2. Les contraintes nationales et internationales
La
vigilance de l'opinion publique
Selon une enquête menée en 1996
49(
*
)
, la lutte contre la pollution de
l'air est, pour plus d'un Français sur deux (54 %, soit huit points
de plus que l'année précédente), l'action que l'Etat doit
mener en priorité dans le domaine de la protection de l'environnement.
Quant aux Parisiens, 62 % d'entre eux placent la pollution en tête
de leurs préoccupations
50(
*
)
.
De plus, 95 % des Français sont conscients des risques que la
pollution atmosphérique présente pour la santé et, parmi
eux, 72 % y voient un danger qu'ils qualifient d'important : 45 % de
nos concitoyens déclarent qu'eux-mêmes ou une personne de leur
proche entourage ont subi des troubles liés à ces
phénomènes
51(
*
)
.
Par ailleurs, dans le domaine des mesures à prendre pour lutter contre
cette nuisance, même si les comportements personnels ont tendance
à évoluer dans le bon sens, l'action de l'Etat et la contrainte
réglementaire semblent indispensables afin de l'emporter sur la pratique
individuelle spontanée.
La loi du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation
rationnelle de l'énergie
Ce texte a précisément mis en place un cadre d'action pour les
pouvoirs publics en organisant la surveillance de la qualité de l'air,
en prévoyant des plans régionaux pour la qualité de l'air,
des plans de protection de l'atmosphère, des plans de
déplacements urbains et en revalorisant le concept de maîtrise de
l'énergie.
Des délais ont été prévus pour la
réalisation de ces objectifs : il est indispensable de les respecter.
Des décrets en Conseil d'Etat doivent définir des mesures visant
à réduire la consommation d'énergie et à limiter
les sources d'émission de substances polluantes nocives pour la
santé humaine et l'environnement : il est indispensable de les
faire paraître rapidement.
Les choix européens
Ils concernent le domaine des transports mais, de façon plus
générale, l'amélioration de la qualité de l'air.
En ce qui concerne les
transports
, le programme " Auto-oil "
doit aboutir en juin 1998.
LE PROGRAMME AUTO-OIL SUR LES CARBURANTS
Le
projet de directive, qui vise à réduire à l'horizon 2010
les concentrations de polluants dans l'air en milieu urbain de 60 à
70 %, fait l'objet de surenchères de la part du Parlement
européen. Ainsi, le texte élaboré par la Commission sur la
base du programme Auto-Oil
52(
*
)
qui définissait les orientations les plus économiques (elles
n'auraient coûté que 12 milliards d'euros à l'Union
européenne), a été repoussé en première
lecture par le Parlement au motif qu'il manquait d'ambition. Le Conseil des
ministres a alors proposé un texte de compromis qui représente
une dépense de 20 milliards d'euros, dont 15 % environ pour la
France.
Mais le Parlement s'est prononcé pour des normes plus
sévères et obligatoires aussi bien pour 2000 que pour 2005
(alors que le texte du Conseil ne prévoit que des valeurs limites
indicatives pour 2005). Il s'agirait notamment de porter la teneur maximale
autorisée en soufre de 400-500 parties pour millions (ppm) à 150
ppm pour l'essence et 200 ppm pour le gazole en 2000, et 30 ppm pour l'essence
et 50 ppm pour le gazole en 2005 (la position commune du Conseil
prévoyait uniquement 350 ppm pour le gazole à compter du
1
er
janvier 2000). Il s'agirait également de ramener à
1 % v/v (valeur par volume) la teneur en benzène dans les essences
(contre 5 % aujourd'hui) et à 35 % v/v la valeur limite obligatoire
des composés aromatiques (contre 42 % dans la proposition du
Conseil). Enfin, le Parlement a voté l'interdiction au 1
er
janvier 2000 de la commercialisation de l'essence plombée.
Le surcoût par rapport au projet du Conseil serait de l'ordre de 30
milliards d'euros, portant le coût global du durcissement envisagé
à 50 milliards d'euros. Un compromis final devrait être
trouvé d'ici juin 1998
, en comité de conciliation avec le
Conseil des ministres.
De plus, le Parlement européen a demandé à la Commission
européenne d'élaborer d'ici fin 1998
une directive
réglementant les émissions spécifiques de gaz
carbonique
et rendant obligatoire à partir de 2005 une consommation
de 5 litres/100 km pour les véhicules neufs de la gamme
moyenne (4,5 litres pour le diesel). Ces valeurs devraient être
fixées à 3 litres pour 2010.
En ce qui concerne la
qualité de l'air
, les ministres de
l'environnement européens ont accepté en mars 1998, à
l'unanimité, la proposition de la Commission europénne d'imposer
des valeurs limites calquées sur la recommandation de l'Organisation
mondiale de la santé pour les émissions de certaines polluants,
nocifs pour la santé et l'environnement. Ces valeurs limites concernent
le dioxyde de soufre (SO
2
), et le plomb (la date butoir étant
fixée à 2005), ainsi que le dioxyde d'azote (NO
2
),
l'oxyde nitrique (NO) et les particules (la date butoir étant
fixée à 2010).
Les engagements internationaux de baisse des rejets de gaz à effet
de serre
.
La situation des pays industriels est préoccupante :
Un Français émet en moyenne par an 6,1 tonnes de
CO
2
contre près de 9 tonnes pour un Japonais et
près de 20 tonnes pour un habitant des Etats-Unis.
Pourtant, malgré ses faibles émissions, la France n'est pas en
situation confortable dans les négociations internationales
. Le
sommet de Kyoto a fixé un taux global de réduction des
émissions des six gaz à effet de serre de 5,2 % entre
2008 et 2012 par rapport à 1990, soit une diminution de 7 % pour
les Etats-Unis, 6 % pour la Japon et 8 % pour la " bulle "
que constituent les 15 pays de l'Union européenne.
Or, la France avait déjà un faible niveau d'émission de
gaz carbonique en 1990, compte tenu des éléments
énoncés plus haut, et les efforts qu'elle devra consentir seront,
de ce fait, plus coûteux que pour d'autres pays. En effet, son bas taux
d'émissions provenant du recours massif à l'énergie
nucléaire,
l'effort devra porter principalement sur le secteur des
transports
, ce qui implique des décisions politiques
délicates.
Par ailleurs, l'Union européenne redéfinira, vraisemblablement en
juin 1998, les normes respectives pour chacun des Etats membres correspondant
au nouvel objectif global (soit une diminution de 8 % alors que celle qui
avait été prévue par le Conseil en mars 1997 était
de 10 %). Dans ce contexte,
la France, même si son taux
d'accroissement autorisé d'émission de gaz à effet de
serre reste fixé à zéro, sera
défavorisée
par le fait que
l'accord de Kyoto porte sur
six gaz à effet de serre et ne prend en compte les
" puits " de carbone (forêts) que de façon
limitée.
Or, lorsque notre pays s'était engagé
à ne pas rejeter plus de gaz en 2010 qu'en 1990, les hypothèses
étaient différentes (prise en compte de seulement
trois gaz : le gaz carbonique, le méthane et l'oxyde nitreux,
mais de l'ensemble des puits).
Il convient donc de bien mesurer et de ne pas
minimiser les efforts qui s'avéreront nécessaires.