2. Un basculement inachevé des mesures de protection juridique vers les mesures de protection sociale
La Cour des comptes estime que « le basculement des curatelles dites "sociales" vers les MASP ne semble pas avoir eu lieu, alors qu'il constituait l'une des hypothèses fortes de la réforme. Seuls 5,4 % des MASP feraient suite à une mesure judiciaire terminée depuis moins d'un an, le plus souvent une TPSA (58 %). Les juges ont donc très peu utilisé en 2008 la possibilité offerte par la loi de transformer les TPSA en MASP ».
Par ailleurs, les MAJ n'ont guère rencontré plus de succès. Lors de l'audition « pour suite à donner » précitée, Marie-Thérèse Cornette, contre-rapporteur de la Cour des comptes a jugé que « la MAJ passe par une procédure bien trop longue. Fin 2009, on dénombrait un millier de MAJ, contre 30 000 escomptées au cours des travaux préparatoires. Les 68 000 TPSA auraient dû disparaître fin 2011, pour être transformées en MAJ ou en MASP. Or, très peu de transformations ont eu lieu, ce qui a rendu nombre de TPSA caduques, mais a laissé subsister les curatelles généralement associées à ce dispositif. La déjudiciarisation souhaitée n'a donc pas eu lieu ».
L'ensemble de ces constats invite à réfléchir sur la pertinence de l'architecture du dispositif mis en oeuvre (MASP 1, 2 et 3 ; MAJ). La Cour des comptes formule deux recommandations. La première consiste à « mettre en place un suivi national de l'évolution quantitative des MASP, et en particulier de celles de niveau 3, dans l'objectif de s'assurer, d'une part, de la réalité de leur intégration parmi les différents dispositifs sociaux existants et, d'autre part, de la pertinence des distinctions opérées entre les trois niveaux de MASP ».
De fait, la segmentation de l'intervention publique nuit à sa lisibilité . Il existe clairement un déficit d'information et de communication autour du dispositif des MASP. Même les travailleurs sociaux rencontrent des difficultés à s'approprier la réforme, car, comme le note justement la Cour, « les situations des personnes à protéger [...] ne sont pas aussi clairement différenciées que ne le prévoyait la loi ».
Par ailleurs, le dispositif MASP apparaît encore comme lourd à gérer d'un point de vue administratif puisque les contrats ont une durée de six mois renouvelables. Il serait certainement utile d'étudier la pertinence d'un délai plus long, jusqu'à un an par exemple, afin d'alléger la charge des travailleurs sociaux.
L'autre recommandation de la Cour des comptes vise à « conduire une réflexion sur l'articulation des mesures MASP et MAJ, lorsque la MAJ arrive à échéance sans que la situation de l'intéressé ait évolué ». En effet, après huit ans (quatre ans de MASP et quatre ans de MAJ), il se peut que la personne soit toujours incapable de gérer ses ressources par elle-même, sans pour autant être éligible à une mesure de protection juridique. La question de la caducité des mesures au bout de quatre ans, notamment des MASP, mérite également d'être posée.