CHAPITRE DEUX : UN CAP CLAIR POUR NOS FINANCES PUBLIQUES : RÉDUIRE LE DÉFICIT PUBLIC À 1 % DU PIB DANS 5 ANS ET LA DETTE PUBLIQUE À 40 % DU PIB EN 2030
Au moment où l'on s'engage, d'une certaine manière, dans la « dernière ligne droite » de la législature et où il faut songer au « passage de témoin », il a paru légitime et, en tout état de cause, pédagogique de chercher à définir un objectif raisonnable susceptible de remettre le pays sur les rails, et à procéder à un balayage des différents moyens d'y parvenir en s'appuyant sur l'image très parlante de la « boîte à outils ».
S'agissant de l'objectif de nature à desserrer l'étau de la dette, il a paru cohérent de chercher à ramener le déficit public à 1 % du PIB en cinq ans. Il s'agit du point de passage obligé pour ramener l'endettement public à 40 % du PIB en 2030 , et éviter, ainsi, que la charge de la dette n'obère trop les marges de manoeuvre budgétaires.
Il faut donc noter que l'objectif de votre rapporteur général, s'il paraît moins volontariste que le programme de désendettement du gouvernement, qui ramènerait les finances publiques à l'équilibre en 2010, a le mérite du réalisme .
Faisant peser l'effort, en majorité, sur la dépense , tout en considérant comme difficilement évitable de faire porter une part du programme de désendettement sur les recettes , l'objectif présenté par votre rapporteur général présente l'avantage d'éviter de graves déconvenues, conduisant, soit à remiser le programme de désendettement du gouvernement dans les oubliettes de l'histoire des finances publiques, soit à prévoir des hausses d'impôts difficilement soutenables pour l'économie française.
Pour trouver les quelque quarante milliards d'euros d'économies 27 ( * ) auxquelles correspond l'objectif de votre commission des finances par rapport à un scénario reflétant la tendance observée entre 1994 et 2005, votre rapporteur général a procédé à un inventaire des marges de manoeuvre possibles tant dans les sphères des finances de l'Etat que des finances sociales, étant noté qu'il est irréaliste que les collectivités territoriales dégagent sur longue période un excédent structurel.
Pour l'Etat, une norme de stabilisation de la masse salariale, posée au sein d'une norme de dépense plus globale, s'impose désormais .
S'il a semblé naturel à votre commission des finances, s'agissant d'un débat commun, de traiter conjointement des finances de l'Etat et des administrations de sécurité sociale dans le cadre d'une vision consolidée , il n'en subsiste pas moins une certaine dissymétrie entre les propositions qu'elle est amenée à faire. Contrairement à celui relatif aux finances de l'Etat, l'inventaire des postes d'économies en matière sociale comporte des mesures substantielles mentionnées pour mémoire , telles celles relatives à l'organisation des structures hospitalières mais dont l'évaluation sort de son champ naturel de compétences, voire qui, du point de vue de votre rapporteur général, posent des problèmes de fond pour l'économie du secteur de la santé. En revanche, il est toute une série d'autres mesures, comme celles relatives aux allègements de charges ou au partage du financement entre prélèvements obligatoires et contributions individuelles, pour lesquelles votre commission des finances estime que la question doit être posée dans le cadre du présent rapport.
En tout état de cause, il est apparu important de souligner, sur le plan des principes, la nécessité de restaurer des mécanismes régulateurs et d'amener la collectivité nationale à réfléchir sur le partage entre dépenses financées par l'impôt et par les assurés sociaux.
Une des difficultés inhérentes au système actuel, soulignée dans le dernier rapport de l'Institut Montaigne 28 ( * ) vient de ce que la sécurité sociale « finance de la même manière des services d'assurance (maladie, chômage), des services en quelque sorte financiers, consistant à investir dans les jeunes générations et à leur demander ensuite de prendre en charge leurs aînés, et des services d'assistance, les seuls à requérir une redistribution des revenus par des prélèvements obligatoires stricto sensu. Ce méli-mélo entre assurance et assistance est la source principale des difficultés de nos protections sociales ».
Dans cette optique, chercher à déplacer la frontière entre prélèvements obligatoires et paiement d'une prestation de services marchands , c'est s'efforcer de trouver quels prélèvements obligatoires, actuellement ressentis comme sans contrepartie, pourraient se voir substituer des achats de services d'autant mieux acceptés qu'ils seraient perçus comme le paiement du prix d'une prestation.
Sans exagérer la portée pratique que l'on peut donner à ce type d'analyse, eu égard à la place de la sécurité sociale et notamment du paritarisme, dans notre mentalité collective, il faut reconnaître qu'il y a une série de clarifications à effectuer notamment entre solidarité et services rendus.
I. UN POINT DE PASSAGE OBLIGÉ : AMÉLIORER LE SOLDE PUBLIC DE 40 MILLIARDS D'EUROS D'ICI 2011
L'objectif retenu par votre commission des finances est de ramener la dette publique à 40 % du PIB en 20 ans , ce qui implique d'abaisser préalablement le déficit public à 1 % de PIB.
Pour atteindre cet objectif, il faut qu' en 2011 les dépenses publiques soient inférieures de 40 milliards d'euros à ce qu'elles seraient en cas de poursuite des tendances observées de 1994 à 2005 en matière de recettes et de dépenses.
Compte tenu, en particulier, de la récente réforme de l'assurance maladie, la future législature bénéficiera de l'héritage réformiste de l'actuel gouvernement, « limitant » les efforts à réaliser à 30 milliards d'euros.
A. SE GARDER TANT DU LAXISME QUE DES DÉCLARATIONS D'INTENTION
1. Une croissance des dépenses des administrations publiques de l'ordre de 2 % par an en volume depuis plus de dix ans
Sur longue période, les dépenses publiques augmentent au même rythme que le PIB, soit un peu plus de 2 % par an en volume, comme l'indique le graphique ci-après.
Croissance moyenne en volume des dépenses des administrations publiques (1994-2005)
(en %)
Source : Insee
La publication de programmes de stabilité à partir de 1999 ne s'est accompagnée d'aucune inflexion. Par ailleurs, l'application de la règle du « zéro volume » aux dépenses de l'Etat à partir de 2003 ne s'est pas concrétisée par une moindre croissance des dépenses au sens de la comptabilité nationale, seule pertinente du point de vue du pacte de stabilité, comme l'indique le graphique ci-après.
Croissance en volume des dépenses des administrations publiques
(en %)
Source : Insee
* 27 Correspondant à 30 milliards d'euros d'économies de mesures nouvelles, si l'on suppose que la réforme de la sécurité sociale réalisée par la présente législature permettra, en l'absence de nouvelles réformes, de porter le taux de croissance en volume des dépenses des administrations de sécurité sociale de 2,5 % par an de 1994 à 2005 à 2 % par an de 2007 à 2011.
* 28 « TVA, CSG, IR, cotisations...Comment financer la protection sociale » par M. Jacques Bichot.