E. DES INTERROGATIONS QUANT AUX CONSÉQUENCES DE LA SUSPENSION DE L'ÉCOTAXE ET AUX SCENARII DE SORTIE DE CRISE
Dans le cadre de l'exécution stricte du contrat, la suspension de la taxe, qui correspond au fonctionnement « à vide » du dispositif après mise à disposition, coûterait, selon les informations fournies à votre rapporteur, sans prise en compte des pénalités, environ 44 millions d'euros par trimestre en intégrant une rémunération des SHT.
Dans l'hypothèse où l'État ne paierait pas d'annuité en 2014, la nécessité de financer le portage financier du dispositif génèrerait un coût supplémentaire dépendant de la durée de la suspension. L'ordre de grandeur pourrait être estimé sur une année à une dizaine de millions d'euros au moins auxquels s'ajouterait probablement le coût de la rupture des instruments de couverture du risque de variation des taux.
En cas de sortie de la suspension pour une mise en oeuvre de la taxe, il n'y aurait pas de coût additionnel particulier puisque l'on resterait dans l'exécution du contrat.
En cas de sortie de la suspension pour un abandon de la taxe, trois hypothèses de sortie du dispositif doivent être envisagées.
La première hypothèse est celle de la déchéance du contractant, prononcée avant la mise à disposition du dispositif et fondée sur un retard du prestataire de plus de six mois. Dans cette hypothèse, le montant pourrait faire l'objet de discussions juridiques puisque, dans ce cas, le contrat renvoie à la jurisprudence existante. Il serait toutefois très proche du coût calculé après la mise à disposition dans la mesure où tout le dispositif est réalisé. La différence concerne alors essentiellement les modalités de paiement puisqu'avant la mise à disposition, l'État devrait payer en une seule fois, alors qu'après celle-ci l'État pourrait payer sa dette en plusieurs échéances.
Devant la commission d'enquête, M. Christian Eckert, secrétaire d'État au budget, a indiqué que le prononcé de la déchéance pourrait coûter à l'État 950 millions d'euros, à raison de 850 millions d'euros d'indemnité versée à Écomouv' et de 100 millions d'euros au titre des frais financiers et de la rupture des contrats liant Écomouv' avec les SHT. Il a affirmé qu'il s'agissait de la fourchette haute.
La seconde hypothèse apparaît la moins probable puisqu'elle consisterait à rompre le contrat, pour un motif d'intérêt général, après avoir accepté la mise à disposition du dispositif. Dans ce cas, le montant versé à Écomouv' dépendrait de la date de rupture. Plus elle est éloignée de l'échéance du contrat et plus elle est élevée. En octobre 2011, la Mappp avait critiqué la formule contractuelle de calcul de cette indemnité, considérant qu'elle était trop favorable au prestataire privé. En effet, elle prend également en compte - à la différence de la déchéance - une partie de la perte des bénéfices que le prestataire privé aurait dû percevoir si le contrat s'était déroulé jusqu'à son terme.
La troisième hypothèse reposerait sur un accord contractuel, à l'amiable, entre l'État et Écomouv'. Le coût de sortie dépendrait alors de la négociation mais on peut penser qu'elle couvrirait légitimement une grande partie des investissements réalisés par Écomouv' ainsi que les frais financiers associés. Cet accord serait formalisé par un protocole d'accord négocié directement par les parties ou grâce à l'intervention de la commission de conciliation prévue par les termes du contrat. Il semble que ce soit aujourd'hui la solution privilégiée.
Les éléments détaillés concernant l'indemnisation des différentes parties ont été précisés précédemment. La discussion devra aussi porter sur l'indemnisation des SHT et l'État pourra difficilement faire l'économie d'une négociation directe avec elles.
En effet, pour l'État, les conséquences financières de la suspension concernent avant tout le manque à gagner en termes de recettes d'écotaxe. Très concrètement, son produit devait revenir pour 760 millions d'euros à l'Afitf et pour 160 millions d'euros aux collectivités propriétaires d'une partie du réseau taxable. Un abandon complet du dispositif paraît donc quasi impossible, tant au regard des investissements faits que des recettes attendues.
Il reste à considérer l'existence de délais nécessaires pour remettre en ordre de marche l'ensemble du dispositif de collecte (et notamment tout le processus d'enregistrement, mais aussi en termes de textes réglementaires dont l'articulation serait à rebâtir). Il semble de plus en plus probable qu'aucune recette ne sera perçue au titre de l'exercice 2014. Lors de son audition, la directrice générale des douanes a estimé qu'il faudrait au moins six mois, à compter de la décision de lever la période de suspension, pour « remettre en route » le dispositif. Il y a donc désormais urgence à trouver un accord avec Écomouv'.