2. Les incertitudes concernant l'Europe du Sud-Est
S'il ne
faut pas perdre de vue la déception causée dans certains pays par
le choix de seulement trois pays pour la première vague
d'élargissement, il convient également de prendre en compte le
problème spécifique que représente l'Europe du Sud-Est,
qui ne sera pas représentée à l'OTAN par de nouveaux
membres après cette première vague. C'est d'ailleurs pour tenter
d'éviter cette coupure Nord-Sud que la France, avec plusieurs de ses
partenaires européens, a plaidé à Madrid pour que
la
Roumanie et la Slovénie
soient invités à la
première vague d'adhésion, au côté des trois Etats
d'Europe centrale. L'Europe du Sud-Est a en effet été le
théâtre de la première véritable crise militaire sur
notre continent. Par delà la mise en oeuvre de l'accord de Dayton pour
la Bosnie-Herzégovine, l'environnement sécuritaire actuel de
cette partie de l'Europe, avec la situation au Kosovo ou en Albanie, demeure
plus qu'instable.
La communauté internationale a pris conscience de cette
difficulté et les initiatives sont nombreuses qui se proposent
d'instaurer pour cette zone des
mécanismes régionaux de
prévention et de coopération
.
Ainsi l'Union européenne a-t-elle pris l'initiative
du "processus de
Royaumont",
rassemblant la plupart des Etats de la région
8(
*
)
aux côtés des Quinze, de
la Russie, du Conseil de l'Europe et de l'OSCE. Destiné à
promouvoir, éventuellement par la conclusion d'un traité, la
stabilité, la confiance et le bon voisinage dans l'Europe du Sud-Est, ce
projet est concurrencé par la
Southeast Cooperation Initiative
(SECI),
initiative américaine décidée à
Genève en 1996 et destinée à encourager la
coopération régionale sur des questions pratiques telles que le
passage des frontières, l'aménagement des infrastructures, la
promotion des échanges, l'énergie...
Nombreux sont également les
projets régionaux
: initiative
centre-européenne, conférences balkaniques lancées par la
Bulgarie, négociations sur les mesures de stabilisation régionale
et de maîtrise des armements dans le Sud-Est de l'Europe, prévues
par les accords de Dayton/Paris, sans oublier
le partenariat pour la paix et
le CPEA
auxquels participent les Etats de la zone. Une telle floraison
quelque peu désordonnée d'initiatives témoigne de la
sollicitude d'une communauté internationale légitimement
préoccupée par une région dont les principaux pays, comme
la Bulgarie et la Roumanie, ne participent à aucun des processus
d'élargissement actuellement en cours des organisations
européennes et euro-atlantiques et qui est le théâtre de
conflits latents. On peut toutefois regretter que ce souci de ne pas
concrétiser une nouvelle fracture Nord-Sud en Europe ne donne pas lieu
à un projet plus cohérent, plus clair et plus lisible rassemblant
et catalysant cet évident besoin de dialogue régional et
d'actions préventives.