B. DIVERSIFIER LE BOUQUET ÉNERGÉTIQUE DE L'UNION EUROPÉENNE

Même si elle rappelle que le choix des bouquets énergétiques relève de la responsabilité des États membres, la Deuxième analyse stratégique illustre la réflexion engagée par la Commission sur la manière de diversifier le bouquet énergétique de l'Union européenne, dans lequel les énergies fossiles continuent d'occuper une place prépondérante (à hauteur de 78,8 %) - c'est également le cas au niveau mondial -, comme le montre le graphique ci-dessous :

Bouquet énergétique de l'Union européenne en 2007
(consommation)


Source Eurostat

Le pétrole continue d'occuper la première place dans le bouquet énergétique européen, suivi du gaz, dont la part a progressé depuis une quinzaine d'années, et du charbon, dont la part a au contraire diminué.

L'Union européenne , dont la consommation n'est pas couverte par sa production - elle consomme plus du double de sa production -, est un importateur net d'énergie .

Le tableau ci-après illustre l' extrême hétérogénéité de la production d'énergie selon les États membres , en 2007.

Au niveau de l'ensemble de l'Union européenne, l'énergie nucléaire constitue la première source de production d'énergie , soit 28,4 %, mais la France représente à elle seule près de la moitié de la production européenne, tandis que d'autres États membres n'y recourent pas du tout. Vient ensuite le charbon (22,0 %), dans la production duquel la Pologne et l'Allemagne tiennent une place prépondérante. Le gaz naturel occupe la troisième place (19,7 %), suivi des énergies renouvelables (16,3 %) et du pétrole (13,6 %).

Production d'énergie primaire en 2007 dans l'Union européenne
(en milliers de tonnes équivalents pétrole - Mtep)

Pétrole brut

Gaz naturel

Charbon et lignite

Énergie nucléaire

Énergie renouvelable (biomasse, hydro...)

Production totale
d'énergie primaire

Allemagne

3 430

12 871

54 590

36 251

28 121

135 263

Autriche

1 004

1 589

0

nc

7 839

10 431

Belgique

nc

0

0

12 440

1 273

13 713

Bulgarie

26

236

4 771

3 777

995

9 805

Chypre

nc

nc

nc

nc

65

65

Danemark

15 526

8 268

nc

nc

3 193

26 987

Espagne

143

80

5 454

14 214

10 288

30 180

Estonie

nc

nc

3 610

nc

745

4 423

Finlande

nc

nc

1 088

6 042

8 589

15 719

France

1 031

915

0

113 430

18 645

134 021

Grèce

82

22

10 392

nc

1 677

12 172

Hongrie

1 207

2 005

1 773

3 786

1 404

10 174

Irlande

nc

369

591

nc

447

1 408

Italie

5 948

7 949

100

0

11 901

25 899

Lettonie

nc

nc

3

nc

1 794

1 797

Lituanie

157

nc

15

2 536

813

3 521

Luxembourg

nc

nc

nc

nc

82

82

Malte

nc

nc

nc

nc

nc

nc

Pays-Bas

2 653

54 759

nc

1 083

2 496

60 992

Pologne

725

3 897

61 992

nc

5 018

71 632

Portugal

nc

nc

0

nc

4 610

4 610

Rép. tchèque

249

140

23 804

6 751

2 404

33 348

Roumanie

4 822

9 233

6 858

1 989

4 717

27 619

Royaume-Uni

78 269

64 912

9 757

16 258

4 368

173 564

Slovaquie

24

109

551

3 955

983

5 622

Slovénie

0

3

1 239

1 469

726

3 437

Suède

0

nc

153

17 275

15 639

33 068

TOTAL
UE-27

115 297

167 356

186 742

241 258

138 831

849 551

Source : Eurostat.

Le pétrole restera une source d'énergie difficilement remplaçable. Sa place dans le bouquet énergétique devrait progressivement reculer et, compte tenu de la réglementation communautaire de plus en plus contraignante, sa part devrait sensiblement diminuer dans les secteurs où son usage n'est pas nécessaire comme le chauffage ou la production d'électricité. En revanche, le pétrole continuera d'occuper une place incontournable dans le secteur des transports. En l'état actuel des connaissances, les réserves de pétrole devraient durer au moins 70 ans, dont environ la moitié au titre de réserves bien identifiées, l'essentiel d'entre elles se situant au Moyen Orient. Des investissements considérables seront nécessaires pour exploiter les autres réserves (huiles non conventionnelles et schistes bitumeux en particulier).

Les réserves de gaz , quant à elles, sont encore plus concentrées que celles de pétrole, puisque trois pays, la Russie, l'Iran et le Qatar, détiennent plus de la moitié des réserves mondiales, même si de nouveaux acteurs émergent, comme l'Australie, pour le gaz naturel liquéfié (GNL).

Les scenarii prospectifs retenus par la Commission prévoient tous une baisse sensible de la consommation de gaz d'ici à 2020. Cette problématique est nouvelle. Jusqu'à présent, en effet, la croissance de la demande de gaz avait été très rapide. Or, il existe une incertitude sur l'évolution de cette demande à l'horizon 2020/2030, qui pourrait diminuer, en particulier si d'importants États membres, comme l'Allemagne et le Royaume-Uni, décident de produire une part croissante de leur électricité à partir de l'énergie nucléaire. Une telle évolution pourrait compromettre la rentabilité des investissements réalisés dans le secteur gazier.

Le charbon est une source d'énergie relativement disponible, qui est encore très présente dans le bouquet énergétique de bon nombre d'États membres. Bien que son usage soit actuellement pénalisé par les émissions de gaz à effet de serre dont il est à l'origine, les perspectives en matière de captage et de stockage de carbone (CSC) pourraient faire de ce combustible une source majeure d'énergie à terme. En effet, les vastes réserves mondiales de charbon pourraient continuer à être exploitées sans aggraver le changement climatique.

En ce qui concerne l' énergie nucléaire , qui fournit un tiers de la production d'électricité de l'Union européenne, le Conseil européen des 8 et 9 mars 2007 a pris acte de l'évaluation de « la contribution apportée par l'énergie nucléaire en réponse aux préoccupations croissantes concernant la sécurité de l'approvisionnement énergétique et les réductions des émissions de CO2, étant entendu qu'il faut veiller à ce que la sûreté et la sécurité nucléaires occupent une place centrale dans le processus de décision » et a confirmé qu' « il appartient à chacun des États membres de décider s'il aura ou non recours à l'énergie nucléaire », cette décision devant être prise « en gardant à l'esprit la nécessité de continuer à améliorer la sûreté nucléaire et la gestion des déchets radioactifs ».

Aussi la Deuxième analyse stratégique aborde-t-elle la question de l'énergie nucléaire essentiellement sous l'angle de la sûreté et de la sécurité : l'Union européenne doit établir « un cadre législatif commun en ce qui concerne la sûreté des installations nucléaires et la gestion des déchets nucléaires ». Elle reconnaît néanmoins que « l'énergie nucléaire contribue à la sécurité de l'approvisionnement énergétique de l'UE car elle constitue une source d'électricité importante permettant d'assurer la charge de base, qui n'accroît pas les émissions de gaz à effet de serre et permet donc de lutter contre le changement climatique ». Le texte constitue donc une avancée, la Commission affichant un soutien plus affirmé que par le passé à l'énergie nucléaire.

Actuellement, dans l'Union européenne, 144 réacteurs nucléaires, répartis dans 15 pays, dont 58 réacteurs français, produisent 37 % de l'électricité. Dans sa Deuxième analyse stratégique, la Commission note que « la part de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité devrait chuter sensiblement d'ici à 2020 si aucune décision n'est prise concernant de nouveaux investissements ». L'évolution de la puissance nucléaire installée paraît en effet difficile à prévoir et dépendra principalement des décisions que prendront certains États membres en la matière.

L'énergie nucléaire connaît actuellement un regain d'intérêt au sein de l'Union européenne, que l'on retrouve aussi au niveau mondial. La Pologne par exemple, envisage de démarrer un programme nucléaire. Si le France et le Royaume-Uni ont une réelle tradition nucléaire, la perception de cette source de production électrique a récemment évolué dans plusieurs États membres. Ainsi en est-il de l'Italie, qui avait renoncé au nucléaire par référendum en 1987, après la catastrophe de Tchernobyl. Or, le Parlement italien a récemment approuvé un plan de relance du nucléaire afin de réduire la dépendance extérieure et les émissions de gaz à effet de serre. L'opinion publique italienne reste toutefois à convaincre. La Suède avait également abandonné le nucléaire par référendum, dès 1980, mais a récemment décidé de remplacer les réacteurs encore en activité arrivés en fin de vie. L'Allemagne avait décidé l'abandon du nucléaire d'ici 2020, mais la chancelière Angela Merkel, bien qu'elle ait précédemment assuré ne pas revenir sur cet engagement souscrit par son prédécesseur, a récemment évoqué un report de la date de fermeture des centrales nucléaires allemandes. Les Pays-Bas ont repoussé de 20 ans la date de fermeture de leur centrale nucléaire.

Page mise à jour le

Partager cette page