Rapport n° 100 (1998-1999) de M. Louis SOUVET , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 9 décembre 1998

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N° 100

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 9 décembre 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur :

- la proposition de résolution présentée en application de l'article 73 bis du Règlement par M. Michel BARNIER sur la communication de la Commission : proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 (n° E-1171),

- la proposition de résolution présentée en application de l'article 73 bis du Règlement par M. Guy FISCHER, Mmes Nicole BORVO, Marie-Claude BEAUDEAU, M. Jean-Luc BÉCART, Mme Danielle BIDARD-REYDET,
MM. Robert BRET, Michel DUFFOUR, Thierry FOUCAUD, Gérard LE CAM, Pierre LEFEBVRE, Paul LORIDANT, Mme Hélène LUC, MM. Jack RALITE, Ivan RENAR et Mme Odette TERRADE sur la communication de la Commission : proposition de
lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 (n° E-1171),

Par M. Louis SOUVET

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.

Voir les numéros :

Sénat : 87 et 98 (1998-1999).

Union européenne.

TRAVAUX DE COMMISSION

Réunie le mercredi 9 décembre 1998 sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission des Affaires sociales a procédé à l'examen de la proposition de résolution n° 87 (1998-1998), présentée par M. Michel Barnier et de la proposition de résolution n° 98 (1998-1999), présentée par M. Guy Fischer et plusieurs de ses collègues , en application de l'article 73 bis du règlement, sur la communication de la Commission européenne : proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 (n° E-1171).

M. Jean Delaneau, président, a déclaré que la commission avait accepté de procéder à l'examen conjoint de la proposition de résolution déposée par M. Michel Barnier et de la proposition de résolution déposée par M. Guy Fischer et plusieurs de ses collègues, bien que cette dernière ait été déposée tardivement.

M. Louis Souvet, rapporteur, a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. rapport ci-après).

M. Guy Fischer , après avoir observé que le Gouvernement français avait obtenu une inflexion sensible dans la conduite de la politique économique au niveau européen, a estimé que le texte de la proposition de la Commission européenne était encore trop libéral. Il a justifié sa proposition de résolution par la nécessité de mieux prendre en compte les aspects sociaux dans la construction européenne. Il a déclaré que sa proposition de résolution concluait à l'adoption des lignes directrices pour l'emploi sous réserve de l'acceptation de modifications substantielles.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard s'est félicitée du contenu et de la rapidité de la mise en oeuvre des plans d'action nationale pour l'emploi. Elle a estimé qu'ils constituaient le pendant du pacte de stabilité et qu'ils préparaient une nouvelle étape de la construction de l'Europe sociale. Elle a considéré que la proposition de résolution de M. Michel Barnier n'était pas très éloignée du plan d'action nationale français à l'exception des remarques ayant trait au rôle de l'Etat dans la mise en place de la réduction du temps de travail. Ce dernier point lui a semblé justifier un avis défavorable du groupe socialiste à l'adoption des conclusions de la commission.

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que les sénateurs avaient la possibilité de présenter des amendements aux conclusions de la commission.

Mme Gisèle Printz a souligné l'intérêt des dispositions relatives à la promotion des handicapés sur le lieu de travail dans les lignes directrices pour l'emploi.

M. Claude Huriet a observé que la commission pourrait être amenée à examiner un nombre toujours plus grand de résolutions, il s'est interrogé sur les moyens de renforcer le dialogue institutionnel entre la commission des Affaires sociales du Sénat, les commissions du Parlement européen et la Commission européenne.

M. Jean Delaneau, président, a considéré que l'approfondissement du dialogue institutionnel reposait notamment sur l'amélioration de la circulation de l'information et le renforcement de la réactivité du Parlement aux initiatives de la Commission européenne. Il a cité l'exemple du Parlement britannique qui est étroitement associé à la définition et à la conduite de la politique européenne du Royaume-Uni.

M. Claude Domeizel s'est interrogé sur la signification de la proposition du rapporteur de modifier la ligne directrice n° 12 afin qu'il soit rappelé que les emplois créés grâce à des aides publiques devaient être, à terme, pérennisés et solvabilisés par la demande privée. Il a désapprouvé cette proposition dans la mesure où elle pourrait concerner le plan emploi-jeunes.

M. André Jourdain a souhaité savoir si la ligne directrice n° 16 relative au développement de contrats de travail adaptables pouvait concerner le multisalariat et les groupements d'employeurs.

M. Louis Souvet, rapporteur, a confirmé que ces deux types d'activité étaient bien concernés par cette ligne directrice n° 16.

M. Guy Fischer s'est interrogé sur le fait que la proposition de résolution adoptée par la commission des Affaires sociales puisse devenir résolution du Sénat sans nécessairement avoir été examinée en séance publique.

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que cette procédure avait été conçue pour des raisons d'efficacité compte tenu du délai souvent très bref existant entre la communication au Parlement des propositions d'actes communautaires et la date prévue pour leur adoption. Il a observé que le droit d'amendement de la proposition de résolution de la commission n'était pas limité aux seuls membres de la commission des Affaires sociales.

La commission a adopté la proposition de résolution résultant des conclusions du rapporteur. Conformément à l'article 73 bis, alinéa 7 du règlement, elle a fixé le délai-limite pour le dépôt des amendements au mardi 15 décembre à 17 heures, ces amendements devant être examinés lors de la réunion de la commission du mercredi 16 décembre.

Mesdames, Messieurs,

La commission des Affaires sociales est saisie, conformément à l'article 88-4 de la Constitution et à l'article 73 bis du règlement du Sénat, de deux propositions de résolution sur la proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 formulée par la Commission européenne.

La première proposition de résolution est présentée à titre personnel par M. Michel Barnier, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, la seconde par M. Guy Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Les lignes directrices pour l'emploi sont un élément important des dispositions relatives aux politiques de l'emploi comprises dans le Traité d'Amsterdam. Elles ont été mises en oeuvre par anticipation depuis 1997. La proposition élaborée par la Commission européenne devrait être examinée lors du Conseil européen de Vienne des 12 et 13 décembre prochains. Il était par conséquent urgent que votre commission examine ce texte de manière à ce que le Parlement puisse utilement mettre en oeuvre la procédure prévue par l'article 88-4 de la Constitution.

Les conclusions de la commission reprennent et complètent, sur cinq points, les réserves formulées par le président Barnier.

La proposition de résolution présentée par M. Guy Fischer et certains de ses collègues du groupe communiste républicain et citoyen est apparue comme trop éloignée des positions tant de la Commission européenne, du Gouvernement français que du Sénat pour constituer un texte de travail.

Votre commission des Affaires sociales a néanmoins souhaité reprendre une préoccupation soulevée par cette proposition de résolution relative à la lutte contre les discriminations au travail.

Sous ces réserves, votre commission des Affaires sociales vous propose d'inviter le Gouvernement à approuver les orientations proposées par la Commission européenne.

I. LES LIGNES DIRECTRICES POUR L'EMPLOI ENTRE COORDINATION DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES NATIONALES ET GOUVERNEMENT ÉCONOMIQUE EUROPÉEN

Le lancement de l'Union économique et monétaire en 1992 a donné lieu à une réflexion 1 ( * ) sur le déséquilibre attendu dans la conduite des politiques économiques entre, d'une part, l'action intégrée et fédérale de la future Banque centrale européenne indépendante et, d'autre part, la mise en oeuvre des politiques budgétaires et structurelles par chacun des Etats membres.

Il est progressivement apparu nécessaire de constituer un contrepoids à la future Banque centrale européenne, ne serait-ce que pour permettre la coordination des choix monétaires et budgétaires. A défaut, le risque était grand d'aboutir à un hiatus entre les institutions, la Banque centrale européenne mettant en oeuvre une politique monétaire excessivement rigoureuse pour dissuader les Etats de promouvoir des politiques supposées laxistes. La réflexion sur un rapprochement des politiques budgétaires et des politiques de l'emploi a donc très tôt été comprise comme une nécessité.

Un débat s'est alors développé entre les tenants de la coordination des politiques nationales et les partisans d'un gouvernement économique européen. Pour ces derniers, il convenait de définir la politique économique au niveau européen, du moins dans ses grandes orientations, la responsabilité de sa mise en oeuvre pouvant rester du domaine des Etats.

Les dispositions du Traité d'Amsterdam relatives à la politique de l'emploi 2 ( * ) ne tranchent pas entre ces deux conceptions, elles constituent plutôt une synthèse improbable de ces deux philosophies opposées.

L'article 125 du Traité dispose que les Etats membres de la Communauté s'attachent à élaborer une stratégie coordonnée pour l'emploi.

L'article 126 pose deux limites à cette stratégie, elle ne doit pas remettre en cause les équilibres économiques et les pratiques nationales liées aux responsabilités des partenaires sociaux.

L'article 127 réduit le rôle de la Communauté à l'encouragement et au soutien de la coopération entre les Etats membres.

L'article 128 détermine le processus d'adoption des lignes directrices dont les Etats membres doivent tenir compte dans leur politique de l'emploi.

Il résulte de ce compromis un dispositif complexe qui ne constitue pas une politique européenne de l'emploi mais bien, comme l'illustre l'intitulé, des lignes directrices, suffisamment générales pour ne heurter aucun des pays membres.

Ces lignes directrices traduisent la prise de conscience des Etats membres de la nécessité de progresser dans la voie d'une Europe sociale. Incidemment, leur caractère peu contraignant illustre l'étendue du chemin à parcourir avant d'aboutir à un véritable espace social européen comme il existe un espace économique et monétaire.

Le Traité d'Amsterdam n'a pas encore été ratifié. Les nouvelles dispositions relatives à la coordination des politiques de l'emploi ont donc été mises en oeuvre par anticipation. Les lignes directrices pour l'emploi adoptées à la suite du Conseil européen extraordinaire de Luxembourg, les 20 et 21 novembre 1997 ont doté l'Union européenne d'une " stratégie pluriannuelle coordonnée " plaçant la lutte contre le chômage au coeur de leur priorité d'action.

Cet engagement pluriannuel pour l'emploi repose sur des objectifs communs, déclinés chaque année dans des plans nationaux pour l'emploi et organisés autour de quatre piliers : améliorer la capacité d'insertion des jeunes et des adultes afin de prévenir le chômage de longue durée et lutter contre l'exclusion ; développer l'esprit d'entreprise ; améliorer la capacité d'adaptation des travailleurs et des entreprises ; renforcer l'égalité des chances entre les hommes et les femmes et oeuvrer pour une meilleure intégration des handicapés.

La mise en oeuvre de cette dynamique donne lieu à une surveillance multilatérale, par l'établissement d'une procédure commune d'évaluation des résultats, utilisant des indicateurs de performances et des indicateurs de moyens et d'efficacité des politiques d'emploi.

Le Conseil européen de Cardiff qui s'est tenu les 15 et 16 juin dernier a examiné les efforts entrepris dans les plans nationaux pour l'emploi. La Commission européenne a rendu public, le 14 octobre dernier, sur la base des rapports transmis par les Etats membres, un rapport conjoint en vue du Conseil européen de Vienne des 12 et 13 décembre prochains. Ce rapport comporte des propositions d'adaptations des lignes directrices adoptées pour 1998.

II. LA COMMISSION EUROPÉENNE PROPOSE D'ADAPTER LES LIGNES DIRECTRICES POUR 1999 DANS UN SENS FAVORABLE À L'AUGMENTATION DU TAUX D'EMPLOI

La Commission européenne considère que les discussions entreprises au début de l'année avec les Etats membres lors de la préparation des plans d'action nationaux ont fait apparaître un certain nombre de lacunes dans la portée et le champ d'application des lignes directrices pour 1998, ainsi que la nécessité d'apporter un certain nombre d'éclaircissements.

Dans ces conditions, la Commission européenne a décidé de proposer un nombre restreint d'adaptations aux lignes directrices pour 1998. Ces modifications sont inspirées par le constat opéré par la Commission européenne comme quoi " il restait beaucoup à faire pour améliorer les performances d'emploi de l'Union européenne ".

La Commission européenne a observé 3 ( * ) en particulier que " les taux actuels de créations d'emplois étaient insuffisants pour éviter l'afflux de nouveaux venus dans le chômage de longue durée, résorber l'effectif existant de chômeurs et offrir des emplois aux nouveaux entrants sur le marché du travail ". Elle a remarqué que " le taux actuel d'emploi de 60,5 % dans l'Union européenne était bien inférieur au taux de 64 % atteint au milieu des années 70 et se situait loin derrière le taux de 74 % des Etats-Unis ".

Taux d'emploi (1985 et 1997)

Source : Commission européenne

En conséquence, la Commission européenne a souhaité que des politiques macro-économiques et des réformes structurelles d'envergure correspondant aux grandes orientations de politique économique soient mises en place pour " redresser la situation ".

Pour ce faire, elle a proposé pour 1999 cinq séries de modifications 4 ( * ) .

•  Concernant l'accentuation des mesures actives, la Commission européenne a souhaité prendre acte des efforts des pays membres pour revoir leurs systèmes fiscaux et leurs régimes d'allocation dans un sens favorable à la participation active au monde du travail et à la lutte contre l'exclusion sociale.

Elle a proposé de créer une nouvelle ligne directrice portant le numéro 4 invitant les Etats membres à examiner et à modifier les systèmes d'indemnisation et de fiscalité de manière à inciter réellement les chômeurs ou les inactifs à chercher et à saisir les possibilités d'emploi ou de formation. Dans le même temps, la Commission européenne préconise une réévaluation critique des prestations existantes comme les préretraites qui incitent les travailleurs à anticiper leur départ du monde du travail.

•  Soulignant l'importance de l'apprentissage tout au long de la vie, la Commission européenne a souhaité introduire une référence spécifique, dans la ligne directrice n° 6, aux besoins en compétences dans les technologies de l'information et de la communication ainsi qu'à la nécessité de faciliter l'accès des travailleurs plus âgés à ces technologies.

•  Abordant la question du marché du travail, la Commission européenne a souhaité instituer, dans la ligne directrice n° 9, la nécessité d'apporter une attention particulière aux " besoins des minorités ethniques ".

•  Evoquant le potentiel de créations d'emplois que recèle le secteur des services, la Commission européenne a estimé qu'une ligne directrice spécifique devait être définie, la ligne directrice n° 13, pour encourager une création d'emplois plus dynamique dans ce secteur où l'Union européenne est en retard par rapport aux Etats-Unis. Elle a également souhaité souligner le potentiel d'emplois attaché au développement de la société de l'information.

•  Rappelant la nécessité de concilier la vie professionnelle et la vie familiale, la Commission européenne a proposé de renforcer la ligne directrice n° 19 demandant qu'une attention particulière soit accordée au développement de services de prise en charge " abordables, accessibles et de haute qualité ". Elle a souhaité une certaine flexibilité des conditions de travail de manière à promouvoir la conciliation des responsabilités professionnelles et des tâches familiales.

Par ailleurs, la Commission européenne a proposé des modifications de certaines lignes directrices de manière à en clarifier la portée ou l'interprétation.

•  Sous le pilier 5 ( * ) employabilité , l'idée de réduire le nombre de jeunes quittant le système scolaire prématurément est étendue aux jeunes ayant des difficultés d'apprentissage ( ligne directrice n° 7 ).

•  Le pilier de l'esprit d'entreprise fait maintenant référence à la prise en compte de la dimension entreprenariale par l'ensemble de la société et évoque la nécessité d'offrir aux entrepreneurs une formation à l'esprit d'entreprise et des services de soutien ciblés ( ligne directrice n° 10 ). La référence à la réduction des frais généraux et des charges administratives des entreprises est étendue aux frais encourus au moment de la création d'une entreprise ( ligne directrice n° 11 ).

•  En ce qui concerne le pilier de l'adaptabilité , le texte affirme maintenant qu'un étroit partenariat devrait être développé à tous les niveaux appropriés (de l'Union européenne, de l'Etat membre, du secteur et de l'entreprise) ( ligne directrice n° 15 ) et que le cadre réglementaire en vigueur devrait être revu pour soutenir l'adaptabilité ( ligne directrice n° 17 ).

III.  DEUX PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION POUR DEUX CONCEPTIONS OPPOSÉES DE LA CONSTRUCTION EUROPÉENNE ?

Votre commission a procédé à l'examen conjoint des deux propositions de résolution sur la communication de la Commission européenne sur les lignes directrices pour l'emploi pour 1999 en application de l'article 73 bis du règlement.

Cet examen conjoint a eu pour mérite de mettre en lumière deux conceptions diamétralement opposées de la construction européenne.

La première proposition de résolution 6 ( * ) a été déposée à titre personnel par M. Michel Barnier, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.

Elle estime que " le contenu des lignes directrices proposées par la Commission européenne paraît, dans l'ensemble, bien adapté à la problématique de l'emploi telle qu'elle se présente dans la communauté et singulièrement en France " 7 ( * ) .

M. Michel Barnier considère que " sous réserve de certaines précisions et de certains compléments, les " lignes directrices " proposées par la Commission européenne méritaient d'être approuvées ", il lui " paraît, par conséquent, souhaitable que le Sénat incite le Gouvernement à les soutenir et à les mettre en oeuvre " 8 ( * ) .

M. Michel Barnier a souhaité néanmoins formuler dix réserves 9 ( * ) qui constituent autant de suggestions pour approfondir et améliorer les lignes directrices pour l'emploi :

- les incitations à la recherche d'emploi doivent concerner prioritairement les chômeurs (ligne directrice n° 4) ;

- les aides à la sortie du marché du travail doivent faire l'objet d'un rapport au Parlement français afin de déterminer leur coût et leurs effets (ligne directrice n° 4);

- les obstacles à la mobilité géographique doivent être réduits (ligne directrice n° 4) ;

- la ligne directrice n° 8 doit mentionner également le réexamen des dispositifs d'orientation scolaire et universitaire ;

- dans la ligne directrice n° 9, la référence aux " minorités ethniques " doit être supprimée ;

- la ligne directrice n° 10 doit mentionner également la réduction des obstacles à la transmission des entreprises ;

- l'instauration d'une écotaxe prévue par la ligne directrice n° 11 n'apporte pas la réponse attendue pour assurer le financement des systèmes de sécurité sociale ;

- la ligne directrice n° 14 doit être complétée pour mentionner une réduction de TVA sur les services à forte intensité de main-d'oeuvre et peu exposés à la concurrence transfrontalière ;

- la ligne directrice n° 15, dès lors qu'elle reconnaît que la modernisation de l'organisation du travail est de la responsabilité essentielle des partenaires sociaux, doit souligner plus explicitement que l'intervention des Etats dans ce domaine doit respecter le principe de subsidiarité ;

- la ligne directrice n° 16 pourrait prévoir la définition à l'échelon communautaire de formules de référence pour les nouveaux types de contrat, afin d'encourager les évolutions et de favoriser un rapprochement spontané des législations.

La proposition de résolution 10 ( * ) présentée par M. Guy Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen participe d'une tout autre logique.

Les auteurs de la proposition de résolution " demandent au Gouvernement de faire état d'orientations allant dans le sens d'une croissance durable, accompagnées d'un développement de l'emploi, en rupture avec la logique libérale de l'actuelle construction européenne et en proposant une réorientation progressiste de cette dernière " .

Cette proposition conclut à l'adoption des lignes directrices pour l'emploi sous réserve de l'adoption des modifications qu'elle propose.

Toutefois, cette acceptation semble contradictoire avec le contenu même de la proposition de résolution Cette dernière comprend en effet plusieurs dispositions qui sont incompatibles avec la politique d'inspiration libérale et sociale menée par les gouvernements européens et les instances européennes. On citera la première disposition qui propose de revenir sur le Pacte de stabilité et de relancer la dépense publique, la deuxième disposition qui propose de revenir sur le principe de l'indépendance de la Banque centrale européenne ou encore la quatrième qui se prononce en faveur de taux d'intérêt administrés.

Cette proposition constitue donc sur plusieurs points fondamentaux l'antithèse des lignes directrices pour l'emploi proposées par la Commission européenne et acceptées par le président Barnier sous réserve de modifications. Elle est également en contradiction avec la politique économique suivie par le Gouvernement français depuis dix-huit mois .

Deux dispositions de la proposition de résolution présentée par M. Guy Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen rejoignent néanmoins les propositions de la Commission européenne. Il s'agit de la disposition n° 8 tendant à demander le renforcement de la formation professionnelle tout au long de la vie et de la disposition n° 10 demandant le respect de l'égalité entre hommes et femmes dans les relations du travail et la lutte contre les discriminations.

IV. LES CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR VOTRE COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Votre commission a considéré que le mécanisme des lignes directrices était d'une complexité exagérée et qu'il mériterait d'être simplifié à mesure que serait précisé le rôle de chaque institution dans la définition et la mise en oeuvre d'une véritable politique économique et sociale européenne.

Dans cette attente, votre commission a estimé que les propositions de la Commission européenne étaient effectivement de nature à renforcer l'harmonisation des politiques économiques européennes. Elle a pris acte des références appuyées à leur nécessaire compatibilité avec les objectifs de maîtrise des comptes publics et de respect du rôle des partenaires sociaux.

Etant donné le caractère essentiellement déclaratif de la proposition de résolution déposée par les membres du groupe communiste républicain et citoyen et le contenu même des propositions formulées, votre commission des Affaires sociales a décidé de prendre le texte du président Barnier comme base de travail.

Votre commission a considéré comme extrêmement pertinentes les réserves formulées par le président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. Elle considère cependant que le rapport demandé sur les aides au retrait d'activité, dont le principe est excellent, mériterait d'être mentionné à l'occasion du projet de loi sur les retraites que s'est engagé à présenter le Gouvernement à l'issue de la mission de diagnostic confiée au Commissariat général du Plan, de préférence au texte examiné présentement dont il convient de préserver la dimension communautaire.

Votre commission approuve en particulier le retrait de la clause relative aux " minorités ethniques " qui est contraire à notre tradition républicaine. Elle souligne tout l'intérêt de la référence au principe de subsidiarité dans la définition des rôles respectifs de l'Etat et des partenaires sociaux dans les relations du travail, et le souhait que soient définies à l'échelon européen des formules de référence pour les nouveaux types de contrat, afin d'encourager les évolutions et de favoriser un rapprochement spontané des législations.

Votre commission des Affaires sociales a souhaité compléter les réserves formulées par le président Barnier sur plusieurs points :

•  Concernant l'amélioration de la capacité d'insertion professionnelle, elle a considéré que la ligne directrice n° 6 devrait préciser que les aides à la formation professionnelle s'appliquent à l'ensemble des salariés, quel que soit leur niveau de formation ou de diplôme.

•  A propos de l'égalité des droits, votre commission a souhaité reprendre une préoccupation évoquée par la proposition de résolution déposée par les membres du groupe communiste républicain et citoyen et à laquelle elle est attachée. Elle a considéré en effet qu'il serait souhaitable que la ligne directrice n° 9 précise que les Etats membres s'attacheront à interdire toutes les formes de discrimination dans l'accès au marché du travail ; les discriminations positives devant en revanche être réservées aux handicapés et aux publics en grande difficulté d'insertion.

•  Soulignant l'intérêt d'exploiter les opportunités de nouvelles créations d'emplois, elle a considéré que la ligne directrice n° 12 gagnerait à rappeler que les emplois créés grâce à des aides publiques devaient à terme être pérennisés et solvabilisés par une demande privée.

•  Evoquant la nécessité de rendre le système fiscal plus favorable à l'emploi, votre commission a souhaité que la ligne directrice n° 14 fasse plus explicitement référence à la nécessité de poursuivre les politiques d'allégement de charges sur les bas salaires.

•  Afin de concilier vie professionnelle et vie familiale, votre commission estime nécessaire que la ligne directrice n° 19 précise que la promotion des politiques favorables à la famille repose à la fois sur le développement des structures d'accueil collectif et le renforcement des aides aux modes de garde individuelle.

ANNEXE N° 1
-
DISPOSITIONS DU TRAITÉ D'AMSTERDAM
RELATIVES À LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

LES POLITIQUES DE LA COMMUNAUTÉ

Titre VIII

Emploi

Article 125

Les Etats membres et la Communauté s'attachent, conformément au présent titre, à élaborer une stratégie coordonnée pour l'emploi et en particulier à promouvoir une main-d'oeuvre qualifiée, formée et susceptible de s'adapter ainsi que des marchés du travail aptes à réagir rapidement à l'évolution de l'économie, en vue d'atteindre les objectifs énoncés à l'article 2 du traité sur l'Union européenne et à l'article 2 du présent traité.

Article 126

1. Les Etats membres, par le biais de leurs politiques de l'emploi, contribuent à la réalisation des objectifs visés à l'article 125 d'une manière compatible avec les grandes orientations des politiques économiques des Etats membres et de la communauté, adoptées en application de l'article 99, paragraphe 2.

2. Les Etats membres, compte tenu des pratiques nationales liées aux responsabilités des partenaires sociaux, considèrent la promotion de l'emploi comme une question d'intérêt commun et coordonnent leur action à cet égard au sein du Conseil, conformément à l'article 128.

Article 127

1. La communauté contribue à la réalisation d'un niveau d'emploi élevé en encourageant la coopération entre les Etats membres et en soutenant et, au besoin, en complétant leur action. Ce faisant, elle respecte pleinement les compétences des Etats membres en la matière.

2. L'objectif consistant à atteindre un niveau d'emploi élevé est pris en compte dans la définition et la mise en oeuvre des politiques et des actions de la Communauté.

Article 128

1. Le Conseil européen examine, chaque année, la situation de l'emploi dans la Communauté et adopte des conclusions à ce sujet, sur la base d'un rapport annuel conjoint du Conseil et de la Commission.

2. Sur la base des conclusions du Conseil européen, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, du Comité économique et social, du Comité des régions et du Comité de l'emploi visé à l'article 130 élabore chaque année des lignes directrices, dont les Etats membres tiennent compte dans leurs politiques de l'emploi. Ces lignes directrices sont compatibles avec les grandes orientations adoptées en application de l'article 99, paragraphe 2.

3. Chaque Etat-membre transmet au Conseil et à la Commission un rapport annuel sur les principales mesures qu'il a prises pour mettre en oeuvre sa politique de l'emploi, à la lumière des lignes directrices visées au paragraphe 2.

4. Sur la base des rapports visés au paragraphe 3 et après avoir obtenu l'avis du Comité de l'emploi, le Conseil procède annuellement, à la lumière des lignes directrices pour l'emploi, à un examen de la mise en oeuvre des politiques de l'emploi des Etats membres. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur recommandation de la Commission peut, s'il le juge approprié à la suite de son examen, adresser des recommandations aux Etats membres.

5. Sur la base des résultats de cet examen, le Conseil et la Commission adressent un rapport annuel conjoint au Conseil européen concernant la situation de l'emploi dans la Communauté et la mise en oeuvre des lignes directrices pour l'emploi.

Article 129

Le Conseil, statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 et après consultation du Comité économique et social et du Comité des régions, peut adopter des actions d'encouragement destinées à favoriser la coopération entre les Etats membres et à soutenir leur action dans le domaine de l'emploi par le biais d'initiatives visant à développer les échanges d'informations et de meilleures pratiques, en fournissant des analyses pratiques, en fournissant des analyses comparatives et des conseils ainsi qu'en promouvant les approches novatrices et en évaluant les expériences, notamment en ayant recours aux projets pilotes.

Ces mesures ne comportent pas d'harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des Etats membres.

Article 130

Le Conseil, après consultation du Parlement européen, institue un Comité de l'emploi à caractère consultatif afin de promouvoir la coordination, entre les Etats membres, des politiques en matière d'emploi et de marché du travail. Le comité a pour mission :

- de suivre l'évolution de la situation de l'emploi et des politiques de l'emploi dans les Etats membres et dans la Communauté ;

- sans préjudice de l'article 207, de formuler des avis, soit à la demande du Conseil ou de la Commission, soit de sa propre initiative, et de contribuer à la préparation des délibérations du Conseil visées à l'article 128.

Dans l'accomplissement de son mandat, le comité consulte les partenaires sociaux.

Chaque Etat-membre et la Commission nomment deux membres du comité.

ANNEXE N° 2
-
LES LIGNES DIRECTRICES POUR L'EMPLOI EN 199911 ( * )

I - AMÉLIORER LA CAPACITÉ D'INSERTION PROFESSIONNELLE

S'attaquer au chômage des jeunes et prévenir le chômage de longue durée

Pour infléchir l'évolution du chômage des jeunes et du chômage de longue durée, les Etats membres intensifieront leurs efforts pour développer des stratégies préventives et axées sur la capacité d'insertion professionnelle en se fondant sur l'identification précoce des besoins individuels ; dans un délai à fixer par chaque Etat-membre, qui ne peut excéder quatre ans -ce délai pouvant être plus long dans les Etats membres à chômage particulièrement élevé-, les Etats membres feront en sorte :

1.  d'offrir un nouveau départ à tout jeune chômeur avant qu'il n'atteigne six mois de chômage, sous forme de formation, de reconversion, d'expérience professionnelle, d'emploi ou de toute autre mesure propre à favoriser son insertion professionnelle ;

2.  d'offrir également un nouveau départ aux chômeurs adultes avant qu'ils n'atteignent douze mois de chômage, par un des moyens précités ou, plus généralement, par un accompagnement individuel d'orientation professionnelle.

Ces mesures préventives et d'insertion devraient être combinées avec des mesures de réinsertion des chômeurs de longue durée.

Passer des mesures passives à des mesures actives

Les systèmes d'indemnisation, de fiscalité et de formation -là où cela s'avère nécessaire- doivent être revus et adaptés afin de promouvoir activement la capacité d'insertion professionnelle. A cette fin, chaque Etat-membre :

3.  s'efforcera d'augmenter sensiblement le nombre de personnes bénéficiant de mesures actives propres à faciliter leur insertion professionnelle. En vue d'augmenter le pourcentage de chômeurs qui se voient proposer une formation ou toute autre mesure analogue, il se fixera en particulier un objectif, en fonction de sa situation de départ, de rapprochement progressif de la moyenne des trois Etats membres les plus performants et au moins 20 %.

4. examinera et modifiera ses systèmes d'indemnisation et de fiscalité et incitera réellement les chômeurs ou les inactifs à chercher et à saisir les possibilités d'emploi ou de formation. En outre, il est nécessaire de réévaluer d'une manière critique les mesures actuelles incitant les travailleurs à quitter relativement tôt le monde du travail.

Encourager une approche de partenariat

L'action des Etats membres seuls ne suffira pas pour atteindre les résultats souhaités en matière d'insertion. En conséquence :

5.  les partenaires sociaux sont instamment invités, à leurs différents niveaux de responsabilités et d'action, à conclure rapidement des accords en vue d'accroître les possibilités de formation, d'expérience professionnelle, de stage ou d'autres mesures propres à faciliter la capacité d'insertion professionnelle ;

6. en vue de contribuer au développement d'une main d'oeuvre qualifiée et capable de s'adapter, les Etats membres, en collaboration avec les partenaires sociaux, s'efforceront de développer des possibilités d'apprentissage tout au long de la vie, notamment dans les domaines des technologies de l'information et de la communication, et se fixeront un objectif d'augmentation du nombre de personnes bénéficiant, chaque année, de telles mesures. L'accent sera notamment mis sur la facilité d'accès des travailleurs âgés.

Faciliter le passage de l'école au travail

Les perspectives d'emploi sont médiocres pour les jeunes qui quittent le système scolaire sans avoir acquis les aptitudes nécessaires pour accéder au marché du travail. En conséquence, les Etats membres :

7.  amélioreront la qualité de leur système scolaire, en accordant notamment une attention particulière aux jeunes ayant des difficultés d'apprentissage, de manière à réduire substantiellement le nombre de jeunes qui quittent prématurément le système scolaire ;

8.  veilleront à doter les jeunes d'une plus grande capacité d'adaptation aux mutations technologiques et économiques et de qualifications correspondant aux besoins du marché du travail, le cas échéant en mettant en place ou en développant les systèmes d'apprentissage.

Promouvoir un marché du travail ouvert à tous

Nombre de groupes et d'individus ont des difficultés particulières à acquérir les compétences nécessaires, à accéder et à rester dans le marché du travail. Un ensemble cohérent de politiques favorisant l'intégration de ces groupes et individus dans le monde du travail et permettant de lutter contre la discrimination est requis. Chaque Etat-membre :

9. accordera une attention particulière aux besoins des personnes handicapées, des minorités ethniques et d'autres groupes et individus défavorisés et élaborera des politiques préventives et actives appropriées afin de favoriser leur intégration dans le marché du travail.

II - DÉVELOPPER L'ESPRIT D'ENTREPRISE

Faciliter le démarrage et la gestion des entreprises

Le développement de nouvelles entreprises, et la croissance de PME, est indispensable à la création d'emplois. Ce processus doit être favorisé en sensibilisant davantage la société à l'esprit d'entreprise, en mettant en place une réglementation claire, stable et fiable et en améliorant les conditions pour le développement des marchés de capital à risque. Les Etats membres devraient également alléger et simplifier les charges administratives et fiscales qui pèsent sur les petites et moyennes entreprises. Dans ce but, les Etats membres :

10.  accorderont une attention particulière à la réduction sensible des frais généraux et des charges administratives des entreprises et plus spécialement des petites et moyennes entreprises, notamment lors de la création d'une entreprise et de l'embauche de travailleurs supplémentaires ;

11.  encourageront le développement de l'activité indépendante en examinant -avec l'objectif de les réduire- les obstacles pouvant exister, notamment dans les régimes fiscaux et de sécurité sociale, au passage à l'activité indépendante et à la création de petites entreprises, et en favorisant les formations en matière de création d'entreprise et les services de soutien ciblés aux chefs d'entreprises.

Exploiter les opportunités de nouvelles créations d'emplois

Si l'Union européenne veut réussir à relever le défi de l'emploi, toutes les sources potentielles d'emploi ainsi que les nouvelles technologies et innovations doivent être effectivement exploitées. A cette fin, les Etats membres :

12. favoriseront les moyens d'exploiter complètement les possibilités offertes par la création d'emploi à l'échelon local, dans l'économie sociale et dans les nouvelles activités liées aux besoins non encore satisfaits par le marché, en examinant -avec l'objectif de les réduire- les obstacles qui les freineraient.

13. élaboreront un cadre politique pour exploiter pleinement le potentiel d'emploi du secteur des services, notamment en identifiant et en éliminant les obstacles qui continuent d'entraver la croissance des entreprises et la création d'emplois plus nombreux et meilleurs et en exploitant le potentiel d'emploi de la société de l'information.

Rendre le système fiscal plus favorable à l'emploi

et renverser la tendance à long terme à l'alourdissement de la fiscalité et des prélèvements obligatoires sur le travail (qui sont passés de 35  % en 1980 à plus de 42 % en 1995). Chaque Etat-membre :

14.  se fixera, en tant que de besoin et en tenant compte de son niveau actuel, un objectif de réduction progressive de la charge fiscale totale et, là où cela est approprié, un objectif de réduction progressive de la pression fiscale sur le travail et des coûts non salariaux du travail -notamment sur le travail peu qualifié et faiblement rémunéré- sans mettre en cause l'assainissement des finances publiques et l'équilibre financier des systèmes de sécurité sociale. Il examinera, le cas échéant, l'opportunité d'introduire une taxe sur l'énergie ou sur les émissions polluantes ou toute autre mesure fiscale.

III - ENCOURAGER LA CAPACITÉ D'ADAPTATION DES ENTREPRISES ET DE LEURS TRAVAILLEURS

Modernisation de l'organisation du travail

Afin de promouvoir la modernisation de l'organisation du travail et des formes de travail, un partenariat solide devrait être établi à tous les niveaux appropriés (européen, national, sectoriel et au niveau des entreprises) :

15.  les partenaires sociaux sont invités à négocier, à tous les niveaux appropriés, des accords visant à moderniser l'organisation du travail, y compris les formules souples de travail, afin de rendre les entreprises productives et compétitives et d'atteindre l'équilibre nécessaire entre souplesse et sécurité. Ces accords peuvent porter, par exemple, sur l'annualisation du temps de travail, la réduction du temps de travail, la réduction des heures supplémentaires, le développement du travail à temps partiel, la formation tout au long de la vie et les interruptions de carrière ;

16.  chaque Etat-membre examinera de son côté l'opportunité d'introduire dans sa législation des types de contrats plus adaptables pour tenir compte du fait que l'emploi revêt des formes de plus en plus diverses. Les personnes travaillant dans le cadre de contrats de ce type devraient, dans le même temps, bénéficier d'une sécurité suffisante et d'un meilleur statut professionnel, compatible avec les nécessités des entreprises.

Soutenir la capacité d'adaptation des entreprises

Afin de rehausser les niveaux de qualification au sein des entreprises, les Etats membres :

17.  réexamineront les obstacles, notamment fiscaux, qui peuvent s'opposer à l'investissement dans les ressources humaines et, le cas échéant, prévoiront des incitations, fiscales ou autres, pour développer la formation en entreprise ; ils reverront aussi le cadre réglementaire actuel pour s'assurer qu'il contribue à réduire les obstacles à l'emploi et à accroître la capacité du marché du travail à s'adapter aux changements structurels de l'économie.

IV - RENFORCER LES POLITIQUES D'ÉGALITÉ DES CHANCES POUR LES FEMMES ET LES HOMMES

S'attaquer à la discrimination entre hommes et femmes

Les Etats membres devraient traduire leur volonté de promouvoir l'égalité des chances en augmentant le taux d'emploi des femmes. Ils devraient également être attentifs au déséquilibre dans la représentation des femmes ou des hommes dans certains secteurs d'activité et dans certaines professions. Les Etats membres :

18.  s'efforceront de réduire l'écart entre le taux de chômage des femmes et celui des hommes en soutenant activement une augmentation de l'emploi des femmes et agiront contre la sous-représentation des femmes dans certains secteurs d'activité et professions et leur sur-représentation dans d'autres.

Concilier vie professionnelle et vie familiale

Les politiques en matière d'interruption de carrière, de congé parental, de travail à temps partiel et d'horaire de travail souple sont d'une importance particulière pour les femmes et les hommes. La mise en oeuvre des diverses directives et des accords des partenaires sociaux en la matière devrait être accélérée et faire l'objet d'un suivi régulier. Il faut disposer en suffisance de services de qualité en matière de garde d'enfants et de soins aux personnes dépendantes afin de favoriser l'entrée et le maintien des femmes et des hommes sur le marché du travail. Les Etats membres :

19. élaboreront et appliqueront des programmes visant à promouvoir des politiques favorables à la famille, y compris des services de soins abordables, accessibles et de bonne qualité pour les enfants et les autres personnes à charge, ainsi que les systèmes de congé parental et d'autres types de congé.

Faciliter la réintégration dans la vie active

Les Etats membres :

20.  accorderont une attention particulière au cas des femmes et des hommes qui envisagent de réintégrer la vie active rémunérée après une absence et, dans ce but, ils examineront les moyens de supprimer progressivement les obstacles qui freinent cette réintégration.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

(Texte adopté par la commission en application

de l'article 73 bis -6 du règlement du Sénat)

PROPOSITION DE RESOLUTION

sur la communication de la Commission : proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 (n° E-1171),

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition d'acte communautaire E-1171 : proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 (COM (1998) 574 final),

Invite le Gouvernement à approuver les orientations proposées par la Commission européenne sous les réserves suivantes :

- les mesures destinées à inciter réellement les personnes sans emploi à chercher et à saisir les possibilités d'emploi ou de formation (ligne directrice 4) doivent concerner prioritairement les chômeurs :

- la ligne directrice 4 doit reconnaître la nécessité de prendre des mesures pour réduire les obstacles à la mobilité géographique des demandeurs d'emploi ;

- la ligne directrice 6 doit préciser que les aides à la formation professionnelle s'appliquent à l'ensemble des salariés quel que soit leur niveau de formation ou leur diplôme ;

- la ligne directrice 8 doit mentionner également le réexamen des dispositifs d'orientation scolaire et universitaire ;

- dans la ligne directrice 9, la référence aux " minorités ethniques " doit être supprimée ; cette ligne doit être en outre complétée de manière à préciser que les Etats membres s'attacheront à interdire toutes les formes de discrimination dans l'accès au marché du travail ;

- la ligne directrice 10 doit mentionner également la réduction des obstacles à la transmission des entreprises ;

- si l'on peut justifier l'introduction d'une taxe sur l'énergie ou sur les émissions polluantes (ligne directrice 11) au nom d'impératifs environnementaux, une telle taxe ne paraît pas pouvoir constituer une alternative réaliste aux modes actuels de financement des systèmes de Sécurité sociale ;

- la ligne directrice 12 doit rappeler que les emplois créés grâce à des aides publiques doivent à terme être pérennisés et solvabilisés par la demande privée ;

- la ligne directrice 14 doit être complétée pour mentionner une réduction de la TVA sur les services à forte intensité de main-d'oeuvre et peu exposés à la concurrence transfrontalière, la référence à la nécessité d'amplifier et de pérenniser les allégements de charges sur les bas salaires doit être plus explicite ;

- la ligne directrice 15, dès lors qu'elle reconnaît que la modernisation de l'organisation du travail est de la responsabilité essentielle des partenaires sociaux, doit souligner plus explicitement que l'intervention des Etats dans ce domaine doit respecter le principe de subsidiarité ;

- la ligne directrice 16 pourrait prévoir la définition à l'échelon communautaire de formules de référence pour les nouveaux types de contrat, afin d'encourager les évolutions et de favoriser un rapprochement spontané des législations ;

- la ligne directrice 19 doit préciser que la promotion des politiques favorables à la famille repose à la fois sur le développement des structures d'accueil collectif et le renforcement des aides au mode de garde individuelle.

* 1 Cf. " Coordination des politiques économiques nationales ou constitution d'une politique économique européenne ? ", André Gauron in Coordination européenne des politiques économiques, Rapport n° 5 du Conseil d'Analyse Economique, p. 109.

* 2 Voir annexe n° 1.

* 3 Communication de la Commission européenne, Proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999, Com (1998) 574 final, p. 2.

* 4 Les passages en gras dans l'annexe n° 2 relative aux lignes directrices pour l'emploi en 1999 correspondent aux modifications adoptées.

* 5 Pour reprendre la terminologie de la commission qui se réfère aux " piliers qui structurent les lignes directrices ".

* 6 Proposition de résolution n° 87 par M. Michel Barnier annexée au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1998.

* 7 Idem p. 3.

* 8 Idem p. 8.

* 9 Idem p. 9.

* 10 Proposition de résolution n° 98 présentée par M. Guy Fischer, Mmes Nicole Borvo, Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Robert Bret, Michel Duffour, Thierry Foucaud, Gérard Le Cam, Pierre Lefebvre, Paul Loridant, Mme Hélène Luc, MM. Jack Ralite, Ivan Renar et Mme Odette Terrade.

* 11 Les passages en gras correspondent aux modifications apportées aux lignes directrices pour l'emploi en 1998.

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