C. LA DIMENSION SEPTENTRIONALE DE LA SÉCURITÉ EUROPÉENNE
Souhaitant rompre avec une vision par trop orientale de la situation géopolitique, la commission politique a présenté devant l'assemblée un texte rappelant le défi que représente le Grand Nord en matière de sécurité européenne. Le rapport présenté succède à un premier état des lieux effectué en 2007. Les travaux de l'Assemblée de l'UEO ont depuis été relayés par l'Union européenne, notamment à l'occasion de la présidence française. Une communication de la Commission européenne sur l'Union européenne et l'Arctique a ainsi été publiée le 20 novembre 2008.
L'essor des activités militaires dans la région, la présence d'importantes ressources énergétiques, l'ouverture de nouvelles voies de navigation maritime comme le problème des déchets nucléaires ne sont pas sans susciter d'interrogations en matière militaire. Toutes ces questions s'inscrivent de surcroît dans un cadre environnemental précis, celui de la fonte de la calotte glaciaire, qui, s'il est analysé comme un désastre écologique, permet également un accès plus rapide aux ressources minérales comme aux hydrocarbures, au risque d'engendrer de profonds différends entre les États voisins. Comme l'a souligné la Commission européenne en mars 2008, les changements climatiques observables en Arctique ne sont pas sans incidence sur la dynamique géostratégique de la région.
Invitée à intervenir à l'occasion du débat organisé au sein de l'hémicycle, Mme Elisabeth Walaas, Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la Norvège, a rappelé qu'il existait d'ores et déjà un cadre susceptible de permettre une coopération étroite entre les États au travers du Conseil de l'Arctique. Créé en 1996, il réunit sept États (Norvège, Danemark, Finlande, Islande, Suède, Canada, États-Unis et Russie) et huit observateurs (au nombre desquels la France et la Chine). Les travaux menés par le Conseil sont cependant limités aux questions environnementales : sécurité maritime, prévention des marées noires, coopération en matière de recherche, gestion globale des ressources maritimes. Les questions de défense ne sont pas abordées, seules la Finlande, la Norvège et la Suède travaillant actuellement sur un projet de collaboration poussée en la matière. Une collaboration plus poussée avec l'Union européenne est également à l'ordre du jour.
La question de la défense est pourtant, aux yeux des rapporteurs des projets de recommandation et de directive, primordiale, notamment face au développement des activités militaires russes dans la région (multiplication des vols de bombardiers stratégiques). La volonté, manifestée par Moscou, de défendre ses intérêts en Arctique a conduit les pays membres de l'OTAN présents dans la zone, en premier lieu le Canada, à renforcer leurs infrastructures militaires. Un rapprochement de la Norvège et de la Finlande avec l'Alliance atlantique est également décelable, sans concrétisation néanmoins. Le durcissement russe, plus que tangible après l'épisode géorgien, pourrait trouver un nouvel écho dans le Grand Nord devant les problèmes de souveraineté (revendication russe au pôle Nord) et d'exploitation des ressources.
Face à ce raidissement et aux menaces qu'il implique, la recommandation insiste sur la nécessité de renforcer le cadre juridique et institutionnel existant, tant en ce qui concerne le Conseil de l'Arctique que la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, adoptée en 1982 mais non ratifiée par les États-Unis. Un soutien plus important de l'Union européenne est également suggéré. Le texte, tel qu'adopté, insiste par ailleurs sur la nécessité de mettre en oeuvre un vaste programme de coopération sur ces questions avec la Russie.