de la loi de financement de la sécurité sociale pour
1997 a affecté aux régimes obligatoires d'assurance maladie la
fraction de CSG au taux de 1 % et de 40 % du droit de consommation
sur les alcools, en contrepartie de la substitution d'un point de CSG à
1,3 point de cotisation d'assurance maladie sur les revenus d'activité.
La CANAM devait recevoir 2.946 millions de francs à ce titre en 1997 et
3.336 millions de francs en 1998
.
Un dispositif à trois étages est prévu (article
L. 139-2 du code de la sécurité sociale) :
- ces ressources sont d'abord réparties en fonction de la perte de
recettes induites pour chaque régime d'assurance maladie par la
diminution des taux de cotisation ;
- la fraction restante est ensuite répartie prioritairement, en fonction
de leurs déficits comptables, entre la CNAMTS et la CANAM (avant
attribution du produit de la C3S) ;
- enfin, le solde est, le cas échéant, réparti au prorata
du déficit comptable des autres régimes obligatoires d'assurance
maladie.
Ainsi, la CANAM est attributaire de ces ressources au titre de la
deuxième répartition
II. LES MODIFICATIONS PROPOSEES PAR LE PRÉSENT ARTICLE
Le reversement des réserves de la C3S à la CNAVTS d'une part, et
sur la CNAMTS, d'autre part, intervient indirectement, en trois
étapes :
Report du solde de la C3S sur 1998 :
Le
paragraphe I
du présent article prévoit d'abord,
à titre exceptionnel, de ne pas procéder à la
deuxième répartition du solde du produit de la C3S
constaté pour l'exercice 1997. En conséquence, comme il avait
été procédé en décembre 1996 pour le solde
disponible à l'époque, le solde du produit qui excède les
déficits comptables des régimes prioritaires (la CANAM,
l'ORGANIC, la CANCAVA et la CNREBTP) serait reporté sur 1998. Comme
indiqué plus haut, il s'agit d'un montant de 2,56 milliards de francs.
On remarquera que c'est la seconde fois en deux ans que la loi de
financement de la sécurité sociale " gèle " la
deuxième répartition et reporte sur l'année suivante le
reliquat de C3S, ce qui donne un caractère tout relatif aux termes
" à titre exceptionnel "
Le paragraphe II
précise que les déficits des régimes
de non salariés seront calculés, pour la détermination des
montants de C3S dus, en encaissements-décaissements. Il s'agit de faire
exception à la réforme comptable des régimes ORGANIC et
CANCAVA qui prévoit une comptabilité en droits constatés
(décret de mars 1997). En effet, l'année 1997 étant une
année de transition, il est difficile de mesurer l'impact exact de cette
réforme sur l'équilibre financier des différents
régimes. Le présent paragraphe remédie à cette
difficulté et facilite le passage d'une comptabilité à
l'autre.
Contribution de l'ORGANIC et de la CANCAVA au financement de la
CNAVTS :
Aux termes du paragraphe III, il est prévu que l'ORGANIC et la CANCAVA
verseront exceptionnellement et respectivement
700 et 500 millions
de francs à la CNAVTS, soit un total de 1,2 milliard de francs. La
date de ces versements ainsi que leurs modalités sont renvoyés
à un arrêté. Ils devraient en toute logique intervenir en
1998 et devraient être compensés par un relèvement à
due concurrence du versement de la C3S.
Reversement des recettes de la CANAM à la CNAMTS :
Le paragraphe IV procède à une nouvelle rédaction de
l'article L. 139-2 du code de la sécurité sociale, afin de
faire passer la CANAM du deuxième étage au troisième
étage de la répartition du produit de la fraction de CSG au taux
de 1 % et de la fraction du droit de consommation sur les alcools.
En conséquence, à partir du 1
er
janvier 1998, la
CNAMTS serait d'abord servie de façon prioritaire, et seul le reliquat
éventuel serait reversé à la CANAM qui devrait le partager
avec les autres régimes obligatoires d'assurance maladie, au prorata de
leur déficit comptable.
Cela représente une perte de ressources de 1 milliard de francs pour
la CANAM et un gain équivalent pour la CNAMTS, selon le Gouvernement. On
notera que cette estimation est sensiblement inférieure au montant des
ressources que la CANAM escomptait à ce titre pour 1998 (3,3 milliards
de francs).
Comme pour les versements exceptionnels précédents, une hausse du
montant de C3S versé à la CANAM devrait pallier la contraction de
cette ressource.
Il importe de noter que la CANAM ne perd pas de façon définitive
le bénéfice des ressources issues de la répartition de la
CSG et des droits sur les alcools, contrairement à ce qu'indique
l'exposé des motifs. En effet, l'opération consiste à
repousser le rang au titre duquel la CANAM est servie et non à l'exclure
définitivement du nombre des attributaires.
Au total, il s'agit donc bien d'un transfert de 2,2 milliards de francs du
produit excédentaire de la C3S au profit des caisses nationales
d'assurance maladie et d'assurance vieillesse des travailleurs salariés.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Sur la forme, le transfert de l'excédent de C3S au régime
général d'assurance maladie et d'assurance vieillesse est aussi
complexe qu'opaque.
Il n'est en effet que la conséquence indirecte du versement de 1,2
milliard de francs de la part de l'ORGANIC et de la CANCAVA à la CNAVTS
d'une part, et du transfert à la CNAMTS des ressources de la CANAM
issues de la répartition d'une partie de la CSG et des droits sur les
alcools, d'autre part.
C'est ainsi à travers la compensation par une
hausse des versements de C3S à hauteur des pertes de ressources
occasionnées par ces dispositions pour chacun de ces régimes, que
la réserve de C3S constatée en 1997 va être
résorbée.
Or l'objectif du Gouvernement, clairement exprimé dans l'exposé
des motifs, est bien "
d'utiliser les réserves de C3S pour
financer une partie du déficit du régime
général
". Si tel est l'objectif, il apparaîtrait
plus logique et transparent d'attribuer directement une partie du produit de la
C3S au régime général. C'est d'ailleurs l'objet d'un
amendement de la commission des affaires sociale du Sénat.
Mais
,
sur le fond, cette mesure est parfaitement contraire à
la logique de la C3S
qui a été instaurée afin de
compenser les effets de la " salarisation " croissante de la
société française sur l'équilibre financier des
régimes de non salariés.
Il convient en effet de ne pas
perdre de vue le fait que la tendance de long terme à la diminution des
professions non salariées a eu pour corollaire un accroissement de la
population salariée qui cotise au régime général,
dont l'équilibre démographique et les ressources se sont
trouvées ainsi améliorées.
Votre commission des finances réitère donc son attachement au
principe selon lequel la C3S est destinée exclusivement, et par sa
conception même, à financer les régimes d'assurance maladie
et d'assurance vieillesse des non salariés.
En conséquence, face à l'accumulation d'excédents de C3S,
deux solutions sont envisageables :
Si l'on admet le principe selon lequel, pour une année
déterminée, le produit de la C3S doit correspondre exactement aux
déficits prévisionnels des régimes attributaires, il
convient d'adapter chaque année le produit de cette taxe aux besoins
anticipés. Mais cette solution conduirait à modifier chaque
année le taux de la C3S pour ne pas faire apparaître
d'excédent. Votre commission des finances n'y est pas favorable car elle
est contraire au principe de stabilité de la fiscalité d'une
part, et ne participe pas d'une gestion à long terme, d'autre part.
Si l'on se place dans une logique de gestion prévisionnelle des
besoins de financement des régimes de non salariés, il convient
au contraire de garder en réserve les excédents de C3S
constatés pour faire face à d'éventuels déficits
futurs.
Or, l'examen des prévisions fournies par le Gouvernement en annexe du
présent projet de loi de finances
9(
*
)
montre que les trois organismes attributaires principaux de la C3S devraient
connaître des déficits dès 1999,
après
attribution de la C3S.
La CANAM devrait ainsi enregistrer un déficit
de 85 millions de francs en 1999 et de 263 millions de francs en
2000 ; l'ORGANIC devrait être déficitaire de 536 et
1.081 millions de francs pour les mêmes années ; le
déficit prévisionnel de la CANCAVA, enfin, devrait atteindre
114 millions de francs en 1999 et 271 millions de francs en 2000.
Au total, le montant des déficits cumulés des trois principaux
bénéficiaires de la C3S devrait s'élever à 2,35
milliards de francs en 2000, soit une somme légèrement
supérieure au produit de la C3S que le présent article propose
d'attribuer au régime général
.
Certes, il convient de prendre ces chiffres avec la plus grande circonspection,
l'exercice prévisionnel étant des plus délicats en
matière de finances sociales. Mais la prudence impose d'être
prévoyant et de garder en réserve les ressources
nécessaires pour compenser tout déficit futur.
Votre commission des finances vous propose donc de supprimer les paragraphes
III et IV du présent article, qui opèrent l'affectation du
produit de la C3S au régime général, et de ne conserver
que les paragraphes I et II, qui opèrent le report du solde
excédentaire de 1997 sur l'exercice 1998.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet
article ainsi modifié.
ARTICLE 12
Modification des règles de compensation maladie
bilatérale entre le régime des clercs et employés de
notaire et le régime général
Commentaire : cet article tend à modifier les
règles de compensation bilatérale entre la caisse de retraite et
de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) et la
CNAMTS, de manière à accroître de 210 millions de
francs les transferts de la première vers la seconde.
I. LA CAISSE DE RETRAITE ET DE PRÉVOYANCE DES CLERCS ET EMPLOYES DE
NOTAIRES
La caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de
notaires est un régime spécial de sécurité sociale
créé par une loi du 12 juillet 1937. Elle couvre les risques
maladie-maternité et vieillesse-invalidité-décès,
avec une séparation uniquement comptable entre les deux risques. Elle
gère également des oeuvres sanitaires et sociales.
Le régime présente la particularité de percevoir
auprès de ses 54.209 cotisants des cotisations assises sur les
salaires et les retraites dont le taux est global pour l'ensemble des risques,
la répartition par risque étant fixée par
arrêté du ministre chargé de la sécurité
sociale. L'équivalent de la cotisation patronale, qui assure
actuellement le quart des ressources du régime est une cotisation de
4 % assise sur l'ensemble des émoluments et honoraires des
études notariales.
Le taux des cotisations de la CRPCEN est plus élevé que celui
du régime général, puisqu'il s'élèveau 1er
janvier 1997 à 38,4 % sur les revenus d'activité
+ 4 % sur les honoraires, alors qu'il n'est que de 34,6 % dans
le régime général, part salariale et patronale
confondues.
Ce taux de cotisation élevé permet à la CRPCEN de servir
à des ressortissants des prestations plus avantageuses que celles du
régime général. En matière de risque maladie, il
n'y a pas de délai de carence et la prise en charge des frais
médicaux s'effectue avec un ticket modérateur d'un montant
moindre de 10 à 15 % ; en matière de risque vieillesse, les
règles sont similaires à celles de la fonction publique et la
pension peut atteindre 75 % du salaire annuel moyen. Il s'agit donc d'un
régime unique qui inclut à la fois une mutuelle maladie et un
régime complémentaire de retraite.
Outre le financement de ces prestations avantageuses, le taux
élevé des cotisations de la CRPCEN permet surtout à
celle-ci d'être équilibrée
. Selon le rapport de la
commission des comptes de la sécurité sociale, ce régime
spécial devrait, en 1997, couvrir 3,653 milliards de francs
d'emplois par 3,704 millliards de francs de ressources, soit un solde des
opérations courantes positif de 51 millions de francs.
II. LA MESURE PROPOSÉE
L'article L.134-1 du code de la sécurité sociale institue une
compensation généralisée entre le régime
général de la sécurité sociale et les
régimes spéciaux obligatoires. La compensation
"porte sur les
charges de l'assurance maladie et maternité au titre des prestations en
nature et de l'assurance vieillesse au titre des droits propres".
Par ailleurs, des dispositions législatives particulières,
rassemblées dans les articles L.134-3 et suivants du code de la
sécurité sociale, instituent des compensations bilatérales
au titre des risques maladie-maternité et invalidité entre le
régime général et les régimes de la SNCF, des
mineurs, des marins et de la RATP. Cette énumération est
exclusive.
La compensation bilatérale maladie entre le régime
général relève donc uniquement de la partie
réglementaire du code de la sécurité sociale, et figure
aux articles D.134-12 et suivants. Actuellement, le montant de la compensation
est calculée selon des règles qui tiennent compte à la
fois des différences des niveaux de prestations et des
différences des niveaux de cotisations.
Le présent article propose de donner une base légale à
la compensation bilatérale maladie et la CNAMTS et la CRPCEN, en
retenant les mêmes règles que pour la compensation
bilatérale entre le régime général et les autres
régimes spéciaux visés à l'article L.134-3.
Selon ces règles, la base de recettes retenue pour le calcul de la
compensation est constituée en appliquant des cotisations identiques
à celles du régime général à une assiette
comprenant l'ensemble des éléments composant le salaire et les
produits divers affectés au risque. Ainsi, la base de prestations
fictives ne serait plus la prestation moyenne du régime spécial
de la CRPCEN, mais la prestation légale d'assurance maladie
maternité remboursée au taux moyen du régime
général, à partir d'une cotisation de
référence alignée sur les taux de ce régime.
Le présent article vise aussi le régime spécial de la
Banque de France mais cela ne change en rien sa situation, puisque la partie
réglementaire du code de la sécurité sociale fixe
déjà des modalités de compensation analogues à
celles exposées ci-dessus. La mention de la Banque de France a pour seul
effet de donner une base légale au dispositif réglementaire
existant.
L'application de ces règles nouvelles à la CRPCEN aurait pour
effet d'accroître de 210 millions de francs le montant de son
transfert maladie vers le régime général, en le portant de
111 à 321 millions de francs.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission s'étonne tout d'abord qu'il lui soit demandé,
sans autre explication, de valider le principe du transfert bilatéral
maladie entre le régime général et le régime de la
Banque de France et la CRPCEN, qui n'avait jusqu'à présent
aucune base légale
.
Sur le fond, la justification avancée par le Gouvernement pour cette
mesure, présentée comme un simple retour au droit commun des
transferts de compensation entre le régime général et les
régimes spéciaux, n'apparaît pas sérieuse.
En effet, la CRPCEN, régime entièrement privé, ne peut
aucunement être assimilée aux régimes spéciaux
publics qui, outre des transferts de compensations consistants, sont
directement équilibrés par de subventions budgétaires.
Par ailleurs, la neutralisation des différences entre le
régime général et les régimes spéciaux a
précisément pour but de
limiter le montant des transferts
à la charge du régime débiteur
, le régime
général : dans le cas présent, cette neutralisation
aurait pour
effet inverse
d'accroître le montant des transferts
à la charge du régime débiteur, la CRPCEN.
Enfin, la CRPCEN, qui a choisi d'offrir à ses assujettis un niveau de
couverture maladie légèrement plus favorable que celui du
régime général, assure son équilibre financier
sans faire appel à aucun financement public,
mais uniquement
grâce à un
taux d'effort contributif élevé.
Il n'est pas légitime d'en tirer argument pour accroître le
montant de son transfert de compensation maladie vers le régime
général.
Cela paraît d'autant moins légitime que
le Gouvernement refuse par ailleurs de remettre à plat les avantages de
régimes spéciaux publics massivement subventionnés.
Sur le plan financier, l'application des nouvelles règles de
compensation bilatérale maladie entraînera pour la branche maladie
du régime de la CRPCEN une charge supplémentaire à
laquelle elle ne peut faire face en prenant sur ses seules réserves. Il
serait donc nécessaire de modifier la clé de répartition
des ressources en diminuant la part du risque vieillesse et d'assurer le
financement des prestations de retraite de la CPRCEN par
un
prélèvement sur les réserves de la branche vieillesse
,
qui s'élèvent à 3,2 milliards de francs.
Ainsi, à la seule fin de réduire marginalement le
déficit chronique du régime général, le
Gouvernement se propose d'accroître les transferts de compensation
maladie aux dépens du seul régime spécial qui
s'équilibre par un effort contributif important, et de le contraindre
ainsi à prélever sur les réserves qu'il a
constituées en vue de ses charges de retraite futures.
Cette proposition, dictée par des considérations de pure
opportunité, apparaît d'autant moins responsable que les
perspectives démographiques de la CRPCEN à moyen terme ne sont
pas du tout favorables.
Décision de la commission : votre commission vous propose de
supprimer cet article.
ARTICLE 13
Intégration financière du régime des
ministres des cultes au régime général
Commentaire : le présent article tend à
intégrer financièrement au régime général le
régime des ministres des cultes, structurellement déficitaire en
raison de son déséquilibre démographique.
La loi du 2 janvier 1978, codifiée aux articles L.721-1 et suivants du
code de la Sécurité sociale, a créé la caisse
autonome mutuelle d'assurance vieillesse des cultes (CAMAVIC) en charge de la
gestion du régime de retraite des ministres des cultes et des membres
des congrégations et collectivités religieuses qui ne
relèvent pas, à titre obligatoire, d'un autre régime de
sécurité sociale. La CAMAVIC gère également un
régime d'invalidité depuis 1980.
La très grande majorité (96 %) des membres affiliés
à cette caisse appartient au culte catholique.
En effet, la majorité des pasteurs, ainsi que les
rabbins, relèvent du régime général en tant que
salariés de leurs associations cultuelles.
Les ressources de la CAMAVIC, qui s'élèvent à 1,4
milliard de francs pour 1998, sont constituées à 81,6 % par des
transferts au titre de la compensation démographique, et à 14,8 %
par des cotisations. Ainsi, le régime est désormais
financé essentiellement par des ressources externes.
Malgré ces apports extérieurs, la CAMAVIC reste structurellement
déficitaire, du fait de son ratio démographique, ou rapport
nombre de cotisants/nombre de pensionnés, qui s'élève
à 0,36 seulement en 1996. Ce ratio était de 1,01 en 1979 lors de
la création du régime. Le montant du déficit
s'élèverait, pour les années 1997 et 1998, à
environ 6 % des recettes du régime.
Le nombre de cotisants diminue régulièrement, à un rythme
d'environ - 4,5 % par an. L'année 1996 a vu également une
diminution des effectifs pensionnés d'environ -0,4 %. Cette
évolution s'explique par le nombre élevé de
décès enregistrés, car 38 % des assurés sont
âgés d'au moins 75 ans, et par le tarissement des flux de nouveaux
pensionnés..
Depuis 1994, les comptes de la CAMAVIC sont
déséquilibrés et son financement n'est assuré que
par la mobilisation de ses réserves. Du reste, dans son rapport sur la
sécurité sociale 1996, la Cour des Comptes concluait :
"l'existence même du régime est en cause à
échéance de 4 à 5 ans; la survie de la protection sociale
des ministres des cultes nécessite donc une réforme".
Un groupe de travail a été constitué, associant des
représentants des principaux cultes concernés et les
administrations de tutelle, afin de proposer les modifications
législatives et réglementaires susceptibles d'assurer la
pérennité du régime.
Le présent article tend à concrétiser les conclusions de
ce groupe de travail relatives à l'intégration financière
de la CAMAVIC au régime général.
Précédemment, la branche maladie du régime des cultes
avait été de la même façon intégrée au
régime général en juillet 1987.
Une telle intégration nécessite la modification du mode actuel
de calcul des cotisations.
En effet, le montant de la cotisation annuelle dû par chaque
assuré est actuellement fixé de manière forfaitaire en
valeur absolue. La cotisation est supportée pour une part par
l'assuré et pour une autre part par l'association, congrégation
ou collectivité religieuse pour le compte de laquelle l'assuré
exerce sa mission.
L'intégration conduit à remplacer ce système par un mode
de calcul consistant à appliquer les taux de cotisation vieillesse du
régime général à une base forfaitaire égale
au SMIC. Le taux de la cotisation à la charge de l'assuré serait
donc de 6,55 % et celui de la cotisation à la charge de
l'association, congrégation ou collectivité religieuse de 9,8 %.
Il est à noter que la charge de la part de cotisation payable par ces
dernières pourrait être modulée en fonction de leur
situation démographique respective.
L'alignement sur l'effort contributif du régime général
interviendrait par voie réglementaire. Le supplément de recettes
dégagé devrait permettre à la CAMAVIC d'approcher
l'équilibre.
Les prestations seraient également alignées sur celles de
l'assurance vieillesse du régime général, sous
réserve d'adaptation en ce qui concerne l'âge de départ
à la retraite.
Un tel alignement serait favorable aux assurés et, ne concernant que
les droits à pension acquis après le 1er janvier 1998,
engendrerait une montée en charge très progressive.
Cette mesure, effective au 1
er
janvier 1998, aurait pour
contrepartie l'affectation à la Caisse nationale d'assurance vieillesse
des travailleurs salariés (CNAVTS) des réserves dont dispose la
CAMAVIC, qui devraient s'élever à 310 millions de francs au 31
décembre 1997.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 14
Suppression du régime
spécial de l'ancienne
chambre de commerce et d'industrie de
Roubaix
Commentaire : cet article tend à l'absorption
par le régime général du régime spécial de
retraite de l'ancienne chambre de commerce et d'industrie de Roubaix.
I. UNE OPÉRATION DONT LES PARAMÈTRES SEMBLENT MAL CONNUS
Le régime spécial de retraite de l'ancienne chambre de commerce
et d'industrie de Roubaix a été clos le 1er janvier 1967,
à la suite de la fusion des chambres de commerce et d'industrie de
Lille, Roubaix et Tourcoing intervenue en juillet 1996.
Seuls les
agents recrutés antérieurement à cette date continuent de
relever de ce régime en voie d'extinction, le personnel embauché
par la nouvelle chambre de commerce et d'industrie unique relevant du
régime général de sécurité sociale.
La situation démographique exacte du régime spécial de
l'ancienne chambre de commerce et d'industrie de Roubaix semble assez
mystérieuse. Si l'on en croit le rapport fait par M. Denis Jacquet
au nom de la commission des affaires culturelles et sociale de
l'Assemblée nationale, il ne compterait plus que
9 cotisants
10(
*
)
. Si l'on en croit le
rapport fait par M. Augustin Bonrepaux au nom de la commission des finances de
l'Assemblée nationale
11(
*
)
, il
comporterait "
6 actifs, 117 retraités et 119 futurs
retraités".
Enfin, si l'on s'en tient à la liste des
régimes obligatoires de base de sécurité sociale
présentée l'an dernier en annexe de la loi de financement pour
1997, en application de l'article LO 111-4 du code de la
sécurité sociale, ce régime à
géométrie variable comporterait 0 actifs cotisants et
111 retraités, dont 95 de droits propres.
La charge
annuelle des pensions du régime serait de 6,1 millions de
francs.
Le présent article propose de supprimer, à compter du
1er janvier 1998, le régime spécial de l'ancienne chambre de
commerce et d'industrie de Roubaix, ses ressortissants actifs et
retraités étant affiliés au régime
général et aux régimes de retraite complémentaires.
Les obligations contractées par l'ancienne chambre de commerce et
d'industrie de Roubaix seraient transférées au régime
général, dans la limite des propres règles de ce dernier
pour l'âge d'ouverture des droits, la durée de cotisation et le
montant maximal de la pension. La fraction des pensions excédant cette
base servie par le régime général serait prise en charge
par les régimes complémentaires.
Le bouclage financier de l'opération serait assuré, d'une part,
par le versement d'une contribution, sorte de droit d'entrée, de la
chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing au régime
général et, d'autre part, par des cotisations de celle-ci aux
régimes complémentaires de retraite.
Le montant de la contribution "pour solde de tous comptes" au régime
général, qui serait fixé par décret, devrait
s'élever à 28,6 millions de francs, selon le
ministère de l'emploi et de la solidarité.
Compte tenu d'une charge de pensions annuelle d'environ 6 millions de
francs, ce montant correspond, en total non actualisé, à moins de
5 années de fonctionnement du régime existant.
Votre rapporteur pour avis relève que cette somme apparaît
excessivement modeste, sauf à spéculer sur une espérance
de vie fâcheusement courte des retraités de l'ancienne Chambre de
commerce et d'industrie de Roubaix.
II. LA NÉCESSITÉ D'UN EXAMEN D'ENSEMBLE DES RÉGIMES EN
VOIE D'EXTINCTION
Votre commission n'est pas opposée au principe de la mesure
proposée par le présent article, car il est toujours souhaitable
de simplifier la structure institutionnelle inutilement fragmentée de
notre système de protection sociale.
Néanmoins, elle considère qu'il n'est pas de bonne
méthode de procéder ainsi ponctuellement, sans bien
connaître tous les tentants et aboutissants de l'opération, alors
que le régime de l'ancienne chambre de commerce et d'industrie de
Roubaix n'est pas le seul dans sa situation.
En effet, la liste des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale annexée au projet de loi de financement
de l'an dernier montre qu'il existe, en dehors du cas particulier des
104 régimes spéciaux d'Alsace et de Moselle,
8 régimes spéciaux en voie d'extinction.
Le cas du régime de la SEITA est un peu à part,.
car sa privatisation par la loi n° 94-1135 du 27 décembre
1994 s'est accompagnée du maintien de la garantie de l'Etat pour les
retraites des personnels recrutés avant l'accès de cet ancien
établissement public industriel et commercial au statut de
société en 1980.
Cette garantie de l'Etat est posée par l'article 6 de la loi
n° 84-603 créant une société nationale
d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes. Elle se traduit par le
versement d'une subvention budgétaire inscrite au budget des Charges
communes. Le régime de retraite de la SEITA est le seul qui comporte
encore des actifs cotisants, au nombre de 3.932 pour un effectif de
retraités s'élevant à 11.004.
Mais, les autres "micro-régimes" spéciaux de retraite en voie
d'extinction, parce que clos, sont dans des situations vraisemblablement
comparables à celles du régime spécial de l'ancienne
chambre de commerce et d'industrie de Roubaix.
Un examen d'ensemble de ces régimes s'impose donc, avant toute mesure
ponctuelle.
Votre commission vous propose donc de surseoir, à titre conservatoire,
à la suppression du régime spécial de la chambre de
commerce et d'industrie de Roubaix et de demander au Gouvernement de
présenter, à l'appui de la loi de financement de la
sécurité sociale de l'an prochain, un rapport :
- analysant la situation de chacun des régimes spéciaux de
retraite en voie d'extinction ;
- déterminant des règles communes pour leur
éventuelle absorption par un autre régime de
sécurité sociale ;
- et évaluant, pour chacun des régimes concernés, les
incidences financières de leur absorption éventuelle.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
cet article dans la rédaction qu'elle vous propose.
ARTICLE 15
Prévision des recettes par
catégories
Commentaire : cet article retrace les prévisions de
recettes pour 1998, par catégories, de l'ensemble des régimes
obligatoires de base et des organismes créés pour concourir
à leur financement.
Le présent article distingue sept catégories de recettes.
Les cotisations effectives sont celles effectivement
prélevées sur les salaires, les revenus de remplacement et les
revenus des entrepreneurs individuels, ainsi que les cotisations prises en
charge par l'Etat dans le cadre de la politique de l'emploi. En revanche, elles
n'incluent pas les cotisations des praticiens et auxiliaires médicaux
prises en charge par les caisses d'assurance maladie qui, constituant à
la fois des recettes et des dépenses pour la sécurité
sociale, sont consolidées.
Les cotisations fictives correspondent aux prestations fournies
directement à leurs agents par les employeurs publics (Etat, SNCF, RATP
et Banque de France), qui sont ainsi équilibrées comptablement.
Les contributions publiques correspondent aux subventions
d'équilibre versées par le budget de l'Etat à certains
régimes spéciaux (36 milliards de francs) et au
remboursement de certaines prestations servies par les régimes de
sécurité sociale pour le compte de l'Etat, principalement
l'allocation aux adultes handicapés (24,8 milliards de francs), le RMI
restant en dehors du champ de la loi de financement.
Les impôts et taxes affectés sont ceux directement
affectés aux régimes de base de sécurité sociale,
ainsi que ceux qui constituent les ressources du fonds de solidarité
vieillesse, dont les régimes sont les destinataires finaux.
Les transferts reçus ne tiennent pas compte des transferts de
compensation démographique entre les régimes de
sécurité sociale, dont le solde est nul par construction. Ils ne
tiennent pas compte non plus des transferts provenant du fonds de
solidarité vieillesse, qui ont pour contrepartie des impôts et
taxes affectés déjà pris en compte dans la
catégorie précédente de recettes.
Les revenus des capitaux résultent des excédents de
trésorerie et des réserves des régimes de
sécurité sociale.
Les autres ressources recouvrent principalement les recours contre tiers
(6 milliards de francs) et les recettes provenant des départements
d'outre-mer (17 milliards de francs). En effet, la ventilation des
recettes DOM entre les différentes catégories n'est pas connue
avec précision.
Les prévisions de recettes de l'ensemble des régimes obligatoires
de base sont fixées par le présent article à
1.723 milliards de francs pour 1998, selon le détail suivant :
Cotisations effectives 1.034,1
Cotisations fictives 186,9
Contributions publiques 62,0
Impôts et taxes affectés 403,0
Transferts reçus 4,6
Revenus des capitaux 1,3
Autres ressources 31,1
Total des recettes
1.723,0
Le tableau ci-dessous retrace les évolutions des catégories de
ressources par rapport à la loi de financement de l'an dernier :
L'impact du basculement des cotisations maladie sur la CSG
est
très net : il se traduit par une diminution des cotisations
effectives de 1.152,1 milliards de francs en 1997 à
1.034,1 milliards de francs pour 1998, soit une baisse de 10,2 %. En
contrepartie, les impôts et taxes affectées augmentent de
223,6 milliards de francs en 1997 à 403 milliards de francs
pour 1998, soit une augmentation de 80 %.
La diminution de 3 % des contributions publiques s'explique par
l'érosion spontanée des subventions d'équilibre de l'Etat
aux régimes spéciaux de retraite. La diminution d'un quart des
revenus des capitaux résulte simplement d'une estimation plus
réaliste de cette catégorie de ressources par rapport à
l'an dernier, où elle avait été évaluée
à 1,8 milliard de francs, alors qu'elle ne devait finalement
s'élever qu'à 1,4 milliard de francs en 1997.
Votre commission vous propose un amendement tendant à réduire
de 1,4 milliard de francs la ligne "cotisations effectives", qui
passerait
ainsi de 1.034,1 milliards de francs à 1.032,7 milliards de
francs pour 1998
. Il s'agit d'un amendement de conséquence de sa
position sur la branche accidents du travail, précédemment
exprimée dans les commentaires de l'article 9 du présent
projet de loi de financement.
La branche accident du travail du régime général est en
effet présentée par le Gouvernement en excédent de
1,4 milliard de francs pour 1998,
à taux de cotisations
inchangés par rapport à 1997.
Or, cette hypothèse de
taux de cotisations inchangés est fausse si l'on s'en tient à la
lettre de l'article L.242-5 du code de la sécurité sociale,
qui fait obligation aux gestionnaires de la branche accident du travail de
maintenir ou rétablir son équilibre en ajustant les taux de
cotisations, mais pas de dégager des excédents.
Le loi de financement de l'année 1998 ne peut donc pas prévoir
des excédents pour la branche accident du travail, sauf à imposer
aux gestionnaires de la branche de fixer des taux inutilement
élevés au regard des dépenses prévisionnelles. Il
ne s'agit que de rétablir la sincérité des comptes
présentés par le Gouvernement.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi rectifié.
ARTICLE 19
Mise sous conditions de ressources des
allocations familiales
Commentaire : cet article tend à créer un
plafond de ressources pour les allocations familiales, qui serait fixé
à 25.000 francs pour un couple, avec des majorations de 7.000 francs
pour les couples biactifs ou les familles monoparentales et de 5.000 francs par
enfant à partir du troisième.
I. LA MESURE PROPOSEE
Le premier alinéa du
paragraphe I
du présent article
complète l'article L. 521-1 du code de la sécurité
sociale, qui dispose simplement, dans sa rédaction actuelle, que
"les
allocations familiales sont dues à partir du deuxième enfant
à charge résidant en France."
Un deuxième alinéa pose le principe d'un plafond de ressources,
fixé par décret, et de sa modulation en fonction du nombre
d'enfants.
Un troisième alinéa pose le principe de la majoration du plafond
lorsque les deux membres du couple disposent d'un revenu professionnel ou que
la charge des enfants est assurée par une personne seule.
L'Assemblée a complété le texte proposé pour
l'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale par un
alinéa selon lequel
"les événements susceptibles de
modifier le revenu professionnel tels que divorce, décès ou
chômage sont,
dans les meilleurs délais
, pris en compte
pour l'attribution de ces allocations".
L'objectif de cette disposition
paraît louable, mais son caractère réellement normatif
douteux.
Le cinquième alinéa prévoit l'indexation du plafond de
ressources sur l'indice des prix hors tabac, comme la BMAF, et le
sixième alinéa pose le principe d'allocations
différentielles lorsque les ressources du couple n'excèdent le
plafond que d'un montant limité, afin de prévenir les effets de
seuil.
Le
paragraphe II
transpose ces règles à l'article L.
755-11, qui définit les allocations familiales dans les
départements d'Outre-mer. En effet, le régime des prestations
familiales dans les DOM est spécifique : les allocations familiales sont
versées dès le premier enfant, tandis que les prestations sous
conditions de ressources sont versées avec des plafonds
inférieurs de 10,39 % à ceux de la Métropole.
L'Assemblée nationale a modifié le texte initial afin que les
plafonds de ressources soient strictement identiques en Métropole et
dans les DOM, alors que le Gouvernement avait fait part de son intention de
fixer des plafonds de ressources inférieurs pour les DOM.
Le
paragraphe IV
étend les règles de plafonnement des
allocations familiales aux personnels de l'Etat et des collectivités
locales visés à l'article L. 755-10 du code de la
sécurité sociale.
Selon les indications fournies par le Gouvernement, le plafond de ressources et
ses majorations seront fixés par voie réglementaire aux niveaux
suivants :
- 25.000 francs pour le revenu net mensuel au-delà duquel les
allocations ne seront plus versées ;
- 7.000 francs pour la majoration prévue au bénéfice des
couples biactifs et des familles monoparentales ;
- 5.000 francs pour la majoration prévue pour chacun des enfants
à partir du troisième.
Le jeu combiné de ces règles aboutirait aux seuils d'exclusion
suivants :
Seuils d'exclusion des allocations familiales
Famille monoactive |
2 enfants |
3 enfants |
4 enfants |
Plafond à partir duquel les allocations sont réduites par un mécanisme différentiel |
300.000 F |
360.000 F |
420.000 F |
Seuil de suppression des allocations |
311.083 F |
385.300 F |
459.500 F |
Famille biactive ou monoparentale |
2 enfants |
3 enfants |
4 enfants |
Plafond à partir duquel les allocations sont réduites par un mécanisme différentiel |
384.000 F |
444.000 F |
504.000 F |
Seuil de suppression des allocations |
395.083 F |
469.300 F |
543.500 F |
Enfin, le
paragraphe V,
qui a été
ajouté par l'Assemblée nationale, dispose que
"la mise en
oeuvre d'un plafond de ressources pour le versement des allocations familiales
prévue au présent article est transitoire.
Elle s'appliquera jusqu'à ce que soit décidée une
réforme d'ensemble des prestations et des aides fiscales aux familles,
que le Gouvernement mettra en oeuvre, dans un objectif de justice et de
solidarité, après avoir réorienté le système
existant."
Cette déclaration d'intention dépourvue de toute portée
normative n'a évidemment pas sa place dans le code de la
sécurité sociale. Mais elle traduit le fait que le Gouvernement
n'a pas convaincu sa propre majorité, et que celle-ci a voté la
mise sous conditions de ressources des allocations familiales avec des remords.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
La mesure qui fait l'objet du présent article a été
présentée par le Gouvernement comme une mesure "de
solidarité" alors qu'il s'agit manifestement d'une mesure de pure
économie, dont le rendement attendu s'élève à 4
milliards de francs.
Votre commission des finances a bien conscience de la
gravité de la situation financière de la branche famille, mais
estime que les mesures nécessaires pour réduire son
déficit prévisionnel
de -11,8 milliards de francs ne
peuvent pas se limiter à une redistribution entre les familles les plus
modestes et les familles aisées.
Par ailleurs, le Gouvernement a délibérément ignoré
l'avis des organisations principalement intéressées. En effet, la
CNAF, par la voix de son président, M. Jean-Paul Brobst, a
exprimé sa préférence pour une fiscalisation des
allocations familiales, dont le produit estimé à 6 milliards de
francs serait ensuite recyclé au profit de la branche famille d'une
manière ou d'une autre. Pour sa part, l'UNAF a présenté
des contre-propositions tendant à maintenir les allocations sans
condition de ressources et à moduler le plafond du quotient familial.
Enfin, sur le fond, la mesure proposée par le présent article
apparaît contraire aux fondements de la politique familiale, qui repose
sur une logique d'équité horizontale, pour un même niveau
de revenu, entre ceux qui ont des enfants et ceux qui n'en ont pas.
Votre rapporteur pour avis veut citer à ce propos un extrait de
l'analyse consacrée dernièrement au plafonnement des allocations
familiales par l'OFCE
12(
*
)
, organisme qui n'est
pas réputé systématiquement hostile à la politique
du Gouvernement :
"Le projet de plafonnement des allocations familiales
soulève la question de la situation des familles avec enfants, de
revenus moyens ou élevés. Certains estiment qu'en période
d'aggravation de la fracture sociale et de difficultés des finances
publiques il serait souhaitable de supprimer leurs allocations familiales (qui
déjà ne représentent qu'une faible part de leur revenu) et
de remettre en cause le quotient familial pour concentrer l'aide sur les plus
pauvres (ou pour réduire le déficit public).
Pourtant, la comparaison avec les personnes sans enfants de même niveau
de salaires montre que ces familles ne sont en rien favorisées : l'aide
apportée par les allocations est faible par rapport au coût des
effectif des enfants ; le quotient familial correspond à la logique de
l'impôt progressif et non pas à un privilège fiscal.
Certes, ces familles ne sont pas les plus à plaindre, mais elles ne
bénéficient en rien d'allocations exorbitantes ou de
privilèges fiscaux. En plus de leur travail, elles contribuent à
préparer les générations futures.
Il serait
profondément malsain que les cadres subissent des pertes de niveau de
vie trop importantes en ayant des enfants. La société a besoin
d'enfants à tous les niveaux de revenus
. Le plafonnement des
allocations familiales aurait pour effet d'aggraver la disparité des
niveaux de vie entre cadres, avec et sans enfants."
Décision de la commission : votre commission vous propose la
suppression de cet article.
ARTICLE 20
Réduction du taux de
l'allocation de garde d'enfant à domicile
Commentaire : Cet article tend à réduire de
100 % à 50 % le taux de prise en charge des cotisations familiales par
l'AGED, tout en maintenant un taux de 75 % pour les ménages aux revenus
inférieurs à 300.000 francs.
I. LA MESURE PROPOSEE
L'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) a été
créée en 1986 afin d'apporter une aide financière aux
parents exerçant une activité professionnelle et employant
à domicile une personne pour assurer la garde de leur enfant.
Cette allocation consiste dans la prise en charge directe par la CNAF, selon un
système de tiers payant, des cotisations sociale afférentes au
salaire de la personne employée à domicile, dans la limite d'un
montant maximal.
Créée dans les limites de 50 % des cotisations sociales et de
2.000 F maximum, l'AGED a été étendue par la loi du 25
juillet 1994 relative à la famille sur les deux points suivants :
- extension aux enfants âgés de 3 à 6 ans ;
- relèvement à 100 % du taux de prise en charge des
cotisations sociales par l'AGED.
Au 1
er
janvier 1997, le montant maximal de l'AGED
s'élève à 12.836 francs par trimestre, soit environ
4.000 francs par mois, pour la garde d'un enfant de moins de trois ans. Si
l'enfant est âgé de plus de trois ans, ou si l'AGED est
cumulée avec l'allocation parentale d'éducation à taux
partiel, ce plafond est diminué de moitié pour atteindre 6.418
francs par trimestre.
Le
paragraphe I
du présent article modifie l'article L. 842-2 du
code de la sécurité, qui détermine le montant de l'AGED,
en disposant que celui-ci est égal
"à une fraction,
fixée par décret, du montant des cotisations patronales et
salariales".
Ce plafond serait donc fixé à 50 % des cotisations.
Le
paragraphe II,
introduit par l'Assemblée nationale dans le
texte initial, prévoit que le taux de prise en charge de l'AGED et son
montant maximal seront majorés pour les ménages dont les
ressources sont inférieures à un plafond fixé par
décret, lorsque l'enfant est âgé de moins de trois ans.
Il s'agit d'une atténuation demandée par la commission des
affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale.
Pour les familles dont les ressources sont inférieures à 300.000
francs, l'AGED serait ainsi maintenue au taux de 75 %.
Le Gouvernement, en
acceptant cet amendement, a ainsi implicitement reconnu les
inconvénients de la mesure qu'il proposait.
Le
paragraphe IV
prévoit l'indexation des plafonds de l'AGED sur
l'indice des prix hors tabac.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Le Gouvernement propose de rogner une prestation familiale qui a
rencontré, depuis son extension en 1994, un succès qui a
dépassé les prévisions des promoteurs de la loi relative
à la famille : alors que le surcoût lié à
l'extension de l'AGED avait été à l'époque
estimé à 264 millions de francs pour 1997, il devrait
atteindre en fait cette année 964 millions de francs, sur un
coût total de 2,145 milliards de francs .
Votre commission des finances estime néanmoins que ce
dépassement des prévisions n'est pas un signe de dérive,
mais simplement le révélateur du fait que l'AGED répond
parfaitement à une demande des familles qui n'était pas
jusqu'alors satisfaite
. Comme pour la mise sous condition de ressources des
allocations familiales, le Gouvernement invoque des arguments
d'équité et de solidarité, alors qu'il cherche simplement
à réaliser des économies, ce qui n'est pas en soi honteux,
à condition de bien cibler celles-ci. Or, tel n'est pas le cas avec la
mesure proposée.
Certes, l'AGED est réservée aux familles aisées, puisque
le niveau de revenu moyen de ses allocataires était en 1995 de 327.000
francs, à comparer avec un revenu moyen pour l'ensemble de la population
de 141.000 F.
Mais elle répond aux besoins spécifiques d'une
certaine catégorie de femmes actives, dont les responsabilités
professionnelles s'accordent mal avec les contraintes horaires des modes de
garde collectifs.
La richesse du système français de
prestations familiales réside précisément dans cette
diversité - parfois excessive - qui lui permet d'offrir une prestation
adaptée pour chacune des catégories de mères.
Enfin, l'argument du taux excessif de prise en charge de la dépense
n'apparaît pas pertinent. Dans son rapport sur la sécurité
sociale de septembre 1996, la Cour des comptes avait observé que le
cumul de l'AGED avec la réduction d'impôt pour emplois à
domicile pouvait aboutir, dans certains cas limites, à ce que la
collectivité prenne en charge jusqu'à 70 % du coût total de
l'emploi, dont 50 % du salaire net.
Ce taux de prise en charge sera déjà sensiblement réduit
par la diminution de 45.000 francs à 22.500 francs de la
réduction d'impôt pour emplois à domicile proposée
par l'article du projet de loi de finances pour 1998. Par ailleurs, l'AGED
devient moins coûteuse que les modes de garde collectifs, dès lors
qu'il y a plus d'un enfant à garder.
Décision de la commission : votre commission vous propose la
suppression de cet article.
ARTICLE 23
Validation de la nomenclature
applicable aux actes de scanographie
Commentaire : cet article tend à valider l'ensemble
des décisions individuelles de cotation des actes de scanographie prises
conformément à la nomenclature provisoire adoptée par voie
ministérielle depuis 1991.
I. LA NOMENCLATURE APPLICABLE AUX ACTES DE SCANOGRAPHIE
L'arrêté du 27 mars 1972 modifié fixe la nomenclature
générale des actes professionnels des médecins,
chirurgiens-dentistes, sages-femmes et auxiliaires médicaux. En outre,
il prévoit, pour les actes ne figurant pas à la nomenclature en
raison de l'évolution de la technique médicale, la
possibilité d'une cotation provisoire, déterminée par les
ministres chargés de la santé, de la sécurité
sociale et de l'agriculture conjointement et pour une durée d'un an
renouvelable.
Ainsi, l'arrêté du 16 mars 1978 a ajouté à la
nomenclature générale, à titre provisoire, les actes de
scanographie en leur attribuant la cotation Z. 90. Cet arrêté
a été explicitemnt abrogé par un arrêté du
11 juillet 1991. Une circulaire du même jour des ministres
chargés de la santé, de la sécurité sociale, de
l'agriculture et de la forêt a remplacé cette cotation provisoire
en dissociant, pour le calcul de la rémunération, d'une part
l'acte intellectuel rémunéré par les honoraires
(Z. 19) et, d'autre part, l'amortissement du matériel
financé par un forfait technique.
En 1992, une circulaire interministérielle a fixé la cotation
provisoire des actes de scanographie pour l'année en cours et, à
partir de 1993, celle-ci a été fixée par
arrêté.
Or, le conseil d'Etat, dans un arrêt du 4 mars 1996, a
annulé la circulaire du 11 juillet 1991 portant cotation provisoire
des actes de scanographie au motif qu'à la date de sa publication, les
actes de scanographies étaient couramment pratiqués depuis
plusieurs années et ne pouvaient plus être
considérés comme relevant du champ d'application des cotations
provisoires.
Le conseil d'Etat a également annulé le même jour
l'arrêté du 11 juillet 1991 modifiant la nomenclature
générale des actes professionnels et portant abrogation des
dispostions de l'arrêté du 16 mars 1978 au motif qu'il avait
été pris par une autorité incompétente.
En conséquence, les médecins-radiologues pourraient s'appuyer
sur cette jurisprudence pour faire annuler tous les actes réglementaires
pris après 1991 et portant cotation provisoire ainsi que les
décisions individuelles en résultant.
En outre, ils pourraient
réclamer le paiement de la différence entre l'ancienne et la
nouvelle cotation.
Pour éviter le développement d'un tel contentieux, cet article
propose de valider l'ensemble des actes pris en application des
décisions annulées et, de façon préventive,
l'ensemble des actes pris sur le fondement des arrêtés portant
cotation provisoire.
II. LA JUSTIFICATION DE LA VALIDATION
Dans sa décision n °80-119 DC du 22 juillet 1980, le
Conseil constitutionnel a admis la constitutionnalité des lois de
validation qui, sauf en matière pénale, permettent au
législateur de prendre des mesures rétroactives et cela,
notamment, "
afin de régler, comme lui seul peut le faire, les
situations nées de l'annulation
" d'un acte administratif.
L'exercice du pouvoir de validation doit, toutefois, satisfaire à des
exigences constitutionnelles.
D'une part, le législateur doit respecter les exigences du principe de
séparation des pouvoirs et s'abstenir tant de valider les actes
mêmes qui ont été annulés, que de faire obstacle
à l'exécution des actes annulés par des décisions
juridictionnelles "
passées en force de chose jugée
".
D'autre part, la validation doit être justifiée par des raisons
d'intérêt général. A cet égard, le conseil
constitutionnel a estimé, dans sa décision n °95-369 DC
du 28 décembre 1995 sur la loi de finances pour 1996, que "
la
seule considération d'un intérêt financier
" ne peux pas
donner à une validation un motif d'intérêt
général autorisant le législateur à faire obstacle
aux effets d'une décision de justice.
En l'espèce, la première condition est respectée puisque
la validation proposée exclut de son champ d'application les
décisions de justice passées en force de chose jugée.
En revanche, la réalité d'un intérêt
général à préserver est plus discutable. En effet,
cette validation tend surtout à éviter le développement
d'un contentieux qui pourrait entrainer une charge financière de
600 millions de francs pour l'assurance-maladie. Cette somme est certes
importante, mais elle correspond à moins de 0,09 % des
dépenses de la branche maladie prévues pour 1998, qui
s'élèvent à 678,3 milliards de francs.
L'équilibre financier ne serait donc pas affecté au point de
remettre en cause la continuité de la mision de service public de cette
branche.
Le ministère de l'emploi et de la solidarité fait toutefois
remarquer que ces 600 millions de francs correspondent à la
moitié du fonds de prévention de la CNAM. En outre, le
Gouvernement a régularisé la situation par l'arrêté
du 30 mai 1997 modifiant la nomenclature générale des actes
professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes
et des auxiliaires médicaux et portant cotation des actes de
scanographie. Enfin, et cela paraît décisif, l'arrêt du
Conseil d'Etat est fondé sur un motif de pure forme, le niveau de la
cotation des actes de scanographie n'étant pas contesté sur le
fond.
Décision de la commission : votre commission émet un avis
favorable à l'adoption de cet article sans modification.
ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 23
Gel
des dépenses de gestion administrative du régime
général
Commentaire : cet article additionnel tend à
limiter, pour 1998, les budgets de gestion administrative du régime
général aux montants atteints en 1997.
I. LA DERIVE DES DEPENSES DE GESTION DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE
L'annexe C du présent projet de loi de financement, relative aux
recettes et dépenses des régimes de base, montre que les frais de
gestion de l'ensemble des régimes de sécurité sociale
devraient s'élever, pour 1998, à 62,6 milliards de francs,
soit 3,4 % du total de leurs emplois.
Encore faut-il préciser que les frais de gestion des régimes dits
"d'employeurs", c'est-à-dire sans autonomie juridique ni comptable,
n'apparaissent pas dans les comptes présentés en loi de
financement de la sécurité sociale. Le principal de ces
régimes est celui des fonctionnaires de l'Etat, dont les coûts de
gestion sont imputés au budget général sans être
clairement identifiés.
Pour le seul régime général, l'évolution des frais
de gestion, depuis 1995, est la suivante :
On constate qu'après un effort de modération en
1997, les frais de gestion administrative du régime
général devrait pour 1998 reprendre leur tendance
antérieure à croître plus rapidement que les
dépenses de prestations.
Votre rapporteur rappelle que le plan de redressement financier de la
sécurité sociale présenté en novembre 1995 par le
Premier ministre prévoyait que les caisses de sécurité
sociale réaliseraient des économies sur leurs coûts de
gestion de 1,5 milliard de francs en 1996 et de 2 milliards de francs
en 1997.
Or, comme le souligne le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale de septembre 1997, ces économies n'ont
pas été réalisées
. Par rapport aux
prévisions, les dépenses de gestion du régime
général ont été dépassées de
1,6 milliard de francs en 1996 et de 1,2 milliard de francs en
1997.
Le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale
avance plusieurs raisons pour expliquer ce dépassement.
Tout d'abord, les prévisions 1996 et 1997 ont été
établies à partir de l'exécution constatée en 1995,
majorée de l'évolution de l'indice des prix retenue par la loi de
finances pour le budget de l'Etat et diminuée de l'effet attendu des
économies du plan de novembre 1995. Cette approche supposait que les
budgets effectivement accordés progressent selon ces évolutions
et que leur taux d'exécution soit constant.
Or, l'ensemble des budgets de gestion administrative des caisses s'inscrit
depuis plusieurs années dans un cadre pluriannuel. Cette
pluriannualité donne une souplesse accrue dans l'utilisation des
budgets, notamment par
le mécanisme du report des excédents
d'une année sur l'autre
, mais il rend difficile
l'établissement de prévisions fiables des dépenses
annuelles.
Par ailleurs, plusieurs éléments non prévisibles peuvent
intervenir en cours de gestion. Ainsi, par exemple, en 1996 la CNAMTS a
procédé à la mise en place du carnet de santé,
alors que cette dépense n'avait pas été prévue
initialement. De plus, l'amélioration des taux d'exécution ou le
report d'excédents d'une année sur l'autre sont fluctuants et ne
peuvent, de fait, qu'être constatés en fin d'exercice. Ainsi, le
décalage entre les prévisions d'évolution et la
réalisation apparaît pratiquement inéluctable.
L'action engagée par les caisses pour se conformer à la
décision de novembre 1995 a, ainsi, principalement porté sur les
investissements et les reports d'excédents sans affecter directement les
dépenses de fonctionnement, afin de préserver les dépenses
de personnels.
Certes, le rapport de la Commission des comptes de la sécurité
sociale relève que cette mesure a permis de freiner très
fortement l'évolution des dépenses, puisque la progression des
dépenses de gestion administrative de la CNAF en 1996 par rapport
à 1995 est de 4,9 %, alors qu'elle aurait été de
7,06 % sans la mise en oeuvre du plan d'économie. La progression
des dépenses de gestion de la CANAMTS et de la CNAVTS a également
été ralentie, mais dans une moindre mesure, leurs dépenses
ayant déjà des taux d'évolution inférieurs à
celles de la CNAF.
Quoiqu'il en soit, votre commission estime indispensable que les
administrations sociales participent à l'effort d'économie qui
est par ailleurs demandé aux administrations de l'Etat et aux services
des collectivités locales.
II. LE PARLEMENT DISPOSE DES MOYENS JURIDIQUES DE MAÎTRISER CETTE
DÉRIVE
Grâce au plan de réforme de la sécurité sociale
promu par M. Alain Juppé, le Parlement est désormais
doté des moyens d'influer sur les dépenses de gestion des
organismes du régime général.
En effet, l'ordonnance n° 96-344 du 24 avril 1996, portant mesures
relatives à l'organisation de la sécurité sociale, pose le
principe de l'encadrement des budgets pluriannuels de gestion administrative
des trois caisses nationales du régime général et de
l'ACOSS par les
conventions d'objectifs et de gestion
conclues entre
celles-ci et l'Etat.
Ces conventions d'objectifs et de gestion doivent tenir compte des lois de
financement de la sécurité sociale, comme cela résulte
explicitement du premier alinéa de l'article L 227-1 du code de la
sécurité sociale : "
Dans le respect des lois de financement
de la sécurité sociale
, l'autorité
compétente de l'Etat conclut respectivement avec la Caisse nationale de
l'assurance-maladie des travailleurs salariés, la Caisse nationale
d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, la Caisse nationale
des allocations familiales et l'Agence centrale des organismes de
sécurité sociale des conventions d'objectifs et de gestion
comportant des engagements réciproques des signataires
."
Une procédure de révision des conventions d'objectifs et de
gestion en cours est par ailleurs prévue par les deux derniers
alinéas du I de l'article précité, qui dispose que ces
conventions déterminent :
"1° Les conditions de conclusion
des avenants en cours d'exécution de chaque convention,
notamment en
fonction des lois de financement de la sécurité sociale
et
des modifications importantes de la charge de travail des organismes
liées à l'évolution du cadre législatif et
réglementaire de leur action ; "2° Le processus d'évaluation
contradictoire des résultats obtenus au regard des objectifs
fixés".
Ainsi, si le Parlement fixe, pour les dépenses de gestion des
organismes de sécurité sociale entrant dans le champ de l'article
L 227-1 du code de la sécurité sociale, un objectif dans la loi
de financement de l'année,
cet objectif devra être
répercuté par voie d'avenant dans les conventions d'objectifs et
de gestion qui lient l'Etat et ces organismes.
Par le présent article additionnel, votre commission vous propose,
compte tenu de la dérive constatée au cours des deux exercices
antérieurs, de geler pour 1998 les budgets de gestion administrative de
la CNAMTS, de la CNAVTS, de la CNAF et de l'ACOSS aux montants atteints en 1997.
Les dépenses de gestion des caisses seraient ainsi ramenées de
48,3 milliards de francs à 47,1 milliards de francs, soit une
économie de 1,2 milliard de francs.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter
l'article additionnel qu'elle vous propose.
ARTICLE 23 BIS
Objectifs de dépenses par branche
Commentaire : cet article tend à fixer les
objectifs de dépenses par branche de l'ensemble des régimes
obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou
retraités titulaires de droits propres.
Dans le projet de loi de financement initial, cet article figurait à la
suite de l'article 15 relatif aux prévisions de recettes, et avant
l'article 17 relatif aux plafonds de trésorerie des régimes
de base de sécurité sociale. Alors que ces trois articles
figuraient en tête du projet de loi de financement l'an dernier, le
Gouvernement a voulu cette année les insérer entre les
dispositions relatives aux recettes et les dispositions relatives aux
dépenses, sur le modèle des lois de finances.
L'Assemblée nationale a jugé opportun de modifier la structure de
la loi de financement de la sécurité sociale proposée par
le Gouvernement, en reportant à la fin de son texte les objectifs de
dépenses et les plafonds de trésorerie.
Votre rapporteur n'est pas certain que la loi de financement y gagnera en
lisibilité. Il rappelle que l'article d'équilibre de la loi de
finances, que le Gouvernement avait souhaité transposer aux lois de
financement, a d'abord une fonction politique : il permet au Parlement,
à l'issue de l'examen de la première partie de la loi de
finances, de prendre acte du montant des recettes disponibles pour le budget de
l'Etat ainsi que du montant du déficit autorisé, avant de
s'engager dans la discussion de la seconde partie relative aux dépenses.
La solution retenue par l'Assemblée nationale, qui déconnecte les
recettes et les dépenses, semble admettre en quelque sorte que le
déficit de la sécurité sociale soit, non pas un choix
politique, mais la simple résultante des évolutions
spontanées et divergentes de recettes insuffisamment dynamiques et de
dépenses mal maîtrisées.
Les quatre branches qui ont été retenues pour la
détermination des objectifs de dépenses sont celles existant au
sein du régime général : maladie - maternité -
invalidité - décès ; accidents du travail ;
vieillesse ; famille.
Comme pour les recettes, cette nomenclature implique certaines conventions
comptables.
La définition de la branche maladie - maternité -
invalidité - décès a nécessité le
reclassement des pensions d'invalidité servies à des
bénéficiaires âgés de plus de 60 ans par les
principaux régimes spéciaux, car ces derniers les rattachent au
risque vieillesse. Dans le régime général et les
régimes alignés, les prestations d'invalidité à la
branche maladie sont transformées en pensions de vieillesse lorsque
leurs bénéficiaires ont atteint 60 ans.
La branche vieillesse rassemble donc les prestations d'assurance vieillesse
proprement dites, les prestations d'assurance veuvage et les prestations
d'invalidité servies à des bénéficiaires
âgés de plus de 60 ans.
La branche accidents du travail regroupe les dépenses effectives des
fonds existants ainsi que les dépenses réalisées
directement par les régimes d'employeurs en contrepartie de cotisations
fictives.
La branche famille correspond, pour l'essentiel, aux dépenses de la
CNAF, qui retracent déjà l'ensemble des prestations
légales servies par les autres régimes ainsi que les charges
annexes des organismes du régime général. Les frais de
gestion et les dépenses d'action sociale des régimes agricoles et
du régime minier, pour la part correspondant aux cotisations
complémentaires familiales, s'y ajoutent.
Votre rapporteur tient à rappeler ici les observations de la Cour des
comptes, dans son rapport au Parlement sur la sécurité sociale de
septembre 1997, sur la présentation des transferts entre branches.
La Cour des comptes a estimé que la convention consistant à
maintenir le transfert dans l'objectif de dépenses de la branche
contributaire et à le porter en diminution de la branche
bénéficiaire faussait la présentation des objectifs des
dépenses par branche, dans la mesure où les montants des
transferts peuvent être modifiés par simple décision
réglementaire.
La Cour des comptes a estimé qu'il serait plus
logique d'exclure les transferts de l'objectif des dépenses de la
branche qui les verse et de les imputer à celle qui les
reçoit.
Les objectifs des dépenses des régimes obligatoires de base
comptant plus de vingt mille ressortissants sont fixés, par le
présent article, à
1.731,2 milliards de francs pour
1998
, selon le détail suivant :
Maladie-maternité-invalidité-décès 678,5
Vieillesse-veuvage 755,0
Accidents du travail 50,8
Famille 246,9
Total des dépenses
1.731,2
Par ailleurs, les dépenses des régimes comptant moins de 20.000
ressortissants, qui restent en dehors du champ de cet article, sont
évaluées à 2,6 milliards de francs.
Pour bien apprécier ces objectifs de dépenses, il convient de
considérer leurs évolutions par rapport aux années
précédentes.
La forte diminution de l'objectif des dépenses de la
branche accidents du travail, qui passe de 54,8 milliards de francs en
1997 à 50,8 milliards de francs en 1998, est trompeuse. Elle
correspond en fait au prélèvement exceptionnel sur le fonds de
l'allocation temporaire d'invalidité des agents des collectivités
locales (ATIACL) au profit de la CNRACL, opéré par la loi de
financement de l'an dernier, qui s'est traduit par un transfert non
renouvelable de la branche accidents du travail vers la branche vieillesse.
La baisse de 7,3 % qui en résulte pour 1998 n'est qu'apparente,
ce qui confirme le bien-fondé des observations de la Cour des comptes
sur le mode d'imputation des transferts entre branches.
En revanche, la diminution de 2,1 % des dépenses de la branche
famille pour 1998 correspond à l'impact bien réel des mesures
d'économies proposées par le Gouvernement.
Le taux de progression du total des objectifs de dépenses, soit
+ 2 % pour 1998, peut être rapproché utilement des taux
de croissance du PIB, tels qu'ils figurent dans le rapport économique et
financier annexé au projet de loi de finances : + 2,2 %
en 1997 et + 3 % pour 1998.
Votre commission vous soumet pour cet article un amendement tendant à
réduire les objectifs de dépenses d'un montant de
1,2 milliard de francs réparti entre les quatre branches au prorata
de leurs dépenses de gestion
. Il s'agit d'un amendement de
conséquence du gel des budgets de gestion administrative des caisses du
régime général pour 1998 qu'elle vous propose par ailleurs.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 23 ter
Objectif national de dépenses d'assurance
maladie
Commentaire : cet article a pour objet de fixer pour 1998
à 613,8 milliards de francs l'objectif national de dépenses
d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base.
I. UN OBJECTIF DEFINI SELON DES CONVENTIONS RELEVANT DU SEUL GOUVERNEMENT
La détermination de l'objectif national de dépenses d'assurance
maladie est une disposition obligatoire de la loi de financement de la
sécurité sociale, prévue au 4° de l'article
L.O. 111-3.
La portée de cet objectif, exprimé en montant et non en taux,
est différente selon les catégories de destinataires. Pour les
assurés sociaux, l'objectif n'a pas de caractère limitatif et son
dépassement éventuel n'aura pas pour conséquence de
restreindre leurs droits aux soins. Pour les professionnels de santé,
l'objectif aura bien un caractère contraignant et son dépassement
éventuel entraînera des reversements.
L'objectif est exprimé en dépenses remboursées et non pas
en dépenses remboursables. Cela implique qu'une augmentation du forfait
hospitalier ou une diminution des taux de remboursement aurait pour effet
mécanique de réduire le montant des dépenses prises en
compte par l'objectif, à consommation de soins inchangée.
L'objectif national de dépenses d'assurance maladie englobe
également la branche accidents du travail. Toutefois, il ne correspond
pas à la somme des objectifs de dépenses de ces deux branches. Il
ne couvre en effet que les dépenses de soins des risques
maladie-maternité et accidents du travail, ainsi que les prestations en
espèces du risque-maladie et celles du risque accidents du travail pour
leur part liée à l'incapacité temporaire.
Sont donc déduites des dépenses des branches maladie et
accidents du travail :
·
les rentes d'accidents du travail ;
·
les indemnités journalières
maternité ;
·
les dépenses de gestion administrative ;
·
les dépenses d'action sanitaire et sociale ;
·
les dépenses des fonds de prévention ;
·
les transferts ;
·
les frais financiers.
Le tableau ci-dessous retrace la façon dont s'effectue le passage du
total des dépenses de la branche
maladie-maternité-invalidité et de la branche accidents du
travail à l'objectif national des dépenses d'assurance maladie
pour 1998.
Votre rapporteur pour avis observe que l'objectif national
de dépenses d'assurance maladie a été créé
par la loi organique du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la
sécurité sociale, sans que son contenu exact soit
défini.
Les deux ordonnances du 24 avril 1996 n° 96-345, relative à la
maîtrise médicalisée des dépenses de soins, et
n° 96-346 portant réforme de l'hospitalisation publique et
privée, y font référence sans que son contenu soit
autrement précisé.
Ainsi, la définition du contenu exact de l'ONDAM fixé au niveau
global par le Parlement relève de la seule responsabilité du
Gouvernement.
II. UN OBJECTIF EN HAUSSE SENSIBLE POUR 1998
Dans le projet de loi de financement initial, le Gouvernement proposait de
fixer l'objectif national de dépenses d'assurance maladie à
613,6 milliards de francs pour 1998, ce qui correspond à un taux de
progression de 2,2 % par rapport à 1997. Ce montant a été
relevé de 200 millions de francs à l'issue de la discussion
à l'Assemblée nationale, afin de tenir compte de la majoration
des indemnités journalières de longue durée
(supérieures à six mois) destinée à compenser le
relèvement du taux de la CSG.
En valeur absolue, le montant de l'ONDAM augmenterait ainsi de 13,6
milliards de francs par rapport à l'objectif de l'an dernier, qui avait
été fixé à 600,2 milliards de francs. Votre
rapporteur pour avis rappelle que le montant de 1997 correspondait à une
augmentation de 1,7 % par rapport à 1996.
Le Gouvernement n'a pas donné beaucoup d'informations sur la
manière dont il entend décliner l'ONDAM après le vote du
Parlement. Le ministre de l'Emploi et de la solidarité a simplement
indiqué que la progression serait de 2,1 % pour les dépenses de
soins de ville (contre 2 % l'an dernier), 2,2 % pour les dépenses des
établissements sanitaires sous dotation globale et 3,15 pour les
établissements médicaux sociaux.
Selon le rapport fait par M. Claude Evin au nom de la commission des affaires
culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée Nationale
13(
*
)
, la déclinaison de l'ONDAM pour 1998 pourrait
être la suivante :
Déclinaison de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie en 1998
(en milliards de francs)
Objectif
|
Prévision
|
Objectif 1997/
|
|
I - Métropole |
|||
I-1. Soins de ville |
261,8 |
267,3 |
+ 2,1 % |
I-2. Etablissements sanitaires |
242,8 |
248,1 |
+ 2,2 % |
I-3. Médico-social |
40,2 |
41,5 |
+ 3,15 % |
I-4. Cliniques privées |
41,9 |
43,1 |
+ 2,9 % |
II - Ressortissants français à l'étranger |
0,8 |
0,8 |
- |
III - Prestations DOM |
12,4 |
12,6 |
+ 2,2 % |
Marge de manoeuvre résiduelle |
0,2 |
0,2 |
+ 2,2 % |
Total ONDAM |
600,2 |
613,6 |
+ 2,2 % |
Votre rapporteur pour avis s'étonne que le
Gouvernement propose pour l'ONDAM un taux de progression sensiblement
supérieur en 1998 à celui de 1997, alors que tous les experts
s'accordent pour estimer que le dispositif de maîtrise des
dépenses d'assurance maladie est encore loin d'être
opérationnel et n'a jusqu'à présent produit qu'un effet
dissuasif
. Il estime ce relâchement d'autant plus regrettable que la
norme plus rigoureuse de + 1,7 % retenue l'an dernier devrait globalement
être respectée à la fin de 1997.
Par ailleurs, votre rapporteur pour avis considère que l'ONDAM devrait
intégrer une plus grande part des dépenses d'assurance maladie.
En particulier, les dépenses de prévention de la CNAMTS devraient
y figurer, dans la mesure où elles influent sur le niveau des
dépenses remboursées.
Par exemple, la campagne annuelle d'information sur la vaccination contre la
grippe se traduira, dans un premier temps, par une économie sur les
dépenses de soins et d'indemnités journalières
liées à la moindre prévalence de la maladie.
D'une façon générale, le basculement souhaitable des
dépenses de soins vers les dépenses de prévention devrait
s'effectuer au sein de l'ONDAM pour être source d'économies
réelles.
De même votre rapporteur pour avis est favorable à l'inclusion
dans l'ONDAM du fonds d'accompagnement social pour la modernisation des
hôpitaux créé par l'article 21 du présent projet de
loi de financement (dont votre commission des finances ne s'est pas saisi). Il
semble en effet tout à fait normal que les dépenses ainsi
financées au profit des établissements qui font l'effort de se
restructurer soient imputées sur les moyens budgétaires de
l'ensemble des établissements hospitaliers, qui sont loin de tous faire
le même effort.
Mais la définition de l'ONDAM relève, pour l'instant, de la seule
responsabilité du Gouvernement.
En revanche, votre commission des finances vous propose de mettre à
profit la compétence dévolue au Parlement à l'égard
du montant global de l'ONDAM pour établir celui-ci à un niveau
plus compatible avec l'état des finances de l'assurance maladie.
Une progression de l'ONDAM calée sur le taux d'inflation hors tabac
prévu pour 1998, soit + 1,3 %, le fixerait ainsi à 608 milliards
de francs. En niveau absolu, l'économie correspondante serait de 5,8
milliards de francs par rapport à l'objectif de 613,8 milliards de
francs voté par l'Assemblée nationale.
Décision de la commission : votre commission est favorable à
l'adoption de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ainsi
limité.
ARTICLE 24
Ratification du décret relevant
le plafond d'avances de trésorerie du régime
général pour 1997
Commentaire : cet article tend à ratifier le
décret n
o
97-918 du 8 octobre 1997 par lequel le
Gouvernement a porté de 66 à 80 milliards de francs les
limites dans lesquelles les besoins de trésorerie du régime
général peuvent être couverts par des ressources non
permanentes.
L'article LO 111-5 du code de la sécurité sociale prévoit
"qu'en cas d'urgence, les plafonds de trésorerie des régimes
de sécurité sociale autorisés à recourir à
des ressources non permanentes peuvent être relevés par
décret pris en Conseil des ministres après avis du Conseil
d'Etat. La ratification de ces décrets doit être discutée
au Parlement dans le prochain projet de loi de financement de la
sécurité sociale."
Ce dispositif, inspiré de la procédure des décrets
d'avances prévue par l'ordonnance n
o
59-2 du
2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances,
constitue un grand progrès pour l'information du Parlement.
Auparavant, lorsque les besoins de trésorerie du régime
général venaient à dépasser en cours d'exercice le
plafond conventionnel des avances de la Caisse des dépôts et
consignations à l'ACOSS, des avances du Trésor prenaient le
relais
sur une simple décision du ministre de l'économie et
des finances,
sans que le Parlement ait à en connaître. Le
montant des avances du Trésor au régime général
n'était ratifié que deux ans plus tard, par la loi portant
règlement définitif du budget de l'année concernée.
Ainsi, l'article 9 du projet de loi portant règlement définitif
du budget de 1995 autorise l'ouverture de 13.961 milliards de francs de
crédits sur le compte d'avances n
o
903-58
intitulé "Avances à divers services de l'Etat ou organismes
gérant des services publics", au titre des avances du Trésor
à l'ACOSS. Ce montant impressionnant d'avances cumulées
correspond, d'après "l'Etat récapitulatif des crédits
constituant la contribution de l'Etat au financement de la
sécurité sociale", à un solde moyen annuel de
32,3 milliards de francs, le régime général
s'étant trouvé déficitaire à la fin de 1995 de
67,4 milliards de francs. Le compte d'avances n'est pas pourvu en loi de
finances initiale, s'agissant de crédits évaluatifs au sens de
l'article 9 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 (Etat F
annexé).
Avec l'instauration des lois de financement de la sécurité
sociale, le plafond des avances de trésorerie du régime
général ne peut plus être dépassé sans un
acte solennel du Gouvernement, qui doit procéder par décret en
Conseil des ministres.
De surcroît, l'article 8 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997 fait obligation au Gouvernement de
déposer au Parlement, dans un délai de quinze jours, un rapport
présentant les raisons du dépassement des limites de
trésorerie et justifiant l'urgence de la mesure. Cette disposition, qui
résulte d'un amendement présenté l'an dernier par le
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales de
l'Assemblée nationale, M. Charles de Courson, vise à assurer
une information parfaite du Parlement.
Le Gouvernement n'a pas formellement déposé le rapport requis.
Néanmoins, on peut admettre que l'annexe B au présent projet de
loi de financement, relative à la mise en oeuvre des dispositions de la
loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, en fait
office. En effet, ce document retrace de façon détaillée
les raisons pour lesquelles les prévisions de recettes de la
sécurité sociale ont été inférieures de
5,1 milliards de francs au montant inscrit en loi de financement, et ses
objectifs de dépenses supérieurs de 5,7 milliards de francs.
S'agissant du seul régime général, ces évolutions
se traduisent par une variation de son fonds de roulement de
- 37,6 milliards de francs en 1997, contre - 30 milliards
de francs prévus initialement en loi de financement de la
sécurité sociale. Compte tenu du déficit effectif de 1996,
soit - 53,2 milliards de francs, et du versement de
17,5 milliards de francs effectué par la CADES au titre du
déficit provisionnel de 1996, le besoin de trésorerie du
régime général devrait s'établir à
- 74,7 milliards de francs au 31 décembre 1997. Ce besoin
de trésorerie sera intégralement couvert par la Caisse des
dépôts et consignations, à l'exclusion de toutes avances du
Trésor.
Décision de la commission : votre commission a donné un avis
favorable à l'adoption de cet article sans modification.
ARTICLE 25
Prolongation de cinq ans du
mécanisme de la CADES
Commentaire : Cet article vise à transférer
la dette du régime général de sécurité
sociale portée par l'ACOSS à la CADES et à prolonger de
5 ans la durée de vie de cette caisse.
La Caisse d'amortissement de la dette sociale -la CADES- est une structure
de cantonnement de la dette accumulée par le régime
général de la sécurité sociale.
C'est un outil vertueux en ce sens qu'il est destiné à apurer
une dette en capital et intérêts au moyen de ses ressources
propres, exigence que ne s'impose pas l'Etat. Il est donc bien
préférable de confier cette mission à un organisme dont la
responsabilité à cet égard est bien définie et
identifiable.
Mais, cette vertu, reconnue par les marchés, n'est que toute
relative. Instrument efficient et "a priori" efficace, la CADES
exerce des
tâches peu louables.
Elle reporte sur les générations futures les charges nées
de l'intempérance des bénéficiaires de la
sécurité sociale. Il n'y a guère de justification à
ce report de charges s'agissant d'opérations de régimes
d'assurance sociale par répartition dont les déficits ne trouvent
pas d'excuses dans quelque dépense d'investissement que ce soit.
La CADES ne doit pas servir de lénitif aux prestataires de
l'assurance sociale, non plus qu'à leurs gestionnaires. C'est ainsi que
le texte soumis par le Gouvernement qui vise à prolonger son existence
ne saurait être approuvé s'il n'était le dernier de son
genre.
I. CONSIDÉRATIONS JURIDIQUES
A. UN CURIEUX EXERCICE DE RATIFICATION
Le présent article comporte ratification -implicite- de l'ordonnance
n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette
sociale.
Cette situation doit donc conduire à montrer beaucoup d'attention
à cet article. D'emblée, cette conséquence indirecte d'un
vote favorable sur l'article 25 apparaît comme une bizarrerie juridique.
L'article 38 de la Constitution indique en effet que les ordonnances prises
sur son fondement deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est
pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la
loi d'habilitation.
Un tel projet a certes bien été déposé par le
précédent Gouvernement dans les délais impartis. Cette
formalité étant accomplie, la caducité de l'ordonnance a
ainsi pu être évitée.
Il est cependant piquant d'observer que la ratification de l'ordonnance
n° 96-50 ne résulterait pas de l'adoption du projet de loi de
ratification qui avait alors été déposée mais du
projet de loi présentement examiné. Or, celui-ci a
été déposé bien après l'expiration du terme
fixé par la loi autorisant le Gouvernement à réformer la
protection sociale par voie d'ordonnance qui déterminait la date
à laquelle le projet de loi portant ratification des ordonnances devait
être au plus tard déposé, à savoir le 31 mars
1996.
B. UNE DISPOSITION DONT L'INSCRIPTION DANS LA LOI DE FINANCEMENT DE LA
SECURITÉ SOCIALE POSE PROBLEME
L'article 113-3 du code de la sécurité sociale issu de la
loi organique n° 96-646 du 22 juillet 1996 détermine le
contenu de la loi de financement de la sécurité sociale. Les
dispositions susceptibles d'y figurer sont limitativement
énumérées par le I de l'article.
Le présent article n'entre dans aucune des catégories
énumérées par ce I. Mais, le III de l'article indique, lui
:
"Outre celles prévues au I, les lois de financement de la
sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions
affectant directement l'équilibre financier des régimes
obligataires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur
l'application des lois de financement de la sécurité sociale."
C'est sur le fondement de ce III que le Gouvernement justifie l'inclusion de
l'article 25 dans le présent projet de loi. Il est fait observer
que le transfert de dette prévu par l'article, se traduisant par un
allégement des charges d'intérêt de l'Agence centrale des
organismes de sécurité sociale (ACOSS) de l'ordre de
3 milliards de francs, l'inclusion de cet article 25 dans le
présent projet de loi est justifié compte tenu de son effet sur
l'équilibre financier de la sécurité sociale.
Cette interprétation paraît recevable, même si le
caractère direct de l'effet de l'article 25 sur l'équilibre
financier du régime général peut être
discuté.
Sans doute, l'ACOSS dont l'équilibre financier est seul concerné
par cet article n'est-elle pas en elle-même un régime de base de
la sécurité sociale. Il s'agit en effet d'un établissement
public national à caractère administratif qui, selon l'article
L.225-2 du code de la sécurité sociale, jouit de la
personnalité juridique et de l'autonomie financière. L'ACOSS a
donc une existence juridique
per se
indépendante des trois
caisses nationales. Elle assure certes la gestion de la trésorerie de
ces caisses, et parfois même, dans le cadre de mandats donnés par
leurs conseils d'administration mais elle est une personne morale autonome.
Elle est donc responsable de ses dettes qu'elle supporte en propre. C'est
d'ailleurs ce qui résulte logiquement de l'article 25
lui-même qui transfère la dette d l'ACOSS et pas celle de la CNAM,
de la CNAF ou de la CNAVTS.
Mais, même si cette qualification ne peut être retenue qu'au moyen
d'une analyse indirecte,
l'ACOSS apparaît bien comme l'un des
éléments du régime général
. Celui-ci est
défini à l'article L. 200-2 qui précise qu'il
comprend quatre branches gérées par trois caisses et que
l'équilibre financier de chaque branche est assuré par la caisse
chargée de la gérer. Il est indiqué que la gestion commune
de trésorerie des différentes branches par l'ACOSS ne fait pas
obstacle à cette dernière obligation. On peut noter au passage
que cette dernière disposition est quelque peu problématique.
Dans les faits, l'institution d'un organisme autonome chargé de
gérer la trésorerie des branches décharge en pratique les
caisses de l'obligation imposée à elles d'assurer
l'équilibre financier de chacune de branches dont elles assurent la
gestion. C'est évidemment à l'ACOSS que revient effectivement
cette charge en trésorerie et qui
in fine
se trouve porter les
dettes des caisses.
On pourrait, en outre, faire valoir que le transfert à la CADES du
versement autrefois à la charge du FSV de 12,5 milliards de francs
au budget de l'Etat vient alléger les charges d'un régime de base
de sécurité sociale et affecte directement son équilibre
financier.
Il reste cependant à savoir si le FSV appartient à la
catégorie des régimes de base de sécurité sociale.
Ces considérations conduisent à justifier l'insertion de
l'article 25 du présent projet dans le texte déposé
par le Gouvernement sous réserve des incertitudes sur le
caractère direct de ses effets sur l'équilibre financier du
régime général.
C. L'IMPORTANTE QUESTION DE LA QUALIFICATION JURIDIQUE DES CONTRIBUTIONS AU
REMBOURSEMENT DE LA DETTE SOCIALE
La qualification juridique des contributions au remboursement de la dette
sociale -CRDS- est l'objet de débats.
La Commission européenne les considère comme des cotisations
sociales.
Cette interprétation peut se prévaloir du fait que
ces contributions se substituent aux relèvements de cotisations sociales
qu'aurait rendu nécessaire l'apurement de la dette auquel ces ressources
sont destinées si cette dette n'avait été
transférée. Elle peut également s'asseoir, en dépit
de ce transfert, sur le caractère social de la dette
transférée qui correspond en effet à l'accumulation de
déficits de régimes sociaux ou encore sur un choix de
qualification de la CADES comme établissement public à
caractère social.
Mais,
le Gouvernement défend une autre position selon laquelle
lesdites contributions seraient des impositions
puisque constituant des
prélèvements sans contrepartie, au même titre que la
contribution sociale généralisée. Cette prétention
peut en outre s'appuyer sur l'idée que le transfert de la dette des
régimes de sécurité sociale à un organisme qui
n'entre pas dans le champ des institutions de sécurité sociale
aurait opéré une novation de la dette qui de ce fait aurait perdu
sa qualité de dette de la sécurité sociale pour devenir
dette d'un organisme divers d'administration centrale.
On se gardera bien de trancher ce débat mais il faut souligner que
la position défendue par le Gouvernement laisse pendante une question
importante relative à la qualification des CRDS.
On sait que le Conseil constitutionnel a innové dans sa décision
n° 82-152 du 14 janvier 1983 en admettant que des "impositions
de toutes natures" puissent être
affectées
à des
établissements publics en dehors des procédures
formalisées à l'article 18 de l'ordonnance du 2 janvier
1959 considérant que ces procédures ne devaient s'appliquer
qu'aux seules recettes de l'Etat et pas aux recettes ayant le caractère
de "ressources d'établissement public".
Or, les contributions au redressement de la dette sociale étant
affectées à la CADES, établissement public administratif,
la jurisprudence du Conseil constitutionnel invite à leur
reconnaître la qualification de "ressources d'établissement
public".
Une pareille qualification ne devrait être écartée,
semble-t-il, que si les contributions en cause étaient des recettes de
l'Etat inscrites comme telles au budget général et dont une
partie seulement était affectée à la CADES. En ce cas,
conformément à la décision n° 93-328 du
16 décembre 1993, l'affectation des contributions devrait
obéir aux règles posées par l'article 18 de
l'ordonnance du 2 janvier 1959.
Mais, comme tel n'est pas le cas, il paraît loisible à une loi
autre qu'une loi de finance, en l'espèce, la loi de financement de la
sécurité sociale, s'affranchissant en outre des principes
commandant l'affectation des recettes de l'Etat de prévoir
l'instauration d'une imposition au profit d'un établissement public.
Sur le fond une telle jurisprudence a quelque chose de peu satisfaisant.
Elle incite, en effet, à l'émiettement de l'Etat et des
impositions.
Pour s'affranchir de la règle de l'unité
budgétaire et de celle de l'universalité budgétaire,
l'Etat est invité à créer des structures
extérieures qui constituent alors autant de démembrements et
privent d'une part importante de sa substance l'acte budgétaire.
Il existe d'ailleurs une contradiction potentielle entre la jurisprudence
du Conseil et l'article 34 de la Constitution au terme duquel "Les lois de
finances déterminent les ressources et les charges de l'Etat dans les
conditions et sous les réserves prévue par une loi
organique".
Il apparaît en effet qu'exclure du champ de l'Etat les
organismes prenant la forme d'établissement public, placées sous
la tutelle de ministres conduit à une conception excessivement
restrictive de l'Etat. D'ailleurs, si devant la multiplication des
établissements publics de cette sorte la doctrine a évoqué
la dispersion ou encore l'émiettement de l'Etat, elle n'a jamais
considéré que de tels établissements échappaient au
champ de l'Etat. Dans ces conditions, ayant été rappelé
que les jurisprudences précitées du Conseil constitutionnel
concernaient des cas où les établissements publics en cause ne
relevaient pas de l'orbite des administrations publiques centrales mais de
celui des administrations de sécurité sociale,
une distinction
pourrait être retenue au terme de laquelle les ressources
affectées à la CADES seraient bien des "ressources
d'établissement public", mais encore, plus précisément,
des "ressources d'établissement public d'Etat", comme telles soumises
aux règles de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 sur les lois
de finances
.
Alors et alors seulement, l'affectation des CRDS à la CADES par la
loi de financement de la sécurité sociale et, en son principe
même, apparaîtrait constitutionnellement problématique.
II. CONSIDÉRATIONS FINANCIERES
A. L'OBJET DE LA CADES
La CADES est usuellement présentée comme une structure de
cantonnement de dettes chargée d'apurer une partie de la dette publique
au moyen de ressources propres et, transitoirement, de ressources d'emprunt
nécessaires à la couverture des besoins de trésorerie de
la Caisse.
La Caisse d'amortissement de la dette sociale -la CADES- a été
instituée par l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996.
C'est un établissement public à caractère administratif
dont la mission est, pour l'heure :
- d'apurer la dette du régime général de
137 milliards de francs transférée à elle par
l'ordonnance de 1996, correspondant pour 120 milliards aux déficits
des exercices 1994 et 1995 et, pour 17 milliards au déficit
prévisionnel de 1996 ;
- de verser chaque année 12,5 milliards de francs à
l'Etat pour le remboursement en capital et intérêts de la dette de
110 milliards de francs du régime général reprise par
lui au 1er janvier 1994 ;
- de verser, pour la seule année 1996, 3 milliards de francs
à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs non
salariés des professions non agricoles (CANAM) pour couvrir ses
déficits des exercices 1995 et 1996.
Le présent article tend, quant à lui, à :
·
prolonger la durée de vie de la CADES d'une
période supplémentaire de 5 années ;
·
transférer à la CADES la dette de
l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)
à l'égard de la Caisse des dépôts et consignations
correspondant au financement des déficits du régime
général de sécurité sociale constatés au
31 décembre 1997 et à son déficit prévisionnel
pour l'exercice 1998 et ce sous un plafond de 75 milliards pour les
premiers et de 12 milliards pour le second ;
·
prolonger en conséquence la durée de
perception des contributions pour le remboursement de la dette sociale.
Il apparaît ainsi que l'objet de la CADES
est en
réalité double
:
- elle est, d'une part, chargée d'apurer la dette
transférée à elle ;
- elle est, d'autre part, chargée de verser à l'Etat et à
la CANAM des contributions financières, le versement prévu au
profit de l'Etat étant
causé
par les charges
supportées par lui du fait de la reprise à son compte de la dette
du Fonds de solidarité-vieillesse à partir du 1er janvier
1994.
Le versement de 12,5 milliards de francs au budget de l'Etat pose un
vrai problème.
L'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 a en effet mis
à la charge de la CADES un versement annuel de 12,5 milliards de
francs au budget général pendant 13 ans, de 1996 à
2008.
Ce versement était antérieurement à la charge du Fonds de
solidarité vieillesse. L'article 105 de la loi de finances pour
1994 avait en effet transféré cette dette qui était
auparavant portée par le FSV à l'Etat, le FSV devant
dédommager celui-ci de la charge d cette dette en capital et
intérêts moyennant un échéancier explicité
dans l'exposé des motifs de l'article. Le versement mis à la
charge de la caisse correspond donc aux charges résiduelles de la dette
-amortissements et intérêts- de 110 milliards de francs
reprise à son compte
par l'Etat au début de 1994, qui
représentait l'endettement de l'ACOSS auprès de la Caisse des
dépôts et consignations contracté pour financer le cumul
des déficits du régime général tels
qu'arrêtés au 31 décembre 1993.
Les modalités retenues pour organiser les versements de la CADES
à ce titre ne sont pas satisfaisantes
. L'Etat, au terme de ce
dispositif, devrait percevoir 12,5 milliards de francs de recettes
budgétaires par an -soit un total cumulé de 162,5 milliards
de francs
14(
*
)
au cours de la période
visée par l'actuel III de l'article 4 de l'ordonnance-,
alors même que la dette qu'il a reprise ne donne pas lieu à des
dépenses budgétaires à due concurrence
le
remboursement en capital de cette dette ne l'exposant qu'à supporter une
charge au titre des opérations de trésorerie,
"c'est-à-dire hors budget" selon les termes mêmes de la Cour des
comptes. Finalement, seules les charges d'intérêt de cette dette
figurent parmi les charges budgétaires de l'Etat.
Les observations de la Cour peuvent donc être reprises et, avec elle, le
constat opéré que ces modalités d'imputation conduisent
à minorer artificiellement le déficit budgétaire de l'Etat.
Une pareille observation conduit à juger que
le déficit
budgétaire tel qu'il figure à l'article d'équilibre
des lois de finances manque de sincérité
. En tout cas, il ne
reflète pas les réalités financières du budget de
l'Etat. Ainsi, la présentation qui en est faite au Parlement n'est-elle
pas convenable.
Cette situation est d'autant moins admissible que la Commission
européenne bénéficie, elle, d'une information
financière reflétant fidèlement les comptes de l'Etat
.
Le besoin de financement des administrations publiques qui lui est
notifié est en effet le résultat d'une correction du
déficit budgétaire qui comprend, parmi d'autres retraitements, la
soustraction de la part du versement ici analysé représentative
des charges d'amortissement de la dette.
C'est pourquoi un amendement de votre commission propose qu'à compter
du 1er janvier 1998, le versement
visé par le III ancien de
l'ordonnance étant inchangé dans sont montant et dans son
affectation comme ressource de l'Etat,
voie son imputation scindée en
deux parties
:
·
l'une, correspondant aux charges
d'intérêt
de la dette reprise par l'Etat et inscrites au
chapitre 11-05 du titre I relatif à la dette publique du budget des
charges communes,
serait versée au budget de l'Etat
;
·
l'autre, correspondant à des opérations
de trésorerie
effectuées hors budget conformément
à l'article 15 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959
serait versée aux comptes de trésorerie visés à
l'article 30 de la même ordonnance
.
Sans doute, le Conseil constitutionnel a-t-il considéré dans sa
décision n° 93-330 du 29 décembre 1993 que la loi
de finances "n'établissait aucun lien juridique entre le
règlement par l'Etat de la dette de l'agence et le
prélèvement mis à la charge de l'établissement
public" fonds de solidarité-vieillesse. Mais, il l'a fait à
l'occasion d'une saisine qui posait une question entièrement
différente de celle évoquée par la commission des finances
du Sénat, même si elle portait sur la nature du remboursement mis
à la charge du FSV qui apparaît analogue à celui mis
à la charge de la CADES. Le Conseil a en effet répondu à
une question portant sur la comptabilisation des engagements de l'Etat et non
à une question portant sur celle du versement du FSV.
Il a considéré que la reprise de la dette en cause consistait en
une opération de trésorerie de l'Etat et ne pouvait être
assimilée à un prêt ou à une avance au sens de
l'article 28.
Il en a déduit que l'Etat n'était pas contraint de la faire
figurer dans un compte d'avances. Il a alors indiqué que les solutions
retenues pour retracer les dépenses liées à cette reprise
de dette avaient été pertinentes, les charges
d'intérêt figurant au budget général en tant que
charges annuelles permanentes de l'Etat tandis que les opérations de
trésorerie n'avaient pas à figurer dans un titre du budget et
pouvaient, à bon droit, être retracées dans des comptes
distincts faisant apparaître les engagements de l'Etat.
Sa décision portait donc sur l'imputation des engagements de l'Etat du
fait de la reprise de dette mentionnée. Le fait que le Conseil ait
souligné qu'aucun lien juridique entre le règlement par l'Etat de
la dette du FSV et le versement mis à la charge de
l'établissement n'avait été établi par la loi de
finances instituant ce versement fait partie de l'argumentaire produit par le
Gouvernement en réponse aux observations de la Cour des comptes
dénonçant la comptabilisation de ce versement.
Compte tenu des développements qui précèdent, une pareille
attitude apparaît relever d'un juridisme excessif. Plus marginalement, on
peut observer qu'elle fait par ailleurs fi d'arguments juridiques aussi, sinon
plus solides, que ceux produits par le Gouvernement. Car le versement mis
à la charge de la CADES est bel et bien
causé
dans
l'esprit du législateur par la nécessité de
dédommager l'Etat des charges associées aux engagements
contractés par lui du fait de la reprise de dette évoquée
ci-dessus
15(
*
)
.
En outre, rien n'interdit au législateur de prévoir telle
imputation qu'il souhaite à une ressource de l'Etat dans le cadre d'une
disposition extérieure à un projet de loi de finances sous
réserve pour lui de respecter les termes de l'article 40 de la
Constitution.
B. LES RESSOURCES DE LA CADES
Pour financer ses missions, la CADES est dotée de ressources propres.
Il s'agit, à titre principal, du produit des diverses contributions pour
le redressement de la dette sociale instituées par le chapitre II de
l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996. Ces contributions
concernent presque tous les éléments de revenu des ménages
à l'exception de quelques minima sociaux
16(
*
)
..
Cette assiette, par son ampleur, conduit
à solliciter des contribuables qui n'ont pas
bénéficié et ne bénéficient pas des
prestations dont le caractère excessif a provoqué les
déficit cristallisés dans la dette transférée
à la CADES.
Compte tenu des principes de l'organisation de notre
sécurité sociale, il y a là quelque chose de choquant.
Les taux des différentes contributions est fixé à
0,5 % par l'article 19 de l'ordonnance du 24 janvier 1996.
Compte tenu de la diversité des éléments d'assiette, les
administrations du recouvrement sont elles-mêmes diverses : les
contributions prélevées sur les revenus d'activité et le
remplacement font l'objet de prélèvements à la source et
sont recouvrées par les Unions de recouvrement de la
sécurité sociale et des allocations familiales (les
URSSAF) ; les autres contributions sont recouvrées par les services
du ministère de l'économie et des finances.
La CADES est donc dépourvue de moyens propres pour recouvrer les CRDS
ce qui est normal dans une perspective de bonne gestion publique des
prélèvements. Ce qui, en revanche, est moins normal, c'est que
d'importants retards d'encaissements aient dû être constatés
dans les premiers temps d'existence de la caisse. Ces retards ont
été dénoncés par la Cour des comptes qui a pu
constater :
"Les encaissements par la CADES des produits de la
CRDS ont
commencé tardivement : la caisse n'a reçu qu'en
juin 1996 les premiers versements de l'ACOSS (5,35 milliards de
francs). Les retards se sont poursuivis jusqu'au troisième trimestre. A
cette date, ni la CNAMTS, ni la CNAVTS n'avaient reversé le produit de
la CRDS précompté sur les revenus de remplacement ;
d'importants retards de paiement étaient relevés aussi de la part
du ministère de la défense et la mutualité sociale
agricole."
L'ACOSS effectue avec un grand retard la régularisation mensuelle de
ses versements provisionnels, en règle générale six mois
après le mois considéré. De plus, les
régularisations sont parfois massives et malaisées à
comprendre".
De la même manière, on peut regretter que l'article 8 de
l'ordonnance n° 96-50 ait cru bon de mettre à la charge de la
caisse les frais d'assiette et de recouvrement des contributions pour le
remboursement de la dette sociale. Cette solution a conduit à instaurer
un prélèvement de 0,5 % sur leur produit. Si elle peut
justifier que la caisse ne disposant de services d'assiette et de recouvrement
propres recoure aux moyens des URSSAF et de l'administration des finances, il
ne faut perdre de vue que ces services ont précisément pour
mission essentielle d'asseoir et de recouvrer les prélèvements
obligatoires et qu'il n'est pas de bon usage de dédommager les services
publics des coûts que les prélèvements obligatoires
généraux sont censés couvrir. Il convient d'ajouter que la
détermination forfaitaire du prélèvement pour frais
d'assiette et de recouvrement n'offre aucunement la garantie que ce
prélèvement est la juste contrepartie du service fourni. Enfin,
les modalités d'imputation de ce prélèvement sont opaques.
On ne sait comment il se répartit entre les URSSAF et le budget de
l'Etat. Au sein de ce dernier, on en sait si le prélèvement est
imputé au titre des recettes budgétaires ou bien s'il est l'un de
ces faux fonds de concours qui vont abonder les moyens des services financiers.
Plus marginalement, la CADES bénéficie d'autres ressources
propres :
·
l'article 9 de l'ordonnance susvisée
prévoit le transfert à son actif du patrimoine privé
à usage locatif des caisses nationales de sécurité sociale
et de l'ACOSS à compter du 31 décembre 1999 et des produits
des cessions de ce patrimoine intervenues entre la date d'entrée en
vigueur de l'ordonnance et cette dernière date ;
·
l'article 6-II de l'ordonnance édicte,
quant à lui, que la CADES bénéficiera sous certaines
conditions définies par décret des remboursements à la
Caisse nationale d'assurance maladie des avances détenues par elle du
fait des prestations liquidées avant le 31 décembre 1995
effectués en application des règlements communautaires de
coordination des régimes nationaux de sécurité sociale et
des accords bilatéraux.
Trois observations s'imposent :
·
Le dispositif de l'article 6-II a
été vidé de sa portée par la disposition du
décret du 24 avril 1996 selon laquelle "les reversements
prévus ne sauraient avoir pour effet d'entraîner un déficit
ou d'aggraver un déficit de la CNAMTS". Cette réserve conduit
à méconnaître les principes comptables adoptés par
les caisses qui tendent à privilégier la comptabilité en
droits constatés plutôt que la comptabilité de caisse.
·
Le texte de l'ordonnance que vient ratifier le
projet en discussion ne comporte pas de disposition prévoyant
explicitement le sort de la CADES au terme prévu par son existence.
Or, la caisse est susceptible de disposer d'un patrimoine liquide -v. infra-
mais aussi immobilier compte tenu de l'article 9 de l'ordonnance. C'est
l'un des motifs qui a inspiré à la commission des finances son
amendement n° 17 prévoyant la clôture de la CADES le
31 janvier 2014 et la dévolution de son patrimoine à cette
date.
·
Enfin, l'ordonnance ne prévoit pas de
versement de la part des caisses au titre de leurs éventuels
excédents.
Cette situation qui n'est sans doute que virtuelle aurait
mérité qu'on la prévoit. La solution retenue consacre le
choix implicite de ne pas affecter ces excédents à l'apurement de
la dette accumulée par le régime général. Un tel
choix n'est pas satisfaisant puisqu'aussi bien la constitution
d'excédents financiers constitue une solution naturelle pour apurer les
déficits passés.
C. L'ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA CADES :
1. Un équilibre financier moins solide qu'il n'y paraît
Les deux tableaux qui précèdent montrent que
l'équilibre financier de la CADES serait assuré dans l'une et
l'autre hypothèse de durée d'existence de la caisse sur la base
des seules recettes tirées des contributions au remboursement de la
dette sociale.
Cependant, des opérations d'endettement externe sont indispensables
à la caisse pour financer les remboursements des dettes reprises par
elle. Ces opérations sont à considérer comme des
emprunts-relais. Elles impliquent des charges de remboursement en capital mais
aussi en intérêts.
Dans la version actuelle de la caisse, ces charges s'établissent comme
suit (en milliards de francs) :
· Remboursement du capital 140
· Intérêts 76,13
· Total 216,13
Dans la version proposée par le Gouvernement, elles sont les
suivantes :
· Remboursement du capital 227
· Intérêts 166,23
· Total 393,23
Les chiffres qui précèdent démontrent assez les lourdes
conséquences financières des déficits des régimes
sociaux qui s'accompagnent de charges d'intérêt venant grever les
coûts des prestations servies. Il est à observer que ces charges
d'intérêt seraient beaucoup plus lourdes si des impositions
n'étaient affectées à la CADES.
Mais, les données ci-dessus démontrent aussi que la prolongation
de la durée de vie de la caisse accroît mécaniquement la
charge des intérêts, la durée des emprunts-relais
nécessaire au financement intercalaire des besoins de la caisse
étant augmentée.
L'opération proposée par le
Gouvernement n'est donc pas neutre financièrement
.
Elle l'est d'autant moins que la prolongation de l'existence de la caisse et
l'aggravation de ses engagements exposent la CADES à des risques
supplémentaires par rapport à la situation actuelle.
L'établissement devra en effet faire appel à des ressources
financières lui permettant d'adosser progressivement ses engagements
selon un mécanisme au terme duquel des emprunts à long terme se
substitueront peu à peu aux ressources courtes auxquelles elle aura fait
appel pour honorer sa dette.
Au cours de cette période de
constitution d'une dette optimale, la caisse se trouvera en situation de
risques de taux.
Cette considération n'est pas seulement théorique tant
l'équilibre financier de la caisse est dépendant du coût de
ses ressources externes.
Ainsi, si les perspectives de trésorerie de
la caisse à la fin de son existence sont, en l'état des taux
d'intérêt, convenables avec un excédent prévisible
de 20 milliards en valeur actualisée, un renchérissement du
coût de ses emprunts de 1 % se traduirait par une dégradation de
cette position de trésorerie de 13 milliards, l'excédent
prévisible passant alors à 7 milliards de francs.
La caisse, fort sensible au coût de ses ressources externes verra donc
cette vulnérabilité accrue du fait de l'adoption de l'article du
projet de loi.
Mais, là n'est pas le seul élément de
vulnérabilité financière de la caisse. Son
équilibre financier est également très dépendant
des hypothèses posées en matière de croissance du produit
des contributions pour le redressement de la dette sociale.
Ceux-ci
devraient s'établir à 25,6 milliards de francs en 1997 et
les tableaux de financement sont construits sur une progression de 3,5 % en
moyenne annuelle. Cette hypothèse suppose une croissance en volume du
revenu des ménages de l'ordre de 2,4 % compte tenu des perspectives
d'inflation. Elle peut être jugée excessivement optimiste sur la
base même des dispositions du projet de loi en discussion et compte tenu
des problèmes d'équilibre des revenus de transfert qu'on peut
d'ores et déjà escompter. Une part importante de l'assiette des
contributions, celle constituée pour les revenus de remplacement, devra,
en tout état de cause, évoluer beaucoup moins vite que les 2,4 %
retenus dans le cadre des simulations d'équilibre de la caisse. La
croissance des revenus d'activité et d'épargne devra donc
être sensiblement plus rapide ce qui, pour les premiers d'entre eux,
n'apparaît guère probable. Pour illustrer l'ampleur de
l'aléa, une variante a été réalisée sur la
base d'une croissance de 3 % par an des recettes des contributions pour le
redressement de la dette sociale. En ce cas, l'excédent de
trésorerie ne serait plus que de 8 milliards au terme prévu pour
l'existence de la caisse contre 20,2 milliards sur la base d'une
progression de 3,5 %.
Finalement, l'équilibre financier de la caisse sortira
vulnérabilisé de la disposition proposée par le
Gouvernement. La garantie implicite de l'Etat assure toutefois à la
caisse des conditions de financement favorables.
2. Un transfert de charges entre générations
Le mécanisme de la CADES suppose que les générations
futures supportent les conséquences financières des
déficits générés par les prestations de
sécurité sociale versées dans le passé.
Rien ne saurait justifier un pareil report de charges
sinon la
nécessité de corriger les errements passés et la crainte
que les remèdes que l'équité supposerait ne viennent
"casser"
la croissance. Si une imposition avait été
décidée pour apurer la dette passée en une seule fois elle
aurait dû rapporter 337 milliards de francs, soit près de 4
points du PIB estimé pour 1998 et plus de 13 fois la charge annuelle des
contributions au redressement de la dette sociale.
De la même manière, sans prolongation de la CADES, il eut
été nécessaire d'accroître de 0,2 point le taux des
CRDS, soit une charge annuelle supplémentaire de l'ordre d'une dizaine
de milliards de francs pesant sur les ménages.
La mécanique proposée par le Gouvernement permet d'éviter
pour l'heure ces surcroîts de prélèvements.
Mais, elle ne fait que reporter ces derniers ce qui a pour effet, à
terme, compte tenu des charges supplémentaires d'intérêt
supposées par la prolongation de la période de refinancement d'en
alourdir le poids.
Entre le 1
er
février 2009 et le 31 janvier 2014, les
ménages devraient supporter 209 milliards de francs de CRDS, soit 41,8
milliards de francs par an.
La commission des finances a beaucoup hésité à donner son
approbation à cet article du fait de ces perspectives. C'est la mort
dans l'âme qu'elle s'y est résolue sous la réserve
très solennelle que pareille solution ne soit plus jamais
recherchée.
C'est afin de manifester cette volonté qu'elle propose d'amender
l'article en prévoyant explicitement la dissolution de la caisse au 31
janvier 2014.
Décision de la commission : Votre commission est favorable à
l'adoption de cet article complété par les amendements qu'elle
vous propose d'adopter.
ARTICLE 26 (nouveau)
Plafonds de
trésorerie des régimes autorisés à s'endetter
Commentaire : Cet article a pour objet de fixer les
limites
dans lesquelles certains régimes obligatoires de base peuvent recourir
à des ressources non permanentes pour couvrir leurs besoins de
trésorerie.
I. LES PLAFONDS DE TRÉSORERIE PROPOSÉS
Le plafonnement proposé par le présent article est essentiel.
D'une certaine manière, il supplée l'absence d'article
d'équilibre dans la structure des lois de financement de la
sécurité sociale, en permettant de prendre la mesure des besoins
de trésorerie prévisionnels des principaux régimes de
sécurité sociale.
En la matière, les pouvoirs du Parlement apparaissent plus
étendus qu'à l'égard des charges de trésorerie de
l'Etat car, au-delà de la fixation du solde annuel de la loi de
finances, les opérations du Trésor échappent au
contrôle parlementaire en vertu de l'autorisation d'emprunter de
portée très générale accordée chaque
année au ministre de l'économie et des finances.
Les plafonds fixés par le présent article s'appliquent aux
encours des avances de trésorerie un jour donné. Il ne s'agit
donc pas des " soldes significatifs de trésorerie "
présentés dans le rapport de la Commission des comptes de la
sécurité sociale, qui retracent l'évolution tendancielle
du besoin de trésorerie des régimes au cours d'une année.
Ces plafonds ne s'appliquent pas aux emprunts que les organismes de
sécurité sociale peuvent contracter pour leurs opérations
en capital.
Il n'en reste pas moins que le recours à des avances de
trésorerie de la part d'un régime de sécurité
sociale peut correspondre aussi bien à un décalage conjoncturel
et transitoire qu'à un désajustement structurel et cumulatif
entre ses recettes et ses dépenses.
A cet égard, les cinq régimes concernés par le
présent article apparaissent dans des situations bien différentes.
Dans le projet de loi de financement initial, le plafond proposé pour
le régime général était fixé à
15
milliards de francs
, correspondant au montant conventionnel des avances de
la Caisse des dépôts et consignations à l'ACOSS.
Ce plafond conventionnel paraissait largement suffisant pour faire face
à un besoin de trésorerie qui ne devrait pas excéder -5
milliards de francs au 31 décembre 1998, compte tenu du versement de 12
milliards de francs effectué en début d'année par la CADES
au titre de la prise en charge du déficit prévisionnel de
l'exercice.
Trésorerie quotidienne de l'ACOSS de janvier à décembre 1997
Néanmoins, l'Assemblée nationale, instruite par
le précédent du dépassement de près de 10 milliards
de francs du plafond de trésorerie fixée à 66 milliards de
francs en 1997, a jugé prudent de relever le plafond de
trésorerie du régime général pour 1998 à 20
milliards de francs .
Le plafond proposé pour le régime des exploitants agricoles est
fixé à
8,5 milliards de francs.
Ce montant est celui
prévu conventionnellement entre la Caisse centrale de Mutualité
sociale agricole et le Crédit agricole.
Situation de trésorerie du BAPSA de janvier à
décembre 1998
(soldes bimensuels)
Le plafond de trésorerie proposé pour le fonds
spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels
de l'Etat, géré par la Caisse des dépôts
s'élève à
0,5 milliard de francs
.
Il apparaît cohérent avec le profil de trésorerie du
FSPOEIE, qui ne devrait pas descendre en-deçà d'un
découvert de -500 millions de francs au début de 1998. Par
ailleurs, ce creux de trésorerie d'un fonds financé à 80 %
par des crédits budgétaires résulte des dates de parution
des arrêtés de transfert, et peut donc aisément être
contrôlé.
Situation de trésorerie du FSPOEIE de janvier à décembre 1998
Le plafond de trésorerie proposé pour la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines s'élève à 2,3 milliards de francs . Ce plafond apparaît lui aussi surdimensionné, puisque le profil de trésorerie de la CANSSM, qui bénéficie d'une subvention d'équilibre de l'Etat, ne fait pas apparaître de découvert en 1989, mais des excédents culminant à 1,7 milliards de francs au mois de novembre.
Situation de trésorerie de la CANSSM de janvier
à décembre 1997
(soldes décadaires)
Enfin, un nouveau régime de sécurité sociale apparaît au présent article, alors qu'il n'y figurait pas dans la loi de financement de l'an dernier : il s'agit de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. Le plafond de trésorerie proposé pour la CNRACL en 1998 s'élève à 2,5 milliards de francs, correspondant au découvert maximal attendu en fin d'année.
Situation de trésorerie de la CNRACL de janvier à décembre 1998
Votre rapporteur pour avis tient à souligner que
l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale
prévoit la fixation de plafonds de trésorerie pour les seuls
régimes qui "
peuvent légalement recourir à des
ressources non permanentes
".
Il faut donc considérer que le vote
de cette disposition de la loi de financement de la sécurité
sociale aura valeur d'autorisation légale d'endettement de la CNRACL
.
II. LA " PENTE GLISSANTE " DE L'ENDETTEMENT : UN CHOIX
INACCEPTABLE POUR LA CNRACL
Votre commission des finances tient à dénoncer
l'inquiétante " fuite en avant "
que constituerait
l'autorisation d'emprunt donnée à la CNRACL. L'ouverture de cette
faculté va conduire ce régime, structurellement
excédentaire hors charges de compensation, à
s'engager dans
une politique d'endettement pour assumer une dérive financière
due à des facteurs externes
.
Cette situation résulte en effet, exclusivement, de l'effet de ciseaux
entre la
progression constante des sommes versées au titre des
compensations
financières versées aux autres régimes
et
le déclin du rapport démographique de la CNRACL
. Or,
l'institution de ces " compensations " financières trouve
son
origine dans le caractère favorable de ce rapport démographique.
C'est donc une révision progressive du montant de ces contributions
qu'il faut rechercher.
La " solution " que propose cet article ne répond en
effet
nullement au problème de l'équilibre de ce régime : elle
apparaît de nature à contribuer à l'aggravation progressive
de son déséquilibre
. En effet, les frais financiers
afférents à ces avances de trésorerie devront être
pris en charge par la CNRACL, sachant qu'à la date du présent
rapport, la Caisse des dépôts et consignations semble exclure
toute avance de trésorerie à taux zéro.
A. L'ABSURDITÉ D'UNE LOGIQUE D'ENDETTEMENT
La CNRACL, structurellement excédentaire, est en effet mise dans des
proportions croissantes en situation de déséquilibre financier du
fait de sa " participation " aux mécanismes dits de
compensation et de surcompensation.
1. Un déséquilibre financier artificiel
Les graphiques ci-contre font en effet clairement ressortir que l'origine des
difficultés financières de la CNRACL se trouve dans
l'évolution contradictoire du rapport démographique de ce
régime et du montant de ses participations aux mécanismes de
compensation.
Il convient tout d'abord de noter que le rapport démographique brut de
la CNRACL a été divisé par 1,62 entre 1981 et 1997. Entre
1994 et 1996
, pour ne prendre que les dernières années, le
nombre de
pensionnés
de la CNRACL a en effet progressé
de
+ 8,8 %
pour atteindre 542.533 pensionnés. Dans le
même temps, la
croissance du nombre des
cotisants
ne s'est
élevé qu'à
+ 2,5 %
, atteignant ainsi 1.564.594
cotisants
.
Ainsi, la faible progression du nombre de cotisants ne permet pas
d'équilibrer la forte croissance du nombre des pensionnés, ce qui
se traduit par une dégradation du rapport démographique. de la
CNRACL.
L'évolution comparée du rapport démographique de la CNRACL et du montant des compensations versées par ce régime : un effet de ciseaux
Source : Commission des Finances à partir des données fournies par la DGCL et la CNRACL
Cette évolution démographique de la CNRACL ne
serait pas en elle même préoccupante, s'il n'y avait pas eu une
croissance régulière du montant des compensations versées
par ce régime.
Source : Commission des Finances à partir des données fournies par la DGCL et la CNRACL
Dans ce domaine en effet, il convient de rappeler, qu'en
application de l'article L. 134-1 du code de la sécurité
sociale, la CNRACL participe, en tant que régime obligatoire de
sécurité sociale, au dispositif de solidarité entre les
régimes de protection sociale du régime vieillesse. Ce dispositif
comporte deux aspects le plus souvent appelés " compensation
généralisée " et " surcompensation ".
La compensation généralisée a été
instituée par la loi n° 74-1094 du 24 décembre 1974
entre les régimes de base de sécurité sociale, une
compensation supplémentaire, dite surcompensation, spécifique aux
régimes spéciaux (Etat, collectivités territoriales, SNCF,
RATP, marins, mineurs ) ayant été créée par la loi
de finances pour 1986 (n° 85-1403 du 30 décembre 1985).
La compensation généralisée
entre les
régimes de base de sécurité sociale a pour objet de
déterminer, par rapport à une moyenne théorique, les
régimes qui disposent d'un surplus de capacité contributive et
inversement, les uns versant ce surplus aux autres en fonction de leur besoin
de financement.
La surcompensation
est déterminée selon des
modalités comparables à celles décrites ci-dessus, la
surcompensation étant cependant diminuée du montant de la
compensation généralisée.
Les transferts de surcompensation ainsi définis théoriquement
par l'application d'un régime moyen fictif ne sont toutefois retenus,
pour les versements effectifs, qu'à hauteur d'un certain pourcentage
afin d'être rendus compatibles avec les ressources des régimes
contributeurs
. C'est ce taux de réfaction appliqué de
manière discrétionnaire à l'ensemble du mécanisme
des transferts qui est communément nommé "taux de la
surcompensation".
Le taux de la surcompensation, initialement fixé à 22 %, a
été porté à 30 % pour l'exercice 1992
(décret du 11 décembre 1992) et à 38 % pour
l'exercice 1993. Ce taux de 38 % a été confirmé par
un décret du 16 août 1994.
2. Le refus d'une logique d'endettement
Admettre le recours à des avances de trésorerie pour
équilibrer les comptes de la CNRACL en 1998 serait accepter une logique
dangereuse.
Une telle politique conduit en effet à la fois à :
· repousser dans le temps la définition de solutions durables ;
· générer pour la CNRACL des frais financiers ;
· pérenniser les mécanismes de compensation et, partant les
causes réelles du déséquilibre.
Votre commission des finances se doit donc d'alerter les responsables
locaux sur les lourdes conséquences d'un tel engrenage, qui conduirait
à faire assumer par un régime structurellement
excédentaire des charges d'emprunts destinées à financer
des régimes structurellement déficitaires.
C'est pourquoi votre commission vous propose de supprimer au sein de cet
article la ligne ouvrant à la CNRACL la possibilité de recourir
à des avances de trésorerie pour un montant de 2,5 milliards de
francs pour 1998.
S'agissant de l'année 1998, votre commission estime,
que
dans l'attente d'une révision des conditions de participation de
la CNRACL à la surcompensation
, il est préférable de
reconduire la pratique, employée depuis 1994, du décalage dans le
temps du versement des acomptes de compensation dus par la CNRACL.
Cette
solution d'attente
conduirait à admettre un
décalage de versement sur l'exercice suivant de 4 milliards de francs au
titre de l'année 1998, sachant que le décalage de ces acomptes
ont représenté 1,011 milliard de francs de 1994 sur 1995, 3,585
milliards de francs de 1995 sur 1996, 4,830 milliards de francs de 1996 sur
1997 et 2,834 milliards de francs de 1997 sur 1998 (sachant que cette
diminution résulte en grande partie du transfert des réserves de
l'ATIACL au crédit de la CNRACL).
B. L'INDISPENSABLE RÉFORME DES MODALITÉS DE LA
PARTICIPATION DE LA CNRACL AU SYSTÈME DES COMPENSATIONS
1. Un système rendu obsolète par l'évolution
démographique du régime
Les projections à l'horizon 2015, réalisées par la Caisse
des dépôts et consignations, sur l'évolution respective du
nombre de cotisants et de pensionnés relevant de ce régime sont
en effet éloquentes.
Cette projection met en évidence l'inexorable déclin du rapport
démographique brut (effectif cotisant/effectif pensionné) de la
CNRACL qui va se trouver divisé par 2,55 entre 1994 et 2015.
Source : Commission des Finances à partir des données fournies par la CDC
2. Le nécessaire ajustement du montant des
compensations
Si le principe d'une forme de solidarité financière entre les
régimes de sociaux possède une légitimité certaine,
il ne saurait pour autant être à l'origine de situations de
déséquilibre pour les régimes contributeurs.
Or, dans la perspective démographique qui vient d'être
décrite, la CNRACL se trouve -à droit constant- condamnée
à subir un déséquilibre croissant.
A cet égard, votre commission souhaite que soit retenu le principe d'un
ajustement permanent des contributions versées au titre de la
surcompensation (compensation entre les régimes spéciaux
d'assurance vieillesse des salariés). Le montant de celles-ci
étant calculées chaque année en fonction de la
" capacité contributive " réelle de la caisse.
La mise en oeuvre de cet objectif pourrait résulter soit d'une
révision annuelle du taux de la surcompensation, soit d'un ajustement
progressif du plafond limitant le montant des contributions financières
versées au titre de la surcompensation à en pourcentage du total
des prestations servies par la caisse, actuellement fixé à
25 %.
Ce " filet de sécurité " contre le risque d'une
progression incontrôlée du montant des versements liés
à la surcompensation est défini au troisième alinéa
de l'article L. 131-4 du code de la sécurité sociale. Il
s'applique à tous les régimes participant à la
surcompensation, mais intéresse au premier chef la CNRACL.
L'initiative en revient au Sénat, qui a inséré cette
disposition l'an dernier dans la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, à la demande de sa commission
des affaires sociales. Ce dispositif constitue un instrument législatif
de modulation bien adapté à l'objectif de limitation annuelle des
sommes versées chaque année au titre de la surcompensation.
Décision de la commission : votre commission vous est favorable
à l'adoption de cet article, sous réserve de la suppression de la
ligne ouvrant à la CNRACL la possibilité de recourir à des
avances de trésorerie pour un montant de 2,5 milliards de francs en
1998.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DE M. LE PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES
Le jeudi 30 octobre 1997, sous la présidence de
M. Christian Poncelet, la commission a procédé à
l'audition
de M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour
des Comptes, de M. Gabriel Mignot, président de la 6e chambre, et
de Mme Anne-Marie Boutin, conseiller-maître
.
M. Pierre Joxe, premier président à la Cour des Comptes, a
rappelé que ce troisième rapport sur la sécurité
sociale mettait fin à une période de transition puisque
l'année prochaine, le rapport présenté par la Cour des
Comptes portera, pour la première fois, sur la mise en oeuvre d'une loi
de financement de la sécurité sociale, celle de 1997.
Il a déclaré que, pour remplir la mission que lui avait
confiée le Parlement, à l'initiative de M. Jacques Oudin, la
Cour des Comptes avait réorganisé ses structures et
réparti les affaires sociales entre deux chambres, la 1e et la 6e, cette
dernière étant chargée de la santé publique, de la
sécurité sociale et de l'élaboration du rapport sur la
mise en oeuvre de la loi de financement. Il a estimé qu'il s'agissait
d'un tournant majeur dans l'histoire de la Cour des Comptes.
M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour des Comptes, a ensuite
souligné que le partage des dispositions relatives aux
prélèvements obligatoires entre le projet de loi de finances et
le projet de loi de financement de la sécurité sociale
aboutissait à un débat parlementaire fractionné. A cet
égard, il a insisté sur l'interpénétration
croissante des finances sociales et des finances publiques, notamment en raison
du développement de la contribution sociale
généralisée, et a plaidé pour une collaboration
plus étroite entre, d'une part, les commissions des finances et des
affaires sociales des assemblées, et, d'autre part, la Cour des Comptes
sur le thème du financement de la sécurité sociale.
Puis Mme Anne-Marie Boutin, conseiller-maître, rapporteur du rapport sur
la sécurité sociale, a présenté successivement les
six parties du rapport.
Elle a indiqué que la première partie était
consacrée au nouveau cadre juridique et comptable dans lequel devait
désormais s'exercer l'évaluation de l'application de la loi de
financement. A cet égard, elle a plaidé pour une modernisation de
la comptabilité des organismes de la sécurité sociale et
pour une clarification des concepts utilisés. Elle a également
insisté sur les difficultés rencontrées pour
l'élaboration de l'objectif national de dépenses d'assurance
maladie et la mise en place d'outils de suivi.
Ensuite, Mme Anne-Marie Boutin
a évoqué les
problèmes de financement de la sécurité sociale
traités dans la deuxième partie. Après s'être
inquiétée de l'opacité des règles régissant
les exonérations de cotisations et les compensations entre
régimes, elle a annoncé que la Cour des Comptes n'avait
relevé aucune anomalie dans le fonctionnement de la caisse
d'amortissement de la dette sociale. Elle a ajouté que la Cour
s'était par ailleurs intéressée à la politique de
recouvrement menée par les URSSAF et avait conclu à un manque
d'harmonisation dans les pratiques.
Evoquant la troisième partie du rapport Mme Anne-Marie Boutin,
conseiller-maître, a indiqué que celle-ci était
consacrée à la régulation et à la maîtrise
des dépenses d'assurance maladie à travers trois sujets :
l'encadrement des dépenses hospitalières, la régulation
des dépenses ambulatoires et la tarification par une analyse du cas des
prothèses internes.
A propos de l'encadrement des dépenses hospitalières, elle a
indiqué que la Cour des Comptes avait analysé la mise en place
des agences régionales de l'hospitalisation et l'activité
libérale des praticiens hospitaliers à temps plein, qui
apparaît insuffisamment contrôlée. Evoquant le programme de
médicalisation des systèmes d'information (PMSI)
débuté en 1982, dont le coût total d'investissement s'est
élevé à 3 milliards de francs, avec un coût
annuel de fonctionnement estimé à 600 millions de francs,
elle a mis en garde contre une utilisation intempestive de cet outil
statistique et comptable, en rappelant qu'il ne pouvait pas se substituer
à l'évaluation qualitatives des services hospitaliers, ni aux
études épidémiologiques.
Concernant la régulation des dépenses ambulatoires, elle a
insisté sur le caractère opposable des références
médicales, sur la nécessité de recentrer le contrôle
médical exercé par les caisses sur l'offre de soin, et sur le
caractère obsolète du dispositif du ticket modérateur en
raison du développement de l'aide médicale et des assurances
complémentaires.
A propos des prothèses internes, elle a constaté que le
système actuel de tarification entraînait des coûts
très importants et estimé que la longueur des délais
d'élaboration des tarifs n'était pas acceptable. Elle s'est par
ailleurs alarmée des problèmes de sécurité
médicale posés par certaines prothèses.
Abordant la quatrième partie consacrée aux dépenses de la
branche famille, Mme Anne-Marie Boutin, conseiller-maître
,
a
estimé que la politique familiale se caractérisait par une
insuffisance de l'expertise préalable à la décision et une
mauvaise articulation entre les prestations familiales et les incitations
liées à la politique fiscale ou à la politique de l'emploi.
Traitant ensuite de la cinquième partie du rapport consacrée aux
régimes spéciaux Mme Anne-Marie Boutin,
conseiller-maître
,
a relevé que la comparaison entre
ceux-ci et le régime général était difficile. Elle
a indiqué que la Cour des Comptes avait pu évaluer le coût
supplémentaire des avantages d'assurance maladie spécifiques du
régime de la SNCF à 1,4 milliard de francs.
En conclusion, elle a rappelé que la sixième partie, assez
technique, regroupait les principales constatations faites par les
comités départementaux d'examen des comptes des organismes de
sécurité sociale (CODEC) en 1996. Elle s'est
félicitée du fait que l'animation du réseau des CODEC par
la Cour des Comptes se soit traduite par une plus grande motivation et une
meilleure efficacité des comités.
M. Alain Lambert, rapporteur général, constatant le
caractère encore très approximatif des comptes sociaux, s'est
demandé si le Parlement disposait réellement des
éléments d'information suffisants pour se prononcer en
connaissance de cause sur l'équilibre de la sécurité
sociale. Il s'est inquiété du télescopage entre la loi de
finances et la loi de financement de la sécurité sociale, sur
lesquelles le Parlement était appelé à débattre
simultanément. Il a enfin souhaité connaître l'analyse de
la Cour des Comptes sur les dispositifs de garde des enfants financés
par la branche famille
En réponse, M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour des
Comptes, a considéré que les modalités de discussion de la
loi de finances et de la loi de financement de la sécurité
sociale relevaient de l'organisation interne du Parlement. Concernant la
seconde, il a souligné qu'elle n'avait pas la même valeur
juridique que la loi de finances. Il a observé qu'elle constituait un
acte de prévision, contenant à la fois des orientations et des
hypothèses dont le degré de précision n'était pas
très élevé, en raison de l'insuffisance des instruments de
mesure. Il a toutefois considéré que la tendance spontanée
au déficit de la sécurité sociale n'était pas
douteuse, et posait le problème du poids croissant de la dette sociale.
Mme Anne-Marie Boutin, conseiller-maître
,
a alors salué
l'effort d'harmonisation mené par la direction de la
sécurité sociale et la direction du budget concernant les
données économiques communes aux lois de finances et aux lois de
financement. Elle a, toutefois, regretté qu'au moment du vote de la loi
N+1, le Parlement ne dispose toujours pas des comptes N-1 de nombreuses caisses.
Concernant le coût de la garde des enfants, Mme Anne-Marie Boutin,
conseiller-maître, a déclaré qu'il existait des
études sur les trois formes de garde (garde à domicile, garde par
une nourrice agréée, et crèche) mais a reconnu qu'un
nombre important de questions restait sans réponse, comme par exemple le
nombre d'emplois réellement créés par l'allocation de
garde d'enfants à domicile. En outre, elle a mis en garde contre les
dysfonctionnements du dispositif actuel.
M. Christian Poncelet, président, s'est enfin interrogé sur
les conséquences du transfert massif des cotisations sociales vers
l'impôt pour le principe de gestion paritaire des organismes de
sécurité sociale.
II. EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 5 novembre, sous la
présidence de M. Christian Poncelet, la commission a
décidé de se saisir pour avis du projet de loi
n
o
70 (1997-1998) de financement de la sécurité
sociale pour 1998 et a désigné M. Jacques Oudin comme
rapporteur pour avis
.
Elle a ensuite procédé à l'examen de ce projet de loi, sur
le rapport de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis.
Evoquant le contexte politique du projet de loi de financement de la
sécurité sociale, M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a
rappelé qu'il s'inscrivait dans le cadre d'une réforme
constitutionnelle qu'il avait lui-même depuis longtemps défendue,
et qui avait abouti à renforcer le contrôle du Parlement sur la
sécurité sociale. Il a estimé que cette réforme
était excellente sous réserve d'être bien utilisée.
A cet égard, il a regretté que le dispositif proposé par
le Gouvernement ne soit pas satisfaisant, en ce qu'il aboutit à alourdir
les prélèvements sociaux. Il a fait valoir qu'au niveau atteint
par ces prélèvements, tous les besoins de protection sociale
pouvaient être satisfaits sans les augmenter.
Evoquant le contexte parlementaire, le rapporteur pour avis a constaté
que le projet de loi de finances était renvoyé à la
commission des finances tandis que la loi de financement de la
sécurité sociale relevait de la compétence de la
commission des affaires sociales. Il a estimé que cette partition
n'était pas souhaitable, et s'est prononcé en faveur soit d'une
compétence réservée à la commission des finances
pour la partie fiscale de la loi de financement de la sécurité
sociale, soit d'une commission spéciale associant la commission des
finances et la commission des affaires sociales sur la totalité du
projet de loi de financement. Il a souligné qu'à défaut de
cette unité de vue, il serait impossible de réussir à
maîtriser la progression des prélèvements obligatoires qui
pèsent à la fois sur la croissance et sur l'emploi.
Evoquant le contexte technique de la loi de financement, M. Jacques Oudin,
rapporteur pour avis, s'est félicité du travail accompli par la
Cour des Comptes, avec le sérieux qui la caractérise, dans ses
trois premiers rapports annuels au Parlement sur la sécurité
sociale. Il a indiqué que la Cour des Comptes avait adapté son
organisation interne en créant une nouvelle chambre toute entière
dédiée à la sécurité sociale. Il a
relevé que la Cour des Comptes se montrait très critique sur
l'absence de maîtrise des dépenses sociales, ainsi que sur les
imperfections de la comptabilité des organismes de
sécurité sociale. Le rapporteur pour avis a regretté que
les comptes présentés à l'appui du projet de loi de
financement de la sécurité sociale soient toujours en
encaissements/décaissements, technique qui relève selon lui de la
"préhistoire" de la comptabilité.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a ensuite présenté
l'économie générale du projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Après avoir rappelé qu'il n'existait pas à proprement
parler d'article d'équilibre dans le projet de loi, le rapporteur pour
avis a indiqué que le rapprochement entre les prévisions de
dépenses et les objectifs de dépenses du projet de loi de
financement de la sécurité sociale faisait apparaître un
solde de 33 milliards de francs. Il a annoncé que le Gouvernement
proposait au Parlement de le ramener à 12 milliards de francs, soit
un effort de redressement financier portant sur 21 milliards de francs.
Le rapporteur pour avis a jugé éminemment contestable le plan de
redressement proposé par le Gouvernement, dans la mesure où il
repose principalement sur des prélèvements nouveaux,
accessoirement sur des économies mal choisies, et pour le solde sur des
ponctions de trésorerie non reconductibles.
Il a indiqué que les recettes nouvelles s'élevaient à 12
milliards, correspondant aux mesures suivantes : substitution de la
contribution sociale généralisée (CSG) aux cotisations
maladie, soit 4,6 milliards ; extension de l'assiette et fusion du
1 % caisse nationale des allocations familiales (CNAF) et du 1 %
caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés
(CNAVTS) sur les produits d'épargne, soit 4,5 milliards ;
relèvement de 6 à 8 % du taux de la taxe sur les contrats de
prévoyance supplémentaire, soit 500 millions de
francs ; déplafonnement complet des cotisations d'allocations
familiales des non salariés, soit 300 millions de francs ;
modification des règles de compensation bilatérale entre le
régime des clercs et employés de notaires et le régime
général, soit 200 millions de francs ; relèvement de
la taxe sur la publicité pharmaceutique, soit 300 millions de
francs ; création d'une taxe sur les ventes directes de
médicaments, soit 300 millions de francs ; création
d'une taxe de santé publique sur les tabacs affectée à la
caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS),
soit 1,3 milliard de francs.
Au regard de ces prélèvements nouveaux considérables, le
rapporteur pour avis a estimé que les économies proposées
étaient limitées et contestables, avec un montant de
4,9 milliards de francs correspondant à la mise sous
conditions de ressources des allocations familiales, soit 4 milliards de
francs ; et la modulation de l'AGED, soit 900 millions de francs.
Le rapporteur pour avis a relevé que le plan de redressement
proposé était bouclé par des mesures de trésorerie
non renouvelables, pour un montant total de 5,5 milliards de
francs correspondant aux trois mesures suivantes : reprise de la dette
cumulée 1997-1998 du régime général par la caisse
d'amortissement de la dette sociale (CADES), soit 3 milliards de francs en
diminution des charges d'intérêt ; affectation de
l'excédent de la contribution sociale de solidarité des
sociétés (C3S) au régime général, soit
2,2 milliards de francs ; intégration financière au
régime général de la caisse mutuelle d'assurance
vieillesse des cultes (CAMAVIC), soit 300 millions de francs.
Enfin, le rapporteur pour avis a souligné que le plan de redressement de
la sécurité sociale intégrait aussi des dépenses
supplémentaires, pour un montant total de 1,4 milliard de francs,
correspondant aux mesures suivantes : relèvement de l'objectif national
des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) au-delà de son
évolution tendancielle, soit 500 millions de francs ;
création d'un fonds d'accompagnement social pour la restructuration des
hôpitaux, soit 300 millions de francs ; abondement du fonds de
prévention de la caisse nationale d'assurance maladie, soit 300 millions
de francs ; et généralisation des allocations familiales
jusqu'à l'âge de 19 ans, soit 300 millions de francs.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a alors proposé à la
commission de retenir sept orientations principales sur le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998.
Premièrement, pas d'aggravation du déficit proposé par le
Gouvernement, soit 12 milliards de francs, ce qui implique de trouver des
économies alternatives ou d'accepter certaines hausses de taxes.
Deuxièmement, préservation de la politique familiale, ce qui
implique le refus de toute restriction des prestations.
Troisièmement, modération de la progression des dépenses
d'assurance maladie, ce qui implique une progression de l'ONDAM limitée
au taux d'inflation hors tabac et une relance des dispositifs de maîtrise
actuellement en panne. Le rapporteur pour avis a souligné que cette
position était plus rigoureuse que celles du Gouvernement et de la
commission des affaires sociales.
Quatrièmement, une politique cohérente d'imposition sur le
revenu, ce qui conduit à refuser l'augmentation de la CSG. Le rapporteur
pour avis a rappelé que la commission l'avait accepté l'an
dernier de la part du précédent Gouvernement, parce que
l'impôt sur le revenu était parallèlement diminué.
Mais, considérant que le Gouvernement de M. Lionel Jospin abandonnait la
baisse de l'impôt sur le revenu, il a jugé inacceptable la hausse
supplémentaire et massive de la CSG proposée.
Cinquièmement, une politique cohérente de taxation de
l'épargne. Le rapporteur pour avis a estimé que, dès lors
que l'on refusait la hausse de la CSG, il était possible d'accepter
l'extension de l'assiette des autres contributions sociales assises sur
l'épargne, à condition d'en réduire le taux.
Sixièmement, la cohérence dans les taxations sociales, qui
conduit à refuser la taxe sur la prévoyance
supplémentaire, à refuser le bouleversement de la
fiscalité applicable au secteur de la distribution de
médicaments, à refuser l'affectation du produit de la C3S au
régime général, et à refuser la contribution
spécifique sur les tabacs.
Septièmement, le rapporteur pour avis a souhaité que la
commission prenne date pour l'avenir, sur les trois points suivants :
- il a jugé impératif que l'ONDAM reste calé sur
l'inflation, au moins tant que les outils de contrôle et de suivi des
dépenses de soins ne seront pas parfaitement opératoires,
considérant qu'il s'agissait d'une position de prudence plus que de
rigueur ;
- il a estimé sage de refuser d'autoriser la caisse nationale de
retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) à
s'endetter, considérant que cela reviendra à mettre le doigt
dans un engrenage fatal ;
- il a estimé de la plus haute importance de prendre date sur
l'opération de réouverture de la CADES pour lui transférer
la nouvelle dette cumulée du régime général, soit
87 milliards de francs.
Le rapporteur spécial a indiqué que la réouverture de la
CADES se traduirait par une prolongation des contributions au remboursement de
la dette sociale de cinq années, ce qui aboutissait à un
alourdissement différé de la fiscalité de
211,97 milliards de francs, soit 42,4 milliards par an entre 2008 et
janvier 2014.
Il a souligné que ce prélèvement constituait une entorse
aux principes des régimes sociaux par répartition et au principe
selon lequel les caisses de sécurité sociale sont responsables de
leur équilibre financier. Il a regretté que cette solution
aboutisse à faire supporter aux générations futures les
turpitudes de notre génération.
Toutefois, considérant que nécessité fait loi, le
rapporteur pour avis a admis que la CADES ne constituait pas un mauvais
instrument pour apurer la dette sociale, dans la mesure où il s'agit
d'un organisme aisément identifiable et pleinement responsable du
remboursement de la dette. Il a relevé que l'on ne pouvait pas en dire
autant de l'Etat, qui emprunte pour rembourser.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a fait valoir que la CADES était
un bon outil qui sert un mauvais objectif, à savoir l'apurement de
déficits sociaux au moyen d'une augmentation des
prélèvements. Il a affirmé que tout devait être
entrepris pour éradiquer les déficits sociaux, et que la
commission devait insister pour que la prolongation de la CADES proposée
par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
1998 soit la dernière en son genre.
M. Alain Lambert, rapporteur général, a observé que la
prorogation de cinq ans de la contribution de remboursement de la dette sociale
aboutissait à faire supporter par le contribuable de 2010 les
dépenses de protection sociale d'aujourd'hui. Il s'est demandé si
ce dispositif était compatible avec le concept de solidarité
entre les générations, soulignant que les
générations futures auraient de surcroît à financer
des charges de pension considérables. Il a affirmé que cette
question relevait de la plus haute responsabilité politique. Par
ailleurs, il a souhaité savoir si l'on disposait d'instruments de
régulation de la loi de financement en cours d'année comparables
à ceux existant pour la loi de finances. Enfin, relevant que la
contribution sociale de solidarité des sociétés
dégageait un produit excédentaire, il a souhaité savoir si
une diminution de son taux apparaissait possible.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, a répondu que la CADES
était un instrument de pure nécessité, faisant fi de toute
doctrine de solidarité entre les générations. Il a
ajouté que c'était la raison pour laquelle il proposerait un
amendement cherchant à concilier nécessité et rigueur, en
affirmant le principe de la dissolution de la CADES à la date
fixée pour son terme, même s'il avait conscience que ce qu'une loi
fait, une autre loi peut le défaire. Il a regretté que l'on ne
dispose d'aucun outil de maîtrise des dépenses sociales comparable
à ceux qui permettent de réguler les dépenses
budgétaires. Après avoir rappelé que la contribution
sociale de solidarité des sociétés était
fondée sur la solidarité entre les salariés et les non
salariés, il a estimé que les évolutions
prévisibles des régimes de retraite des non salariés, qui
devraient se retrouver déficitaires dès 1999, ne permettaient pas
d'envisager une baisse du taux de la contribution.
M. Philippe Marini a déclaré qu'il partageait
entièrement la ligne du rapporteur pour avis, et estimait dangereux le
projet de loi de financement, car de nature à encourager une
irresponsabilité croissante en matière de déficit de la
sécurité sociale. Il a affirmé sa volonté de
combattre cette irresponsabilité qui risquait d'entraîner une
divergence entre la fiscalité d'Etat et l'ensemble des
prélèvements sociaux, alors que tous les
prélèvements pèsent également sur les entreprises
et le travail. S'agissant de l'ONDAM, il a considéré que la
solution proposée par le rapporteur pour avis était tout à
fait modérée au regard de l'objectif de gel des dépenses
budgétaires que la commission proposait par ailleurs.
M. Maurice Schumann, après avoir salué dans l'exposé
du rapporteur pour avis un bel exemple de clairvoyance et de courage, a
confié que lorsqu'il était ministre des affaires sociales,
vingt-huit ans auparavant, l'un de ses conseillers médecin avait
évalué, à sa demande, le montant des dépenses de
santé injustifiées à 57 milliards de francs de
l'époque.
Mme Marie-Claude Beaudeau a estimé que la véritable question du
financement de la sécurité sociale était de trouver
d'autres recettes. Elle a déclaré qu'elle n'était pas
choquée que la part des dépenses de santé dans le produit
intérieur brut (PIB) augmente, et que le manque de recettes sociales
était dû à la non création d'emplois et à la
faiblesse des salaires. A cet égard, elle a considéré que
la CSG était illusoire et ne réglait pas la question, ce qui
justifiait que son parti se soit opposé à la CSG depuis son
origine.
Elle a observé que la loi de financement de la sécurité
sociale instituait des taux de CSG différents selon les
catégories sociales, précisément pour pallier l'injustice
du caractère proportionnel de la contribution. Elle a fait valoir que
cette injustice allait croissant avec l'alourdissement de la CSG qui
deviendrait, avec un produit supérieur à 300 milliards de
francs, le second impôt après la taxe à la valeur
ajoutée (TVA). Elle a affirmé que les principes d'une
fiscalité démocratique fondée sur la progressivité
de l'impôt se trouvaient mis à mal.
Elle a estimé que d'autres solutions s'imposaient, lorsque l'on
constatait l'accroissement de la marge des entreprises et le doublement des
dividendes depuis 1989. Elle a estimé que le financement
équitable et durable d'une vraie protection sociale pourrait se fonder
sur les profits placés sur les marchés, qui sont en France
supérieurs à 700 milliards de francs.
Elle s'est par ailleurs inquiétée de la fiscalisation croissante
de l'assurance maladie, car la rupture du lien entre cotisations et prestations
ne garantissait plus pour l'avenir le maintien du niveau de celles-ci. Elle a
conclu que son groupe n'approuvait pas le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998, mais a relevé qu'aucun des
amendements proposés par le rapporteur pour avis ne dégageait les
recettes nouvelles souhaitables.
En réponse aux intervenants, M. Jacques Oudin, rapporteur pour
avis, a relevé que l'objectif de progression qu'il proposait pour
l'ONDAM était effectivement raisonnable et a souligné qu'il n'y
aurait en aucun cas diminution, mais simplement moindre progression des
dépenses d'assurance maladie.
Il a exposé que de nombreux rapports concordants sur les dépenses
injustifiées d'assurance maladie avaient identifié le nombre de
lits d'hôpitaux excédentaires à plusieurs milliers et les
gaspillages à plus de 100 milliards de francs. Il a relevé
que la France dépensait 30 % de plus pour son système de
soins que la moyenne des autres pays européens, mais que ses indicateurs
sanitaires n'étaient pas meilleurs pour autant. Il a observé que
les inégalités des dotations hospitalières entre les
différentes régions, sans lien avec l'état de santé
des populations, étaient un indice supplémentaire de la
réalité de dépenses inutiles.
Il a jugé que le problème du financement de la
sécurité sociale n'était pas d'abord un manque de
recettes, mais plutôt un excès de dépenses auquel les
Gouvernements successifs cherchaient à s'ajuster en multipliant les
taxes et les ponctions de trésorerie avec une imagination
débordante.
Rappelant qu'il avait eu l'honneur de rapporter devant le Sénat sur la
CSG lors de sa création en 1990, il a réaffirmé qu'il
n'était pas contre le principe d'une contribution très large, un
foyer sur deux ne payant pas d'impôt sur le revenu. Il a
considéré qu'un bon impôt était un impôt
à base large et à taux réduit.
S'agissant des ponctions sur les bénéfices des entreprises, il a
estimé que le débat avait déjà eu lieu lors de la
discussion de la loi portant mesures urgentes d'ordre fiscal et financier. Il a
souligné que l'assiette de la fiscalité des entreprises
était volatile, du fait des possibilités de
délocalisations, et rappelé qu'une entreprise est d'abord une
source d'emplois.
S'agissant des conséquences de la réforme du financement de
l'assurance maladie, le rapporteur pour avis s'est déclaré
personnellement en faveur d'une étatisation de l'assurance maladie avec
une participation accrue des professions médicales, et a observé
qu'actuellement toutes les décisions véritablement importantes
étaient déjà prises par l'Etat.
La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements
proposés par le rapporteur spécial.
A l'
article 3,
relatif à l'augmentation du taux de la CSG et
à la diminution des taux des cotisations d'assurance maladie, la
commission a adopté un amendement tendant à rejeter la hausse de
la CSG, tout en acceptant deux exonérations pertinentes apportées
par l'Assemblée nationale relatives, respectivement, à la
fraction de l'avoir fiscal plafonnée et aux produits d'assurance vie
destinés aux personnes handicapées.
La commission a supprimé l'
article 4,
relatif au
déplafonnement des cotisations personnelles d'allocations familiales des
employeurs et travailleurs indépendants.
A l'
article 5,
elle a refusé la création d'une taxe
additionnelle de santé publique sur les tabacs et a adopté un
amendement en faveur du relèvement de la fraction des droits de
consommation sur les tabacs affectée à la caisse nationale
d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).
A l'
article 6
relatif à la création d'un nouveau
prélèvement social de 2 % regroupant les
prélèvements actuels de 1 % affecté à la CNAF et de
1 % affecté à la caisse nationale d'assurance vieillesse des
travailleurs salariés (CNAVTS), la commission a adopté un
amendement tendant à réduire à 1,5 % le taux de ce nouveau
prélèvement.
La commission a ensuite adopté un amendement tendant à la
suppression de l'
article 8
relatif à la création d'un
contribution sur les ventes directes des laboratoires pharmaceutiques.
Elle a ensuite examiné à l'
article 9
un amendement de
suppression de cet article qui tend à valider, de façon
préventive, les taux des cotisations d'accidents du travail fixés
par voie réglementaire pour 1997.
M. Michel Charasse s'est demandé si le refus de la validation ne
risquait pas d'amener la branche accidents du travail à devoir
rembourser les cotisations trop perçues, ce qui serait source de
complications et de coûts de gestion inutiles.
Le rapporteur pour avis a fait valoir que les cotisations indues pouvaient tout
simplement être compensées par un abattement sur les cotisations
de l'année en cours, comme cela a déjà été
voté par le Parlement en 1993 à la suite d'une
précédente annulation. La commission a alors adopté un
amendement de suppression de cet article.
A l'
article 10,
qui augmente le taux de la taxe sur les contributions
patronales au financement des garanties complémentaires de
prévoyance, la commission a adopté un amendement tendant, d'une
part, à refuser l'augmentation de son taux et, d'autre part, à
supprimer cette taxe à compter de 1999.
Elle a supprimé les paragraphes III et IV de l'
article 11
,
relatif à la neutralisation de la seconde répartition de la
contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) pour
1997, afin que les excédents dégagés par cette taxe
restent affectés à l'organisation autonome de l'industrie et du
commercie (ORGANIC), à la caisse autonome nationale de compensation de
l'assurance vieillesse artisanale (CANCAVA), et à la caisse d'assurance
maladie des professions indépendantes (CANAM).
La commission a ensuite supprimé l'
article 12
relatif à la
modification des règles de compensation bilatérale entre la
Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de
notaires (CRPCEN) à la Caisse nationale d'assurance maladie des
travailleurs salariés (CNAMTS).
M. Maurice Schuman a souligné qu'il attachait beaucoup d'importance
à la suppression de cet article, qui menaçait l'équilibre
financier d'un régime à la création duquel il avait
contribué dans ses fonctions antérieures.
A
l'article 14,
relatif à l'absorption du régime
spécial de l'ancienne chambre de commerce et d'industrie de Roubaix par
le régime général, la commission a adopté un
amendement tendant à rejeter, à titre conservatoire, la mesure
proposée et à demander au Gouvernement un rapport sur la
situation de l'ensemble des micro-régimes de sécurité
sociale en voie d'extinction.
A
l'article 15
relatif aux prévisions des recettes par
catégories, la commission a adopté un amendement réduisant
de 1,4 milliard de francs les prévisions de cotisations effectives
pour 1998, correspondant à l'excédant prévisionnel de la
branche accidents du travail.
La commission a ensuite adopté des amendements tendant à la
suppression de l'
article 19,
concernant la mise sous conditions de
ressources des allocations familiales, et de l'
article 20,
relatif
à la réduction du taux de prise en charge des cotisations
sociales pour l'allocation de garde d'enfants à domicile.
Puis la commission a adopté un amendement, portant
article
additionnel après l'article 23
, tendant à geler pour 1998 les
dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale
à leur niveau de 1997.
M. Michel Charasse s'est demandé si la rédaction de
l'article additionnel proposé ne risquait pas d'avoir un
caractère d'injonction au Gouvernement.
A
l'article 23 bis
, relatif aux objectifs de dépenses par
branche, la commission a adopté un amendement tirant les
conséquences de l'amendement précédent.
A l'
article 23 ter
, relatif à l'objectif national de
dépenses d'assurance maladie, la commission a adopté un
amendement tendant à limiter la progression de l'ONDAM au taux
d'inflation hors tabac.
A l'
article 25,
relatif au transfert à la CADES de la dette
des exercices 1997 et 1998 du régime général, la
commission a adopté un premier amendement tendant à
préciser qu'à la date fixée pour son terme, la caisse
serait dissoute et son patrimoine dévolu à l'Etat.
M. Philippe Adnot a marqué sa réprobation de la
méthode consistant à reporter sur les générations
futures le poids des déficits actuels, et a déclaré
être défavorable à l'adoption de l'article 25 du
projet de loi de financement.
M. Jean-Philippe Lachenaud a indiqué qu'il existait d'autres
solutions qu'une prolongation de la durée de la CADES.
M. Michel Charasse a fait observer qu'il était illusoire de fixer une
date pour la disparition de la CADES.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis, est convenu que le transfert de la
nouvelle dette du régime général à la CADES ne
faisait que reporter la difficulté, mais qu'il fallait bien faire face
aux échéances des avances de la Caisse des dépôts et
consignations au régime général. Après avoir
précisé que le transfert de 87 milliards de francs et la
prolongation de la CADES correspondait à une charge
d'intérêts supplémentaire de 33 milliards de francs, il a
fait valoir que l'autre solution consistant à relever la contribution de
remboursement de la dette sociale (CRDS) de 0,5 à 0,7 point, soit un
prélèvement supplémentaire sur les ménages de 10
milliards de francs pour 1998, semblait exclue.
La commission a ensuite adopté un second amendement à
l'article 25
, tendant à prévoir que seule la part du
versement de la CADES à l'Etat représentative des
intérêts pouvait être imputée au budget
général, la part représentative du remboursement du
capital étant versée directement au Trésor.
A
l'article 26,
relatif aux plafonds de trésorerie des
régimes autorisés à s'endetter, la commission a
adopté un amendement excluant de cette faculté la caisse
nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).
M. René Régnault a rappelé que le Gouvernement, en
annonçant aux élus locaux que les taux de cotisation à la
CNRACL ne seraient pas augmentés en 1998, avait omis de préciser
qu'il proposerait par ailleurs d'autoriser la CNRACL à s'endetter. Il a
fait part de son opposition à cette proposition, qui constituerait une
dangereuse fuite en avant en mettant à la charge de la CNRACL des frais
financiers supplémentaires. Il a annoncé que son groupe
s'efforcerait de proposer une solution pour que la CNRACL soit dans la
situation d'honorer ses obligations en 1998, sans avoir à s'endetter.
AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
Article 3
Rédiger comme suit cet article :
I.- Le II. de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
"L'avoir fiscal non utilisé en application des dispositions de
l'article 158
bis
du code général des impôts est
déduit de l'assiette de la contribution."
II.- Le III de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
"Les dispositions du II ne sont pas applicables aux produits visés au
2° de l'article 199 septies du code général des
impôts."
III.- Les pertes de recettes résultant du II ci-dessus sont
compensées à due concurrence par une majoration des taux
mentionnés aux I, II et III de l'article L. 136-8 du code de la
sécurité sociale.
Article 4
Supprimer cet article
Article 5
Rédiger comme suit cet article :
Au dernier alinéa de l'article L. 241-2 du code de la
sécurité sociale, supprimer les mots "pour 1997".
Article 6
Dans le I du texte proposé pour l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale par le I de cet article, remplacer le taux de :"2 %" par celui de :"1,5 %".
Article 8
Supprimer cet article
Article 9
Supprimer cet article
Article 10
Rédiger ainsi le paragraphe II de cet article :
II.- A l'article L.137-1 du même code, après les mots : "il est
institué", sont insérés les mots : ", jusqu'au 31
décembre 1998,".
Article 11
Supprimer les paragraphes III et IV de cet article.
Article 12
Supprimer cet article
Article 14
Rédiger ainsi cet article :
A l'appui du projet de loi de financement de la sécurité sociale
pour 1999, le Gouvernement présente un rapport :
- analysant la situation de chacun des régimes spéciaux de
retraite en voie d'extinction ;
- déterminant des règles communes pour leur éventuelle
absorption par un autre régime de sécurité sociale ;
- et évaluant, pour chacun des régimes concernés, les
incidences financières de leur absorption éventuelle.
Article 15
Dans la première ligne du tableau de cet article,
remplacer le nombre:
1 034,1
par le nombre:
1 032,7
Article 19
Supprimer cet article
Article 20
Supprimer cet article
Article additionnel après l'article 23
Les budgets de gestion administrative des organismes de sécurité sociale visés à l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale sont limités pour 1998 aux montants atteints en 1997.
Article 23 bis
I.- A la première ligne du tableau de cet article,
remplacer le nombre :
678,5
par le nombre :
677,7
II. - A la seconde ligne du tableau de cet article, remplacer le nombre :
755,0
par le nombre :
754,7
III.- A la troisième ligne du tableau de cet article, remplacer le
nombre :
50,8
par le nombre :
50,7
IV.- A la quatrième ligne du tableau de cet article, remplacer le nombre
:
246,9
par le nombre :
246,7
Article 23 ter
Dans le texte de cet article, remplacer la somme :
613,8 milliards de francs
par la somme :
608 milliards de francs
Article 25
Rédiger comme suit le 1° de cet article :
1° L'article 1er est ainsi modifié :
a)
Les mots : "treize ans et un mois" sont remplacés par les
mots "dix-huit ans et un mois" ;
b)
Il est inséré un alinéa ainsi
rédigé :
"Au terme de son existence prévu par la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998, le 31 janvier 2014, la Caisse
d'amortissement de la dette sociale est dissoute et son patrimoine est
dévolu à l'Etat. Cette dévolution du patrimoine fait
l'objet d'un arrêté conjoint du ministre chargé de la
sécurité sociale et du ministre chargé de
l'économie et des finances. Les transferts des biens, droits et
obligations de la caisse d'amortissement de la dette sociale qu'elle suppose ne
donnent lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts,
droits ou taxes" ;
Article 25
Dans 3° de cet article, insérer deux
alinéas ainsi rédigés :
c) Dans le III, les mots : "au budget général de" sont
remplacés par le mot : "à".
d) Le III est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
"A compter de l'année 1998 et jusqu'à l'année 2008, la
part de cette somme correspondant aux remboursements en capital de la dette
visée à l'article 105 de la loi de finances pour 1994 est
versée au Trésor, sans qu'elle puisse faire l'objet d'un
versement au budget général."
Article 26
Supprimer la troisième ligne du tableau de cet article.
1
Rapport général sur le
projet de loi de finances pour 1995, n° 79 tome I, pages 58 et suivantes.
2
Rapport n° 385 sur le projet de loi de financement de
la sécurité sociale, Tome II, Assurance maladie et accidents du
travail, p.58.
3
Stockage et distribution des produits pharmaceutiques et
parapharmaceutiques auprès des grossistes-répartiteurs, des
pharmaciens d'officine, des hôpitaux et cliniques publics et privés
4
L'article D 242-1 du code de la sécurité sociale
fait en réalité référence à un double
plafond d'exonération : le plafond général égal
à 85 % du plafond de la sécurité sociale et qui inclut
"toutes prestations complémentaires de retraite et de prévoyance"
et le plafond spécifique de 19 % du plafond de la
sécurité sociale pour les "contributions destinées au
financement des prestations complémentaires de prevoyance". Aujourd'hui
ce plafond représente 31.281 francs par salarié et par an.
5
Fiches de présentation du plan de redressement de la
sécurité sociale de novembre 1995.
6
Les contributions de l'employeur destinées au financement
pour ses salariés expatriés, soit de la protection sociale de
base (par exemple, affiliation à la caisse des Français de
l'étranger), soit de la prévoyance complémentaire ne sont
pas comprises dans l'assiette de la taxe.
7
Rapport n° 385, tome III, p.27.
8
La CNREBTP n'est pas citée à ce niveau légal
dans la mesure où elle bénéficie réglementairement
d'un prélèvement sur la fraction de C3S attribuée à
l'ORGANIC.
9
Annexe C, recettes et dépenses des régimes de base,
page 96. Ces prévisions intègrent les modifications
éventuellement apportées au code de la sécurité
sociale par le projet de loi de financement de la sécurité
sociale.
10
Rapport AN n° 385, Tome III, Assurance vieillesse
p. 41
11
Rapport AN n° 386, p. 76
12
Lettre de l'OFCE n° 167 - 30 septembre 1997 - "Le
plafonnement des allocations familiales : question de méthodes."
13
Rapport AN n° 385 - Tome II Assurance maladie et accidents
du travail
14
S'ajoutant aux 13,6 milliards de francs versés par
le FSV en 1994 et 1995 au titre des charges d'intérêt de la dette.
15
Sans quoi, d'ailleurs, le taux de CRDS aurait été
fixé à un niveau plus bas.
16
L'article 14 a prévu que les prestations familiales
seraient assujetties à compter de 1997. Pour 90 %, l'assiette des
contributions est constituée de revenus d'activité et de
remplacement.