2. Le plafonnement des niches fiscales, première étape d'une démarche vertueuse ?

a) Au milieu du gué

La liste des « niches » dont le plafonnement est proposé correspondrait aux seuls « avantages qui sont la conséquence d'une situation choisie par le contribuable » . A défaut d'une remise en cause générale, ce critère est a priori judicieux dans le cadre d'une démarche guidée par l'équité . Sur les 184 dépenses fiscales (parmi 527) recensées dans le « bleu » « Evaluation des voies et moyens » rattachées à l'impôt sur le revenu, le plafonnement concernerait ainsi 19 d'entre elles.

Pour 17 de ces dépenses fiscales, un plafonnement général est prévu à raison de 8.000 euros par foyer majoré de 750 euros par personne à charge et de 5.000 euros en présence d'une personne handicapée. Il est également prévu un plafonnement spécifique concernant les deux réductions d'impôt sur le revenu relatives aux investissements dans les départements d'outre-mer. Son montant peut être calculé de la même façon que pour le plafonnement général, ou représenter 15 % du revenu net imposable si ce montant est plus favorable au contribuable.

Votre rapporteur général estime que le plafonnement proposé n'est bienvenu qu'à la condition de constituer un premier pas, une première étape vers une remise en cause générale des avantages fiscaux 45 ( * ) qui puisse être compensée, à rendement de l'impôt inchangé, par une baisse générale du barème.

b) Un risque de prolifération

Il serait à craindre que la nouvelle logique imprimée par le plafonnement des avantages fiscaux ne soit pas celle d'une réduction de leur nombre, mais celle d'une prolifération sous contrôle de la dépense fiscale .

Le projet de loi finances pour 2006 n'apporte-t-il pas déjà, ainsi, son lot d'« améliorations », avec la création d'un crédit d'impôt pour favoriser la mobilité des chômeurs de longue durée ou des salariés perdant leur emploi à la suite d'un plan social (article 7), le renforcement des avantages liés à l'acquisition d'un véhicule propre (article 66) ou les dépenses d'équipement de l'habitation principale dès lors qu'elles amélioreraient la « performance énergétique » des logements (article 67) ?

Si le gouvernement n'adoptait pas pour objectif final une remise en cause générale des différentes niches fiscales, la présente tentative d'une diminution de la dépense fiscale pourrait bien tourner court, sous l'effet conjugué des lobbys et des experts en stratégie fiscale. Au total, il ne resterait alors de la réforme qu'une nouvelle complexification de la fiscalité du revenu, étant entendu que la simplification du barème tient davantage de la présentation.

Déjà pour 2007, le gain fiscal résultant du plafonnement proposé, évalué par Bercy à 50 millions d'euros, soit seulement 0,1 % du produit de l'impôt sur le revenu et moins de 1,2 % des dépenses fiscales plafonnées, paraît ténu et sans commune mesure avec le coût de la réforme du barème...

Le rapport précité du Conseil d'analyse économique « Croissance équitable et concurrence fiscale » préconise une suppression intégrale des « niches » dans le cadre d'une baisse générale du barème de l'IR assorti d'un renforcement de la CSG, pour un niveau de prélèvement obligatoire globalement inchangé. Ainsi, la logique adoptée par le gouvernement, qui maintient les avantages fiscaux tout en poursuivant la baisse du barème au prix d'une baisse du rendement de l'impôt sur le revenu s'inscrit en contradiction complète par rapport aux principales orientations du rapport du Conseil d'analyse économique...

* 45 Le Conseil des impôts, dans son vingt-et-unième rapport intitulé « La fiscalité dérogatoire », avait insisté sur le nombre, le coût mal maîtrisé, la complexité et l'efficacité incertaine des avantages fiscaux.

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