b) La mise en place d'un inventaire comptable en urgence
Les obligations comptables qui se sont imposées au ministère de la santé pour le recensement et la valorisation du « stock national santé » à la fin de l'année 2006 ont conduit, par ailleurs, celui-ci à fournir un effort important d'organisation et de rationalisation du suivi des stocks. En particulier, les exigences liées à la confection d'un inventaire comptable ont conduit au recrutement d'un premier logisticien chargé notamment de développer en urgence un « outil rudimentaire » de suivi - selon le contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) auprès du ministère de la santé -, pouvant permettre la comptabilisation du « stock national santé ».
Malgré son caractère rudimentaire - il s'agit du développement d'une application sous ACCESS -, cet outil est toujours utilisé dans l'attente d'un nouveau logiciel. En dépit des faiblesses du logiciel actuel, la valeur du « stock national santé » était évaluée, selon les données du contrôle budgétaire et comptable ministériel (CBCM) auprès du ministère de la santé, à 845 millions d'euros au 31 décembre 2008.
c) Les observations de votre rapporteur spécial
Votre rapporteur spécial tient à formuler deux remarques.
Premièrement, il souhaite rappeler qu'une mission d'audit sur « les stocks des médicaments du ministère de la santé » avait été lancée, en 2006 , par la Mission d'audit d'évaluation et de contrôle (MAEC) du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dans le cadre de l'objectif général de qualité des comptes de l'Etat et de préparation de la certification des comptes 56 ( * ) .
Les conclusions de la mission d'audit faisaient apparaître un nombre important de lacunes relatives à l'application informatique utilisée et au dispositif de contrôle interne . En particulier, elle soulignait la traçabilité insuffisante des données ; le nombre important d'intervenants dans le dispositif ; des manquements dans la documentation des dossiers et l'absence de documents de synthèse. Les recommandations formulées par les auditeurs étaient doubles : d'une part, la fiabilisation de l'inventaire et, d'autre part, la consolidation à moyen terme du dispositif de contrôle interne mis en oeuvre par le gestionnaire.
Les observations de la MAEC n'ont été, jusqu'à aujourd'hui, que partiellement mises en oeuvre par l'EPRUS ( cf. tableau suivant). L'hétérogénéité des gestionnaires des sites de stockage, ainsi que le caractère « rudimentaire » de l'outil informatique de l'EPRUS, non relié aux systèmes d'information des différents prestataires extérieurs de l'établissement, sont, comme a pu le constater votre rapporteur spécial, deux obstacles majeurs à la fiabilisation effective de l'inventaire comptable du « stock national santé » et au renforcement du contrôle interne du dispositif.
Le suivi des recommandations de la Mission d'audit d'évaluation et de contrôle (MAEC) sur « les stocks des médicaments du ministère de la santé »
Recommandations |
Suites données |
1- Déployer les plans de contrôle conformément au dispositif FCE |
Effectué . Mais des difficultés demeurent, liées à l'application informatique qui ne permet pas de retracer les contrôles effectués. Le nouveau logiciel en cours d'acquisition devrait pallier ces difficultés. |
2- Corriger les erreurs de comptabilisation apparues au cours de l'audit |
Effectué . |
3- Assurer une définition précise du périmètre de l'inventaire comptable |
Effectué progressivement . En 2008, tous les produits détenus et dont l'Etat avait le contrôle ont été intégrés dans le périmètre. |
4- Normaliser et formaliser les procédures de gestion des stocks |
Tous les documents demandés par l'audit n'ont pas été formalisés. Mais le département des urgences sanitaires (DUS) a réalisé des dossiers par marché qui rassemblent l'ensemble des pièces justificatives et des fiches produits très précises. |
5- Justifier les quantités enregistrées dans l'application informatique ministérielle de gestion (AMG) |
Effectué en partie . Les stocks sont établis au vu des documents détenus par l'administration centrale et attestés par les gestionnaires qui détiennent les stocks. L'EPRUS a mis en place un plan de contrôle sur place en 2008. |
6- Justifier la valorisation des stocks |
Effectué. En particulier, les règles de comptabilisation de certains produits gratuits ont été définies. |
7- Sécuriser l'application informatique et améliorer ses fonctionnalités |
Non réalisé . Un nouveau logiciel est en cours d'acquisition. |
Source : commission des finances, à partir des données de l'EPRUS
La seconde remarque de votre rapporteur spécial porte sur la péremption des produits de santé du « stock national santé ». En effet, en dépit de l'arrivée à péremption d'une part importante du « stock national santé » , comme cela sera développé plus loin dans le présent rapport 57 ( * ) , aucune dépréciation du stock n'a été constatée en comptabilité.
Interrogé sur ce point par votre rapporteur spécial, Gilbert Toulgoat, contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) auprès du ministère de la santé, a précisé que « sur la péremption, la position du ministère est de considérer que les produits stockés sont soit utilisables, soit périmés et que dès lors qu'ils sont utilisables leur valorisation n'a pas à être affectée . [...] C'est pour cela qu'il est demandé au responsable ministériel d'inventaire une déclaration particulière sur ce point. A la clôture 2008, il a été déclaré que tous les stocks inventoriés étaient susceptibles d'être utilisés dans le cadre de la mise en oeuvre d'un plan d'urgence. » 58 ( * )
En pratique, cette situation ne semble cependant pas être aussi nette . En effet, votre rapporteur spécial rappelle, à cet égard, que lors de l'examen du projet de décret d'avance du 13 juillet dernier présenté précédemment, il a été indiqué à votre commission des finances que les achats supplémentaires de masques destinés à renouveler des stocks aujourd'hui périmés n'entraîneraient pas, pour autant, la destruction de ces derniers. Votre commission des finances avait alors relevé la contradiction entre, d'une part, la volonté de renouveler des stocks périmés, et, d'autre part, celle de conserver - tout en refusant de les utiliser au moins dans un premier temps - des produits utilisables en dépit de leur arrivée à péremption. De deux choses l'une : soit ces masques sont réellement efficaces et peuvent être distribués, soit ils ne le sont pas et doivent, en conséquence, être détruits. Pour votre rapporteur spécial, les incertitudes juridiques et comptables induites par ce procédé appellent une clarification rapide .
* 56 Mission d'audit, d'évaluation et de contrôle (MAEC), rapport d'audit n° 2006-02.
* 57 Cf. II.C.
* 58 Réponse du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) auprès du ministère de la santé au questionnaire de votre rapporteur spécial.