N°
282
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 22 mars 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à l' entraide judiciaire en matière civile entre la République française et la République socialiste du Vietnam ,
Par M.
Michel CALDAGUÈS,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Xavier Dugoin, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Michel Pelchat, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.
Voir le
numéro
:
|
|
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser la ratification de la
convention relative à l'entraide judiciaire en matière civile
entre le Vietnam et la France signée à Paris le 24 février
1999.
Cette convention, première en la matière conclue entre le Vietnam
et un pays occidental, est le fruit de la coopération qui s'est
amorcée entre nos deux pays dans le domaine juridique,
coopération qui s'appuie en particulier sur la Maison du droit
franco-vietnamienne créée en février 1993 sur le campus de
l'Université de droit à Hanoi.
Plus généralement, elle s'inscrit dans le cadre des relations
très diversifiées que la France a renforcées avec le
Vietnam depuis plus de dix ans.
Votre rapporteur effectuera une rapide présentation de
l'évolution récente de la situation au Vietnam et de nos
relations bilatérales, avant de détailler les principales
dispositions de la convention d'entraide judiciaire en matière civile,
très semblables à celles prévues par les instruments de
même nature auxquels la France est déjà partie.
I. L'ÉVOLUTION RÉCENTE DU VIETNAM
Peuplé de 78 millions d'habitants, dont 3 à 4
millions
dans la capitale Hanoi, et près de 8 millions dans la capitale
économique, Ho Chi Minh-Ville, le Vietnam s'étend sur 1 600
kilomètres le long de la côte orientale de la péninsule
indochinoise.
Après près de quarante années de guerre, le Vietnam, dans
un contexte pacifié, entreprend depuis une douzaine d'années une
politique de rénovation fondée sur une ouverture politique
prudente et sur la libéralisation progressive de l'économie.
A. L'ÉVOLUTION POLITIQUE
1. La situation intérieure : une ouverture très progressive et maîtrisée par le Parti communiste vietnamien
Le
Vietnam vit toujours sous l'empire du
monopole du Parti communiste
vietnamien
auquel la Constitution reconnaît un rôle dirigeant
fondamental bien que la réforme constitutionnelle de 1992 ait quelque
peu renforcé les prérogatives de l'Assemblée nationale et
de l'exécutif, désormais bicéphale avec l'instauration
d'une Présidence de la République. La direction politique du pays
procède donc des équilibres établis entre l'appareil
d'Etat, d'une part -en particulier le Président de la République
nommé pour 5 ans par l'Assemblée nationale et le Premier ministre
élu pour 5 ans par l'Assemblée nationale sur proposition du
Président- et le Parti communiste vietnamien, d'autre part. Les
élections législatives de 1997 ont été suivies de
la mise en place d'une nouvelle équipe dirigeante, plus jeune que la
précédente, composée du Président de la
République, M. Tran Duc Luong, du Premier ministre, M. Phan Van
Khai, et du secrétaire général du parti, le
général Le Kha Phieu.
La
politique de rénovation
, baptisée " Doi
Moi ", entreprise à partir de 1986, a été
confirmée mais demeure mise en oeuvre à un rythme très
progressif.
L'affirmation, par la nouvelle Constitution adoptée en 1992, du droit
à la liberté d'expression, de presse, d'association, de
manifestation et de culte demeure encore théorique même si
quelques inflexions de portée limitée sont intervenues ces deux
dernières années dans le domaine des droits de l'homme et des
libertés religieuses : des mesures d'amnistie ont été
prises à l'égard de prisonniers politiques et d'autorités
de l'église bouddhiste unifiée du Vietnam en 1998, alors que
certains signes d'ouverture ont été opérés en
direction de l'église catholique, en particulier pour la nomination des
évêques.
Les manifestations ou protestations mettant en cause des cadres du Parti
communiste vietnamien ont conduit ce dernier à renforcer son discours
idéologique pour condamner la bureaucratie, la corruption, la drogue ou
l'accroissement des inégalités et appeler à un
assainissement et un renouvellement interne. Cette évolution s'est
concrétisée par la mise en cause de plusieurs responsables, sans
toutefois entraîner de bouleversement majeur au sein de l'équipe
dirigeante.
2. L'environnement international du Vietnam
Le
Vietnam a fait de l'intégration régionale la priorité
majeure de sa politique extérieure. A ce titre, son
adhésion
à l'Association des nations du Sud-Est asiatique (ASEAN),
en juillet
1995, marque une étape très importante. L'objectif est tout
autant politique qu'économique, puisque l'ASEAN entend édifier
une zone de libre échange que le Vietnam pourrait rejoindre en 2006.
De ses trois voisins, c'est sans doute
la Chine
qui demeure pour Hanoi
le principal sujet de préoccupation. La normalisation des relations
intervenue en 1991 n'a pas effacé tous les sujets de friction. Des
litiges subsistent toujours sur le tracé des frontières maritimes
au Tonkin et au sujet de la souveraineté sur les îles Paracels et
Spratley, en mer de Chine du sud, revendiquée par plusieurs Etats de la
zone. Un accord de délimitation des frontières terrestres a
néanmoins été signé le 30 décembre 1999
entre la Chine et le Vietnam.
Le Vietnam entretient d'excellentes relations avec
le Laos
alors qu'avec
le Cambodge
, malgré la persistance de certains contentieux
liés aux frontières ou au statut de la communauté
vietnamienne, les liens se sont raffermis. Le Vietnam a soutenu la demande
d'admission, devenue effective en avril 1999, du Cambodge à l'ASEAN.
La rencontre le 20 octobre 1999 à Vientiane des Premiers ministres du
Laos, du Cambodge et du Vietnam, semble témoigner de la volonté
de réactiver une relation étroite entre les trois pays de la zone.
Enfin, une étape importante a été franchie dans la
normalisation des relations avec les Etats-Unis,
avec
l'accréditation, en mai 1997, du premier ambassadeur américain
à Hanoi depuis la fin de la guerre. Une délégation
gouvernementale vietnamienne s'est rendue à Washington en octobre 1998
alors que le secrétaire d'Etat américain à la
défense, M. Cohen, vient d'effectuer une visite au Vietnam en mars 2000.