II. VERS UN NOUVEAU MIX ÉNERGÉTIQUE POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

A. L'ÉVALUATION DES RÉSULTATS OBTENUS PAR LES MESURES D'ACCOMPAGNEMENT DES COLLECTIVITÉS

M. Bernard Delcros. - Madame la Directrice, vous avez évoqué les dispositifs qui ont été mis en place dans la loi de finances pour protéger les collectivités. Nous avons prévu un budget de 50 milliards d'euros pour financer ces mesures. Combien de collectivités ont pu en bénéficier ? Quel montant ces aides représentent-elles ?

Vous avez évoqué les CEE, qui sont cependant méconnus et complexes d'accès. Qu'est-il prévu pour les rendre plus accessibles et efficaces ?

Monsieur le Maire, vous avez indiqué que vos dépenses d'énergie avaient augmenté de 10 % du budget, pour 1,6 million d'euros. Je suppose que vous ne prenez en compte que les dépenses directes. En intégrant les effets induits, notamment sur les matières premières, les coûts seraient bien supérieurs. Quelles économies les mesures que vous avez prises pour réduire l'impact de cette augmentation ont-elles permises ? Les 40 % que vous avez évoqués s'entendent-ils en montant ou en consommation ?

Mme Céline Brulin. - Merci pour ces exposés démontrant que chacun déploie des trésors d'ingéniosité dans une situation que vous avez décrite comme conjoncturelle, mais dont vous avez tous souligné qu'elle pourrait devenir structurelle. Ceci suppose de réfléchir à des mesures plus structurelles. Le coût de l'énergie va impacter la capacité des collectivités à investir, par exemple pour réduire les dépenses énergétiques de leurs bâtiments. Une mission du Sénat porte actuellement sur le bâti scolaire, dont la rénovation représente 40 à 50 milliards d'euros d'investissements. Nous avons également vu qu'un nombre conséquent d'industries avait suspendu leurs activités. Je souhaiterais donc vous entendre sur les tarifs réglementés sur le marché européen de l'électricité et sur l'ARENH, puisque certains opérateurs alternatifs ont fait de la spéculation en matière énergétique.

Mme Nelly Recrosio. - Je ne dispose pas du nombre de collectivités. Nous avons environ 400 000 clients qui ont renvoyé une attestation conforme. S'agissant des marchés publics, nous les apprécions dans leur ensemble. Ils regroupent les collectivités, les bailleurs sociaux, etc. J'estime que ceux qui ont bénéficié des aides représentent moins de 10 % de ce volume.

Parmi les aides déployées, le suramortisseur, qui concerne les TPE et assimilés (moins de 10 salariés, moins de 2 millions d'euros de chiffre d'affaires), consiste à plafonner le prix à 230 euros par mégawattheure hors acheminement, toute l'année.

S'agissant de la situation, nous ne connaîtrons probablement pas avant longtemps des prix de marché tels que nous les avons connus il y a quelques années. En 2016, ils se limitaient à 25 euros par mégawattheure. Les prix restent élevés, mais sont nettement inférieurs à ceux du second semestre 2022, où le prix s'élevait à 1 000 euros par mégawattheure fin août. Aujourd'hui, en forward 2024, nous sommes autour de 150 euros par mégawattheure. Pour faire face à cette situation, au-delà des mesures qui seront prises dans le cadre du market design, nous pouvons, en tant que fournisseurs, nous saisir du sujet de l'efficacité énergétique. Tout kilowattheure non consommé est gratuit. Nous avons une offre de pilotage intelligent du bâtiment, qui est adaptée aux collectivités territoriales et permet de gérer automatiquement, avec une interface digitale, le confort et la température. Nous avons observé, sur les clients qui l'utilisent, qu'ils enregistraient en moyenne 15 % d'économie d'énergie. S'agissant des industriels, en comparaison des concurrents européens, nous sommes beaucoup moins chers en France.

En ce qui concerne le tarif réglementé de vente, les décisions prises doivent être conformes aux règles européennes. Nous considérons que les consommateurs éligibles au tarif réglementé de vente sont ceux qui ont moins de 10 salariés, 2 millions d'euros de chiffre d'affaires et de budget et une puissance souscrite inférieure à 36 kVA. Nous avons eu environ 20 000 sites, dont 10 % provenant d'autres fournisseurs et 90 % déjà chez nous en offre de marché. Étendre l'éligibilité de ces acteurs aux puissances souscrites supérieures à 36 kVA nous paraît possible, car conforme au droit européen. En effet, ce chiffre de 36 kVA correspond à une spécificité française. Au-delà de ces conditions, nous identifions une incohérence avec le droit européen.

M. Stéphane Leyenberger. - L'économie que j'ai annoncée s'entend en volume. Nous attendons, sur l'augmentation de 1,6 million d'euros, 30 % d'économies financières. L'augmentation mécanique de la fiscalité, du fait de l'augmentation des bases, y sera quasi exclusivement consacrée. Nous comptons sur l'amortisseur de l'État. Une collectivité comme la nôtre ne peut en outre bénéficier du bouclier tarifaire, car nous avons des puissances beaucoup trop importantes.

Toutes ces mesures conjoncturelles ont par ailleurs des limites. Il nous faut diversifier notre mix énergétique. Nous avons ainsi lancé, à Saverne, une délégation de service public (DSP) pour un grand réseau de chaleur, avant même la crise énergétique. Nous attribuerons ce marché d'ici quelques semaines. 40 % de nos bâtiments devraient être raccordés à ce réseau de chaleur. Les mesures d'isolation des bâtiments représentent quant à elles un coût important. Le passage de l'éclairage public aux LED (Light Emitting Diode, soit diode émettant de la lumière) représente 2 millions d'euros. Sur 90 000 m² de bâtiments, nous avons la chance d'avoir de nombreux bâtiments historiques, qu'il est cependant difficile d'isoler.

Mme Françoise Gatel, présidente. - Une mission du Sénat porte précisément sur la gestion des performances énergétiques et du patrimoine.

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