C. DES MESURES INSUFFISANTES POUR ENDIGUER LE PHÉNOMÈNE

C'est à compter des années 2010 que des mesures ont été prises, en France, pour renforcer la responsabilité des exploitants en matière de prévention (établissement de plans de gestion des pénuries - PGP), de déclaration (les exploitants de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur - MITM - doivent désormais déclarer ces événements dès qu'ils en ont connaissance) ou de gestion des pénuries (constitution de stocks de sécurité fixés à deux mois de couverture des besoins pour l'ensemble des MITM).

Des obligations de service public ont par ailleurs été définies pour les grossistes-répartiteurs, les contraignant notamment à disposer d'un large assortiment de médicaments, en quantité suffisante pour satisfaire à tout moment deux semaines de consommation habituelle.

Ces obligations sont toutefois inégalement appliquées et insuffisamment contrôlées : les PGP transmis à l' Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) sont de qualité très inégale ; les stocks ne sont pas véritablement contrôlés par l'ANSM. Les moyens dont dispose l'Agence apparaissent très insuffisants pour lui permettre de traiter les données dont elle dispose et identifier les risques d'approvisionnement qu'elles révèlent.

Le PGP du Sabril, antiépileptique vital et fréquemment en tension, ne comporte aucune analyse des risques de rupture.

Les pouvoirs de sanction confiés à l'ANSM sont trop peu utilisés : l'Agence n'a pris que huit décisions de sanctions financières entre 2018 et 2022, pour un montant total de 922 000 euros. Aucune n'a été prise pour le motif d'une violation des obligations d'élaboration d'un PGP ou de constitution d'un stock de sécurité.

La feuille de route 2019-2022, mise en place par Agnès Buzyn, n'a pas davantage permis de remédier aux phénomènes de pénurie. Les objectifs qu'elle portait n'ont en majorité pas été atteints : les pénuries d'antibiotiques demeurent fréquentes et l'information des médecins demeure très insuffisante.

Mesures prises par l'ANSM en cas de rupture ou risque de rupture avérés (2021-2022)

Source : Commission d'enquête, d'après les données ANSM 2021 et 2022

De manière générale, l'action de l'ANSM apparaît largement tournée vers la détection et la gestion des ruptures, et trop peu vers la prévention.

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