2. Mais elles continuent de se détourner de filières porteuses auxquelles leurs capacités leur permettraient de prétendre
Comme l'ont expliqué plusieurs des interlocuteurs de votre délégation, on constate actuellement un écart entre les capacités scolaires des filles, et le sentiment qu'elles ont de leurs compétences. Ce manque de confiance en soi, qui peut aller jusqu'à une certaine forme de dévalorisation, les conduit à renoncer « spontanément » à certaines filières d'excellence comme les classes préparatoires aux grandes écoles, aux filières scientifiques et à celles de l'industrie.
Ce phénomène touche à la fois les bonnes élèves, et celles qui, moins adaptées au monde scolaire, décrochent « silencieusement » de l'école, alors que les abandons scolaires se manifestent de façon plus tapageuse chez les garçons.
Ainsi Mme Catherine Marry, sociologue, directrice de recherche au CNRS, a-t-elle estimé que « l'orientation s'effectuait souvent en fonction du prestige des différentes disciplines, par des mécanismes d'autosélection, particulièrement prégnants chez les filles issues des milieux les moins favorisés » , en précisant que ces dernières avaient moins confiance en elles et hésitaient davantage à s'orienter vers les filières les plus prestigieuses.
a) Filières d'excellence ou chasses gardées : le cas des classes préparatoires aux grandes écoles
Dans l'excellent rapport qu'il a consacré à la diversité sociale et à l'égalité des chances dans la composition de classes préparatoires aux grandes écoles 24 ( * ) , M. Yannick Bodin, par ailleurs membre de la délégation, a relevé que les jeunes filles restaient encore minoritaires dans les classes préparatoires aux grandes écoles, puisqu'elles ne représentaient, en 2005-2006, que 41,6 % de l'ensemble des effectifs.
Cette situation globale représente malgré tout un sérieux progrès, puisque, à l'origine, les grandes écoles étaient exclusivement réservées aux jeunes hommes. La part des jeunes filles a progressé d'environ dix points depuis 1975, apportant une contribution trois fois supérieure à celle des garçons dans la croissance globale des effectifs observée sur cette période.
Les marges de progrès sont cependant encore fortes, dans la mesure où les filles sont plus nombreuses que les garçons à accéder au second cycle général et technologique - dont elles représentaient 54,8 % des effectifs en 2005-2006 - et obtiennent par ailleurs de meilleurs résultats scolaires, leur taux de réussite au baccalauréat général dépassant de plus de trois points celui des garçons.
Les chiffres cités par M. Yannick Bodin dans son rapport, sont éloquents : en 2005, près de 59 % des admis au baccalauréat général sont des filles, cette proportion globale variant suivant les sections : 82,4 % en littéraire (L), 64,5 % en filière économique et commerciale (ES) et 46,6 % en filière scientifique (S).
Ces proportions sont loin de se retrouver dans la composition des effectifs des classes préparatoires.
Certes, les jeunes filles dominent très largement les effectifs des classes littéraires, où elles sont présentes à plus de 75 % (contre 70 % en 1975) ; leur présence est équilibrée dans les classes économiques, où elles représentent un peu moins de 55 % des effectifs (contre 40 % en 1975).
Mais elles sont en revanche très minoritaires dans les classes scientifiques qui constituent cependant le principal contingent des effectifs des classes préparatoires. Elles ne représentent en effet qu'un peu moins de 30 % de leurs effectifs (contre 18 % en 1975 et 23 % en 1990).
Encore ce chiffre global masque-t-il d'autres disparités : les filles constituent 70 % des effectifs des filières biologiques préparant aux écoles d'agronomie, mais entre 10 et 30 % seulement des différentes filières préparant aux sciences de l'ingénieur 25 ( * ) .
* 24 Rapport d'information n° 441 (2006-2007) fait par M. Yannick Bodin, au nom de la commission des Affaires culturelles et de la mission d'information, présidée par M. Jacques Legendre, portant sur la diversité sociale et l'égalité des chances dans la composition des classes préparatoires aux grandes écoles.
* 25 Les filles représentent :
- 25 % des effectifs des sections maths physique/sciences de l'ingénieur (MPSI) ;
- 29 % des effectifs des sections physique-chimie/sciences de l'ingénieur (PCSI) ;
- 10 % des effectifs des sections physique-technologie/sciences de l'ingénieur (PTSI).