Rapport d'information n° 365 (2005-2006) de M. Jean BIZET , fait au nom de la délégation pour l'Union européenne, déposé le 18 mai 2006
Disponible au format Acrobat (131 Koctets)
-
I. LE CONSTAT : UN DÉBAT
EUROPÉEN TROP DISTINCT DU DÉBAT NATIONAL
-
II. LA PROCÉDURE D'EXAMEN DES TEXTES
EUROPÉENS
-
III. LES DÉBATS EUROPÉENS EN
SÉANCE PUBLIQUE
-
EXAMEN EN DÉLÉGATION
-
ANNEXES
-
ANNEXE I - L'EXAMEN DES QUESTIONS
EUROPÉENNES PAR LE PARLEMENT BRITANNIQUE
-
ANNEXE II - L'EXAMEN DES QUESTIONS
EUROPÉENNES PAR LE PARLEMENT FINLANDAIS
N° 365
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006
Annexe au procès-verbal de la séance du 18 mai 2006 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation pour l'Union européenne (1) sur une meilleure implication de l'ensemble des sénateurs dans l' examen des questions européennes,
Par M. Jean BIZET,
Sénateur.
(1) Cette délégation est composée de : M. Hubert Haenel, président ; MM. Denis Badré, Jean Bizet, Jacques Blanc, Jean François-Poncet, Bernard Frimat, Simon Sutour, vice-présidents ; MM. Robert Bret, Aymeri de Montesquiou, secrétaires ; MM. Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, Yannick Bodin, Didier Boulaud, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Louis de Broissia, Gérard César, Christian Cointat, Robert del Picchia, Marcel Deneux, André Dulait, Pierre Fauchon, André Ferrand, Yann Gaillard, Paul Girod, Mmes Marie-Thérèse Hermange, Fabienne Keller, MM. Serge Lagauche, Gérard Le Cam, Louis Le Pensec, Mmes Colette Mélot, Monique Papon, MM. Yves Pozzo di Borgo, Roland Ries, Mme Catherine Tasca, MM. Alex Türk, Serge Vinçon.
Union européenne. |
Une des grandes leçons du référendum du 29 mai, c'est la nécessité de rapprocher l'Europe des citoyens. Beaucoup d'électeurs ne se retrouvent pas dans une Europe qui leur paraît souvent difficile à comprendre, voire opaque, et trop peu à l'écoute de leurs préoccupations. Et chacun a pu constater, durant le débat référendaire, que les bases de la construction européenne restaient mal connues. Par exemple, certains articles de la Constitution européenne qui étaient la pure et simple reprise de dispositions en vigueur depuis des décennies sont apparus comme la marque d'un tournant de la construction européenne.
De ce constat, on peut tirer deux conclusions :
- la première est qu'il faut mieux relayer les préoccupations de nos concitoyens auprès des institutions européennes ;
- la seconde est qu'il faut une meilleure information sur l'Europe, davantage d'explications, davantage de débats permettant aux citoyens de mieux cerner les enjeux.
Naturellement, ce n'est pas seulement au Parlement qu'il incombe de répondre à ces préoccupations. Le Gouvernement, les médias ont bien sûr un très grand rôle à jouer à cet égard. Mais nous, parlementaires, avons aussi une responsabilité à exercer. En effet, comment espérer intéresser nos concitoyens à la construction européenne, si les parlementaires qui les représentent ne s'y intéressent pas eux-mêmes ? Or, les questions européennes continuent à rester à part dans les travaux parlementaires, presque marginales, alors qu'en réalité elles ont aujourd'hui une influence déterminante sur les questions nationales.
Nous ne pouvons nous contenter d'avoir, au Sénat, une délégation pour l'Union européenne où se retrouvent en quelque sorte les « spécialistes de l'Europe », tandis que les questions européennes n'occupent qu'une place très réduite dans les travaux des commissions permanentes, et plus réduite encore dans les travaux en séance publique. Je vais donner un exemple personnel. S'il y a un texte européen qui a été débattu par le Sénat, c'est bien la directive Bolkestein, examinée par la délégation pour l'Union européenne, puis par la commission des affaires économiques, puis par la séance publique, avec adoption d'une résolution. Deux mois plus tard, le Gouvernement a déposé, à l'occasion du débat sur le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, un amendement qui donnait satisfaction à l'une des demandes formulées dans la résolution du Sénat. Je suis intervenu dans le débat pour m'en féliciter, mais je dois dire que mon intervention n'a guère eu d'écho : ni le Gouvernement, ni la commission compétente du Sénat ne semblaient voir le moindre lien avec la résolution que le Sénat avait adoptée en séance plénière à propos de la directive Bolkestein. On voit par cet exemple que nous n'arrivons pas à faire le lien entre les questions européennes et les questions nationales, alors qu'aujourd'hui elles sont très souvent inséparables. C'est là un défi qu'il nous faut aujourd'hui relever.
I. LE CONSTAT : UN DÉBAT EUROPÉEN TROP DISTINCT DU DÉBAT NATIONAL
Certes, nous avons fait de grands progrès au cours de la dernière décennie. Avant 1992, les affaires européennes étaient traitées par le parlement français comme des affaires étrangères . L'Assemblée nationale et le Sénat restaient presque indifférents à l'élaboration des textes européens et ne prenaient vraiment conscience de leur existence qu'au moment de leur transposition en droit interne.
Aujourd'hui, le système mis en place permet aux parlementaires français :
- de prendre connaissance, dès leur origine, de tous les projets de textes européens de nature à influer sur la législation française,
- d'analyser ces textes,
- de procéder à un tri afin de distinguer ceux qui ont une réelle importance politique ou juridique,
- enfin, d'examiner ces derniers en profondeur, de dialoguer à leur propos avec le Gouvernement et de lui faire connaître le sentiment de l'Assemblée nationale et du Sénat.
Il est indéniable que nous avons aujourd'hui un système parlementaire d'examen des propositions de textes européens satisfaisant. Le Parlement français est ainsi un des rares - avec les parlements britannique et finlandais - à examiner tous les documents européens qui leur sont soumis. Toutefois, si le parlement français - et notamment le Sénat - examine effectivement les textes européens, on doit constater que le débat européen au Sénat - comme à l'Assemblée nationale - reste aujourd'hui trop distinct du débat sur les questions nationales .
En d'autres termes, le Sénat a franchi une première étape dans la mesure où il ne considère plus les affaires européennes comme des affaires étrangères, mais il ne parvient pas encore à franchir l'étape suivante et à les considérer comme des affaires intérieures . Or, l'interaction entre décisions européennes et décisions nationales est telle aujourd'hui qu'il n'est que rarement possible d'isoler les unes des autres et de traiter les secondes en ignorant les premières.
J'en tire la conclusion que notre but prioritaire doit être de trouver des moyens d'intéresser l'ensemble de nos collègues, et donc l'ensemble des organes du Sénat aux questions européennes .
Ce n'est pas un problème facile à résoudre. Et ce n'est pas une question qui ne se pose qu'au Parlement. Le Gouvernement lui-même peine à y apporter une réponse et nous avons pu constater que nombre de ministres n'ont qu'une connaissance très approximative et un intérêt très relatif pour les travaux qui sont menés à Bruxelles dans leur domaine d'attribution. Ce n'est souvent que tardivement qu'ils prennent la mesure des répercussions qu'auront en France les décisions qui sont préparées au sein des groupes de travail du Conseil ou du COREPER. Et chacun sait que, bien souvent, lorsque le débat arrive devant le Conseil de l'Union, c'est-à-dire devant les ministres eux-mêmes, beaucoup de points essentiels sont déjà définitivement arrêtés. À cet égard, la réanimation récente du Comité interministériel pour les questions européennes paraît une heureuse initiative. Il devrait permettre de sensibiliser les ministres aux travaux menés au sein de l'Union et les amener à intégrer ceux-ci dans leurs propres réflexions.
Cette relégation des affaires européennes n'est d'ailleurs pas le privilège des organes de l'État et l'on en découvre tout aussi bien la manifestation dans le monde des affaires. Un rapport récent de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris soulignait ainsi que « les affaires européennes n'innervent pas encore toute la structure de l'entreprise. Elles restent l'apanage de quelques directions. Nombre de responsables dans les entreprises s'étonnent encore de la facilité avec laquelle on peut rencontrer des fonctionnaires européens et faire valoir ses idées » .
Et, pour revenir au monde parlementaire, notre collègue député Michel Herbillon, dans le rapport qu'il a remis au Premier ministre sur « la fracture européenne » , souligne bien qu'il n'y a pas d'« exception française » pour le traitement - on pourrait dire le mauvais traitement - des questions européennes. Mais, inversement, certains pays sont parvenus à des formules de contrôle parlementaire plus convaincantes que la nôtre : les pays nordiques d'abord, qui sont souvent cités en exemple, mais aussi, plus comparables à nous, la Grande-Bretagne ou l'Allemagne.
Au cours des deux dernières années, beaucoup d'États membres ont, dans la perspective de l'application du traité constitutionnel, mené des réflexions sur leur système de suivi parlementaire des questions européennes. Les parlements danois, finlandais, néerlandais et britannique ont ainsi - souvent en association étroite avec leurs gouvernements - analysé leurs systèmes en en faisant ressortir les points forts et en formulant des propositions pour remédier aux insuffisances. Or, il est intéressant de noter que nombre des préoccupations qu'ils évoquent rejoignent les nôtres.
Marquant sa volonté de mieux intégrer la politique européenne dans les travaux politiques du Folketing, le parlement danois s'est réjoui ainsi d'avoir obtenu une meilleure information de son gouvernement et une meilleure implication de ses commissions sectorielles. Soulignant que la mission de la commission européenne du Folketing est d'assurer l'unité et la cohérence dans le traitement des affaires européennes par le Folketing, il a souhaité que la présentation des questions européennes par les ministres évite les détails techniques, qu'elles soient brèves et qu'elles aient un caractère politique.
Le parlement britannique a insisté, quant à lui, sur la nécessité de se prononcer sur les textes européens le plus vite possible ainsi que sur l'importance d'un dialogue et d'une étroite coopération avec les ministres compétents.
Quant au parlement finlandais, il apparaît comme un véritable modèle de l'imbrication réussie des affaires européennes dans les affaires nationales. Tout projet de texte européen entrant dans le champ de compétences du législateur national est accompagné d'une communication du Gouvernement qui a été approuvée lors d'une réunion plénière de ce dernier, ce qui a pour effet de susciter une coordination interministérielle dès le début du processus. Et tout projet de texte européen est renvoyé à la commission spécialisée compétente qui est obligée d'émettre un avis qu'elle transmet à la Grande commission en sorte que cette dernière arrête une position. On voit là un exemple parfait d'un traitement des affaires européennes à l'égal du traitement des affaires nationales.
Il n'est évidemment pas question de transposer telles quelles dans notre pays ces expériences, qui sont liées à tout un contexte institutionnel. Mais on voit bien que le souci général est, d'une part, de mieux associer l'ensemble des parlementaires, et, d'autre part, d'obtenir un dialogue politique approfondi et effectif avec le Gouvernement.
C'est dans cet esprit qu'il convient de formuler des propositions concernant :
- la procédure d'examen des projets de textes européens, c'est-à-dire la procédure de l'article 88-4 de la Constitution,
- les débats européens en séance plénière.
II. LA PROCÉDURE D'EXAMEN DES TEXTES EUROPÉENS
1. Les insuffisances actuelles
Sans doute n'est-il pas inutile de rappeler tout d'abord les objectifs visés par l'examen par le Sénat des projets de textes européens. J'en distinguerai trois qui sont complémentaires :
- d'abord un objectif d'information . La procédure de l'article 88-4 de la Constitution doit permettre de faire connaître les projets de textes européens, non seulement avant qu'ils ne soient adoptés, mais au moment même où le législateur européen - Parlement européen et Conseil - en prend connaissance. Et cette information doit bénéficier non seulement aux parlementaires, mais aussi aux groupes d'intérêt et à l'ensemble des citoyens ;
- ensuite un objectif de débat politique . La procédure doit permettre un débat public au cours duquel chacun pourra s'exprimer, des conclusions pourront être émises, des propositions pourront être formulées ;
- enfin, un objectif d'influence . Le parlement national a perdu une part de sa compétence de législateur en application des traités européens. Dans un certain nombre de domaines, c'est de ce fait le gouvernement qui devient législateur à sa place. Car les gouvernements des États membres jouent un rôle de législateur au sein du Conseil de l'Union. Dès lors, la procédure de l'article 88-4 doit permettre à l'Assemblée et au Sénat d'influer sur les positions que prendra le gouvernement français dans l'élaboration de la législation européenne par le Conseil. Ce pouvoir d'influence est un substitut au pouvoir législatif qui échappe désormais au parlement.
Que faudrait-il pour que la procédure de l'article 88-4 permette d'atteindre ces objectifs :
- il faudrait d'abord, que le Sénat intervienne rapidement. Nous devons être conscients que c'est tout à fait au début du processus législatif européen que nous pouvons intervenir utilement. De loin, on peut avoir l'impression d'avoir du temps, car il est rare que le Conseil se prononce rapidement de manière officielle. Mais, en réalité, dès que la Commission a présenté un texte, les groupes de travail du Conseil commencent à se réunir et, bien qu'on soit en principe à l'échelon administratif, en réalité sur un grand nombre d'aspects les négociations prennent tournure à ce stade. Si nous attendons que le Conseil soit sur le point de se prononcer pour intervenir, nous n'avons guère de chances d'avoir une influence, car à ce moment-là les jeux sont déjà faits sur la plupart des points et il est quasiment impossible d'amener les négociateurs français à revenir sur un point examiné antérieurement. Il faut donc aller vite.
- il faudrait ensuite, avoir un dialogue effectif avec le Gouvernement . Et cela pour trois raisons : d'abord, parce que cela permet de remettre de la politique dans les affaires européennes qui, en France, sont trop fréquemment traitées presque exclusivement par les administrations, sans interférence véritable du politique ; ensuite, parce que c'est le gouvernement qui va jouer le rôle de législateur à Bruxelles et qu'il est donc logique et normal qu'il entende directement l'expression des assemblées sur les décisions qu'il va prendre ; en troisième lieu, parce que l'existence d'un débat avec le gouvernement est un des moyens d'accroître l'intérêt des sénateurs et de lutter contre la passivité et l'ennui qui accompagnent des débats qui apparaissent souvent trop techniques et trop peu politiques ;
- enfin, il faudrait que la procédure de l'article 88-4 permette à tous les sénateurs de participer aux débats .
Or, à l'heure actuelle, ces conditions ne sont pas remplies.
Notre procédure est lente. Ainsi, en 2005, le délai moyen d'adoption définitive d'une résolution par la commission compétente a été supérieur à trois mois. Et cette moyenne ne tient pas compte, par définition, des propositions de résolution laissées « en attente ». Par exemple, cinq propositions de résolution déposées en 2005 n'ont pas encore été examinées.
Notre procédure ne permet pas non plus un dialogue avec le Gouvernement. Celui-ci n'est présent que si la proposition de résolution est examinée en séance plénière. Or, cette situation est très rare : au cours des quatre dernières années, seulement deux propositions de résolution ont été examinées en séance plénière.
Enfin, notre procédure ne permet pas d'impliquer l'ensemble des sénateurs . L'examen en séance plénière est rarissime et les résolutions sont généralement adoptées par les commissions ; de ce fait, seuls les membres de la délégation pour l'Union européenne dans un premier temps, puis ceux de la commission compétente dans un second temps, peuvent prendre part au débat.
En un mot, au regard de ces trois critères, nous sommes organisés en vue de l'inefficacité maximale.
2. Les solutions proposées
a) Le rapporteur des résolutions
Ce qui caractérise la procédure
législative française, c'est l'importance du rôle du
rapporteur. En France,
« le rapporteur est le véritable
pivot de la procédure législative »
. Chez aucun de
nos partenaires européens, le rapporteur n'occupe une telle place et ne
joue un rôle aussi central et aussi important.
Le rôle du rapporteur dans la procédure législative française « En France, beaucoup plus que dans la plupart des Parlements étrangers, le rapporteur est le véritable pivot de la procédure législative. Ce rapporteur est investi d'une double fonction. D'une part, il est chargé d'étudier le projet pour son examen en commission. Il lui revient donc d'analyser la législation que le projet envisage de modifier et les aménagements qu'il y apporte ainsi que, le cas échéant, les solutions adoptées à l'étranger ; il lui appartient de procéder lui-même à des auditions de personnalités publiques, privées ou syndicales, ou de proposer à la commission d'entendre certaines de ces personnalités ; il lui incombe également - et c'est la part la plus délicate de sa mission - de faire des propositions d'amendements, d'une ampleur très variable en fonction du jugement politique et technique qu'il porte sur le texte, et d'exprimer son point de vue, favorable ou défavorable, sur les amendements proposés par ses collègues membres de la commission. » (...) « Une fois l'examen par la commission terminé, le rapporteur change de rôle : il devient l'interprète auprès de l'Assemblée des positions prises par la commission, positions qu'il doit défendre même dans le cas où elles ne coïncident pas, sur tel ou tel point particulier, avec ses options personnelles ». Paul Cahoua : « Les commissions, lieu du travail législatif » (revue « Pouvoirs », n° 34). |
Or, l'on sait que la procédure d'examen des résolutions européennes a été calquée sur la procédure d'examen des lois. De ce fait, le rapporteur y joue ce même rôle central. Mais, pour l'examen des propositions de résolution européennes, on a multiplié le nombre des rapporteurs.
Pour un texte de loi national, l'instruction est effectuée par le rapporteur entre le dépôt du projet et l'examen de ce projet par la commission compétente. S'il y a des commissions saisies pour avis, les instructions par les rapporteurs pour avis se déroulent concomitamment, sans exiger un délai supplémentaire. En revanche, lorsqu'un texte européen donne lieu à une proposition de résolution déposée par la délégation pour l'Union européenne, ce texte fait l'objet de deux instructions successives.
En effet, lorsque la délégation pour l'Union européenne conclut au dépôt d'une proposition de résolution, c'est à l'issue d'une procédure au cours de laquelle un sénateur membre de la délégation a été nommé rapporteur et a fait l'instruction du dossier. Et c'est en fonction de cette instruction et des explications techniques délivrées par le rapporteur que la délégation arrête le texte de sa proposition de résolution. Or, lorsque la commission compétente est saisie de cette proposition de résolution, elle refait complètement l'instruction du texte européen concerné comme si le Sénat venait seulement d'en être saisi. C'est une situation unique. La délégation est un organe du Sénat où tous les groupes sont représentés à la proportionnelle ; toutes les commissions y sont également représentées. Ses travaux ont donc une représentativité indiscutable. Reprendre de zéro l'instruction d'un texte déjà examiné par la délégation ne peut se justifier ni par des raisons techniques ni par des raisons politiques. De même que, en séance plénière, on ne refait pas le travail d'instruction effectué en commission, de même il n'est pas logique que la commission refasse le travail de la délégation.
Car ce cumul de deux instructions successives entraîne des délais considérables. Si l'on prend les sept résolutions que le Sénat a adoptées sur proposition de la délégation à propos de textes européens qui lui ont été soumis en 2005, on constate qu'il s'est écoulé en moyenne 30 jours entre le dépôt de la proposition de résolution par la délégation et la nomination du rapporteur par la commission compétente, auxquels s'ajoutent en moyenne 45 jours entre la nomination du rapporteur et la réunion de la commission. Il y a donc eu un délai moyen de 75 jours entre le dépôt de la proposition de résolution qui résulte de la délibération de la délégation pour l'Union européenne et l'examen de cette proposition de résolution par la commission compétente . On imagine aisément les progrès de la discussion au sein des groupes de travail du Conseil pendant ces 75 jours !
Il est donc temps de mettre fin à cette anomalie, en décidant que, de plein droit, le rapporteur de la délégation est également rapporteur devant la commission compétente , même s'il n'en est pas membre. La commission resterait l'organe de décision, elle resterait l'organe d'instruction pour les propositions de résolution émanant de sénateurs individuels ou de groupes, mais elle ne referait pas l'instruction des textes déjà examinés par la délégation. Cela permettrait de gagner un temps considérable, sans remettre en cause le pouvoir de décision de la commission compétente. Bien entendu, le rapporteur ne prendrait part au vote au sein de la commission que s'il était lui-même membre de celle-ci.
Première proposition : dans le cas d'une
proposition de résolution déposée au nom de la
délégation pour l'Union européenne, le rapporteur de la
délégation est rapporteur devant la commission
compétente.
|
b) Le délai d'examen des résolutions
Toujours dans l'idée de raccourcir les délais, nous devrions prévoir dans le Règlement du Sénat qu'une proposition de résolution déposée par la délégation doit être examinée par la commission compétente dans un délai maximum d'un mois . Cette suggestion n'a rien d'extravagant, puisqu'une telle règle a été introduite dans le règlement de l'Assemblée nationale il y a plusieurs années. On peut même penser que, dès lors qu'il n'est plus nécessaire de trouver un nouveau rapporteur et de lui laisser le temps d'appréhender le dossier, la réunion de la commission devrait avoir lieu très peu de temps après le dépôt de la proposition de résolution.
Deuxième proposition : toute proposition
de résolution déposée au nom de la
délégation pour l'Union européenne doit être
examinée par la commission compétente dans le délai d'un
mois suivant son dépôt.
|
c) L'association des sénateurs
Il nous faut également trouver une formule permettant d'associer l'ensemble des sénateurs. Il suffirait de décider, pour cela, que lorsque la commission compétente se prononce sur une proposition de résolution, elle est ouverte à tous les sénateurs. Tous les sénateurs pourraient intervenir dans le débat, soutenir éventuellement un amendement, mais naturellement seuls les membres de la Commission pourraient prendre part au vote. Dans le même esprit, il serait souhaitable que ce type particulier de réunion fasse l'objet d'un compte rendu intégral au Journal Officiel et qu'il soit ouvert au public. Il est clair que, si cette formule était adoptée, il ne serait plus nécessaire de prévoir la possibilité d'un examen en séance publique. Comme nous l'avons vu, l'examen en séance publique est extrêmement rare, mais sa possibilité contribue à allonger sensiblement les délais : actuellement, une résolution adoptée par une commission ne devient définitive qu'au bout de dix jours, qui est le délai durant lequel on peut demander un examen en séance publique. Ce serait autant de gagné.
Troisième proposition : tous les
sénateurs peuvent participer aux réunions au cours desquelles une
commission examine une proposition de résolution européenne.
Cette réunion est ouverte au public et fait l'objet d'un compte rendu
intégral publié au Journal officiel.
|
d) Le dialogue avec le Gouvernement
Enfin, il nous faut un dialogue effectif avec le Gouvernement. On peut faire à cet égard trois suggestions.
La première est que le Gouvernement devrait être présent lors de l'examen et de l'adoption d'une résolution par la commission compétente. C'est essentiel si nous voulons que les recommandations du Sénat soient prises en compte. Et cela paraît parfaitement possible : le nombre des résolutions (moins d'une dizaine par an) n'est pas tel que cela puisse poser un problème pratique.
Quatrième proposition : le Gouvernement
participe aux réunions au cours desquelles une commission examine une
proposition de résolution européenne.
|
e) L'information par le Gouvernement
Deuxième suggestion : pour chaque texte, le Gouvernement devrait transmettre très rapidement à l'Assemblée nationale et au Sénat une note préliminaire précisant l'analyse qu'il fait du texte et sa position en première analyse. Là également, c'est parfaitement possible. Au Royaume-Uni, le Gouvernement adresse aux deux Chambres une note de ce type dans un délai de dix jours pour tous les textes soumis aux assemblées. L'administration britannique n'a pas plus de moyens que la nôtre. Notre administration devrait donc être capable d'en faire autant. À l'heure actuelle, nous recevons des « fiches d'impact » sur 10 % des textes environ : il y a du chemin à faire !
Cinquième proposition : dans les trois
semaines suivant la soumission d'un document européen à
l'Assemblée nationale et au Sénat en application de l'article
88-4 de la Constitution, le Gouvernement leur transmet une note
précisant l'analyse qu'il fait de ce texte et sa position en
première analyse.
|
f) Les suites données aux résolutions
Enfin, troisième suggestion : si nous voulons être influents, il faut que le Gouvernement soit amené à nous dire quelles suites il a données à nos résolutions . Il a le droit de s'en écarter, c'est entendu : encore faut-il qu'il s'en explique. Actuellement, il n'y a aucun suivi des résolutions. Quelle forme cela pourrait-il prendre ? Nous pourrions nous inspirer, là aussi, de l'exemple britannique, où le Gouvernement s'explique par écrit sur les suites données aux résolutions. On pourrait imaginer également qu'il y ait, de temps à autre, une réunion conjointe de la délégation et des commissions intéressées pour avoir un débat avec le Gouvernement sur les suites données aux résolutions.
Sixième proposition : le Gouvernement rend
compte à l'Assemblée nationale et au Sénat des suites
qu'il a données à leurs résolutions
européennes.
|
III. LES DÉBATS EUROPÉENS EN SÉANCE PUBLIQUE
Penchons-nous maintenant sur les débats d'orientation en séance publique. C'est un aspect pour lequel nous avons enregistré un progrès, avec désormais la tenue d'un débat avant les réunions du Conseil européen. Que pourrions-nous faire pour que ces débats soient l'occasion d'associer le plus grand nombre possible de sénateurs ?
1. La participation des commissions aux débats
On peut penser d'abord qu'il serait utile que les commissions soient présentes dans ces débats lorsque l'ordre du jour du Conseil européen comporte des sujets entrant dans leur champ de compétences. Il n'est pas souhaitable que les débats européens deviennent une réunion extraordinaire de la délégation pour l'Union européenne se déroulant dans l'hémicycle. Et ces interventions des commissions compétentes pourraient être préparées par un débat au sein de ces commissions, de manière à ce que chacun des membres de la commission concernée ait eu l'occasion de se faire entendre et à ce que le représentant d'une commission puisse dire qu'il exprime un sentiment majoritaire.
Par exemple, lorsque s'est tenu le débat sur la libre circulation des travailleurs, la commission des affaires sociales avait débattu de la position que prendrait son représentant, qui, du coup, pouvait pleinement parler au nom de sa commission, et non en son nom personnel. Cette pratique permet d'intéresser aux débats un plus grand nombre de sénateurs.
Septième proposition : un
représentant de chaque commission concernée par l'ordre du jour
d'une réunion du Conseil européen participe au débat
préalable à cette réunion. Son intervention est
précédée par un débat au sein de la
commission.
|
2. Un droit de réponse
Par ailleurs, pour favoriser une meilleure participation à ces débats, il faudrait les rendre plus interactifs. Qu'il s'agisse des débats préalables aux réunions du Conseil européen ou des questions orales européennes, nous avons actuellement une suite de monologues, puis une réponse du ministre. On pourrait imaginer que, au lieu d'user de son droit de parler dix minutes, chaque orateur puisse choisir de parler huit minutes et de conserver un droit de réponse de deux minutes. Cela rendrait les débats plus interactifs et peut-être plus intéressants à suivre.
Huitième proposition : les débats préalables aux réunions du Conseil européen et les débats sur une question orale européenne peuvent donner lieu à un droit de réponse des orateurs dans le respect du temps de parole qui leur est imparti |
* *
*
Les huit propositions qui ont été formulées correspondent à des suggestions très concrètes, qui paraîtront peut-être limitées. Mais il nous faut commencer par là. Si nous parvenons à mieux impliquer l'ensemble de nos collègues dans l'examen des questions européennes, alors des évolutions plus importantes, si elles sont nécessaires, viendront d'elles-mêmes. Comme l'écrivait très justement notre collègue Michel Herbillon : « C'est avant tout en faisant entrer l'Europe dans l'arène politique que l'on contribuera à lutter contre l'euro-indifférence d'une large majorité des citoyens français ».
EXAMEN EN DÉLÉGATION
La délégation s'est réunie le mardi 16 mai 2006 pour l'examen du présent rapport. À l'issue de la présentation faite par le rapporteur, M. Jean Bizet, le débat suivant s'est engagé :
M. Jean Bizet :
Je récapitule les huit propositions que je soumets aujourd'hui à votre appréciation :
- première proposition : dans le cas d'une proposition de résolution déposée au nom de la délégation pour l'Union européenne, le rapporteur de la délégation est rapporteur devant la commission compétente ;
- deuxième proposition : toute proposition de résolution déposée au nom de la délégation pour l'Union européenne doit être examinée par la commission compétente dans le délai d'un mois suivant son dépôt ;
- troisième proposition : tous les sénateurs peuvent participer aux réunions au cours desquelles une commission examine une proposition de résolution européenne. Cette réunion est ouverte au public et fait l'objet d'un compte rendu intégral publié au Journal officiel ;
- quatrième proposition : le Gouvernement participe aux réunions au cours desquelles une commission examine une proposition de résolution européenne ;
- cinquième proposition : dans les trois semaines suivant la soumission d'un document européen à l'Assemblée nationale et au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution, le Gouvernement leur transmet une note précisant l'analyse qu'il fait de ce texte et sa position en première analyse ;
- sixième proposition : le Gouvernement rend compte à l'Assemblée nationale et au Sénat des suites qu'il a données à leurs résolutions européennes ;
- septième proposition : un représentant de chaque commission concernée par l'ordre du jour d'une réunion du Conseil européen participe au débat préalable à cette réunion. Son intervention est précédée par un débat au sein de la commission ;
- huitième proposition : les débats préalables aux réunions du Conseil européen et les débats sur une question orale européenne peuvent donner lieu à un droit de réponse des orateurs dans le respect du temps de parole qui leur est imparti.
Il n'y a là rien de révolutionnaire, mais je crois que c'est par des modifications de ce genre que nous pouvons aujourd'hui améliorer l'association des sénateurs aux questions européennes.
M. Hubert Haenel :
Le rapport de Jean Bizet s'inscrit bien dans la continuité de nos préoccupations. Au moment de la révision constitutionnelle, nous avions déjà ouvert le débat sur les évolutions nécessaires pour que le Sénat joue mieux son rôle européen. Ce qui s'est passé lors du débat référendaire montre bien qu'il faut adapter notre vie politique à l'Europe. Le résultat de la faible place de l'Europe dans notre vie politique est que les citoyens sont sous-informés. Nous l'avons tous constaté, les critiques contre le traité constitutionnel se sont concentrées sur des dispositions déjà en vigueur depuis le traité de Rome ou du moins depuis l'Acte unique, c'est-à-dire depuis au moins 20 ans. Mais ces dispositions n'avaient jamais été expliquées, assumées, soumises à débat. Nous avons également constaté qu'il y avait un malaise, une inquiétude au sujet de l'élargissement. Mais, là aussi, que s'est-il passé ? Lorsque la décision de principe concernant l'élargissement a été prise, en 1993, ce choix stratégique est passé pratiquement inaperçu. La plupart des citoyens - et même beaucoup d'élus - ont découvert des années plus tard que la décision était prise, que le processus était lancé. Il ne faut pas s'étonner que, dans ces conditions, ils n'aient pas davantage confiance.
Bien sûr, une meilleure implication du Parlement n'est qu'un des nombreux aspects du problème, qui concerne le fonctionnement du Gouvernement, de l'administration, des médias, et même le système scolaire. Mais il faut, comme on dit, que nous commencions par balayer devant notre porte. Si nous donnons le bon exemple, nous serons d'autant plus crédibles quand nous demanderons aux autres d'évoluer.
Nous devons être conscients que, sur le rôle des parlements nationaux, les choses bougent en Europe. Bon nombre de parlements, désormais, contrôlent de plus près l'action européenne de leurs gouvernements et se saisissent des questions européennes. En matière de subsidiarité, la déclaration récente du président Barroso est également une avancée importante. Et l'idée d'un rôle collectif des parlements nationaux par le biais de la COSAC progresse également. Il faut rappeler que, au départ, l'idée d'une meilleure association des parlements nationaux était largement une idée française. Il serait paradoxal que, maintenant, nous nous retrouvions à la traîne faute de savoir évoluer sur le plan interne.
M. Denis Badré :
Ce ne serait hélas pas la première fois qu'on verrait une idée française torpillée par la France !
M. Hubert Haenel :
Les propositions de Jean Bizet sont à mon avis une première étape réaliste. Elles ont le mérite d'être concrètes et je crois qu'elles pourraient enclencher une dynamique. Si nous parvenons à ce que tous nos collègues se saisissent davantage des questions européennes, alors chacun comprendra la nécessité de traiter plus rapidement et plus efficacement ces questions, et les esprits seront prêts pour d'autres évolutions si elles s'avèrent nécessaires.
M. Simon Sutour :
Ces propositions sont intéressantes, mais il serait nécessaire que nous les examinions avec soin et que nous puissions en parler au sein de nos groupes politiques. Nous ne pouvons nous prononcer aujourd'hui sur des propositions que nous n'avons reçues qu'hier.
Par exemple, faut-il, comme le prévoit la septième proposition, que les commissions soient davantage représentées dans les débats européens en séance publique ? Compte tenu de la manière dont le Sénat fonctionne, je crains que cela ne se ramène à un temps de parole supplémentaire pour la majorité. Le problème des débats européens en séance publique me paraît autre : d'abord, ils devraient intervenir plus longtemps avant le Conseil européen, car lorsque le débat a lieu la veille de la réunion, quelle influence pouvons-nous avoir ? Ensuite, il faudrait que le ministre représentant le Gouvernement ne se borne pas à lire, en réponse à nos interventions, un discours déjà préparé, avec ici et là une allusion plus ou moins pertinente aux propos des orateurs.
M. Pierre Fauchon :
Je fais la même réserve : ces propositions méritent un examen approfondi, d'autant que le terrain est incertain. Tout ceci risque d'apparaître comme une tentative de plus pour renforcer la délégation, et nous savons tous quelles réactions cela suscite ! Chacun sait que je suis partisan de réformer le fonctionnement de notre assemblée sur bien des points, mais l'expérience m'a appris qu'au Sénat les changements se font à pas comptés.
Je suis d'accord avec les deux premières propositions du rapporteur. Il est nécessaire que notre procédure soit plus rapide. A la commission des lois, la coutume est que le rapporteur d'une proposition de résolution européenne ne soit pas le rapporteur de la délégation, et cela conduit à allonger la procédure sans justification réelle. Mais que le rapporteur ne soit pas nécessairement membre de la commission me paraît une suggestion beaucoup trop révolutionnaire pour avoir une chance d'être acceptée ! Le délai d'un mois me paraît raisonnable : il est clair que si l'intervention du Sénat n'est pas rapide, elle devient inutile. A quoi bon se prononcer quand les jeux sont déjà faits ?
Je suis sceptique sur les chances de succès de la troisième proposition, qui bouleverserait des habitudes bien ancrées. Et je ne crois pas à la quatrième : je doute que le Gouvernement veuille s'y prêter.
M. Hubert Haenel :
C'est pourtant la règle dans beaucoup de pays membres !
M. Pierre Fauchon :
Ils ont une autre Constitution, d'autres habitudes. En revanche, les cinquième et sixième propositions me paraissent justifiées : mais je crois qu'il faudrait mieux préciser à quel stade le Gouvernement doit faire connaître les suites données aux travaux des assemblées. Enfin, les septième et huitième propositions me paraissent louables. J'espère qu'elles seront retenues, mais on aura compris que je n'y crois guère !
Mme Marie-Thérèse Hermange:
Je crois qu'il y a deux dimensions dans notre débat. La première concerne l'évolution des esprits, le développement de la conscience européenne. Sous cet angle, il ne me paraîtrait pas anormal que le rapporteur de la délégation soit également rapporteur devant la commission, même lorsqu'il n'en est pas membre, car cela contribuerait à diffuser la culture politique européenne.
La deuxième dimension est celle de notre influence, qui suppose d'intervenir le plus tôt possible. Lorsque j'étais parlementaire européenne, il n'était pas rare que je reçoive des notes du gouvernement à Strasbourg, le lundi, pour des votes devant intervenir dans la semaine. A ce stade, c'était totalement inutile. Le Gouvernement devrait, comme l'a dit le rapporteur, nous adresser très tôt des notes préliminaires. Mais nous-mêmes devrions - en liaison avec les commissions compétentes - être en mesure d'intervenir très vite : c'est la clef de toute influence. Au Parlement européen, pour chaque commission, il y a tous les mois une réunion des délégations politiques, débouchant sur une répartition des textes entre les parlementaires, en fonction d'un calendrier diffusé à tous. La répartition se fait sur la base d'une représentation proportionnelle. On ne peut transposer un tel système au Sénat, mais n'y aurait-il pas des enseignements à en tirer ?
M. Denis Badré :
Le rapport souligne à juste titre qu'il nous faudrait être capables de réagir vite - vite et bien, naturellement - que ce soit au sujet du contenu des propositions de la Commission européenne ou que ce soit en matière de subsidiarité, puisque ce dernier problème va revenir à l'ordre du jour.
Les débats européens doivent devenir une part essentielle du débat national et d'abord du débat parlementaire. Nous en sommes loin : les débats sur la transposition des directives, ou sur les résolutions européennes, intéressent peu. Pour remédier à cela, des rapports constructifs entre la délégation et les commissions sont indispensables. Il faut impliquer davantage les commissions dans l'examen des questions européennes. La délégation a l'avantage d'être constituée de membres de toutes les commissions : c'est notre tâche à tous d'instiller l'esprit européen dans nos commissions respectives. Que le rapporteur reste le même pour toute la procédure d'adoption d'une résolution me paraît une bonne chose : c'est une expérience que j'ai eue à la commission des finances, et je crois que c'est la formule la plus efficace. Mais il faut que la délégation choisisse comme rapporteur un membre de la commission qui sera saisie.
Je suis réservé sur la septième proposition. Le débat préalable au Conseil européen risque de tourner à la litanie si les intervenants sont plus nombreux.
Nous devons réfléchir aussi à la manière dont nous allons aborder le contrôle de subsidiarité. Comment le Gouvernement s'intègrera-t-il dans ce contrôle ? Il faudra parvenir à l'associer, en tout cas l'informer.
En conclusion, je partage pleinement l'objectif du rapporteur de faire participer tous les sénateurs à l'examen des projets européens importants.
M. Yann Gaillard :
Je trouve la démarche du rapporteur très intéressante, même s'il présente peut-être trop de propositions à la fois. Les deux premières me paraissent très judicieuses : un même rapporteur pour toute la procédure est bien plus rationnel.
M. Roland Ries :
J'appuie également cette proposition. Le changement de rapporteur à mi-parcours est frustrant et c'est une perte de temps. Je crois que Jean Bizet a raison de proposer une approche très pragmatique qui permet de procéder par petits pas. Mais nous avons besoin de temps pour examiner le détail de ces propositions.
M. Louis de Broissia :
Je suis également favorable à ce que le rapporteur reste le même. Soyons conscients qu'il y aura des réticences à vaincre ! La sixième proposition sur le suivi des résolutions me paraît très importante. Inutile de se faire plaisir en votant une résolution si ce n'est pas pour exercer une influence. Or, j'ai le sentiment qu'il nous manque le petit rouage nécessaire à l'efficacité, qui nous permettrait d'impliquer davantage les commissions et les ministères et de faire passer nos préoccupations à Bruxelles. J'ai eu notamment ce sentiment en travaillant sur l'idée d'un « small business act » européen : à un certain stade, nous n'avons plus de moyens pour avancer.
M. Robert Bret :
C'est pourquoi ce rapport me semble utile : il faut poser le problème. En première analyse, les propositions du rapporteur me paraissent bonnes. Je souhaite en tout cas que le rapport soit publié, afin d'ouvrir le débat.
M. Jean Bizet :
Il ne faut surtout pas voir dans ces propositions la manifestation d'une opposition entre la délégation et les commissions. Mon propos est exactement inverse. Je rappelle qu'il y a moins d'une dizaine de résolutions adoptées chaque année ! La délégation elle-même est formée de membres des différentes commissions. Nous devons viser une bonne articulation entre délégation et commissions. J'ai d'ailleurs délibérément laissé de côté l'idée d'un changement de statut ou même simplement de dénomination de la délégation. Ce que je propose ne demande aucun changement législatif ou constitutionnel, mais seulement une modification du règlement du Sénat. Dans mes propositions, la commission permanente compétente reste toujours l'organe de décision.
Nous ne devons pas oublier le 29 mai. Les citoyens veulent que l'Union soit mieux contrôlée, ils veulent plus de transparence : nous devons répondre à leurs attentes. Ce doit être l'affaire de tous les sénateurs. Le jour où tous nos collègues se saisiront des questions européennes, les préventions contre la délégation disparaîtront car le sens de notre travail sera mieux compris. Je crois que la méconnaissance est pour beaucoup dans les tensions qui sont apparues entre organes du Sénat.
M. Simon Sutour :
Ces tensions sont irrationnelles. Je crois qu'il y a avant tout, derrière tout cela, une crispation contre l'Europe. J'entends dire ici et là que, avec la construction européenne, il ne restera bientôt plus de compétence législative importante pour les commissions. La délégation, qui représente un peu l'Europe au sein du Sénat, sert d'exutoire à cette inquiétude. Or, c'est mal poser le problème que de raisonner ainsi. Le Sénat passe des heures et des heures à examiner des projets ou propositions de loi d'importance très réduite, mais nous ne faisons presque rien dans le cas de directives européennes d'importance capitale. Nous n'intervenons que pour les transposer. C'est cela qu'il faudrait corriger.
M. Hubert Haenel :
Ce qui me paraît clair, c'est qu'on ne peut se satisfaire du statu quo . Si nous ne posons pas le problème de l'amélioration de notre contrôle, personne ne le fera et nous ne progresserons pas. Il est naturel que chacun souhaite avoir le temps d'examiner en détail les propositions du rapporteur. Je vous propose donc que nous ayons, dans quelques semaines, une nouvelle réunion sur ce sujet afin de débattre à tête reposée de ces propositions. En revanche, il me paraît souhaitable de publier dès aujourd'hui ce rapport qui constitue la base du débat, étant entendu qu'il ne s'agit, à ce stade, que de propositions du rapporteur et non de propositions approuvées par la délégation.
Je suis conscient que l'examen des questions européennes, idéalement, devrait être replacé dans le cadre plus général de l'ensemble du mode de fonctionnement du Sénat, avec des questions parfaitement légitimes comme la place de l'opposition ou la revitalisation de la séance publique. Mais cela dépasse les compétences de la délégation. Il est dans notre mission de réfléchir à la manière d'améliorer le traitement des questions européennes par le Sénat, tout en étant conscients que cela n'est qu'une partie de la réforme du fonctionnement du Sénat.
*
À l'issue du débat, la délégation a décidé d'autoriser la publication de ce rapport d'information.
ANNEXES
ANNEXE I - L'EXAMEN DES QUESTIONS EUROPÉENNES PAR LE PARLEMENT BRITANNIQUE
_____
Source : rapports de commissions de la Chambre des
Communes
et de la Chambre des Lords
I - LES PROCÉDURES EXISTANTES
Au Royaume-Uni, la procédure parlementaire d'examen des questions européennes est principalement basée sur l'examen des propositions de textes communautaires. Chaque Chambre a un système différent mais complémentaire : la Chambre des Lords examine plus attentivement un nombre limité de textes. Les questions européennes peuvent être abordées non seulement par les commissions européennes compétentes, mais aussi en séance plénière (questions au Gouvernement par exemple) ou au sein des commissions thématiques.
Le fondement de la procédure est la réserve d'examen qui prévoit qu'un ministre ne peut accepter un texte lors de son examen au Conseil qui si celui-ci a fait l'objet d'un examen parlementaire.
1. À la Chambre des Communes
La procédure commence lorsqu'un document européen est déposé au Parlement, habituellement dans les deux jours ouvrables qui suivent sa réception à Londres. Plus de 1 000 documents sont ainsi déposés par an au Parlement britannique. Dans les dix jours qui suivent ce dépôt, le Gouvernement communique une note explicative (« explanatory memorandum ») , qui couvre un certain nombre de sujets comme l'impact du texte pour le Royaume-Uni, d'éventuels problèmes de subsidiarité ou la position du Gouvernement sur le texte proposé.
Les textes ainsi déposés sont renvoyés à la commission d'examen européen (« European Scrutiny Committee ») qui élabore un avis sur l'importance juridique et politique de chaque texte et qui recommande éventuellement un examen approfondi par l'une des trois commissions permanentes européennes (« European Standing Committees ») . La European Scrutiny Committee est composée de seize membres et dispose d'un secrétariat de seize personnes ; elle se réunit normalement toutes les semaines quand le Parlement siège. Son rôle principal est de « passer au crible » les documents européens, en estimant leur importance juridique et politique et en décidant lesquels doivent être l'objet d'un débat. Avant de clôturer son examen, la commission interroge par écrit (parfois à plusieurs reprises) le ministre compétent : ce dialogue avec les ministres est considéré comme la partie la plus importante de la procédure d'examen. La commission publie chaque semaine un rapport présentant les raisons qui ont abouti à ses décisions sur chaque texte. En 2004, la commission a ainsi examiné 1 002 documents, en a considéré 559 comme étant importants et a recommandé que 53 d'entre eux donnent lieu à un débat plus approfondi (dont 3 en séance plénière).
Les documents sélectionnés par la European Scrutiny Committee sont renvoyés à l'une des trois commissions permanentes traitant des questions européennes (« European Standing Committees ») , qui se distinguent par des attributions thématiques : la commission A s'occupe par exemple d'environnement, d'agriculture, de transport... Chaque commission permanente est composée de 13 membres ; tout député peut pleinement participer aux travaux des commissions, mais sans droit de vote. Les examens commencent habituellement par une communication du ministre responsable, suivie de questions ; la commission débat ensuite d'une « motion » au Gouvernement. Une réforme envisagée serait de débuter la réunion par une présentation très succincte des raisons du renvoi devant la commission du texte étudié par un membre de la European Scrutiny Committee .
European
|
Nombre
|
Nombre
|
A |
14 |
17 |
B |
13 |
18 |
C |
7 |
7 |
2. À la Chambre des Lords
Le principal organe compétent en matière européenne est la commission pour l'Union européenne, composée de 18 membres. Chacun d'eux est membre d'au moins une des sept sous-commissions thématiques, mais d'autres Lords sont cooptés dans ces sous-commissions, si bien qu'au total environ 70 membres de la Chambre sont impliqués dans l'examen des textes communautaires. Le président de la commission sélectionne les plus importants des documents européens déposés et les renvoie à une sous-commission pour un examen approfondi ; en moyenne, sur environ 1 000 textes, un quart est renvoyé en sous-commission, mais c'est celle-ci qui décide précisément lesquels elle souhaite examiner. Les sous-commissions fonctionnent à peu près comme les « European Standing Committees » de la Chambre des Communes et conduisent notamment un dialogue écrit et oral avec les ministres compétents sur chaque texte. Les rapports de sous-commission doivent être approuvés par la commission elle-même, après quoi le Gouvernement dispose de deux mois pour apporter une réponse au rapport.
II - LES PROPOSITIONS FORMULÉES
Les rapports du Parlement britannique insistent régulièrement sur deux points qui semblent centraux :
- l'importance de commencer l'examen des textes européens le plus tôt possible,
- le dialogue et l'étroite coopération avec les ministres compétents.
Le rapport de la commission pour la modernisation de la Chambre des communes explore un certain nombre de recommandations pour améliorer l'examen des questions européennes. Il cite régulièrement l'exemple finlandais, en notant par exemple l'implication des commissions permanentes dans les affaires européennes ; cependant, tout en souhaitant renforcer la place des commissions, le rapport précise que celles-ci ont peu les moyens d'être complètement attentives à l'actualité communautaire à un stade suffisamment précoce des procédures. Le rapport suggère que les notes envoyées par le Gouvernement à la European Scrutiny Committee soient transmises par elle aux différentes commissions permanentes spécialisées.
Par ailleurs, le rapport propose la création d'une grande commission conjointe « Parliamentary European Committee » , qui regrouperait des députés et des Lords. La composition d'une telle commission ne semble pas arrêtée ; cependant, tous les parlementaires devraient pouvoir assister à ses réunions. La commission se réunirait entre deux et quatre fois par an pour évoquer de grandes questions spécifiques ou au début des nouvelles présidences (janvier et juillet) pour que le ministre présente le programme de travail du semestre. La commission serait ouverte aux parlementaires européens britanniques. Un de ses rôles serait d'auditionner les commissaires européens (britannique ou non) ; il semble que cette possibilité soit actuellement rare, car le règlement du Parlement britannique rend difficile l'audition d'une personnalité qui n'est pas parlementaire. Le rapport souligne la nécessité d'associer étroitement le Gouvernement aux travaux de cette nouvelle commission, notamment en ce qui concerne le calendrier.
Enfin, le rapport note l'importance du suivi des travaux du Conseil européen, depuis que celui-ci est devenu une sorte d'appel pour le Conseil et qu'il définit les grandes orientations politiques de l'Union. Son rôle est d'ailleurs largement renforcé dans le traité constitutionnel. Actuellement, les réunions du Conseil européen de juin et de décembre font l'objet d'un débat en séance plénière quelques jours avant leur tenue, afin que le Parlement puisse influencer la position du Gouvernement. Le rapport propose de conserver ces débats, tout en essayant de les concentrer sur un ou deux sujets parmi les plus importants abordés lors du Conseil européen.
ANNEXE II - L'EXAMEN DES QUESTIONS EUROPÉENNES PAR LE PARLEMENT FINLANDAIS
_____
Source : rapport remis en février 2005 par une commission chargée d'évaluer les procédures d'examen des questions européennes par le Parlement finlandais.
I - LES PROCÉDURES EXISTANTES
La Finlande est membre de l'Union européenne depuis le 1 er janvier 1995 ; les procédures organisant les activités européennes du Parlement sont donc en grande partie héritées de la phase de négociations en vue de l'adhésion du pays. Ce système parlementaire repose à la fois sur un large consensus de la classe politique sur les grandes orientations et sur un système électoral proportionnel nécessitant la formation de coalitions.
1. La division formelle entre les propositions européennes
Le système d'examen des textes communautaires repose sur une division entre différents types de textes :
- « textes-U » (70 textes en 2003) : il s'agit des propositions qui devraient être examinés par le Parlement, si la Finlande n'était pas membre de l'Union. Leur nature est donc proche des textes soumis au Parlement français dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution. Ces documents sont accompagnés d'une communication du Gouvernement et leur transmission au Parlement est approuvée lors d'une réunion plénière du Gouvernement, ce qui favorise la coordination interministérielle. Pour ces textes, qui concernent des domaines de prérogatives traditionnelles du Parlement finlandais, le président du Parlement décide leur renvoi à une commission spécialisée, qui est obligée d'émettre un avis, qu'elle transmet à la Grande Commission. La Grande Commission, composée de 25 membres titulaires et de 13 suppléants, se réunit deux fois par semaine. Après avis de la ou des commissions spécialisées, elle arrête une position qui doit être suivie par le Gouvernement ;
- « textes-E » (107 textes en 2003) : ces textes concernent des propositions entrant dans le domaine de la « justice et des affaires intérieures », ainsi que des programmes horizontaux ou des propositions qui ne tombent pas strictement dans le champ des prérogatives traditionnelles du Parlement, mais qui lui ont été soumis, car touchant à des questions d'intérêt général. Pour ces textes, la Grande Commission désigne la ou les commissions spécialisées, qui émettront un avis si elles le souhaitent. L'avis des commissions est adressé à la Grande Commission et l'avis de la Grande Commission est adressé au Gouvernement. La distinction entre textes-E et textes-U est devenue assez théorique, mais le Parlement ne considère pas cela comme une difficulté.
- « textes-UTP » : ils concernent la politique étrangère et de sécurité commune. La procédure d'examen est proche de celle des textes-E, sauf que la Grande Commission est remplacée par la commission des affaires étrangères.
2. Le suivi des réunions du Conseil de l'Union européenne (87 réunions en 2003)
La Grande Commission se réunit le vendredi pour auditionner le ou les ministres concernés par une éventuelle réunion du Conseil de l'Union européenne la semaine suivante. Lors de cette réunion, le ministre fournit une note-type contenant les informations générales sur les sujets inscrits à l'ordre du jour du Conseil et sur les positions de la Finlande. La Grande Commission compare l'état d'avancement du dossier avec l'opinion que le Parlement a rendue en amont (textes-U et textes-E). Quelques jours après la réunion du Conseil, le ministre envoie à la commission un rapport écrit sur ses résultats.
Cependant, le Parlement finlandais est conscient que les négociations principales se déroulent durant les réunions des groupes de travail du Conseil et durant les COREPER, si bien que l'audition des ministres n'est pas suffisante pour préserver l'influence du Parlement. C'est pourquoi le système d'examen est basé sur l'idée que les parlements nationaux n'ont une réelle influence que s'ils participent le plus tôt possible à la formulation de la position nationale. L'audition du ministre vient donc compléter l'information du Parlement et est le prolongement de l'examen des textes par la Grande Commission.
Enfin, le Premier ministre transmet l'ordre du jour et les conclusions des Conseils européens à la Grande Commission, qui l'auditionne à cette occasion et qui peut émettre un avis.
La commission d'évaluation cite un certain nombre de « bonnes pratiques » qu'elle propose éventuellement d'étendre :
- la commission de l'agriculture et de la forêt organise chaque semaine une audition de ses « homologues ministériels » pour avoir une vue globale des activités de l'Union dans son secteur ;
- la commission des transports et des communications fait de même avant chaque Conseil de l'Union traitant de sujets la concernant ; cette audition a lieu avant celle que la Grande Commission organise en tout état de cause, afin que la commission spécialisée soit en mesure de transmettre son opinion à la Grande Commission ;
- plusieurs commissions thématiques se sont réparties les tâches en vue d'examiner le dossier des perspectives financières.
3. La séance publique
La Constitution finlandaise fournit plusieurs opportunités pour débattre en séance publique de sujets européens. Le président du Parlement peut par exemple inscrire en séance un texte (U, E ou UTP) pour débat, mais c'est la Grande Commission (ou la commission des affaires étrangères pour les sujets relatifs à la PESC) qui conserve la prérogative d'élaborer l'opinion du Parlement et de la transmettre au Gouvernement. En pratique, les débats sur des sujets européens sont rares, mais la commission de réforme considère qu'ils devraient être plus nombreux afin de promouvoir une égale participation de tous les députés en ce domaine.
4. La place des députés européens
Le système finlandais ne donne aucune place particulière aux députés européens dans le travail de l'Eduskunta. Cependant, ils ont en pratique accès aux mêmes informations que les députés. Ils ont de facto accès aux réunions de commission et peuvent y être invités comme « experts ». De plus, la Grande Commission fournit un rapport hebdomadaire sur ses activités aux parlementaires européens finlandais. La Grande Commission et la commission des affaires étrangères rencontrent deux fois par an les parlementaires européens finlandais (14) pour discuter de questions d'intérêt commun.
II - LES PROPOSITIONS FORMULÉES
La commission d'évaluation considère que le nouveau protocole sur le rôle des parlements nationaux a été salué principalement par les parlements qui reçoivent peu d'informations de leur Gouvernement, ce qui n'est pas le cas de la Finlande. La Commission a évalué à 1 100 le nombre annuel de documents que la Commission européenne devra transmettre aux parlements nationaux en application des nouveaux protocoles, ce qui représenterait environ 27 000 pages. Environ 70 % seraient des propositions législatives, si bien qu'environ 770 propositions devraient être transmises aux parlements nationaux au titre du contrôle de subsidiarité. La Commission considère que le Parlement finlandais ne pourrait évidement pas examiner valablement chacun de ces textes. Elle propose donc que le système actuel, qui prévoit que le Parlement n'examine que les textes sélectionnés selon certains critères et ayant une réelle importance politique, soit préservé, car il garantit un véritable contrôle parlementaire.
Globalement, la commission prévoit peu de modifications au système d'examen des questions européennes par le Parlement finlandais. Elle propose que l'ordre du jour des Conseils européens soit examiné dans l'optique de savoir si un débat en séance plénière doit être organisé. De même, elle propose que des textes tels que le programme annuel de la Commission, les perspectives financières pluriannuelles ou d'autres propositions sur certaines politiques de l'Union fassent l'objet d'un débat en séance plénière. Elle envisage également de développer l'idée de questions au Gouvernement portant sur des sujets européens. Elle suggère de mieux associer les députés européens finlandais, par exemple en les conviant aux réunions des commissions qui ont les mêmes centres d'intérêt que les commissions auxquelles ils appartiennent au Parlement européen.
En ce qui concerne l'organisation du contrôle de la subsidiarité, la commission considère que le rôle du secrétariat pour l'Union européenne est essentiel pour assurer une « veille » des textes importants. Le secrétariat devrait informer la Grande Commission et les parlementaires par voie électronique. La commission pense que la Grande Commission est l'organe le plus approprié pour s'occuper du contrôle de la subsidiarité. Sur proposition d'un de ses membres ou d'une commission spécialisée, formulée dans des délais définis, la Grande Commission inscrirait un projet à son ordre du jour et proposerait ensuite ses observations en séance plénière du Parlement. Enfin, le Gouvernement devrait informer le Parlement sur tout texte pouvant poser des problèmes en matière de subsidiarité. La décision finale d'envoyer une observation relative à la subsidiarité aux institutions européennes puis de porter plainte devant la Cour de justice serait prise en séance plénière sur proposition de la Grande Commission.
Par ailleurs, la Commission d'évaluation note que la mise en oeuvre du traité augmentera le nombre des réunions interparlementaires. Pour la nomination des délégués à la Convention préalable à la Conférence intergouvernementale, la Commission propose qu'elle s'opère en séance publique et qu'un « code de conduite » organise les travaux de ces délégués.