2. Des difficultés de gestion récurrentes
a) Des sur-engagements répétés, au-delà de ses capacités financières réelles
L'insuffisance de ses moyens fait connaître à l'AFICAR des difficultés de gestion récurrentes , dont témoigne notamment sa tendance à engager des dépenses en dépassement de ses capacités.
Ainsi qu'il a déjà été mentionné, l'agence a dû faire face, en 2006, à une réduction de sa subvention pour charges de service public au titre de la mise en réserve de précaution et de divers redéploiements. 1,133 million d'euros ont été disponibles contre 1,412 initialement prévus. Compte tenu de l'absence totale de contributions extérieures, l'agence s'est trouvée en situation de sur-engagement à hauteur de 432.136 euros au 31 décembre 2006. En dépit des observations des tutelles, cette situation s'est reproduite en 2007 , pour un montant de 165.815 euros, et toujours en raison de la faiblesse des partenariats extérieurs. Sur ses deux premières années de fonctionnement, les engagements pris par l'AFICAR ont donc excédé ses capacités de 597.951 euros.
Cette situation a conduit le ministère de l'agriculture et de la pêche à demander à l'établissement de régulariser sa situation au cours de l'année 2008. Par courriers en date du 20 décembre 2007 et du 24 janvier 2008, le secrétariat général du ministère a attiré l'attention de la directrice de l'agence sur l'« application imparfaite » par l'AFICAR des dispositions régissant les opérateurs de l'Etat, et notamment du décret de 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et de la circulaire annuelle de la direction du Budget relative à la préparation des budgets.
Pointant la situation de « sur-engagement "chronique" » dans laquelle se trouvait l'AFICAR, le ministère a enjoint à l'opérateur de présenter, sous moins d'un mois, « un plan d'actions détaillant les mesures (à) mettre en place » pour régulariser les sur-engagements constatés. Selon les réponses aux questionnaires de votre rapporteur spécial, l'AFICAR a donc été invitée à « limiter strictement ses engagements 2008 à la capacité issue des autorisations d'engagement accordées par l'Etat, augmentée des éventuelles ressources externes, mais déduction faite de la résorption de la totalité des sur-engagements constatés en 2006 et en 2007 45 ( * ) ». Le ministère a, enfin, alloué à l'agence une dotation complémentaire exceptionnelle de 200.000 euros en autorisations d'engagement, afin de l'aider à assainir sa situation.
Si le ministère de l'agriculture et de la pêche fait valoir que « dans un délai, raisonnablement bref, la situation de l'AFICAR a (...) pu être régularisée », l'agence continuait, en 2008, à rencontrer des problèmes de trésorerie. L'absence persistante d'apports financiers extérieurs et l'impossibilité de constituer un fonds de roulement ont été en partie compensées par un cadencement plus favorable du versement de la subvention pour charges de service public. Cela ne semble toutefois pas avoir suffi à améliorer la situation de l'établissement, qui se trouvait, en mars 2008 en insuffisance caractérisée de trésorerie par rapport aux dettes immédiates . Selon le contrôleur général économique et financier, « cette situation, qui a coûté la vie à bien des entreprises, n'a pu être redressée que grâce à une accélération du versement de la subvention d'Etat par rapport à l'échéancier prévu » 46 ( * ) .
b) Un opérateur « orphelin » ?
L'AFICAR n'a, au moment de sa création, reçu aucune dotation en fonds propres . Cette absence a été relevée par le contrôleur général économique et financier, qui y voit le symptôme d'une hésitation , de la part des concepteurs de l'agence, entre les deux options qu'étaient la création d'un établissement public et la constitution d'un simple service administratif 47 ( * ) .
De fait, l'AFICAR présente le double inconvénient de générer les coûts de fonctionnement relativement élevés (et propres à toute structure individualisée ne profitant pas des économies d'échelle d'autres services), tout en n'ayant pas la taille critique pour se doter de services supports suffisants.
Selon le contrôle général économique et financier, les dépenses de fonctionnement directement exposées par l'agence ne représentent que 7 % de l'ensemble des charges. Cette proportion atteint toutefois 21,6 % si l'on ajoute le coût des moyens mis gratuitement à disposition par le ministère de l'agriculture et de la pêche .
Par ailleurs, l'on aurait pu s'attendre à ce qu'un opérateur de taille extrêmement réduite bénéficie d'un soutien efficace de la part du ministère de l'agriculture et de la pêche. Or certains éléments conduisent à penser que la collaboration administrative entre l'AFICAR et les services du ministère est perfectible.
En particulier, aucune convention 48 ( * ) n'a été conclue entre l'AFICAR et le ministère pour régir la mise à disposition de moyens par ce dernier et aucune règle de « travail en commun » 49 ( * ) n'a été formalisée entre l'agence et les services du ministère susceptibles de lui apporter un support technique. L'AFICAR ne disposant pas de service dédié, de telles règles auraient, par exemple, pu être utiles en matière de passation des contrats et marchés.
* 45 Réponses aux questionnaires de votre rapporteur spécial.
* 46 Réponses aux questionnaires de votre rapporteur spécial.
* 47 Selon les réponses du contrôleur général économique et financier aux questionnaires de votre rapporteur spécial, l'établissement « n'a reçu à son démarrage aucune dotation en fonds propres, comme si ses créateurs pensaient par lapsus mettre en place un service administratif ».
* 48 Cette convention était pourtant expressément prévue par l'article R. 111-9 du code rural.
* 49 Selon l'expression du contrôle général économique et financier.