D. LES DÉVELOPPEMENTS EN COURS EN MATIÈRE DE NON-PROLIFÉRATION ET DE DÉSARMEMENT NUCLÉAIRES
La Commission politique a présenté au cours de cette session un important rapport qui fait le point sur la situation en cours dans le domaine de la non-prolifération et du désarmement nucléaires, alors qu'aura lieu en mai 2010 la conférence d'examen du Traité de non prolifération (TNP).
Le rapport passe en revue les traités les plus importants tels que le Traité sur la réduction des armements stratégiques (START), le Traité de non-prolifération (TNP), le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et le Traité d'interdiction de la production des matières fissiles (Traité « Cut-off »).
Le rapport insiste sur la nécessité que les États-Unis et la Russie, les deux puissances nucléaires majeures, parviennent à un accord de fond sur une réduction plus substantielle de leurs arsenaux respectifs avant l'expiration du traité START en décembre 2009. Pour le rapporteur, M. Michael Hancock, la participation constructive de l'Union européenne et une stratégie exhaustive de non-prolifération entre l'Union européenne et les États-Unis seront déterminantes pour la réussite de la Conférence d'examen du TNP. Dans ce contexte, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) devrait être dotée des moyens et de l'autorité nécessaires pour poursuivre son indispensable travail d'investigation et de contrôle dans le domaine des garanties, de la sécurité et de la sûreté nucléaires.
En outre, le rapport examine les implications des développements récents des programmes nucléaires iranien et nord-coréen intervenus dans un mépris total du régime international de non-prolifération. La position des deux pays oscille entre coopération et jeu de dupes. Ainsi, au cours de l'année 2009, les deux pays ont lancé un nombre important de missiles de courte et moyenne portée, et la Corée du Nord a procédé à des essais nucléaires souterrains. Cependant, l'Iran a autorisé récemment des inspecteurs de l'AIEA à visiter l'installation nucléaire qu'il tenait secrète à Qom, tandis que la Corée du Nord semble vouloir se joindre aux pourparlers à six. En conséquence, l'Iran s'est vu proposer fin octobre un arrangement concernant l'enrichissement à l'étranger de son uranium à des fins médicales, qui réduirait les occasions pour Téhéran d'acquérir de l'énergie nucléaire à des fins militaires, et il semblerait que les États-Unis envisagent d'envoyer leur émissaire spécial pour la Corée du Nord à Pyongyang, pour des entretiens directs.
Dans ce contexte, le rapport appelle, afin de mettre un terme à la menace nucléaire, à la poursuite et au renforcement du dialogue avec ces deux pays, tout en garantissant leurs droits à utiliser l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. Néanmoins, il observe que la communauté internationale devra adopter une attitude plus ferme , et que des sanctions plus sévères seront inévitables si la Corée du Nord et l'Iran tournent le dos à la coopération et aux négociations. A cet égard, le soutien de la Chine et de la Russie seront déterminants.
En outre, le rapport s'intéresse à l'importante augmentation de l'arsenal nucléaire de l'Inde et du Pakistan, dans un contexte d'instabilité régionale, et sur la vulnérabilité des installations nucléaires pakistanaises, alors que l'armée pakistanaise combat actuellement les forces armées des talibans près d'Islamabad et que des attaques terroristes se poursuivent dans le pays. Le rapport invite donc l'Union européenne à exercer davantage de pression sur le gouvernement pakistanais, afin qu'il mette en oeuvre des politiques de développement socio-économique pour éradiquer les racines du terrorisme, tout en soutenant les efforts déployés par le Pakistan pour lutter contre les talibans et sécurité ses arsenaux nucléaires.
Enfin, le rapport étudie les stratégies de dissuasion nucléaire britannique et française et conclut que ces deux pays doivent se débarrasser de leurs armes nucléaires , car elles « ne servent aucun objectif utile ». De même, il analyse la politique nucléaire chinoise et estime que ce pays devrait jouer un rôle plus important pour la réduction de la menace nucléaire militaire émanant de la Corée du Nord.
En conclusion, le rapport effectue un rapide tour d'horizon des tendances actuelles de la non-prolifération nucléaire, à la lumière des événements et des initiatives les plus récentes, tel le plan « Global Zero » qui préconise l'élimination totale des armes nucléaires et qui a été lancé en décembre 2008 par une centaine d'hommes politiques et de militaires.
Le rapport a été adopté à l'unanimité . On soulignera trois recommandations en particulier : élaborer une stratégie de non-prolifération commune à l'Union européenne et aux États-Unis avant l'ouverture de la Conférence d'examen du TNP en mai 2010 à New-York ; encourager un vaste dialogue paneuropéen sur la non-prolifération et le désarmement nucléaires au niveau de l'Union européenne, en vue d'élargir l'expérience de l'Union et d'accroître le soutien qu'elle apporte dans ces domaines ; exhorter le Comité politique et de sécurité de l'Union européenne à élaborer un concept de défense antimissile européen en liaison avec l'OTAN et avec la Russie.
Au cours du débat qui a suivi, les orateurs ont rappelé que la fin de la guerre froide n'avait pas fait disparaître la menace nucléaire et qu'il ne fallait pas négliger le risque de voir l'arme nucléaire passer sous le contrôle d'une organisation terroriste. Dans ce contexte, l'implication de la communauté internationale en Afghanistan et au Pakistan est primordiale.
En outre, certains orateurs ont soutenu la proposition du rapporteur de créer une banque d'aide qui faciliterait l'accès au nucléaire civil. Enfin, un parlementaire physicien, expert de la lutte contre la prolifération nucléaire, a souligné l'importance de la mise en place de systèmes de sauvegarde efficaces dans le secteur civil, afin de préserver le nucléaire civil d'une prolifération non maîtrisée.
Le rapport de M. Hancock a le mérite de présenter de façon exhaustive mais pédagogique les différents traités existant pour lutter contre la prolifération nucléaire. Le débat a révélé la préoccupation générale relative à l'Iran et à la Corée du Nord, et la prise de conscience d'une coopération nécessaire avec la Chine et la Russie. Il serait souhaitable que les recommandations adoptées soient suivies d'effet, afin de préparer la conférence d'examen du TNP dans les meilleures conditions. L'unité de l'Europe et des États-Unis sera certainement déterminante à cet égard.