ANNEXE N° 3 : COMPTE RENDU DE L'AUDITION ORGANISÉE PAR LA DÉLÉGATION
Mardi 9 janvier 2001 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente.
La Délégation a procédé à l'audition des docteurs Jacques Milliez , gynécologue-obstétricien, chef du service de gynécologie et d'obstétrique de l'hôpital Saint-Antoine à Paris, Clara Pélissier , gynécologue médicale, présidente de la Société française de gynécologie, André Podevin , sexologue-andrologue, directeur du centre de planification de l'hôpital d'Arras, et Daniel Prévost , praticien hospitalier au centre d'orthogénie de l'hôpital de Roubaix.
Après s'être présentée comme une clinicienne davantage concernée, professionnellement, par le problème de le contraception que par celui de l'interruption volontaire de grossesse (IVG), le docteur Clara Pélissier a estimé le projet de loi utile en ce qu'il attirait l'attention sur le fait qu'aujourd'hui, compte tenu du nombre et de la qualité des techniques contraceptives, les femmes ne devraient plus subir de grossesses non désirées. A cet égard, elle a jugé que le droit à la contraception devrait être plus étendu et mieux expliqué, notamment aux jeunes, et s'est félicitée de la récente adoption de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence.
S'agissant de l'IVG, le docteur Clara Pélissier a considéré que la question de l'augmentation de deux semaines du délai légal d'intervention n'était pas fondamentale, des IVG au-delà du délai actuel étant déjà régulièrement pratiquées et une limite devant en tout état de cause être fixée. Toutefois, les techniques d'intervention pouvant être différentes selon l'état d'avancement de la grossesse, elle a indiqué que la fixation du délai à douze semaines de grossesse devrait nécessairement s'accompagner d'un aménagement technique de la plupart des centres d'IVG et d'une formation adaptée de leurs personnels médicaux et non-médicaux. Elle a suggéré en outre que des améliorations soient apportées à la rémunération et au statut de ces personnels.
Le docteur André Podevin a expliqué qu'en tant que vacataire en centre de gynécologie-obstétrique et directeur du centre de planification d'Arras, il était conduit, tout à la fois, à pratiquer des IVG, prévenir les grossesses non désirées et les maladies sexuellement transmissibles et participer aux séquences d'éducation à la sexualité et à la parentalité dans les collèges. Observant qu'il n'était pas possible d'isoler la question de l'IVG de celles de la contraception et de l'éducation à la sexualité, il a indiqué que l'équipe qu'il dirigeait avait, depuis longtemps et de manière pluridisciplinaire (médecins, infirmières, conseillères conjugales, secrétaires), réfléchi aux procédures et pratiques à instituer pour, dans le respect de la loi, accueillir au mieux et le plus rapidement possible les femmes confrontées à cet "accident de la vie" qu'est une grossesse non désirée. Il a souligné que, grâce à ce travail d'équipe, le centre d'Arras, qui effectue 550 IVG par an, pouvait s'enorgueillir d'éviter toute anesthésie générale et de répondre en moins de trois jours, voire dans la journée pour les situations d'urgence, aux demandes de rendez-vous, y compris pendant les vacances scolaires.
Insistant sur le fait qu'il s'exprimait à titre personnel mais aussi au nom de tous les membres de son équipe, le docteur André Podevin a ensuite considéré que les dispositions du projet de loi relatives à l'allongement du délai légal, à l'aménagement de l'autorisation parentale pour les mineures et à la suppression du caractère obligatoire de l'entretien préalable avec une conseillère conjugale étaient autant de réponses inappropriées aux véritables problèmes que sont les difficultés d'accueil rapide des femmes dans les centres d'IVG, le soutien familial à certaines jeunes filles, les effectifs et la formation à l'écoute des femmes des conseillères conjugales. Il a estimé que ces dispositions étaient en réalité destinées à éviter aux pouvoirs publics d'accorder davantage de moyens humains et financiers pour améliorer le fonctionnement des centres d'IVG, alors même que le renforcement des moyens suffirait à répondre à la plupart des problèmes posés. Il a dit craindre, en outre, qu'elles conduisent à une banalisation de l'IVG, alors que celle-ci est loin de constituer un événement anodin dans la vie des femmes qui la subissent.
En conclusion de son propos, le docteur André Podevin a contesté l'idée d'un droit à l'avortement, considérant qu'il n'existait qu'un droit à la vie, susceptible, parfois, de subir quelques transgressions. Il a estimé que les véritables droits des femmes étaient le droit à la contraception, qui devrait être rendu plus facile d'accès, au besoin par une gratuité intégrale, le droit de ne pas être enceintes lorsqu'elles ne le veulent pas et le droit d'être accompagnées tout au long de leurs démarches d'IVG.
"Généraliste entré dans l'IVG", selon ses propres termes, le docteur Daniel Prévost a signalé que son approche se nourrissait également de son expérience à l'hôpital de Roubaix, qui a effectué 1 365 IVG l'an dernier, d'une réflexion collective menée avec ses collègues et d'échanges avec de nombreuses équipes médicales étrangères, notamment de Belgique, de Suisse, des Pays-Bas et du Québec.
S'agissant du délai légal de l'IVG, le docteur Daniel Prévost a relevé que l'observation des législations et des pratiques étrangères devait conduire à beaucoup de modestie. Indiquant que 80 % des clientes d'une clinique hollandaise qu'il avait visitée étaient françaises, il a affirmé qu'une femme décidée à aller jusqu'au bout de son IVG le faisait, ce qui expliquait le phénomène, bien connu, des départs à l'étranger. Il a par conséquent estimé que l'allongement de deux semaines du délai répondait à une nécessité et qu'il permettrait de résoudre l'essentiel des difficultés, puisque la majorité des situations de délai dit "dépassé" se situait entre la dixième et la douzième semaine de grossesse. Il a ajouté que, sur le plan technique, cette disposition ne poserait pas de problème dès lors que les équipes seraient correctement entraînées et formées, et qu'en réalité, de nombreuses interventions avaient d'ores et déjà lieu au-delà de la dixième semaine.
En ce qui concerne les mineures, le docteur Daniel Prévost a rappelé que plus les populations étaient défavorisées, plus les problèmes de grossesse non désirée étaient aigus et plus les difficultés de dialogue intra-familial étaient grandes. Observant que dans certains milieux, en particulier ceux issus de l'immigration, la question de l'IVG ne pouvait pas être abordée par les jeunes filles mineures avec leurs parents, il a estimé que le dispositif institué par le projet de loi était opportun, s'élevant au passage contre l'idée d'une "banalisation de l'avortement" qui ne lui paraissait devoir reposer sur aucune réalité. Quant à l'entretien social, dont il a précisé qu'il n'était pas supprimé mais simplement rendu facultatif, il a considéré qu'il alourdissait parfois le parcours de certaines femmes, par exemple durant les mois d'été, et qu'il s'agissait aussi, pour nombre d'entre elles, d'une démarche inutile.
Au-delà du contenu du projet de loi, le docteur Daniel Prévost a voulu insister sur les problèmes rencontrés par les équipes pratiquant l'IVG. Relevant que 20 % des praticiens étaient des généralistes, pour l'essentiel militants de la cause des femmes, et que cette activité, peu considérée, mal payée, était négligée par les jeunes médecins, il s'est inquiété du renouvellement des générations d'intervenants dans les centres d'IVG. Il a par ailleurs dénoncé la profonde disparité de ces centres selon les régions et selon leur régime juridique, préconisant à cet égard un fonctionnement organisé en réseaux, à l'instar de ce qui se pratique en Wallonie. Il a également souhaité que la formation des médecins exerçant dans les centres d'IVG soit mieux assurée et facilitée, s'agissant notamment du recours au nouvelles techniques médicales. Il a enfin fait état des grandes difficultés de fonctionnement des centres de planification résultant du partage actuel des responsabilités, et donc des financements, entre l'Etat, dont relève l'IVG, et le conseil général, dont dépend la planification.
Gynécologue-obstétricien, le docteur Jacques Milliez s'est déclaré favorable au projet de loi, signalant toutefois que s'il acceptait l'avortement, il n'y était pour autant pas favorable puisqu'il constituait une triple transgression, à la "loi médicale", à la "loi humaine" et, de son point de vue, à la "loi religieuse". Estimant qu'aucune femme ne demandait une IVG par caprice, il a fait valoir que si des femmes recouraient à cette dernière, c'est qu'elles y étaient forcées, que ce soit par ignorance, par échec de contraception, ou simplement parce que la poursuite de leur grossesse était devenue impossible.
Lorsque ces femmes en état de détresse ont dépassé le délai légal, le docteur Jacques Milliez a considéré qu'il revenait au médecin de leur donner une réponse qui, selon lui, ne pouvait être ni le désintérêt, incompatible avec le serment médical, ni le conseil de poursuivre la grossesse et d'abandonner l'enfant, aucune femme n'acceptant ce qu'il a qualifié de "chantage", ni la suggestion d'aller se faire avorter à l'étranger, qui opère une insupportable discrimination par l'argent. Observant que, s'agissant de l'état de détresse, il n'était pas possible de faire une distinction entre celui d'une femme à neuf semaines de grossesse et celui d'une femme à onze semaines, il a affirmé que beaucoup de médecins, dont lui-même, pratiquaient aujourd'hui des IVG au-delà du délai de dix semaines, sous leur propre responsabilité, pour aider les femmes placées dans une impasse. Il s'est donc réjoui de ce que le projet de loi légalise une situation de fait en augmentant le délai légal de deux semaines.
A cet égard, le docteur Jacques Milliez a reconnu que toutes les situations de dépassement du délai n'étaient pas couvertes par le texte et que le seuil de douze semaines de grossesse était arbitraire à bien des égards. Il a toutefois considéré qu'en matière médicale comme dans d'autres, beaucoup de règles avaient leur part d'arbitraire, que l'existence de seuils était nécessaire et qu'en l'espèce, celui de douze semaines était préférable à celui de dix semaines pour aider les femmes en détresse. Il a ajouté que le risque, parfois évoqué, d'encouragement à l'avortement que constituerait cet allongement du délai légal ne lui paraissait pas crédible dès lors que le nombre des personnes concernées représente environ 2 % du total des IVG pratiquées chaque année en France. Il a également contesté l'argument d'un risque d'eugénisme, relevant qu'aucune différence ne distinguait la structure des tissus entre la dixième et la douzième semaine de grossesse à l'exception du sexe, et que, sur ce point, l'amélioration des techniques rendait l'information disponible de manière de plus en plus précoce (désormais, dès la sixième semaine, par analyse du sang de la mère), renvoyant ainsi la question de l'éventuel eugénisme à un autre débat que celui de l'allongement du délai légal de l'IVG.
S'agissant des dangers thérapeutiques des interventions entre la dixième et la douzième semaine, le docteur Jacques Milliez est convenu que le risque augmentait avec le terme de la grossesse. Observant toutefois que, médicalement, ce risque pouvait être considéré comme acceptable, comme en témoignaient les exemples étrangers, il a considéré qu'avec la formation des personnels, la définition de protocoles précis et le recours à des méthodes plus modernes d'intervention, par exemple médicamenteuses, la légère technicité supplémentaire demandée par ces interruptions de grossesse plus tardives serait aisément intégrée. Il a conclu son intervention relative à l'augmentation du délai légal en relevant qu'aucun argument en contestant le bien-fondé ne pouvait ainsi être retenu.
En ce qui concerne les deux autres questions principales soulevées par le projet de loi, le docteur Jacques Milliez a approuvé la suppression du caractère obligatoire de l'entretien social, estimant qu'il devait être simplement proposé systématiquement aux femmes, ainsi que l'aménagement porté à la nécessité du consentement parental pour les mineures, observant que, dans certaines communautés culturelles, le dialogue familial sur la sexualité de la jeune fille, et donc sur l'IVG, était absolument impossible.
Après avoir estimé que l'IVG pouvait être revendiquée par certaines personnes comme un droit, qu'au demeurant la récente jurisprudence de la Cour de cassation semblait avoir consacré avec l'arrêt Perruche, le docteur Jacques Milliez a conclu son propos en indiquant qu'il approuvait le projet de loi, même avec ses imperfections et ses limites.
Un débat s'est ensuite instauré.
A Mme Odette Terrade , rapporteur , qui souhaitait que des précisions soient apportées sur les risques de dérive "eugénique", le docteur Clara Pélissier a fait part de ses réserves sur l'augmentation du délai légal d'intervention, observant que l'échographie de la onzième ou de la douzième semaines révélait la grossesse gémellaire ou diverses malformations de l'embryon, telle que le rein manquant. Après avoir affirmé avoir déjà été confronté à une demande d'IVG à raison du sexe de l'embryon, le docteur André Podevin a toutefois réaffirmé que, de son point de vue, la question primordiale n'était pas le problème de l'eugénisme ou le passage du délai à la douzième semaine de grossesse, mais les conditions d'accueil réservées au femmes qui demandent à subir une IVG. Relevant que le nombre de femmes recourant à des IVG répétées était en augmentation, il a estimé à cet égard l'entretien social indispensable. De même, soulignant que toutes les adolescentes affirment, lors de leur demande d'IVG, que le consentement parental n'est pas possible, alors qu'il est en réalité obtenu dans l'immense majorité des cas et qu'il permet l'établissement d'un dialogue intra-familial très fructueux et utile pour la jeune fille, il a considéré que la suppression du caractère obligatoire de l'entretien était très regrettable puisqu'elle empêchera dorénavant de nouer ou de renouer le dialogue. Après que le docteur Jacques Milliez eut, pour sa part, estimé nécessaire d'homogénéiser les législations relatives au délai légal et aux pratiques dans l'espace européen, le docteur Daniel Prévost a souligné l'importance de la dimension culturelle dans la question de l'IVG, en opposant notamment notre tradition catholique à celle, protestante, des pays anglo-saxons, et estimé qu'il convenait de ne pas confondre morale personnelle et éthique collective.
Mme Odette Terrade , rapporteur , s'est ensuite interrogée sur le développement des techniques médicamenteuses d'intervention et sur les risques que faisaient courir à ce développement les dispositions de l'article 11 bis du projet de loi, qui incriminent, sans autre précision, "le fait de fournir à la femme les moyens matériels de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même" . En réponse, le docteur Daniel Prévost a précisé qu'avec le RU 486, la base actuelle des IVG était médicamenteuse, autrement dit que des médicaments étaient utilisés dans pratiquement tous les types d'IVG, et qu'aujourd'hui de nombreuses IVG étaient exclusivement médicamenteuses, ce taux atteignant par exemple 45 % des interventions réalisées à Roubaix. Observant que cette évolution des techniques avait permis de faire passer la proportion des anesthésies générales d'environ 40 % il y a dix ans à moins de 5 % aujourd'hui, il a ajouté qu'elle autorisait également le développement de l'ambulation, méthode qui est couramment pratiquée, jusqu'à parfois dix semaines de grossesse, en Belgique, dans le canton de Genève ou au Québec, où l'hospitalisation des femmes pour l'IVG n'est plus majoritaire. Avec ses collègues, le docteur Daniel Prévost est convenu que la rédaction actuelle de l'article 11 bis du projet de loi risquait d'interdire le recours à l'IVG ambulatoire, au détriment des nombreuses femmes pour lesquelles cette pratique présente des avantages.
S'agissant de la situation des jeunes filles mineures et de l'aménagement porté à l'obligation d'obtenir l'autorisation parentale préalablement à l'IVG, le docteur Jacques Milliez a répondu à Mme Odette Terrade , rapporteur , que le choix par la mineure d'un adulte référent était une bonne solution et qu'il fallait en tout état de cause écarter absolument le recours à la justice, car le nécessaire respect des procédures propres à cette dernière, en particulier l'information des parents, aboutissait à des catastrophes pour les intéressées. Approuvant les propos de son confrère, le docteur Daniel Prévost a ajouté qu'actuellement de nombreux médecins et anesthésistes acceptaient, à titre "d'autorisation parentale", des documents signés dont le caractère apocryphe était manifeste. Il s'est par ailleurs réjoui que l'obligation de résidence de trois mois au moins des patientes étrangères ait été supprimée l'an dernier.
A propos de la stérilisation volontaire à visée contraceptive et de son éventuelle prise en charge par la sécurité sociale, abordées par Mme Odette Terrade , rapporteur , le docteur Jacques Milliez a supposé que son remboursement interviendrait comme pour tout acte chirurgical, tandis que le docteur Clara Pélissier a estimé que la gamme des méthodes et produits contraceptifs existant aujourd'hui en France ne rendait pas utile cette stérilisation volontaire.
M. Françis Giraud , rapporteur du projet de loi pour la commission des affaires sociales , est ensuite intervenu. Rappelant sa très grande proximité de pensée avec le Professeur Jean-François Mattéï, avec lequel il a travaillé notamment sur les questions de bioéthique, M. Françis Giraud a fait état des difficultés d'appréciation pour le législateur des opinions très diverses exprimées par les praticiens et de leurs manières d'envisager les principales questions relatives à l'IVG. Ainsi, s'agissant des incidences médicales du passage du délai légal de dix à douze semaines, il a relevé que les avis étaient très partagés, les techniques étant différentes selon les uns, pratiquement identiques selon les autres. De même, s'agissant des statistiques actuelles concernant les dépassements de délai, il s'est interrogé sur la réalité des chiffres avancés. Il a également abordé les différences d'appréciation concernant la suppression du caractère obligatoire de l'entretien social. Il a toutefois observé que la nécessité d'un renforcement de la formation des praticiens de l'IVG, d'une amélioration de leur situation et d'une suppression de la diversité régionale entre les centres d'IVG faisaient l'unanimité. Puis M. Françis Giraud , rapporteur du projet de loi pour la commission des affaires sociales , a fait part de ses interrogations sur la notion de "risque médical acceptable", qui ne lui paraît pas pertinente, sur la responsabilité civile et pénale de l'adulte référent choisi par la mineure, sur la délivrance de médicaments et d'appareils contraceptifs aux mineures sans autorisation parentale, et sur la suppression de la prescription médicale pour la délivrance de contraceptifs hormonaux.
Sur ce dernier point, Mme Dinah Derycke , présidente , a précisé que le projet de loi ne procédait qu'à un toilettage technique du code de la santé publique, qui ne remettait nullement en cause que, à l'exception du NorLevo, et sur le fondement d'une directive européenne du 31 mars 1992, les contraceptifs hormonaux demeuraient soumis à prescription médicale.
A Mme Gisèle Printz , qui s'inquiétait du caractère anonyme de l'accueil des femmes qui demandent une IVG et de la prise en charge de l'acte par la sécurité sociale, Mme Dinah Derycke , présidente , et les docteurs Jacques Milliez et Daniel Prévost ont confirmé que les procédures, notamment de codification des actes, étaient telles que cet anonymat était assuré et que, s'agissant des mineures, soit les équipes médico-sociales elles-mêmes, soit une collaboration entre l'hôpital et la caisse primaire d'assurance-maladie, garantissaient d'ores et déjà leur anonymat, lequel serait en outre explicitement prévu dorénavant, en application de l'article 15 du projet de loi.
Mme Claire-Lise Campion - que la Délégation avait autorisée à assister aux auditions à la demande de Mme Dinah Derycke, présidente - a demandé si le délai de réflexion de deux mois prévu dans le cadre de la stérilisation volontaire à visée contraceptive était suffisant. Après l'avoir jugé satisfaisant, le docteur Jacques Milliez a précisé que les réticences du corps médical à l'égard de la stérilisation contraceptive s'expliquaient par l'existence de remords chez de nombreuses personnes qui l'ont subie. Le docteur André Podevin a estimé que ce type de demande était chargé de sens et qu'il fallait du temps pour mûrir sa décision, et un accompagnement par des conseillères conjugales. Le docteur Clara Pélissier a considéré qu'il faudrait interdire la stérilisation volontaire pour les jeunes femmes en raison des risques de regrets, et qu'il fallait responsabiliser les jeunes filles très tôt à la contraception en les informant qu'il existe toujours, tout au long de la vie féconde, une méthode adaptée.
A cet égard, le docteur Daniel Prévost a estimé la connaissance des méthodes contraceptives satisfaisante en France, puisqu'à la fin de leur vie féconde, deux-tiers des femmes françaises ont, d'après les statistiques, suivi une contraception, ce qui place notre pays dans la moyenne des Etats comparables. Ajoutant que toute mineure peut d'ores et déjà se faire délivrer un traitement contraceptif dans le secret dès lors qu'elle s'adresse à un centre de planification, il a jugé opportun l'article du projet de loi généralisant cette faculté à la médecine de ville. Le docteur André Podevin ayant réagi à ces propos en considérant que le fait qu'une femme sur deux soit confrontée une fois dans sa vie à une IVG indiquait au contraire que les pratiques contraceptives n'étaient pas suffisamment ni correctement mises en oeuvre par les Françaises, le docteur Daniel Prévost a estimé qu'il convenait d'être prudent dans le maniement des statistiques globales, les situations étant très variables selon les régions ou la condition différente des femmes ; par exemple, les femmes célibataires seraient toutes confrontées à une situation de grossesse non désirée au moins une fois dans leur vie alors que la proportion ne serait que de 40 % pour les femmes mariées.
Mme Gisèle Printz s'est étonnée que la place et le rôle de l'homme n'aient pas été abordés au cours des interventions, et a observé qu'ils ne l'étaient au demeurant presque jamais en matière d'IVG. Le docteur Clara Pélissier lui a répondu que les gynécologues médicaux rencontraient effectivement très rarement les couples, sauf dans les cas d'infécondité ou de stérilité. Se fondant sur des études menées par des psychanalystes, le docteur Daniel Prévost a toutefois signalé que les hommes étaient plus présents qu'il n'y paraissait dans les situations d'IVG, mais qu'il fallait opérer une lecture délicate de celles-ci pour le relever. Après avoir précisé qu'en tout état de cause, quand l'homme refuse l'IVG, c'est l'avis de la femme qui prévaut, comme le prévoit la loi, le docteur Jacques Milliez a approuvé les dispositions du projet de loi concernant la stérilisation des personnes handicapées, avec les précautions de procédure qui lui sont attachées, relevé qu'au Japon, des contraceptifs oestro-progestatifs étaient déjà délivrés sans prescription médicale, et considéré qu'aucun problème de responsabilité pénale ou civile ne pourrait se poser pour les adultes référents choisis par les mineures désirant bénéficier d'une IVG dans le secret, ce dernier point étant confirmé par Mme Dinah Derycke , présidente .
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En outre, le mardi 23 janvier 2001 , Mme Odette Terrade , rapporteur , a entendu Mme Maya Surduts , secrétaire générale de la Coordination des associations pour le droit à l'avortement et à la contraception (CADAC).