Plafonds d'avances de trésorerie
(intitulé nouveau)
Par coordination avec l'insertion d'une section 5
intitulée
" Mesures relatives à la dette et aux plafonds
d'avances de trésorerie "
qu'elle vous propose avant l'article
24, votre commission vous propose de supprimer cet intitulé nouveau
introduit par l'Assemblée nationale.
Votre commission vous propose en conséquence d'adopter un amendement
de suppression de cet intitulé.
Art. 26 (nouveau)
Plafonds des avances de
trésorerie
Objet : Cet article fixe les limites dans lesquelles
certains régimes obligatoires de base comptant plus de 20.000 cotisants,
actifs ou retraités titulaires de droits propres, pourront recourir
à des ressources non permanentes pour couvrir leurs besoins de
trésorerie
Le présent article additionnel ajouté
in fine
par
l'Assemblée nationale rétablit l'article 18 supprimé par
elle.
I - Le dispositif proposé
L'annexe C du projet de loi définit la notion de besoins de
trésorerie qui doit être distinguée de celle de besoins de
financement et présente, par ailleurs, les profils de trésorerie
tout au long de l'année 1998 des cinq régimes visés par le
présent article.
Les plafonds proposés sont, pour chacun, les suivants (en milliards de
francs) :
Régime général 15,0
Régime des exploitants agricoles 8,5
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales 2,5
Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines 2,3
Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements
industriels de l'Etat 0,5
L'article 18 rappelle, en outre, que les autres régimes obligatoires de
base comptant plus de 20.000 cotisants actifs ou retraités titulaires de
droits propres, lorsqu'ils disposent d'une trésorerie autonome, ne sont
pas autorisés à recourir à des ressources non permanentes.
S'agissant du régime général, l'annexe C précise
que :
- la trésorerie 1998 part d'un point d'entrée
(+ 12,6 milliards de francs) nettement plus élevé que
l'année précédente en raison de l'opération de
reprise de dette par la CADES, et devrait connaître une
dégradation beaucoup plus limitée compte tenu des mesures de
financement nouvelles intégrées dans ce profil.
La variation de trésorerie sur l'année est estimée
à environ - 8,8 millions de francs dans l'hypothèse
d'une neutralité des relations de trésorerie entre l'Etat et le
régime général.
Le solde au 31 décembre est prévu à hauteur de + 4,1
milliards de francs. Le solde moyen mensuel sur l'exercice devrait
s'élever à + 18,8 milliards de francs.
Le point le plus haut s'élève à 52,4 milliards de francs
le 20 janvier 1998 alors que le point le plus bas devrait être atteint le
9 décembre à - 5,4 milliards de francs ; compte tenu
des montants très élevés des flux de trésorerie,
une marge d'incertitude demeure sur le niveau du solde au jour le jour.
Au total, les besoins de trésorerie du régime
général devraient être couverts par le montant d'avances au
régime général de 15 milliards de francs fixé
par la convention du 18 juin 1980 conclue entre l'ACOSS et la Caisse des
dépôts et consignations.
Une différence majeure est introduite dans le projet de loi pour 1998
par rapport à la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1997.
Parmi les régimes autorisés cette année à recourir
à des ressources non permanentes, se trouve en effet
un nouveau
régime : la CNRACL
. Son plafond d'avances autorisées est
fixé à 2,5 milliards de francs.
Le rapport de la Commission des comptes de la sécurité
sociale
4(
*
)
décrit ainsi
les perspectives pour 1998 :
" Après deux années de soldes excédentaires, le
régime devrait, en 1998, redevenir déficitaire à -
2,5 milliards de francs. En l'absence d'éléments
exceptionnels, comme le versement en 1997 des réserves de l'ATIACL au
crédit de la CNRACL, le régime devient directement tributaire de
l'évolution de son rapport démographique, et de son importante
contribution au processus de compensation (à hauteur de 19,3 milliards
en 1998) (...).
" Malgré le versement des réserves de l'ATIACL (4,5
milliards de francs) au crédit de la CNRACL en 1997, le régime
restera confronté à un sérieux problème de
trésorerie. Compte tenu du report sur 1998 du paiement d'une partie des
acomptes de compensation relatifs à 1997 (environ 2,8 milliards de
francs), du déficit de l'exercice 1998 (- 2,5 milliards de
francs) et du solde de trésorerie au 31 décembre 1997
(+ 1,3 milliard de francs hors réserves du Fonds d'action
sociale), et en supposant les charges de compensation relatives à 1998
entièrement payées en 1998 (environ 19,3 milliards de
francs), son déficit de trésorerie fin 1998 devrait
s'élever à environ 4 milliards de francs, hors
réserves du Fonds d'action sociale.
" Pour régler la situation financière de la CNRACL,
dès lors que les effectifs hospitaliers et territoriaux ne croissent
plus que faiblement, on peut agir sur trois facteurs : le taux de cotisation
employeur porté à 25,1 % le 1er janvier 1995, le taux
de cotisation salarié inchangé à 7,85 % depuis le
1er février 1991 (la CSG s'étant substituée aux
hausses de cotisations), et le taux de recouvrement de la surcompensation
inchangé à 38 % depuis le 1er janvier 1993. Le
mécanisme de surcompensation a pour effet pratique d'alléger les
subventions de l'Etat aux régimes spéciaux (et tout
particulièrement au régime minier). Ainsi, diminuer le taux de
recouvrement de la surcompensation permettrait de réduire le montant des
transferts versés par la CNRACL aux autres régimes, mais
alourdirait la contribution de l'Etat à ce mécanisme à due
concurrence. Augmenter le taux de cotisation employeur, contribuerait à
gonfler le volume des cotisations reçues par la CNRACL, mais
entraînerait une augmentation des dépenses hospitalières et
territoriales (et probablement à ce titre de l'impôt local), et
contribuerait ainsi à mettre davantage en difficulté la
sécurité sociale (le personnel hospitalier représentant
70 % des dépenses d'hospitalisation). Enfin, augmenter le taux de
cotisation salarié, permettrait également d'augmenter le volume
des cotisations reçues par la CNRACL, sans occasionner de
dépenses budgétaires supplémentaires ou de surcoûts
pour les collectivités territoriales ou pour l'assurance maladie, mais
soulèverait de difficiles problèmes, compte tenu notamment des
différents régimes actuellement alignés sur la CNRACL, et
notamment celui des fonctionnaires civils et militaires de l'Etat. "
Il résulte de cette analyse que la CNRACL devra emprunter pour assurer
les échéances de compensation ; elle devrait le faire dans des
conditions peu favorables et donc à un coût élevé,
dès lors que la Caisse des dépôts et consignations est pour
le moins réticente à l'égard de cette opération.
En témoigne la lettre adressée par le directeur
général de la Caisse des dépôts et consignations
à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité (
lettre en
date du 15 octobre
) :
" Je souhaite appeler votre attention sur les dispositions du projet
de
loi de financement de la sécurité sociale qui, dans le cadre
fixé par la loi organique n° 96-646 du 22 juillet 1996,
prévoient que la CNRACL ait recours en 1998 à des ressources non
permanentes pour couvrir ses besoins de trésorerie jusqu'à
hauteur de 2,5 milliards de francs.
" D'après les prévisions effectuées par les services
de la Caisse des dépôts, gestionnaire de la CNRACL, cette
disposition n'est pas nécessaire puisque les réserves de la
caisse de retraite devraient s'élever à 1,5 milliard de francs en
fin d'exercice 1998, si, comme les années précédentes
à l'initiative de vos services, le calendrier de versement des acomptes
de compensation est aménagé (...).
" Par ailleurs, l'incitation faite à la CNRACL de recourir à
des avances de trésorerie me paraît difficilement
défendable dans le cas d'une institution de retraite largement
excédentaire pour sa gestion propre et fortement créditrice de
régimes déficitaires. Outre le fait que les charges de la CNRACL
se trouveraient alourdies par le paiement d'intérêts, le recours
à ce type d'expédient serait d'autant moins justifié que
l'on sait qu'il faudra dès 1999 traiter le problème au fond et
établir pour cette caisse les modalités d'un équilibre
durable. En effet, l'évolution du rapport démographique de la
CNRACL conduit à une croissance lente mais certaine de ses propres
charges de pensions. (...) "
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a porté le plafond des avances de
trésorerie du régime général de 15 à 20
milliards de francs.
La commission des affaires culturelles familiales et sociales avait
proposé dans un premier temps de porter ce plafond à
30 milliards de francs "
afin d'éviter au Gouvernement de
se voir reprocher de tarder à adresser un rapport au Parlement en cas de
décret visant à relever ce plafond
"
5(
*
)
avant de se rallier en séance
publique à un " moyen terme " en l'espèce
20 milliards de francs.
Ce souci
a priori
louable d'épargner au Gouvernement la peine de
prendre un décret majorant le plafond des avances de trésorerie
du régime général est pourtant
doublement
irrecevable
.
Il est en premier lieu impératif que le Gouvernement s'explique au plus
vite devant le Parlement dès lors qu'il apparaît que le
déficit du régime général enregistre un
dérapage.
Il est en second lieu fâcheux, en majorant par précaution le
plafond des avances qui est une des dispositions véritablement
normatives des projets de loi de financement de la sécurité
sociale et qui lui tient lieu en quelque sorte d'article d'équilibre,
d'anticiper voire d'entériner un tel dérapage.
La tenue des comptes sociaux repose largement sur la motivation et la
mobilisation de l'ensemble des acteurs.
Il serait pour le moins étrange de leur signifier que le redressement
des équilibres financiers reste en quelque sorte facultatif.
Mais, en réalité, il semble que cette majoration du plafond
d'avances soit imputable à la modification des structures des ressources
du régime général qui entraîne celle de son profil
de trésorerie : le basculement des cotisations vers la CSG a ainsi un
coût en trésorerie.
III - La position de votre commission
Votre commission vous propose de supprimer l'autorisation, en
réalité l'injonction, faite à la CNRACL de recourir
à l'emprunt.
Elle appelle, comme l'ont fait les maires de France, à une concertation
entre ces derniers et le Gouvernement sur le dispositif de la surcompensation.
C'est en réalité une nécessaire réforme qui doit
être entreprise du système de compensation entre régimes
à l'origine de transferts considérables et évalués
en 1997 à près de 34 milliards de francs.
Elle vous propose par ailleurs de revenir à un plafond des avances de
trésorerie au régime général fixé à
15 milliards de francs. La majoration votée par l'Assemblée
nationale ne lui semble ni opportune ni utile dès lors, de
surcroît, qu'elle vous propose de supprimer, à l'article 3, le
basculement massif des cotisations d'assurance maladie vers la CSG.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
*
* *
Sous réserve de ces observations et des amendements qu'elle vous a proposés, votre commission des Affaires sociales vous demande d'adopter le présent projet de loi.