2. Donner aux collectivités territoriales les moyens de leurs compétences élargies
a) De nouvelles garanties financières
L'acte II de la décentralisation engagé par le gouvernement confie d'importantes compétences aux collectivités territoriales. Le gouvernement a souhaité donner très tôt des garanties, s'agissant de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, quant au financement de ces compétences créées ou transférées au profit des collectivités locales.
Plusieurs garanties relatives aux ressources des collectivités territoriales avaient été introduites par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République :
- d'une part, le quatrième alinéa de l'article 72-2 dispose que « tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ». Il garantit ainsi que les collectivités territoriales bénéficient toujours des ressources nécessaires au financement de leurs nouvelles compétences.
- d'autre part, le troisième alinéa de l'article 72-2 dispose que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ». La loi organique n° 2004-758 du 29 juillet 2004 relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales a précisé la portée de cet alinéa. L'article 3 de cette loi organique dispose ainsi que « les ressources propres des collectivités territoriales sont constituées du produit des impositions de toutes natures dont la loi les autorise à fixer l'assiette, le taux ou le tarif, ou dont elle détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette, des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs ». La loi organique précitée tend à garantir que la part des ressources propres ne pourra, par catégorie de collectivités territoriales, être inférieure à la part constatée pour l'année 2003. Il convient toutefois de noter que les ressources propres des collectivités territoriales ont été entendues largement, incluant notamment les impôts partagés avec l'Etat pour lesquels les collectivités territoriales ne peuvent agir ni sur l'assiette, ni sur le taux.
Lors de l'examen de la loi précitée relative aux libertés et aux responsabilités locales, le Parlement a cherché à s'assurer que les compétences transférées et les compétences nouvelles seraient correctement évaluées et financées.
Plusieurs dispositions ont été introduites à cette fin :
- l'article 118 prévoit que la commission consultative d'évaluation des charges (CCEC) sera désormais présidée par un élu. Elle devra être consultée sur les modalités d'évaluation des charges d'investissement, et chaque année, sur l'évaluation des charges liées à toutes les nouvelles compétences, notamment au regard des recettes fiscales transférées ;
- l'article 119 déroge aux dispositions de droit commun relatif à la compensation des transferts de compétences 26 ( * ) et prévoit que l'évaluation des charges de fonctionnement correspondant aux compétences transférées par la loi précitée relative aux libertés et aux responsabilités locales sera calculée à partir des trois derniers exercices, et, pour les charges d'investissement, à partir des cinq derniers exercices, de manière à limiter l'impact d'une éventuelle minoration artificielle des dépenses de l'Etat en 2004, dernière année avant le transfert ;
- l'article 119 prévoit également que si les recettes provenant des impositions attribuées aux collectivités territoriales au titre de la compensation financière des transferts de compétences « pour des raisons étrangères au pouvoir de modulation reconnu aux collectivités bénéficiaires, l'Etat compense cette perte dans des conditions fixées en loi de finances afin de garantir à ces dernières un niveau de ressources équivalent à celui qu'il consacrait à l'exercice de sa compétence avant son transfert. Ces diminutions de recettes et les mesures de compensation prises au titre du présent alinéa font l'objet d'un rapport au Comité des finances locales » 27 ( * ) .
Le gouvernement a donc entendu les inquiétudes des élus locaux et a souhaité préalablement aux transferts de compétences, prévoir les garanties de financement nécessaires pour permettre aux collectivités territoriales de les exercer.
* 26 On rappellera que l'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales dispose que « tout accroissement net de charges résultant des transferts de compétences effectués entre l'Etat et les collectivités territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux communes, aux départements et aux régions des ressources équivalentes à l'exercice normal de ces compétences. Ces ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées, à la date du transfert, par l'Etat au titre des compétences transférées et évoluent chaque année, « dès la première année, » comme la dotation globale de fonctionnement. Elles assurent la compensation intégrale des charges transférées ».
* 27 On notera que ce dispositif, introduit à l'initiative de l'Assemblée nationale, s'inspire de la décision du Conseil constitutionnel n° 2003-489 DC portant sur la loi de finances pour 2004. Au sujet de l'article 59 de la loi précitée, relatif aux modalités de compensation financière aux départements résultant de la décentralisation du revenu d'insertion, le Conseil constitutionnel indiquait que « si les recettes départementales provenant de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers venaient à diminuer, il appartiendrait à l'Etat de maintenir un niveau de ressources équivalent à celui qu'il consacrait à l'exercice de cette compétence avant son transfert ».