b) Les dispositifs mis en place pour éviter les ruptures de droits posent des problèmes d'équité
Lors des débats sur la loi du 11 février 2005, les associations de personnes handicapées avaient dénoncé de façon récurrente l'existence d'une barrière d'âge à soixante ans, conduisant à des ruptures de droits et de prise en charge.
Certaines prestations destinées aux personnes handicapées cessent en effet d'être versées au-delà de soixante ans. C'est notamment le cas de l'AAH. Le minimum vieillesse qui en prend le relais est certes du même montant, mais le passage d'un système à l'autre s'accompagne de la perte des droits connexes à l'AAH, notamment du bénéfice des compléments d'AAH, qui représentent, selon les cas de figure, entre 17 % et 29 % du montant de base de l'AAH. De la même façon, le versement de la prestation de compensation cesse normalement à l'âge de soixante ans.
S'agissant de l'accueil en établissement, si aucune barrière à soixante ans n'est imposée par la loi, elle existe dans les faits, par la combinaison de trois éléments :
- les agréments donnés aux établissements accueillant des adultes handicapés imposent très souvent une telle barrière d'âge. Des instructions ont été données aux services de l'Etat pour y mettre fin dans les établissements relevant de leur compétence (Esat, Mas, Ssiad) et les départements sont encouragés à faire de même. Mais la suppression de la barrière d'âge n'est pas toujours accordée, notamment pour des raisons d'insuffisance de personnel ou d'inadaptation des locaux ;
- il existe en pratique une barrière d'âge pour l'entrée en Ehpad : avant soixante ans en effet, les personnes accueillies ne peuvent pas bénéficier de l'Apa pour couvrir les frais relatifs au tarif dépendance de l'établissement. Ces frais, parfois élevés, peuvent conduire certaines personnes handicapées à renoncer à un accueil dans ce type d'établissement ;
- les modalités différentes d'application de l'aide sociale en établissement entre structures pour personnes handicapées et pour personnes âgées expliquent également les difficultés pour les personnes handicapées vieillissantes de passer d'un monde à l'autre : en effet, l'aide sociale en établissements pour personnes handicapées est attribuée sur une base ressources beaucoup plus favorable qu'en Ehpad et les sommes ainsi versées ne font l'objet d'aucune mise en oeuvre de l'obligation alimentaire et d'aucun recours en récupération. Beaucoup de personnes handicapées vieillissantes refusent donc de passer en Ehpad en raison du régime d'aide sociale plus défavorable qui s'y applique.
C'est la raison pour laquelle la loi du 11 février 2005 a mis en place des dispositifs de transition pour éviter les ruptures de droits et de prise en charge :
- elle crée d'abord un droit d'option entre la PCH et l'Apa, à compter de l'âge de soixante ans et applicable à chaque renouvellement de la prestation, pour les personnes qui bénéficiaient de la PCH avant l'âge de soixante ans. Elle rend également possible, par exception, l'ouverture d'un droit à la PCH après soixante ans, dès lors que le handicap qui le justifie a été reconnu avant cet âge ;
- elle prévoit le maintien du régime plus favorable de l'aide sociale à l'hébergement en établissement pour personnes handicapées au profit des personnes qui quittent ces établissements pour entrer en maison de retraite. Le bénéfice du régime plus favorable d'aide sociale est également ouvert aux personnes handicapées qui entrent pour la première fois en établissement après soixante ans, à condition de justifier d'un taux d'invalidité supérieur à une limite fixée par décret.
Votre commission reconnaît que ces dispositions sont efficaces pour éviter aux personnes handicapées concernées des ruptures de droits ou de prise en charge. Mais elle observe qu'elles posent des questions d'équité vis-à-vis des personnes âgées accueillies dans les mêmes établissements et souffrant éventuellement des mêmes pathologies, dès lors que leur perte d'autonomie est intervenue après l'âge de soixante ans.