3. L'accessibilité des transports publics locaux : un coût élevé pour les AOT
La loi du 11 février 2005 dite loi Handicap 37 ( * ) marque une étape importante dans la politique de solidarité nationale, en donnant aux personnes handicapées 38 ( * ) et aux personnes à mobilité réduite (PMR) 39 ( * ) une égalité « réelle » pour l'accès aux services publics. La traduction de cet engagement en matière de transports publics génère un coût élevé pour les collectivités territoriales dans un cadre budgétaire très contraint.
a) Des dispositions législatives ambitieuses...
Plusieurs dispositions de la loi Handicap traduisent l'objectif d'égalité réelle pour les personnes handicapées ou à mobilité réduite en matière de transports publics.
Ainsi, l'article 45 pose le principe de la continuité de l'accessibilité de la chaîne du déplacement , créant ainsi une obligation d'accessibilité complète des services de transport collectif. Ces derniers doivent être accessibles aux personnes handicapées et aux PMR dans un délai de dix ans à compter de la publication de la loi , soit au plus tard le 12 février 2015 . Ce délai s'applique aussi bien aux nouvelles lignes de transports publics qu'aux réseaux déjà existants, et à l'ensemble des transports publics 40 ( * ) . Par conséquent, l'ensemble des AOT, au sens de la LOTI (à savoir les AOTU, le Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF), les autorités responsables de l'organisation des transports départementaux et régionaux et l'État), sont soumises au respect de ces dispositions 41 ( * ) .
La chaîne du déplacement comprend le cadre bâti, la voirie, les aménagements des espaces publics, les systèmes de transport et leur intermodalité . Les gares, les quais et les matériels roulants font partie intégrante de la chaîne des déplacements. Par conséquent, le respect de l' obligation d'accessibilité comprend non seulement les moyens de transport public proprement dit (matériels roulants), mais également les gares situées sur le domaine public du chemin de fer et les emplacements d'arrêt de véhicule de transport collectif sur la voirie . Bien qu'il n'existe pas de dispositions particulières dans la loi, la chaîne de déplacement doit être entendue comme comprenant également la billettique et les équipements ainsi que l'information. L'accès à l'information sous toutes ses formes doit être envisagé pour tous les types de handicap et porter sur :
- la préparation au voyage (centrale de mobilité, site Internet, standard téléphonique, fiches horaires, etc.) ;
- l'information à l'arrêt ou en gare routière ;
- l'information pendant le voyage (information embarquée...) ;
- les réclamations.
En particulier, la signalétique doit être continue et cohérente durant toute la chaîne du déplacement.
La loi prévoit toutefois deux exceptions à l'obligation posée à l'article 45 : le cas des réseaux souterrains de transports ferroviaires et de transports guidés, d'une part, et, pour les autres réseaux de transports, est posé le principe de l' impossibilité technique avérée , d'autre part. Si ce dernier principe est invoqué, l'AOT responsable doit mettre à disposition des personnes handicapées et à mobilité réduite des moyens de transport adaptés. Ils sont organisés et financés par l'AOT compétente dans un délai de trois ans, mais le coût de ce transport de substitution pour les usagers ne doit pas être supérieur au coût du transport public existant.
Pour parvenir à l'objectif posé à l'article 45, la loi Handicap prévoit l'élaboration, au plus tard en 2008, de deux documents de planification ou de programmation : - le schéma directeur d'accessibilité des services de transport , qui concerne l'ensemble des AOT (urbaines et interurbaines) ; - le plan de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics (qui s'adresse uniquement aux communes et EPCI). Le schéma directeur est un document de programmation dont l'objet est d' assurer le respect de l'obligation d'accessibilité des services et des réseaux de transports collectifs au terme du délai de dix ans imparti par le législateur (fixé au 12 février 2015), par une mise en oeuvre progressive de mesures appropriées. Pour atteindre cet objectif, le schéma directeur d'accessibilité : - définit les modalités de la mise en accessibilité des différents types de transport (aménagement et équipement des installations d'accès aux véhicules, dispositions concernant les matériels roulants, les mesures d'exploitation et d'organisation des services, les correspondances et les échanges entre les différentes lignes de transport public) ; - établit les éventuels cas de dérogation et définit les services de substitution qui seront mis en place dans le délai de trois ans à compter de l'approbation du schéma par l'autorité organisatrice responsable et les principes d'organisation les concernant. Il précise les dispositions prises pour assurer l'intermodalité avec les réseaux de transport public des autres autorités organisatrices ; - établit la programmation des investissements à réaliser et des mesures d'organisation à mettre en oeuvre dans le délai de dix ans édicté par la loi pour la mise en accessibilité des services de transports collectifs. Il définit les objectifs en matière de fonctionnement des dispositifs de mise en accessibilité des services de transport et les conditions de maintenance qui en découlent ; - prévoit les conditions de sa mise à jour dans les cas où des évolutions technologiques permettraient d'apporter des solutions aux impossibilités techniques avérées identifiées initialement. |
* 37 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
* 38 La situation de handicap est définie à l' article L. 114 du code de l'action sociale et des familles comme « toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ».
* 39 Les PMR sont définies par la directive 2001/85/CE du Parlement et du Conseil européen du 20 novembre 2001 , comme étant « toutes les personnes ayant des difficultés pour utiliser les transports publics, telles que, par exemple, personnes souffrant de handicaps sensoriels et intellectuels, personnes en fauteuil roulant, personnes handicapées des membres, personnes de petite taille, personnes âgées, femmes enceintes, personnes transportant des bagages lourds et personnes avec enfants (y compris enfants en poussette) ».
* 40 Au sens de l'article 7-II de la LOTI. En revanche, les services occasionnels de transport public routier de personnes ne sont pas visés (activités à caractère touristique, commercial ou périscolaire).
* 41 L'article 45 soumet également :
- les communes ou les EPCI à l'élaboration d'un plan de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics ;
- les communes, les EPCI et les syndicats mixtes compétents en matière d'organisation des transports publics urbains pour le volet « accessibilité » des PDU.