III. LE SPORT, UNE RÉPONSE DÉTERMINANTE FACE AUX ENJEUX SANITAIRES, SOCIAUX ET ÉCONOMIQUES

A. UN ENJEU DE SANTÉ PUBLIQUE : LE SPORT COMME REMPART AUX PATHOLOGIES CHRONIQUES, À PLUS FORTE PRÉVALENCE OUTRE-MER

1. Une préoccupation sanitaire commune aux territoires ultramarins : la prévalence de pathologies chroniques et de surpoids, dès le plus jeune âge

Les enjeux sanitaires sont importants outre-mer. En janvier 2018, la ministre des sports confirmait devant la délégation ces chiffres préoccupants : « Aux Antilles et en Guyane, un adulte sur deux est en surpoids. À Mayotte, 52 % des hommes et 79 % des femmes sont en surpoids . En Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, 87 % de la population est en surcharge pondérale . La Réunion, Mayotte, la Guadeloupe et la Martinique ont les taux départementaux de prévalence du diabète les plus élevés de France : 10 % de la population de La Réunion et de Mayotte souffrent de diabète, soit deux fois plus qu'en métropole » 25 ( * ) .

La direction générale des outre-mer rappelait également que, « en CM2, 22,4 % des élèves sont en surpoids dans les DROM et 5,5 % sont obèses contre 18,1 % et 3,6 % au niveau national. Les DROM ont les taux de surpoids et d'obésité les plus élevés de France 26 ( * ) ».

Les données du baromètre santé DOM 2014 avaient montré le caractère très préoccupant du surpoids et de l'obésité dans les outre-mer. Parmi les quatre départements examinés, la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane ont tous des taux supérieurs aux taux hexagonaux. Seule La Réunion dispose de taux très légèrement inférieurs.

Surpoids et obésité en outre-mer

Champ :
Individus de 15 à 75 ans

Martinique

Guadeloupe

Guyane

La Réunion

Hexagone

Corpulence

Surpoids

34 %

31 %

34 %

27 %

29 %

Obésité

17 %

17 %

18 %

11 %

12 %

Source : Enquête Baromètre santé DOM 2014, Inpes

La jeunesse est la première concernée par ces problèmes sanitaires majeurs : les DROM ont des taux de surpoids et d'obésité infantile parmi les plus élevés de France.

Surpoids et obésité infantiles en outre-mer

Grande section de maternelle

2012-2013

CM2

2014-2015

Surpoids*

Obésité

Surpoids*

Obésité

DROM

12,7 %

4,8 %

22,4 %

5,5 %

Hexagone

11,9 %

3,5 %

18,1 %

3,6 %

Sources : Enquêtes nationales de santé en milieu scolaire (DREES-DGESCO)

*Obésité incluse

Champ : France entière (hors Mayotte avant 2014), élèves scolarisés en grande section de maternelle et en CM2

Athlètes de haut niveau mais population plus fortement en surpoids :
l'exemple du paradoxe guadeloupéen

Les situations ultramarines sont parfois paradoxales comme le montre la Guadeloupe, terre de champions à la population pratiquant pourtant moins d'activités sportives et sujette à d'importants problèmes de surpoids et d'obésité. 55 % des Guadeloupéens de 15-74 ans ne pratiquent pas de sport régulièrement, contre 42 % pour la moyenne nationale.

Le territoire connaît également une forte prévalence locale des maladies chroniques : le diabète de type 2 concerne 8,1 % de la population, contre 4,4 % pour la moyenne nationale. En outre, 54,6 % de la population adulte est en surcharge pondérale (47,3 % au niveau national) dont 22,9 % en situation d'obésité (15 % de moyenne nationale) ; cette situation est d'autant plus préoccupante chez les enfants : 22,9 % des enfants de 5 à 14 ans sont en surcharge pondérale (17,8 % pour la moyenne nationale) dont 8,9 % en situation d'obésité (3,6 % pour la moyenne nationale).

Cette situation n'est pas propre à la Guadeloupe : la problématique de la surcharge pondérale est accrue à Saint-Martin où 58 % de la population adulte est en surcharge pondérale, dont 28 % en situation d'obésité, et où à l'entrée en CP 26,3 % des enfants sont en surcharge pondérale.

Source : D'après les réponses de la DJSCS de Guadeloupe

2. Le développement de programmes sport santé

Le ministère des outre-mer relie les taux d'obésité préoccupants à plusieurs facteurs comme l'alimentation, mais également une pratique d'activité physique moins importante que dans l'hexagone, comme évoqué précédemment 27 ( * ) . Face à ce constat, le ministère des outre-mer entend « utiliser le sport comme facteur de santé pour réduire le taux d'obésité et lutter contre les pathologies associées en outre-mer » 28 ( * ) . Le ministère des outre-mer souligne la prise en compte de cette problématique dans différents plans et programmes nationaux : le plan obésité 2010-2013, le programme national nutrition santé 2011-2015, ou encore le plan national sport santé bien-être. Aussi, en 2012, les ministres chargés de la santé et du sport ont demandé aux territoires de décliner au niveau régional le plan « sport santé bien-être » dont le but était de promouvoir et développer la pratique des activités physiques et sportives comme facteur de santé publique. Selon le ministère, « les territoires ont saisi l'enjeu que représente la pratique du sport dans la réduction des taux de surpoids et d'obésité en outre-mer ».

Chaque territoire décline de manière différente cette problématique, au sein des schémas de prévention des projets régionaux de santé (PRS) qui viennent d'être renouvelés et sont actuellement en phase de consultation pour la période 2018-2027, mais également au sein des programmes régionaux nutrition santé. Les différents appels à projet ARS-DJSCS « sport santé bien-être » participent en outre à l'émergence locale de projets innovants.

Certains territoires ont ou vont également expérimenter le dispositif du sport sur ordonnance. Ces déclinaisons territoriales appellent à être actualisées et renforcées . Comme le soulignait la ministre des sports lors de son audition, le ministère des sports lancera des labellisations de « maison sport santé bien-être » en outre-mer : reste à savoir dans quels territoires, selon quel maillage et quel calendrier.

Les élus locaux ont aussi pleinement conscience du levier que représente le sport face aux enjeux de santé ; Marc Sanchez, président de l'ANDES, appelait ainsi devant la délégation 29 ( * ) à « faire valoir l'enjeu de la jeunesse et du sport santé eu égard à la prégnance de la toxicomanie et des maladies chroniques ».

Lors de leur déplacement à la Martinique , le président et les rapporteures présentes ont pu échanger avec les responsables du programme « santé par l'activité régulière - SaPhyR », qui vise à proposer un accompagnement vers une pratique régulière d'activités physiques pour les personnes sédentaires et identifiées comme « à risque » ou souffrant d'une pathologie contrôlée. Ce projet, piloté par le ministère des sports, l'agence régionale de santé ainsi que la caisse de sécurité sociale de Martinique, souhaite développer la prescription de l'activité physique et rendre l'activité physique accessible à tous et particulièrement aux personnes vulnérables.

Une expérience pilote d'un réseau sport santé baptisé « Maita'i sport santé » a également été menée en Polynésie française par le biais d'une convention entre le pays, la caisse de prévoyance sociale, l'institut de la jeunesse et des sports, l'institut de la statistique, le centre hospitalier et le comité des sociétés d'assurance. L'évaluation de ce projet qui a permis l'accompagnement de 150 personnes sur 9 mois jusqu'à juin 2018 doit être livrée prochainement avant un déploiement à plus grande échelle. Ce projet a été mis en avant lors du premier séminaire « sport santé » organisé par le pays en juillet 2018 et est soutenu alors qu'une loi relative au sport sur ordonnance est en cours de rédaction au sein des ministères polynésiens des sports et de la santé. Le gouvernement polynésien s'intéresse aussi au potentiel de la danse tahitienne ori Tahiti sur le plan de la santé osseuse mais aussi de la santé psychologique.

Recommandation n° 9 : Engager, en partenariat avec les territoires, une déclinaison adaptée et amplifiée des politiques de « sport santé » et valoriser les comités et ligues proposant des programmes de « sport santé » accessibles à tous.


* 25 Audition de Madame Laura Flessel, ministre des sports, du mercredi 24 janvier 2018.

* 26 Enquêtes nationales de santé en milieu scolaire (DREES-DGESCO en 2014-2015).

* 27 La Martinique, la Guadeloupe et, dans une moindre mesure, la Guyane ont une pratique du sport jugée insuffisante par le ministère des outre-mer ; seule La Réunion dispose de taux de pratique sportive supérieurs à la moyenne hexagonale.

* 28 Réponse au questionnaire des rapporteures.

* 29 Audition de l'Association nationale des élus en charge du sport (ANDES) du mardi 22 mai 2018.

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