IV. LES CONDITIONS DE LA MISE EN PLACE D'UN « MÉCANISME D'INCLUSION CARBONE » AUX FRONTIÈRES DE L'EUROPE
S'exprimant à Nîmes, le 5 mai 2009, le Président de la République s'est montré clair dans son intention d'amener l'Europe à instaurer, si nécessaire, un mécanisme d'inclusion du prix du carbone aux frontières de l'Union : « La France se battra aux côtés de ses 26 partenaires européens pour obtenir un accord mondial ambitieux pour lutter contre le changement climatique. Mais je le dis solennellement, il n'est pas question d'imposer à nos entreprises des règles très contraignantes en matière d'environnement et d'importer en Europe des produits de pays qui ne respectent pas ces règles. Face aux pays qui refuseraient de jouer le jeu, la France se battra pour l'instauration d'une taxe carbone qui permettra à l'Europe de faire face au dumping écologique ».
Votre groupe de travail est très conscient des enjeux auxquels vise à répondre une éventuelle « taxe aux frontières », tant en termes de compétitivité que de respect de l'objectif global d'émissions de gaz à effet de serre. Cependant, ses travaux lui ont permis de mesurer les difficultés que peut soulever la création d'un tel instrument.
La présente partie vise donc à mettre en lumière les conditions dans lesquelles un tel mécanisme pourrait être mis en place, au vu des règles européennes et internationales régissant le commerce, ainsi que des rapports de forces sur ce sujet au sein même de l'Union européenne.
A. DES VERTUS D'UN MÉCANISME D'INCLUSION DU PRIX DU CARBONE DANS LES PRODUITS IMPORTÉS
1. Harmoniser le signal de prix des émissions de CO2
Comme indiqué précédemment, la stratégie française et européenne pour réduire les émissions de dioxyde de carbone repose notamment sur l'envoi d'un signal de prix desdites émissions aux opérateurs et aux consommateurs finals , afin que ceux-ci soient incités à modifier leur comportement.
Ainsi, aux termes du considérant n° 8 de la directive 2009/29/CE du Parlement européen et du Conseil précitée, « il importe [...] de garantir une plus grande prévisibilité du système et d'élargir son champ d'application en incluant de nouveaux secteurs et de nouveaux gaz, en vue de renforcer le signal de prix du carbone de manière à susciter les investissements nécessaires ».
Or si, d'une part, les enchères devant être mises en place pour l'attribution de quotas d'émissions en Europe et, d'autre part, l'éventuelle instauration d'une contribution climat-énergie en France envoient de tels signaux pour les produits élaborés sur ces territoires, tel pourrait ne pas être le cas pour les produits en provenance de pays ne s'imposant pas de telles contraintes.
Dès lors qu'ils pourraient se fournir en produits ne reflétant pas le coût de l'externalité des émissions de CO 2 , il est à craindre que les industriels et les consommateurs se tournent vers ces produits et ne soient pas incités à modifier leur comportement .