EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 26 juin 2001, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a entendu une communication de M. Joseph Ostermann , rapporteur spécial des crédits de l'emploi , sur la mission de contrôle qu'il a effectuée sur le financement par l'Etat de la réduction du temps de travail .
Après que M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, eut présenté les grandes lignes e son rapport, M. Philippe Marini, rapporteur général , a déploré que le Gouvernement se trouve dans une impasse pour financer les 35 heures et que, dès lors, il avait dû ponctionner les ressources des régimes sociaux. Il a par ailleurs dénoncé le fractionnement des comptes publics, préjudiciable à la transparence des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale. Enfin, il a considéré que le FOREC avait pour conséquence, et probablement aussi pour objectif, d'anesthésier l'opinion publique en ce qui concerne l'évolution des dépenses des administrations publiques.
M. Maurice Blin a indiqué qu'un dirigeant d'une grande entreprise du bâtiment lui avait expliqué que, pour faire face au passage de ses salariés aux 35 heures, il avait dû augmenter ses prix de 10 à 15 %, ce qui contribue au réveil de l'inflation actuellement observé.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a indiqué que le FOREC n'avait toujours pas été créé, essentiellement pour des raisons politiques, en particulier pour éviter de faire apparaître son déficit, d'un montant considérable. Il s'est également dit très inquiet du coût de la réduction du temps de travail dans l'ensemble des fonctions publiques, qui est pour l'instant totalement inconnu.
La commission a alors donné acte au rapporteur des conclusions de sa communication et a décidé d'autoriser leur publication sous la forme d'un rapport d'information.
ANNEXES
• Courrier du 20 juillet 2000 de la direction générale de la comptabilité publique à l'ACOSS concernant le circuit comptable du FOREC
• Courrier du 22 février 2001 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et de la ministre de l'emploi et de la solidarité au directeur de l'ACOSS, relatif aux conséquences comptables de la non constitution du FOREC en 2000
• Courrier du 28 février 2001 du président de l'ACOSS à la ministre de l'emploi et de la solidarité
• Note du 20 mars 2001 du directeur de la sécurité sociale au cabinet de la ministre de l'emploi et de la solidarité
• Courrier du 23 mars 2001 de la ministre de l'emploi et de la solidarité au président de l'ACOSS
• Note du 23 mars 2001 du directeur de la sécurité sociale au cabinet de la ministre de l'emploi et de la solidarité, relative à l'affectation des 15 milliards de francs de l'UNEDIC
A partir de l'analyse des notes de la direction de la prévision et de la direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, ainsi que de celles de la direction de la sécurité sociale du ministère de l'emploi et de la solidarité, ce rapport tend à démontrer que le coût exorbitant des 35 heures - 72 milliards de francs en 2000, 92 milliards de francs cette année, environ 120 milliards de francs à terme - n'avait pas été prévu par le gouvernement et ses services. Ceux-ci, au contraire, avaient élaboré un scénario affichant la neutralité de la réduction du temps de travail sur les finances publiques, dès lors que les régimes sociaux, au nom de la théorie des « retours » financiers des 35 heures, contribuaient au financement de ce dispositif.
Face au déficit croissant du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), le gouvernement a constamment cherché, et a réussi, à désengager le budget de l'Etat du fonds, alors que la loi oblige ce dernier à en assurer l'équilibre financier. Dans le même temps, il n'a jamais renoncé à ponctionner les ressources des régimes sociaux, comme le montre sa décision de leur faire supporter le déficit 2000 de 13 milliards de francs.
Par ailleurs, l'effet sur l'emploi des 35 heures est extrêmement incertain. Le ministère de l'emploi et celui de l'économie et des finances ne dressent pas le même bilan de la réduction du temps de travail en termes de créations d'emplois. Par ailleurs, l'administration n'est pas capable de distinguer les emplois effectivement créés et ceux préservés par les « lois Aubry ». Enfin, les méthodes de comptabilisation retenues par les services ministériels sont « artisanales », ne prenant en compte que les engagements de création ou de préservation d'emplois, jamais des chiffres certains.
Enfin, les services du ministère de l'emploi sont placés dans une situation extrêmement délicate par l'application de la législation relative à la réduction du temps de travail. Les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle sont débordées par des tâches administratives extrêmement lourdes et complexes. Du reste, les créations d'emplois au bénéfice de ces services, contrairement aux engagements du gouvernement, ne sont pas tant dédiées à l'application des « lois Aubry » qu'au renforcement des services.