EXAMEN DES ARTICLES
Pour le titre de la proposition de loi, votre commission a retenu un intitulé de portée plus large que celui figurant dans le texte initial : elle a ainsi préféré la notion de diminution des " risques sanitaires liés à l'exposition à la musique amplifiée " à celle des " risques de lésions auditives lors de l'écoute de baladeurs et de la fréquentation de discothèques ".
Article premier
Prévention des risques
sanitaires liés à l'exposition à un niveau
sonore
élevé
(Intitulé du chapitre V - II du titre premier du
livre premier du code de la santé publique)
Cet article a pour objet de modifier l'intitulé du
chapitre V-II
(" Lutte contre les nuisances sonores
individuelles
") du titre
premier (" Mesures
sanitaires
générales ")
du livre premier
(" Protection
générale de la santé publique ")
du code de la
santé publique.
Ce chapitre V-II a été créé par l'article 2 de
la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre
sanitaire, social et statutaire. Il contient les articles L. 44-5 et
L. 44-6 consacrés à la limitation de la puissance sonore des
baladeurs musicaux.
Dans la mesure où il apparaît opportun que la nouvelle
législation proposée par la proposition de loi, qui concerne
notamment les concerts et les discothèques, figure dans ce chapitre,
l'intitulé de ce dernier
(" Lutte contre les nuisances sonores
individuelles ")
ne peut être conservé.
Votre commission a préféré retenir un intitulé de
portée plus large et qui affirme clairement la finalité sanitaire
de la législation :
" Prévention des risques sanitaires
liés à l'exposition à un niveau sonore
élevé ".
Art. 2
Limitation de la puissance sonore des
jouets musicaux
(Art. L. 44-5 du code de la santé publique)
Cet article, qui correspond à l'article premier du
texte initial de la proposition de loi, limite à 85 décibels
SPL la puissance sonore des jouets musicaux. Il s'insère dans
l'article L. 44-5 du code de la santé publique, issu de la loi
n° 96-452 du 28 mai 1996, qui limite à 100
décibels la puissance sonore des baladeurs musicaux
commercialisés en France.
L'exposé des motifs de la proposition de loi n° 194 indiquait
que son article premier avait pour objet d'abaisser de 100 à
85 décibels la puissance sonore de tous les baladeurs : en fait,
son article premier ne concerne que les baladeurs musicaux
" destinés aux jeunes enfants ".
Votre commission préfère d'ailleurs qu'il en soit ainsi. En
effet, la limitation à 100 décibels de la puissance sonore
des baladeurs n'est pas encore applicable faute de mesures
réglementaires d'application.
Conformément à la législation européenne, le projet
de décret et d'arrêté qui précise les
modalités d'application de l'article L. 44-5 a
été notifié à la Commission qui n'a pas encore
donné son avis.
En effet, la directive 83/189 CEE instituant une procédure
d'échange dans le domaine des normes techniques, qui a été
modifiée par la directive 94/10 CEE prévoit que,
préalablement à son entrée en vigueur, tout projet de
norme doit être notifié à la Commission.
Pendant trois mois, l'application de ce texte est donc suspendue, pour laisser
à tout Etat membre ou à la Commission le temps de réagir
s'il leur apparaît que cette norme peut entraver la concurrence.
Le projet d'arrêté transmis à Bruxelles définit
précisément les baladeurs musicaux, les modalités de
mesure de leur puissance sonore ainsi que les moyens d'information du
consommateur.
Il prévoit également qu'une déclaration de
conformité établie par le fabricant ou l'importateur doit
être présentée aux autorités de contrôle.
Le projet de décret sanctionne enfin de l'amende prévue pour les
contraventions de cinquième classe, assortie le cas
échéant d'une peine de confiscation, la commercialisation en
France de baladeurs musicaux d'une puissance sonore supérieure à
100 décibels.
Votre commission estime prématuré, alors que la loi du
28 mai 1996 n'est pas encore opposable, d'abaisser le niveau sonore
maximal qu'elle prévoit -et cela même s'il semble que les
fabricants le respectent d'ores et déjà pour les produits
commercialisés en France.
En revanche, il est opportun de fixer un niveau sonore maximal inférieur
à 100 décibels pour les baladeurs destinés aux jeunes
enfants. En ce qui les concerne, le niveau choisi par la proposition de loi,
dans l'article premier de son texte initial, est de 85 décibels.
Ce niveau est conforme aux conclusions du Conseil supérieur
d'hygiène publique de France (avis du 4 avril 1996), selon
lesquelles "
parmi les appareils, seuls ceux qui sont limités
à un niveau sonore maximal de 85 décibels peuvent être
considérés comme ne présentant qu'un risque auditif
très faible
".
Certes, ce sont le bon sens et le principe de précaution, plus que des
résultats d'études épidémiologiques, qui commandent
d'éviter l'écoute prolongée de baladeurs chez les jeunes
enfants et de fixer, pour ce qui les concerne, un niveau de pression sonore
inférieur à celui qui est applicable pour les adultes ou les
adolescents.
Mais point n'est besoin d'attendre la survenue d'accidents auditifs chez de
très jeunes enfants pour édicter une mesure préventive.
Aussi, votre commission a retenu à la fois le principe d'une limitation
du niveau sonore des baladeurs destinés aux enfants et le niveau
proposé par la proposition de loi.
Elle a cependant préféré substituer à la notion de
"
baladeurs musicaux destinés aux jeunes enfants
"
celle de "
jouets musicaux
" : cette dernière
référence est en effet à la fois plus large et plus
précise que la première.
Les mesures de contrôle prévues à l'article L. 44-6
pour les baladeurs s'appliqueront aussi aux jouets musicaux, de même que
l'interdiction de commercialisation en France pour les jouets qui ne seraient
pas conformes à la norme de 85 décibels.
Art. 3
Limitation du niveau sonore dans les lieux
de production et de diffusion de musique
amplifiée
(Art. L. 44-7 et art. L. 44-8 nouveaux
du code de la santé publique)
I - Art. L. 44-7 du code de la santé
publique
L'article 3 qui correspond aux articles 2, 3 et 4 du texte initial de la
proposition de loi, propose une limitation du niveau sonore dans les lieux de
diffusion et de production de musique amplifiée. Il prévoit les
modalités de contrôle et les mesures judiciaires et
administratives applicables en cas de dépassement du niveau sonore
maximal. Ces dispositions sont rassemblées dans un article L. 44-7
nouveau du code de la santé publique, inséré dans le
chapitre V-II du titre premier de son livre premier.
Le texte initial de la proposition de loi prévoyait le dispositif
suivant :
1) Dans son article 2, il créait un nouveau chapitre V-III (et non
VIII, comme le laisse à penser le texte imprimé) dans le titre
premier du livre premier du code de la santé publique. Ce chapitre
était intitulé : "
Lutte contre les nuisances sonores
dans les lieux collectifs d'écoute des musiques amplifiées,
concerts et discothèques
"). Pour des raisons pratiques, votre
commission n'a pas retenu cette proposition et a préféré
rassembler toutes les dispositions (elles sont au nombre de deux) relatives
à la musique amplifiée dans un seul chapitre (chapitre V-II)
plutôt que deux.
2) L'article 2 du texte initial de la proposition de loi
prévoyait ensuite deux dispositions relatives aux concerts et
discothèques. Il fixait ainsi à 100 2,5 décibels la
limite du niveau sonore dans les concerts et à
90 2,5 décibels celle des discothèques. Bien que
la rédaction de la proposition de loi ne soit pas strictement
symétrique pour les concerts et les discothèques, on comprend que
ce niveau sonore devait être apprécié en moyenne pendant
une durée déterminée par décret, et que les
infractions donneraient lieu au paiement d'amendes dans les deux cas.
Votre commission, tout en respectant les intentions des auteurs de la
proposition de loi, a adopté un article qui se caractérise par
plusieurs éléments :
- son champ d'application est plus large que celui du texte initial de la
proposition de loi : en effet, il concerne, non seulement les concerts et
discothèques, mais aussi tous les lieux de production, lieux de
répétition, par exemple, et de diffusion de musique
amplifiée. Il concerne donc aussi notamment les salles de cinéma
ou les animations musicales dans les centres commerciaux ou dans les bars.
Par rapport au projet de décret d'application de la loi
n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte
contre le bruit, actuellement examiné par le Conseil d'Etat, il inclut
aussi les concerts en plein air et les salles de spectacles au sens de
l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 ;
- il renvoie, comme le faisait la proposition de loi initiale
(art. 4), au décret la détermination de la durée
pendant laquelle doit être mesuré le niveau sonore ainsi que les
modalités de cette mesure ;
- pour les vérifications, contrôles et mesures judiciaires
applicables, il renvoie aux articles 21 et 22 et au titre V de la loi
n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la
lutte contre le bruit. En effet, par souci de simplicité et dans la
mesure où le dispositif de portée générale
prévu en 1992 pour la lutte contre le bruit est très complet, il
n'est pas apparu utile à votre commission d'y déroger.
Il n'est donc plus prévu, comme dans le texte initial de la proposition
de loi, que des vérifications seront faites "
deux fois par
an
". Ce dispositif s'analysait comme une injonction faite aux
services de contrôle ; il aurait pu être source de contentieux et
revêtait de surcroît peu de portée pratique dans certains
cas (concerts, par exemple). La commission n'a donc pas jugé utile de le
retenir ;
- en ce qui concerne le niveau sonore maximal, le texte adopté par
la commission retient une norme simple, à savoir 90 décibels
A en moyenne, sur une durée prévue par décret, pour tous
les lieux de production ou de diffusion de musique amplifiée. Cette
valeur de 90 décibels est très en deçà des
pratiques actuelles. Dans la mesure où elle ne se justifie que dans un
souci de protection de la santé publique, le texte adopté par la
commission prévoit la possibilité de dérogations,
établies par décret, pour certains lieux, en fonction des risques
induits pour la santé. Votre commission a souhaité limiter
à 10 décibels l'ampleur de ces dérogations.
La proposition de loi prévoyait aussi que les mesures seraient
effectuées "
dans l'axe des enceintes
" ou
"
à l'endroit le plus défavorable pour le
client
" : dans la mesure où l'application de cette disposition
pourrait générer d'inutiles contentieux, votre commission a
préféré retenir la référence à
"
tout endroit où peuvent se trouver le public ou les
clients
".
3) Le texte initial de la proposition de loi prévoyait, en son
article 3, que les frais de contrôle resteraient à la charge
des établissements.
Cette disposition doit être mise en regard de l'article 2 de la loi
n° 92-1444 précitée, qui évoque " les
conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut
vérifier ou faire vérifier par ces organismes,
aux frais du
détenteur
, la conformité des objets et dispositifs aux
prescriptions mentionnées au deuxième alinéa ".
Votre commission a retenu ce principe dans le texte proposé pour le
troisième alinéa de l'article L. 44-7 du code de la
santé publique.
II - Art. L. 44-8 du code de la santé publique
L'article 3 des conclusions de votre commission prévoit que les
lieux de diffusion de musique amplifiée doivent être
équipés de sonomètres normalisés, dont les
caractéristiques seront prévues par décret. Il impose
également qu'un message sanitaire soit affiché à
l'entrée de ces lieux.
L'obligation de détention d'un sonomètre, également
proposée par la proposition de loi n° 2733 (dixième
législature) déposée à l'Assemblée nationale
par M. Claude Gaillard, député ("
Proposition de loi
rendant obligatoire l'installation d'un sonomètre dans tous les lieux de
diffusion de musique amplifiée et fixant les normes de mesure des
niveaux sonores
") constitue à la fois une mesure de
portée pédagogique et une disposition tendant à rendre les
contrôles plus aisés, les sonomètres pouvant être
enregistreurs.
Responsabilisant les professionnels, cette mesure complétera celle qui
concerne les messages sanitaires destinés aux clients ou au public afin
qu'ils modifient progressivement leurs comportements dans
l'intérêt de leur santé.
Sous réserve de ces observations, votre commission vous demande
d'adopter la proposition de loi dans le texte résultant de ses
conclusions tel qu'il est inclus dans le présent rapport.