D. UNE GESTION DES CRÉDITS ENFIN OPTIMALE
1. Une consommation des crédits qui répond enfin à la prévision budgétaire
Alors que la loi de finances initiale pour 2021 prévoyait une dotation de 59 millions d'euros en faveur du pass Culture, 93,55 millions d'euros (AE=CP) ont finalement été consommés. Cette sur-exécution rompt avec la sous-consommation des crédits constatée au cours des précédents exercices. Elle avait été permise par l'ouverture de crédits en collectif de fin de gestion (27 millions d'euros) et le dégel de la réserve de précaution (14 millions d'euros). L'exercice 2022 a confirmé cette tendance avec une consommation intégrale des crédits votés en loi de finances initiale.
Crédits prévus et consommés
au titre du volet individuel
du pass Culture depuis 2019
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
En 2019, seuls 11,91 millions d'euros en CP avaient été consommés, principalement en vue de financer des dépenses de fonctionnement alors que la loi de finances initiale prévoyait une dotation de 28,77 millions d'euros (AE=CP) pour le financement de ce dispositif. L'exercice 2020 avait exacerbé cette tendance à la sous-exécution, la crise sanitaire ayant limité l'offre et conduit au report de l'extension du dispositif. Ainsi sur les 49 millions d'euros prévus en loi de finances initiale, 10 millions d'euros avaient été redéployés et seuls 24,71 millions d'euros ont été effectivement consommés, dont 12,4 millions d'euros dédiés aux frais de gestion.
2. Des coûts de gestion estimés à 29,2 millions d'euros en 2023
Les frais de fonctionnement de la SAS Pass Culture sont estimés à 29,2 millions d'euros en 2023. Ils représentent 11,2 % des dotations versées à la structure.
Répartition de la dotation versée à la SAS Pass Culture
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
Les dépenses de personnel ont atteint 7,77 millions d'euros en 2022, soit une progression de 58,8 % par rapport à 2021. L'élargissement du pass peut justifier pour partie une telle croissance.
Évolution des dépenses de personnel de la SAS Pass Culture depuis 2019
(en euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture
La progression des recrutements se justifie également par une volonté d'internaliser progressivement les compétences, garantissant ainsi stabilité et continuité des équipes pour le développement de l'application, dans un marché professionnel tendu.
Répartition des postes au sein de la SAS Pass Culture depuis 2019
Source : commission des finances, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture
Ce développement interne conduit mécaniquement à une diminution des dépenses d'investissement technologique, estimées à 7,5 millions d'euros en 2022. Celles-ci représentaient ainsi 28,7 % du budget 2022 de la SAS contre 62,3 % du budget 2020.
Répartition du budget annuel de la SAS Pass Culture depuis 2019
(en euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture
La montée en charge des dépenses de fonctionnement est également justifiée par la progression des dépenses de communication. La communication externe a ainsi représenté 7,7 % du budget 2022 de la SAS Pass Culture.
Dépenses de communication de la SAS Pass Culture
(en euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture
Une partie de la fonction avait initialement été externalisée. La direction de la communication a repris, à partir de septembre 2021, certaines activités - rédaction des éléments de langage, relations institutionnelles, relations presse, réseaux sociaux - et s'est enrichie d'une composante marketing plus étoffée.
Les rapporteurs spéciaux estiment que la montée en charge de ce poste budgétaire va dans le bon sens tant elle concourt à faire mieux connaître le dispositif tant du point de vue des jeunes que des offreurs. 93 % des jeunes disent ainsi connaître le pass, selon une enquête CSA menée auprès des 15-19 ans, un tiers des jeunes interrogés citant le dispositif comme un élément de la politique du ministère de la culture en faveur des jeunes.
Les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur l'absence de données afférentes à la SAS au sein des documents budgétaires annexés au projet de loi de finances. Malgré son poids financier, la SAS ne figure pas dans la liste des opérateurs de l'État. Il apparait pourtant indispensable afin d'évaluer la conduite de cet important volet de la politique culturelle que de telles informations soient à la disposition du Parlement.
Recommandation n° 1 (ministère de la culture) : Aux fins de bonne information du Parlement au moment du vote des projets de lois de finances et des projets de lois de règlement, intégrer la SAS Pass Culture dans la liste des opérateurs du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture » et présenter au sein du projet annuel de performances et du rapport annuel de performances une analyse de ses activités et de ses résultats, les financements apportés par l'État, son compte financier et les emplois qu'elle rémunère.
3. Un financement complété par celui des offreurs
Au financement de l'État s'ajoute celui des offreurs, via les conditions de remboursement des offres physiques (barème spécifique ou dégressif selon les offres). Les offres numériques (plateformes notamment) sont décomptées de l'enveloppe de 300 euros, mais ne sont pas remboursées par la SAS Pass Culture aux offreurs. Ces réservations, sont, par ailleurs plafonnées à 100 euros.
L'arrêté du 20 mai 2021 portant application du décret n° 2021-628 du 20 mai 2021 relatif au « pass Culture » prévoit la mise en place d'un barème de remboursement des offreurs. Il succède à un premier barème jugé insuffisament incitatif.
Barème de remboursement des offreurs
Chiffre d'affaires annuel de l'offreur sur le pass Culture |
Taux de remboursement en vigueur depuis le 1er septembre 2021 |
Taux de remboursement en vigueur avant le 1er septembre 2021 |
Jusqu'à 20 000 euros |
100 % |
100 % |
Entre 20 000 et 40 000 euros |
95 % |
95 % |
Entre 40 000 et 150 000 euros |
92 % |
90 % |
Au-delà de 150 000 euros |
90 % |
75 % |
Source : commission des finances du Sénat
Des barèmes dérogatoires ont été instaurés avec certains offreurs culturels, à l'image du cinéma ou du spectacle vivant. Les offreurs peuvent ainsi choisir entre le barème commun ou :
- pour le cinéma, un taux de remboursement fixe de 90 % pour les offres de cartes d'abonnement multiplaces, un taux de remboursement fixe de 95 % pour les séances à l'unité et taux de remboursement fixe de 82,5 % pour les cartes d'abonnement illimité ;
- pour le spectacle vivant, un taux de remboursement fixe de 95 % dès la première place vendue.
Le taux de non-remboursement appliqué au secteur du livre est, de son côté, plafonné à 5 %, afin de respecter le prix unique du livre.
Au 31 décembre 2022, la contribution des acteurs depuis le lancement du dispositif s'élève à 23,62 millions d'euros, soit 7,5 % des montants dépensés par les jeunes.
Montant de la contribution des offreurs depuis le lancement du pass
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture
La baisse de la part de la contribution des offreurs est justifiée par :
- le caractère dégressif du barème de contribution. Celui-ci dépendant du chiffre d'affaires de l'offreur sur la pass, il était mécaniquement appelé à diminuer avec la généralisation du dispositif ;
- le moindre recours aux offres numériques non remboursées et un plus grand accès aux lieux culturels dans un contexte de sortie de crise sanitaire.
L'acquisition de films, de livres et de billets de cinéma constituent les premiers postes de contribution. Les films comme la musique enregistrée sont constitués, en large majorité, d'offres en ligne. Ces offres ne donnent donc pas lieu à un remboursement par la SAS Pass Culture
Contribution des offreurs depuis le lancement du
pass Culture - répartition
par secteur
(en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture