N° 225

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 décembre 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (1) relatif à l'expérimentation du transfert de la compétence « santé scolaire » aux collectivités volontaires,

Par M. Hervé REYNAUD,

Sénateur

(1) Cette délégation est composée de : M. Bernard Delcros, président ; M. Rémy Pointereau, premier vice-président ; Mme Pascale Gruny, MM. Cédric Vial, Fabien Genet, Mme Corinne Féret, MM. Éric Kerrouche, Didier Rambaud,
Pierre Jean Rochette, Gérard Lahellec, Grégory Blanc, Mme Guylène Pantel, vice-présidents ; MM. Jean Pierre Vogel,
Laurent Burgoa, Mme Sonia de La Provôté, M. Hervé Gillé, secrétaires ; M. Jean-Claude Anglars, Mmes Nadine Bellurot,
Catherine Belrhiti, MM. François Bonhomme, Max Brisson, Mme Céline Brulin, MM. Bernard Buis, Cédric Chevalier,
Thierry Cozic, Mme Catherine Di Folco, MM. Jérôme Durain, Daniel Gueret, Joshua Hochart, Patrice Joly, Mmes Muriel Jourda, Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Jacques Lozach, Pascal Martin, Jean-Marie Mizzon, Franck Montaugé, Mme Sylviane Noël, M. Olivier Paccaud, Mme Anne-Sophie Patru, MM. Hervé Reynaud, Jean-Yves Roux, Mmes Patricia Schillinger, Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Lucien Stanzione, Jean-Marie Vanlerenberghe.

SYNTHÈSE

...le rapport d'information

Étude d'options :
une démarche novatrice, des pistes pour réformer la santé scolaire

De M. Hervé Reynaud, Sénateur de la Loire (Groupe Les Républicains).

Améliorer la fabrique des normes imposées aux collectivités : tel était l'objectif du rapport de Françoise Gatel et Rémy Pointereau1(*), publié en janvier 2023 et intitulé « Normes applicables aux collectivités territoriales : face à l'addiction, osons une thérapie de choc ! ».

À la suite de ce rapport, se sont déroulés, le 16 mars 2023, les États généraux de la simplification, clôturés par la signature historique par le Sénat et le Gouvernement d'engagements communs pour la simplification des normes applicables aux collectivités territoriales.

Reprenant l'une des recommandations du rapport sur l'addiction aux normes, cette charte met en avant la nécessité, avant de légiférer, d'évaluer l'intérêt d'une nouvelle norme.

Une telle démarche nécessite, pour être efficace, de développer la culture de l'évaluation, et de faire réaliser cette étude d'options par des experts indépendants et extérieurs au Sénat.

Françoise Gatel, alors présidente de la délégation du Sénat aux collectivités territoriales, avait souhaité en faire une première application sur la proposition de loi qu'elle avait déposée, visant à expérimenter le transfert de la compétence « santé scolaire » aux départements volontaires. Ce texte a été adopté, en première lecture par le Sénat, le 20 mars 2024.

Dans la poursuite de cette démarche vertueuse, et afin de nourrir utilement les prochains travaux parlementaires concernant la proposition de loi précitée, la délégation a fait appel à la société « Ernst & Young », titulaire du marché « Études » du Sénat, afin qu'elle formule une analyse sur le fondement d'entretiens et de données provenant des administrations centrales et déconcentrées.

Cette étude d'options, d'une part, confirme le diagnostic partagé sur l'état préoccupant de la santé scolaire en France, d'autre part, permet de tirer trois importants enseignements en la matière.

Des chiffres alarmants

Ø Chute de plus de 28 % de l'effectif des médecins scolaires depuis 2013

Ø Taux d'encadrement d'un médecin pour 12 800 élèves et d'un infirmier pour 1 303 élèves

Ø Moins de 20% des élèves ont bénéficié de la visite médicale en classe de sixième


1er enseignement

L'étude d'options démontre que la dégradation du contexte financier a altéré l'enthousiasme des départements. Ces derniers craignent désormais une insuffisante compensation par l'État en cas de transfert de la compétence « santé scolaire ».

Sondages de l'association
des Départements de France

Ø En 2023, la moitié des 40 départements interrogés s'était déclarée prête à un tel
transfert.

Ø En novembre 2024, un seul département était volontaire pour l'expérimentation.

 

1ER ENSEIGNEMENT

Recueillir la position actuelle des départements sur la démarche d'expérimentation, dans le cadre de la poursuite de l'examen de la proposition de loi.

2ème enseignement

L'étude d'options a également permis de faire émerger un nouveau sujet en rappelant que onze communes de grande taille exercent d'ores et déjà des compétences en matière de santé scolaire, sur la base d'une convention avec l'État.

Des villes plus efficaces
que l'Éducation nationale ?

Ø Selon la Cour des comptes, le taux de réalisation de la visite médicale des enfants dans leur 6ème année est beaucoup plus élevé dans les villes délégataires que dans les académies.


Mais ce volontarisme local semble représenter un coût important pour les communes concernées.

Un coût important pour les communes :
les données de l'association France urbaine

Ø Coût de la prise en charge pour ces communes : 40 € par enfant et par an.

Ø Versement d'une subvention moyenne de 9,50 € par l'État aux onze villes.

 

2ÈME ENSEIGNEMENT

Évaluer l'intérêt de confier aux communes la compétence « santé scolaire », en particulier dans le cadre d'une convention de délégation de compétence conclue avec l'État.

3ème enseignement

L'étude d'options conduit à s'interroger sur les améliorations susceptibles de faciliter l'exercice du métier des professionnels du domaine de la santé scolaire : meilleure attractivité des conditions de travail, formations continues adaptées, mise en place d'une plateforme numérique pour centraliser les données et faciliter le suivi des élèves, cumuls d'activités plus étendus pour les médecins scolaires, meilleures rémunérations...

 

3ÈME ENSEIGNEMENT

Améliorer les conditions d'exercice du métier des professionnels de la santé scolaire.

Ces pistes de travail et de réflexion démontrent tout l'intérêt qui s'attache à la démarche novatrice initiée par la délégation : l'étude d'options réalisée confirme ainsi la nécessité d'une meilleure fabrique de la norme applicable aux collectivités territoriales. Ce sujet sera d'ailleurs au coeur des prochaines « Assises de la simplification », organisées au printemps 2025.

Gageons que le présent rapport contribuera à la salutaire prise de conscience de la nécessité de passer de l'addiction aux normes à l'obsession de l'efficacité.

AVANT-PROPOS

« Normes applicables aux collectivités territoriales : face à l'addiction, osons une thérapie de choc ! » : tel est le titre évocateur choisi par nos collègues Françoise Gatel et Rémy Pointereau pour leur rapport, approuvé par notre délégation le 26 janvier 20232(*). Rappelant que la simplification des normes applicables aux collectivités se trouve nettement en tête des priorités des élus, ce rapport entendait améliorer le processus de fabrique des normes imposées aux collectivités territoriales. Il est en effet essentiel d'agir de manière préventive plutôt que de s'épuiser à simplifier a posteriori des normes déjà produites.

La mission proposait ainsi six recommandations afin de corriger les défauts qui affectent actuellement les mécanismes de production des lois et décrets. Il privilégie des solutions simples qui peuvent être mises en oeuvre, pour l'essentiel, à droit constant, c'est-à-dire par simple engagement des acteurs.

Parmi ces solutions figurait la nécessité, avant de légiférer, d'évaluer l'intérêt même d'une nouvelle norme, c'est-à-dire de comparer les mérites de l'intervention d'un texte avec les autres solutions possibles dans le cadre juridique en vigueur. Cette démarche nécessite, pour être efficace :

- d'évaluer précisément les dispositions législatives en vigueur que le texte de loi envisage de modifier ou compléter ; ce point rejoint la nécessité de développer notre culture de l'évaluation, insuffisante en France ;

- de faire réaliser cette étude d'options par des experts indépendants et extérieurs au Parlement.

À la suite de ce rapport sur l' « addiction aux normes », notre délégation a organisé, le 16 mars 2023, les États généraux de la simplification, clôturés par la signature historique, par le Sénat et le Gouvernement, d'engagements communs pour la simplification des normes applicables aux collectivités locales. Cette charte reprenait notamment cette démarche novatrice d'étude d'options.

Françoise Gatel, alors présidente de notre délégation, avait souhaité en faire une première application sur la proposition de loi qu'elle avait déposée, visant à expérimenter le transfert de la compétence « santé scolaire » aux départements volontaires. Ce texte a été adopté, en première lecture par le Sénat, le 20 mars 2024.

Succédant à Françoise Gatel, notre collègue Bernard Delcros, Président de notre délégation, a naturellement souhaité poursuivre cette démarche vertueuse, qui s'inscrit dans la logique de sobriété et d'efficacité normatives que la délégation appelle de ses voeux et qui correspond à la mission qui lui a été confiée par le Président du Sénat en 20143(*).

Afin de nourrir utilement les prochains travaux parlementaires concernant la proposition de loi précitée, il nous appartient, en tant que législateurs, de répondre aux questions suivantes : la réforme votée au Sénat est-elle toujours pertinente aujourd'hui, dans le contexte budgétaire que chacun connaît ? Le département serait-il bien l'échelon local le plus adapté pour exercer cette compétence de santé scolaire ? Combien y a-t-il de départements volontaires aujourd'hui ? Quel serait l'impact, organisationnel, sanitaire, financier et économique de cette réforme sur cette collectivité ? Les communes, EPCI ou régions pourraient-ils également jouer un rôle en matière de santé scolaire ? Enfin, peut-on améliorer à droit constant, c'est-à-dire sans transfert de compétence, la politique de santé scolaire en France ?

C'est pour répondre à l'ensemble de ces interrogations avec un regard indépendant que la délégation a fait appel à l'entreprise attributaire du marché « Études » du Sénat, à savoir la société « Ernst & Young ». Elle a été chargée de formuler son analyse sur le fondement d'entretiens et de données provenant des administrations centrales et déconcentrées.

Cette étude d'options, reproduite en annexe du présent rapport, confirme tout d'abord le diagnostic partagé sur l'état préoccupant de la santé scolaire en France. Quelques chiffres suffisent à démontrer que l'offre de service n'est pas adaptée aux besoins : la chute de plus de 28 % de l'effectif des médecins scolaires depuis 2013, un taux d'encadrement d'un médecin pour 12 800 élèves et d'un infirmier pour 1 303 élèves, taux qui explique que moins de 20 % des élèves ont bénéficié de la visite médicale, pourtant obligatoire, en classe de sixième.

Par ailleurs, plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette étude d'options ainsi que du riche débat qui a suivi sa présentation au sein de notre délégation4(*).

1er enseignement : le contexte financier a changé la donne
concernant l'expérimentation du transfert de la compétence « santé
scolaire
». L'enthousiasme des départements a vécu, ce qui soulève de légitimes interrogations sur la proposition de loi précitée que le Sénat a adoptée en mars 2024, visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires. En effet, selon l'article unique de ce texte, chaque département disposerait d'une année à compter de la promulgation de la loi pour demander l'exercice de cette compétence, par une délibération motivée du conseil départemental. Or, au moment de l'examen du texte par le Sénat, l'association des Départements de France avait indiqué que selon un sondage réalisé en 2023, la moitié des 40 départements interrogés s'était déclarée prête à un tel transfert. Toutefois, à nouveau interrogée dans le cadre de l'étude d'options, l'association a souligné, en novembre 2024, que le contexte financier avait modifié l'avis des départements. En effet, ces derniers redoutent désormais de récupérer une compétence qui serait insuffisamment compensée par l'État. Actuellement, seul le département de la Nièvre serait toujours volontaire pour cette expérimentation5(*). Il paraît donc essentiel de recueillir la position actuelle des départements sur la démarche d'expérimentation, dans le cadre de la poursuite de l'examen de la proposition de loi. Précisons, à cet égard, que selon la Cour des comptes, entre 1 milliard et 1,2 milliard d'euros serait consacré à la santé scolaire chaque année. Cette évaluation peut varier de quelque 600 millions à 700 millions d'euros, si l'on adopte une définition très restrictive de la santé scolaire, à 1,3 milliard d'euros, selon la définition la plus large

1er enseignement : recueillir la position actuelle des départements sur la démarche d'expérimentation, dans le cadre de la poursuite de l'examen de la proposition de loi.

2ème enseignement : l'étude d'options a le mérite de faire émerger dans le débat un sujet qui ne figurait pas dans le texte examiné par le Sénat en mars 20246(*) : en effet, l'étude rappelle que certaines communes de grande taille exercent d'ores et déjà des compétences en matière de santé scolaire, sur la base d'une convention avec l'État. Il s'agit des communes suivantes : Antibes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Lyon, Nantes, Rennes, Grenoble, Paris, Strasbourg, Vénissieux et Villeurbanne. Les services municipaux concernés, en charge de la santé scolaire, ont vu leurs missions s'élargir au fil du temps, même si celles-ci ne s'étendent pas au-delà du premier degré scolaire. Selon la Cour des comptes, le taux de réalisation de la visite médicale des enfants dans leur 6ème année est beaucoup plus élevé dans les villes délégataires que dans les académies.Les villes délégataires semblent donc plus efficaces que l'Éducation nationale. Mais ce volontarisme local semble représenter un coût important pour les communes concernées. Ainsi, les données budgétaires fournies par l'association France urbaine, dans le cadre de l'étude d'options, établissent que le coût de la prise en charge pour ces communes s'élève à près de 40 euros par enfant et par an alors que l'État verse une subvention moyenne de 9,50 euros aux 11 villes gestionnaires du service de santé scolaire.

Cette étude d'options nous conduit donc à formuler certaines
interrogations
:

· Peut-on dresser un bilan précis coût/avantages des actions menées par les 11 communes précitées ?

· Le mécanisme de la délégation, par lequel la commune délégataire agit pour le compte de l'État, est-il préférable à celui d'un transfert de compétence ?

· L'expérimentation proposée par le Sénat devrait-elle être élargie à d'autres communes ?

· Devrait-elle également concerner des EPCI ?

2ème enseignement : évaluer l'intérêt de confier aux communes la compétence « santé scolaire », en particulier dans le cadre d'une convention de délégation de compétence conclue avec l'État.

3ème enseignement enfin : l'étude d'options conduit, à nouveau, à nous interroger sur les voies et moyens propres à faciliter l'exercice du
métier des professionnels qui interviennent dans le domaine de la santé
scolaire. Agir dans ce sens suppose de réfléchir à plusieurs
améliorations : des conditions de travail plus attractives, des formations continues adaptées aux enjeux contemporains telles que la santé mentale, la mise en place d'une plateforme numérique pour centraliser les données de santé des élèves et faciliter leur suivi, l'autorisation de cumuls d'activités plus étendus pour les médecins scolaires, de meilleures rémunérations...

3ème enseignement : améliorer les conditions d'exercice du métier des professionnels de la santé scolaire.

Il ne s'agit, à ce stade, que de pistes de travail et de réflexion mais elles démontrent tout l'intérêt qui s'attache à la démarche novatrice initiée par notre délégation : l'étude d'options réalisée à son initiative confirme ainsi la nécessité d'une meilleure fabrique de la norme applicable aux collectivités territoriales.

Ce sujet sera d'ailleurs au coeur des prochaines « Assises de la simplification », organisés au printemps 2025, en présence des principaux acteurs de la norme. La délégation entend ainsi poursuivre inlassablement son travail de « Sisyphe », sur ce sujet ô combien essentiel pour les élus
locaux. Votre rapporteur en est convaincu : tous les producteurs de textes doivent procéder à un changement de logiciel permettant de passer de l'addiction aux normes à l'obsession de l'efficacité.

Gageons que le présent rapport contribuera à cette salutaire prise de conscience.

EXAMEN EN DÉLÉGATION

Lors de sa réunion du 12 décembre 2024, la délégation aux collectivités territoriales a autorisé la publication du présent rapport.

M. Bernard Delcros, président. - L'idée de mener un exercice inédit d'étude d'options est née du rapport de Françoise Gatel et Rémy Pointereau relatif à la simplification des normes imposées aux collectivités territoriales, publié en janvier 2023. Ce rapport a mis en avant la nécessité, avant de légiférer, d'évaluer l'intérêt même d'une nouvelle norme, c'est-à-dire de comparer les mérites de l'intervention d'un texte avec les autres solutions possibles. Cette approche supposait de développer notre culture de l'évaluation, laquelle ne constitue pas une pratique courante en France.

Françoise Gatel avait engagé une première application de cette démarche novatrice, qui fait appel à des experts indépendants et extérieurs au Parlement, à l'occasion de sa proposition de loi visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires. Ce texte a été adopté, en première lecture par le Sénat, le 20 mars 2024.

J'ai naturellement souhaité poursuivre cette démarche vertueuse, qui s'inscrit dans la logique de sobriété et d'efficacité normatives, à laquelle nous tenons. Celle-ci sera d'ailleurs au coeur des prochaines « Assises de la simplification », qui pourraient se tenir le jeudi 3 avril 2025.

Afin de nourrir utilement les travaux parlementaires à venir sur cette proposition de loi, nous devons répondre à plusieurs questions : la réforme votée au Sénat est-elle toujours pertinente aujourd'hui, dans un contexte budgétaire qui a évolué, particulièrement pour les départements ? Des départements sont-ils d'ailleurs toujours volontaires ? D'autres collectivités pourraient-elles être concernées, car des délégations existent déjà en faveur de communes ? Quelles en seraient enfin les conséquences d'un point de vue normatif, financier et organisationnel ?

L'étude a été confiée au cabinet Ernst & Young (EY) aux termes du marché public passé par le Sénat. Nous l'avons chargé de formuler son analyse sur le fondement d'entretiens et de données provenant des administrations centrales et déconcentrées.

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - J'apporte d'emblée une précision sémantique : il me paraît préférable de parler de « santé scolaire » plutôt que de « médecine scolaire ».

En effet, la médecine scolaire se réfère principalement aux interventions médicales réalisées dans les établissements scolaires. Elle est exercée par des professionnels de santé comme les médecins et infirmiers qui assurent le suivi médical, les bilans de santé, les urgences et les dépistages.

La santé scolaire est un concept plus global puisqu'il comprend non seulement la médecine scolaire, mais aussi toutes les actions destinées à promouvoir le bien-être des élèves et l'amélioration de leurs conditions de vie en milieu scolaire. Elle paraît plus adaptée à notre approche de sobriété et d'efficacité normatives, en ce qu'elle est susceptible d'inclure, en étant moins restrictive, d'autres évolutions à venir dans le domaine de la santé de l'enfant en milieu scolaire.

J'étais intervenu en séance publique, en mars dernier, lors de la discussion générale sur la proposition de loi de Françoise Gatel. J'avais présenté un double constat, ainsi que plusieurs défis à relever pour mener à bien le transfert de la compétence aux départements volontaires - j'insiste sur cet adjectif.

Tout d'abord, près de quatre-vingts ans après l'institution d'un service national d'hygiène scolaire sous la responsabilité du ministère de l'Éducation nationale, force est de constater que la politique de santé scolaire est
défaillante. Les nombreux rapports et études parlementaires produits parviennent tous aux mêmes conclusions : en matière de santé scolaire, l'offre de service n'est pas adaptée aux besoins.

Quelques éléments chiffrés l'illustrent : la chute de plus de 28 % de l'effectif des médecins scolaires depuis 2013, un taux d'encadrement d'un médecin pour 12 800 élèves et d'un infirmier pour 1 303 élèves. Ce taux explique que moins de 20 % des élèves ont bénéficié de la visite médicale, pourtant obligatoire, en classe de sixième. En parallèle, les troubles dépressifs ont été multipliés par deux chez les adolescents, les tentatives de suicide ont augmenté de 63 % chez les 10-14 ans et de 42 % chez les 15-19 ans. S'y ajoute le recensement de plus de 700 000 cas de harcèlement scolaire.

Un second constat, tout aussi indiscutable : si l'on raisonne sous l'angle des blocs de compétence, le transfert de la compétence « santé scolaire » aux départements apparaît cohérent, car les services de santé de l'enfant réunissant les moyens et missions de la protection maternelle et infantile (PMI) leur sont déjà confiés. Cela permettrait une plus grande continuité de l'action, quant au volet de prévention notamment, et une meilleure réussite scolaire des enfants.  L'intérêt prophylactique de l'enfant est donc bien au coeur de notre approche.

J'en viens aux principaux défis.

Premièrement, le transfert d'un secteur sous-doté inquiète les départements, la plupart d'entre eux rencontrant déjà des difficultés financières et fonctionnelles, dans le contexte très dégradé de nos finances publiques. À cet égard, l'association des départements de France (DF) a adopté, le 16 octobre 2024, une résolution visant à nous alerter sur la situation des départements. Il est à craindre que ceux-ci soient désormais moins enclins à expérimenter un tel transfert de compétence qu'ils ne l'étaient en mars dernier.

Deuxièmement, la question de la continuité de la santé scolaire au lycée se pose, à un moment où de plus en plus d'élèves de tout âge connaissent des difficultés psychologiques et mentales, ainsi que la question du suivi et de l'accompagnement des enfants porteurs d'un handicap.

Enfin, troisièmement, ce transfert nécessiterait probablement l'intégration dans la fonction publique territoriale d'agents relevant actuellement de l'Éducation nationale.

Nous sommes impatients de savoir si ces constats et défis sont partagés par le cabinet EY et quelles solutions il préconise dans le cadre de l'étude d'options que la délégation lui a confiée.

Mme Jessica Chamba, associée secteur public santé-social du cabinet EY France. - Merci de nous avoir mandatés sur ce sujet. L'équipe de consultants qui est intervenue travaille régulièrement dans le champ social, médico-social et sanitaire, et connaît bien les problématiques de santé dans les territoires.

Nous vous présenterons brièvement la méthode que nous avons retenue ainsi que quelques éléments complémentaires de contexte, avant de vous exposer les options ou scénarios que nous avons étudiés et les perspectives qui s'ouvrent quant à l'évolution de la compétence « santé scolaire ».

Sur la méthodologie, nous avons rapidement considéré que le périmètre de l'étude devait être celui, global, de la « santé scolaire » et non celui, plus spécifique, de la « médecine scolaire ». L'ensemble des acteurs que nous avons rencontré nous a confortés dans cette opinion. En dépit d'un travail assez ramassé dans le temps, nous avons rencontré une quinzaine de personnes pendant quatre à cinq semaines. Ces personnes représentent les différents niveaux de collectivités territoriales, l'Éducation nationale et les divers syndicats professionnels concernés. De plus, nous avons pris connaissance d'un grand nombre de rapports et de données en vue d'objectiver notre analyse.

Mme Airelle Genty, consultante senior secteur public santé-social du cabinet EY France. - L'analyse de l'état des lieux de la santé scolaire nous conduit à dresser trois constats.

En premier lieu, nous relevons le faible niveau de mise en oeuvre des missions relatives à la santé scolaire, en dépit des efforts financiers réalisés pour tenter de recruter des professionnels, notamment des médecins scolaires. Pour ces derniers, le taux de postes vacants atteignait 45 % en 2022.

En deuxième lieu, nous notons un manque de visibilité sur les activités des services de santé scolaire et des difficultés en matière de pilotage. Les rapports disponibles mettent en lumière l'absence de cadre budgétaire unifié, ce qui altère la lisibilité des crédits affectés à ces services, une gestion en silo des ressources humaines ainsi que le manque de système d'information centralisé, ce qui nuit au partage des informations et au suivi des élèves.

Enfin, il apparaît nécessaire de clarifier et de moderniser le cadre d'exercice de la santé scolaire. Le cadre centralisé actuel empêche l'adaptation rapide des services aux besoins spécifiques de chaque territoire. Les textes juridiques et les métiers existants sont en outre inadaptés aux besoins contemporains, en ce qu'ils ne répondent plus à des défis sanitaires tels que l'augmentation des troubles psychiques.

M. Skander Ben Abderahmen, manager secteur public du cabinet EY France. - Nous avons étudié plusieurs options ou scénarios d'évolution de la compétence « santé scolaire ».

Au niveau national, nous nous sommes intéressés à l'hypothèse du maintien, moyennant des changements d'organisation, de la compétence au sein du ministère de l'Éducation nationale, et à celle de son transfert au ministère de la Santé. Un tel maintien de la compétence à un niveau ministériel permet d'assurer une bonne couverture territoriale. Néanmoins, l'inconvénient demeure celui d'un certain éloignement par rapport aux territoires et de la complexité à obtenir que l'ensemble des acteurs travaillent de concert. La question de la fluidité et de la lisibilité budgétaire reste également posée.

À un niveau décentralisé, nous avons considéré la possibilité d'un transfert aux communes, aux métropoles via les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), aux associations, aux départements et aux régions. Nous avons finalement écarté ces dernières du fait de leur propre éloignement du sujet.

Mme Jessica Chamba. - Les représentants de l'association Régions de France ont eux-mêmes reconnu se sentir peu concernés.

M. Skander Ben Abderahmen. - Les autres acteurs du niveau décentralisé présentent des avantages et des limites en commun. Au titre des avantages, citons leur proximité, leur excellente connaissance des territoires, de leurs populations et de l'écosystème pouvant être mobilisée en matière de santé scolaire. En ce qui concerne les limites, l'aspect financier est revenu de manière insistante. Des communes, qui bénéficient par exemple déjà d'une délégation pour le volet santé scolaire, mettent en exergue la différence marquée qui existe entre son coût et la subvention qu'elles obtiennent du ministère de l'Éducation nationale pour sa prise en charge. Ce coût avoisinerait 40 euros, contre une subvention moyenne de l'État de 9,50 euros par élève et par an.

Le département apparaît comme l'échelon le plus pertinent. Il réunit en effet des métiers et des compétences techniques qu'il pourrait mobiliser dans le domaine de la santé scolaire. Bien que, au cours de nos entretiens conduits avec l'association DF, des acteurs ont fait part de leur intérêt pour une meilleure harmonisation du parcours de santé de l'enfant pendant toute leur scolarité, avec un accent sur les aspects de prévention, la difficulté demeure celle des ressources financières. L'évolution des derniers mois les conduit à reconnaître que le contexte financier actuel ne leur permet plus d'imaginer ce type de transfert.

Mme Jessica Chamba. - Il y a dix-huit mois, une vingtaine de départements avaient manifesté leur intérêt pour un essai du transfert de la compétence ; cependant, avec un ratio de subvention par rapport au coût de l'ordre de 1 à 4, un seul semble l'envisager encore.

M. Skander Ben Abderahmen. - Dans ces conditions, nous avons néanmoins approfondi deux scénarios et retenu, à côté d'eux, plusieurs recommandations d'ordre organisationnel.

Le premier scénario, constitutif de la commande initiale, est celui d'un transfert de compétence aux départements. D'un point de vue juridique, et s'il suppose des prérequis et des travaux préparatoires, il serait envisageable. Le frein que nous identifions est ainsi non pas juridique, mais financier.

Le second scénario, qui peut prendre différentes formes, substituerait une autre solution à celle d'un transfert de la compétence aux départements. La création de groupements d'intérêt public (GIP) faciliterait la mise en oeuvre de la santé scolaire dans les territoires. Ces groupements permettent à divers acteurs de mettre des ressources en commun et de coordonner leur action à l'échelle d'un territoire. Une autre possibilité, qui consiste à permettre aux agents publics de la santé scolaire, en particulier aux médecins scolaires, de cumuler leur emploi avec une autre activité publique ou privée lucrative, apporterait une réponse à la problématique de la rémunération et de l'attractivité de ces professions, que les syndicats professionnels, notamment, ne manquent pas de souligner. Bien qu'ouverts au recrutement, de nombreux postes restent en effet vacants et n'attirent pas les jeunes praticiens.

Mme Jessica Chamba. - La grille indiciaire des médecins de santé scolaire n'est en l'état pas suffisamment attractive. Regrouper leur fonction avec d'autres, dont celles de médecin de PMI et de médecin de centre municipal de santé, dans un métier de médecin de santé publique de proximité relevant du statut de fonctionnaire permettrait d'envisager une revalorisation indiciaire. Ce serait une piste à creuser.

M. Skander Ben Abderahmen. - La dernière brique envisageable de ce second scénario est celle des conventions de délégation de compétences entre l'État et les départements volontaires. C'est vraisemblablement celle qui devait servir à titre expérimental pour un transfert temporaire de la compétence aux départements.

Mme Jessica Chamba. - J'en viens aux recommandations que nous formulons, étant précisé que l'Éducation nationale nous a indiqué qu'elle mettait en place un grand plan prioritaire de transformations, tant en matière d'organisation que d'outils, afin d'améliorer la mise en oeuvre nationale de la santé scolaire.

Premièrement, nous suggérons de décloisonner les différentes professions qui interviennent dans ce champ, en vue de créer de véritables équipes pluridisciplinaires. Elles pourraient du reste envisager des collaborations avec les équipes de santé présentes dans les territoires, à l'instar de ce qui existe dans le suivi de la scolarité des enfants qui présentent des troubles de l'apprentissage ou des handicaps. Cela ne nécessiterait aucune évolution législative.

Une deuxième recommandation consiste à améliorer la coordination avec les acteurs externes et à réaliser des diagnostics territoriaux partenariaux, tant à l'échelle des départements qu'à celle des EPCI, sans nécessairement créer de nouvelles structures administratives ou organisationnelles. Il s'agirait d'identifier les ressources de proximité disponibles pour traiter de la santé des enfants, aussi bien dans le secteur libéral que dans le secteur public, et de travailler de concert sur les forces et faiblesses d'un territoire. Les problématiques de santé ne sont en effet pas les mêmes d'un territoire à l'autre et elles évoluent dans le temps.

Une autre recommandation renvoie à la définition de protocoles de gestion entre les établissements et les professionnels de santé. Ils permettraient l'intervention d'autres professionnels de santé.

Par ailleurs, nous évoquons la nécessaire évolution des outils numériques permettant le partage des informations, ainsi que du pilotage et de la remontée des données. L'Éducation nationale y travaille.En conclusion, si aucune solution n'est idéale, plusieurs peuvent être envisagées. La piste de travail la plus intéressante était bien celle d'un transfert de la compétence « santé scolaire » aux Conseils départementaux, mais elle se heurte au double constat d'un contexte financier défavorable et de la situation exsangue de la santé scolaire, et en particulier de la médecine scolaire, sachant que les départements peinent déjà à recruter leurs propres médecins de PMI.

Les acteurs territoriaux que nous avons entendus semblent s'accorder sur l'idée de travailler sur des modalités de coopération renforcée à l'échelle territoriale, éventuellement en la structurant juridiquement sous la forme d'un GIP, en mettant en commun des moyens, des ressources et des outils. Ces acteurs sollicitent avant toute chose qu'on leur confie davantage de responsabilités et promettent de s'organiser en conséquence. Si nous considérons que c'est une piste à ne pas négliger, elle présente néanmoins le risque d'inégalités entre les territoires, selon les initiatives qui y seraient prises et les moyens qui y seraient engagés.

M. Bernard Delcros, président. - Nous manquons de visibilité pour ce qui concerne les moyens financiers, qui ne semblent toutefois pas à la hauteur des enjeux au regard des quelque 45 % de postes de médecins scolaires non pourvus. Quel est le montant des crédits actuellement consacrés par l'État, au-delà de la seule médecine scolaire, à la santé scolaire dans son ensemble, sachant que la prévention doit, à mon sens, progressivement être prise en compte dans les établissements ? Et quel montant serait-il nécessaire d'y consacrer pour que cela fonctionne ?

M. Skander Ben Abderahmen. - Selon la Cour des comptes, entre 1 milliard et 1,2 milliard d'euros serait consacré à la santé scolaire chaque
année. Cette évaluation peut varier de quelque 600 millions à 700 millions d'euros, si l'on adopte une définition très restrictive de la santé scolaire, à 1,3 milliard d'euros, selon la définition la plus large. Une des difficultés en la matière a trait à la comptabilisation des traitements des différentes catégories d'agents : par exemple, le traitement des psychologues de l'Éducation nationale ne relève pas du même budget que celui des médecins et des infirmiers scolaires. Cela contribue au flou existant dans ce domaine.

Pour ce qui concerne la dotation des différents pôles, un même constat résulte des divers rapports analysés : certains postes ouverts ne sont pas pourvus. Depuis 2017 ou 2018, les budgets dédiés aux infirmiers scolaires ont évolué sous l'effet de l'augmentation de ces postes et des traitements associés. À l'inverse, la petite revalorisation salariale accordée aux médecins scolaires ne suffit pas à attirer de nouveaux praticiens. Aussi, dans nombre de départements ou de territoires, certains postes ne sont pas pourvus.

Cela pose la question de l'efficience des moyens accordés : il s'agit non pas de consacrer davantage d'argent à l'augmentation du nombre de postes ouverts, mais d'offrir par exemple de meilleures conditions statutaires. En effet, comme l'indiquait Jessica Chamba, selon les représentants des organisations syndicales concernées, les grilles indiciaires des médecins scolaires n'offrent pas de rémunérations suffisamment élevées pour encourager un investissement de long terme de ces professionnels. Ainsi, autoriser l'exercice mixte de la profession de médecin, c'est-à-dire la possibilité de travailler dans plusieurs structures, ce qui permettrait aux médecins d'enrichir leur formation sur le plan clinique et de percevoir une rémunération plus valorisante, serait peut-être une solution.

M. Hervé Gillé. - Que pensez-vous de l'éventuelle inscription des stratégies de coopération dans les contrats locaux de santé (CLS), qui donnerait davantage de sens à la création de réseaux de santé et améliorerait l'information et la communication en la matière ? Cela entrerait en résonance avec d'autres initiatives en quête de sens et peu lisibles.

Compte tenu de la difficulté à recruter des médecins au regard des grilles indiciaires proposées, ma seconde question porte sur le développement d'une stratégie où les infirmiers diplômés d'État (IDE) en pratique avancée, moyennant une formation complémentaire, joueraient un rôle affirmé d'orientation et, ce faisant, amélioreraient la prise en charge des patients et la mise en réseau de leur traitement, et où les médecins seraient davantage considérés comme des référents territoriaux.

M. Bernard Buis. - Dans les établissements scolaires, l'infirmière et l'assistante sociale sont en lien. Très souvent, les assistantes sociales travaillent avec les familles et sont obligées de recourir à l'assistante sociale du secteur pour connaître le suivi des enfants concernés, car celle-ci a généralement déjà reçu ces enfants. Nous perdons alors du temps et de l'efficacité.

Il faudrait donc envisager un transfert de compétences pour ces deux professions, car si elles dépendent de deux entités différentes, nous risquons de perdre ce lien.

Mme Jessica Chamba. - Monsieur Gillé, vous avez raison ; nous avons échangé avec nos interlocuteurs sur les dispositifs déjà en place, mais aussi sur ce qu'il était possible d'organiser dans les territoires. Reste, toutefois, la question de la bonne échelle d'intervention. En effet, lorsque ces initiatives sont portées par les villes qui les ont mises en place, la démarche est pertinente.

Pour obtenir la couverture territoriale la plus importante possible, la réflexion a porté sur l'éventuelle réalisation, par les départements et les préfets représentant l'État dans les territoires, de diagnostics territoriaux coordonnés au niveau départemental et infradépartemental. Cela pourrait aussi correspondre à la somme de plusieurs CLS ou de plusieurs conseils territoriaux de santé (CTS). L'ensemble de nos interlocuteurs a souligné sa volonté de mettre en place une meilleure coordination des acteurs de la santé dans les territoires.

Un point de vigilance doit toutefois être signalé : nombre d'acteurs ont insisté sur la nécessité de ne pas recréer, au travers d'un transfert de compétences, un fonctionnement en silo entre les secteurs de la santé et de l'éducation. Pour les acteurs interrogés, la plus-value de la santé scolaire réside dans sa présence au sein des établissements scolaires, aux côtés des équipes éducatives. Les représentants des départements soulignent que le transfert de cette compétence aux départements compliquerait ce travail avec des collègues dépendant de l'Éducation nationale. L'enjeu est donc de travailler ensemble sur les enjeux de santé dans le cadre de l'Éducation nationale, tout en conservant ses rattachements administratifs respectifs, et de pouvoir entrer dans les établissements scolaires pour être au contact des enfants.

Au sujet des IDE en pratique avancée, un transfert budgétaire a en quelque sorte déjà eu lieu. En effet, les postes de médecins n'étant pas tous pourvus, on recrute davantage d'infirmières, dont le rôle, de fait, dépasse celui qui était initialement le leur. Néanmoins, ce processus n'est actuellement ni encadré ni validé et les médecins et les infirmières fonctionnent en silo.

M. Hervé Gillé. - Les IDE en pratique avancée ne sont pas pris en considération.

Mme Jessica Chamba. - Tout à fait. Il faudrait travailler sur leur statut afin d'étendre leurs compétences, comme cela est déjà le cas dans d'autres secteurs de la santé qui manquent de médecins. L'Éducation nationale réfléchit aux moyens de décloisonner le travail de ces deux professions.

M. Skander Ben Abderahmen. - Nous avions évoqué cette hypothèse avec les représentantes du syndicat des infirmières - j'emploie le féminin car cette profession est majoritairement féminine. À leurs yeux, au regard du rôle des infirmières en milieu scolaire en matière de santé mentale et de santé sexuelle, mais aussi à l'occasion des visites médicales des enfants âgés de six ans et douze ans, cette évolution est envisageable. Reconnaître le savoir-faire de certaines infirmières ayant un parcours en pratique avancée serait une solution pour pallier le manque cruel de médecins dans certains territoires.

Elles attiraient toutefois notre attention sur un point de vigilance : actuellement, rien ne définit leur périmètre d'activité ; en outre, il n'existe aucun diplôme d'infirmier en pratique avancée (IPA) qui reconnaît un savoir-faire dans ce domaine. Pour elles, cette reconnaissance qui les différencierait d'une infirmière « classique » est essentielle.

En ce qui concerne le lien entre les infirmières et les assistantes sociales, ces dernières sont souvent mentionnées dans les entretiens comme étant celles qui orientent les enfants vers les professionnels médicaux - infirmières ou médecins -, car elles entrent d'abord en contact avec eux au travers d'autres sujets.

Pour autant, les assistantes sociales de l'Éducation nationale travaillent de façon très cloisonnée au regard de l'écosystème social départemental. Par exemple, lorsqu'un enfant victime de maltraitance est détecté au sein d'un établissement scolaire, le signalement peut être fait par l'assistante sociale de l'établissement, mais elle n'aura aucune visibilité sur la suite donnée à cette procédure en raison de l'absence de lien avec ses pairs au sein de l'aide sociale à l'enfance (ASE) et de la PMI. Cela souligne la logique de silo à l'oeuvre, entre ce qui se passe à l'intérieur de l'école et à l'extérieur de l'école, qu'il est de plus en plus urgent de supprimer.

Si votre question portait sur le rôle des assistantes sociales en matière d'orientation scolaire, ce volet ne comprend pas de difficultés particulières.

M. Bernard Delcros, président. - S'agissant de la mise en place d'un GIP, pouvez-vous nous en dire davantage ? Quels en seraient les avantages et les inconvénients ? Cela permettrait de régler le problème du fonctionnement en silo, mais créerait une structure nouvelle.

Mme Jessica Chamba. - Le GIP est la structure juridique permettant de mettre en commun des ressources humaines, financières ou matérielles, par exemple informatiques ou numériques. Concrètement, pour un territoire donné, le département et l'Éducation nationale pourraient mettre à la disposition d'un GIP différentes catégories de professionnels ou s'associer pour réaliser des actions de prévention. Des ressources seraient ainsi mises à la disposition de la mission santé scolaire sans modifier la répartition des compétences de chacun. Ce GIP pourrait commander des prestations informatiques, partager des ressources ou des locaux ou organiser la répartition géographique du travail des médecins ou des infirmières sur l'ensemble du territoire concerné.

Juridiquement, cela nous semble une solution intéressante pour mettre en commun les moyens nécessaires à la réalisation de ce service public, mais sa principale limite est l'ajout d'une structure supplémentaire au paysage institutionnel. Un GIP, c'est une convention constitutive et plusieurs instances de suivi. Potentiellement, il s'agirait d'ajouter des GIP au niveau des départements. Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui sont des GIP, ont des avantages et des inconvénients que vous connaissez. En outre, leur mise en place s'est traduite par une reprise en main des départements. Néanmoins, rien n'empêche de faire la même chose au travers de conventions, plus souples, comme des pactes territoriaux.

À mon sens, la principale réserve soulevée par ce type d'organisation a trait au principe d'équité territoriale : les territoires dynamiques se doteront spontanément de telles structures et ceux en difficulté, situés dans une zone grise, en seront dépourvus, ce qui risquerait d'accroître encore les écarts existants.

M. Bernard Delcros, président. - Je vous remercie de ce travail qui alimentera les réflexions du rapporteur Hervé Reynaud.

Mme Jessica Chamba, Mme Airelle Genty et M. Skander Ben Abderahmen quittent la salle de réunion.

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette étude d'options.

Tout d'abord, la pertinence de cette démarche inédite, lancée par Françoise Gatel et poursuivie par Rémy Pointereau, notre Premier vice-président puis par le président Bernard Delcros, est démontrée. À la suite de la publication en janvier 2023 du rapport d'information rédigé par Rémy Pointereau et Françoise Gatel, qui visait la simplification des normes pesant sur les collectivités territoriales et l'amélioration de la fabrique de la loi, il semblait fondamental d'analyser les différentes options en présence avec le maximum d'objectivité possible, en faisant appel à des organismes indépendants ; les études d'impact du Gouvernement peuvent, parfois, apparaître comme des outils d'autojustification, ce que nous souhaitons éviter.

Ensuite, sur le fond, en premier lieu, le contexte financier a changé la donne pour ce qui concerne l'expérimentation du transfert de la compétence « santé scolaire ». L'enthousiasme des départements a vécu - il convient de le souligner -, ce qui soulève de légitimes interrogations sur la proposition de loi visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires que le Sénat a adoptée, en première lecture, le 20 mars 2024. Selon l'article unique de ce texte, chaque département disposerait d'une année, à compter de la promulgation de la loi, pour demander l'exercice de cette compétence, par une délibération motivée du Conseil départemental.

Or, lors de l'examen du texte par le Sénat, l'association Départements de France avait indiqué que, selon un sondage réalisé en 2023, la moitié des quarante départements interrogés s'était déclarée prête à un tel transfert. Toutefois, en novembre 2024, de nouveau interrogée par le cabinet EY à la demande de notre délégation, l'association soulignait que le contexte financier avait modifié l'avis des départements : désormais, ces derniers redoutent de récupérer une compétence qui serait insuffisamment compensée financièrement par
l'État. Chacun se souvient des restes à charge résultant de transferts de compétences antérieurs : ce fut le cas du revenu de solidarité active (RSA), de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou de la prestation de compensation du handicap (PCH).

Seul le département de la Nièvre serait toujours volontaire pour cette expérimentation. Il paraît donc essentiel de recueillir la position actuelle des départements sur le sujet, dans le cadre de la poursuite de l'examen de la proposition de loi.

En deuxième lieu, l'étude d'options a le mérite de faire émerger un sujet qui ne figurait pas dans la proposition de loi précitée : en effet, l'étude rappelle que certaines communes de grande taille, comptant au moins de 50 000 habitants, exercent d'ores et déjà des compétences en matière de santé scolaire, le plus souvent sur la base d'une convention signée avec l'État. Il s'agit d'une résurgence de la loi de décentralisation de 1983. Étant quelque peu départementaliste, j'avais occulté ce point qui avait été identifié par la Cour des comptes et mentionné dans son rapport, « Les médecins et les personnels de santé scolaire », publié en avril 2020. Les services municipaux concernés, chargés de la santé scolaire, ont vu leurs missions s'élargir au fil du temps, même si celles-ci ne s'étendent pas au-delà des établissements du premier degré. Selon la Cour des comptes, le taux de réalisation de la visite médicale des enfants dans leur sixième année est bien plus élevé dans les villes délégataires que dans les académies : « en 2018-2019, alors que les médecins de l'Éducation nationale ont examiné 18 % des enfants, ce taux est quatre fois plus élevé dans les villes délégataires puisqu'il s'établit à 72,8 % ».

Les villes délégataires semblent donc plus efficaces que l'Éducation nationale en la matière. Mais ce volontarisme local représente un coût important pour les communes concernées. Les données budgétaires fournies par l'association France urbaine dans le cadre de l'étude d'options établissent que le coût de la prise en charge s'élève, pour ces communes, à près de 40 euros par enfant et par an, alors que l'État verse une subvention moyenne de 9,50 euros aux onze villes gestionnaires du service de médecine scolaire. À titre d'exemple, la ville de Lyon dépense chaque année 4 millions d'euros pour un service de santé scolaire, mais ne reçoit que 1 million d'euros de subventions de la part de l'État. On peut se demander comment la ville peut poursuivre une telle mission au regard de son impact budgétaire.

En troisième lieu, l'étude d'options conduit, de nouveau, à nous interroger sur les voies et moyens de nature à faciliter l'exercice de leur métier pour les professionnels qui interviennent dans le domaine de la santé
scolaire. Agir dans ce sens suppose de réfléchir à plusieurs améliorations : rendre les conditions de travail plus attractives - parler de santé scolaire plutôt que de médecine scolaire permettrait d'y parvenir tout en élargissant le champ concerné par ces missions -, proposer des formations continues adaptées aux enjeux contemporains tels que la santé mentale, mettre en place une plateforme numérique pour centraliser les données de santé des élèves et faciliter le suivi, autoriser des cumuls d'activités plus étendus pour les médecins scolaires, ou encore offrir de meilleures rémunérations comme cela a été évoqué.

Ce ne sont, à ce stade, que des pistes de travail et de réflexion, mais elles démontrent tout l'intérêt qui s'attache à la démarche novatrice lancée par notre délégation.

M. Bernard Delcros, président. - Je remercie le rapporteur de cette analyse.

Mme Sonia de La Provôté. - Combien de communes ont pris cette compétence ?

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - Onze.

Mme Sonia de La Provôté. - Lyon est une métropole, qui cumule les compétences communales et départementales. Quels sont les résultats pour les communes de plus petite taille ?

Parmi les propositions du rapport figure la création de GIP. Dans les contrats de réussite éducative, un GIP était souvent mis en place pour le suivi individuel des jeunes. Il permettait des échanges d'informations sur les enfants - tout en respectant le secret des entrevues - entre les médecins et l'accompagnement social, puisque de nombreux sujets relevaient à la fois de la santé et du social. C'est une structure lourde, mais qui offre un cadre particulièrement sécurisé pour le suivi. À Caen, nous avons ainsi pu suivre attentivement un certain nombre de jeunes tout en évitant de qualifier de handicaps des problèmes qui n'en relevaient pas et, par conséquent, d'encombrer ensuite les MDPH.

Les objectifs de la visite obligatoire réalisée entre la fin de la grande section de maternelle et le début du CP sont différents de celle qui est réalisée plus tardivement. La première est souvent réalisée par la PMI, car de nombreux départements lui ont attribué cette mission, favorisant ainsi un dépistage précoce des handicaps. Leur bonne prise en charge conditionne un meilleur suivi scolaire et règle de nombreux problèmes - je pense notamment aux handicaps visuels et auditifs. Certains enfants, avec des prises en charge médicales adaptées, peuvent ainsi suivre une scolarité normale. Les départements ont un rôle particulier à jouer dans la santé scolaire. Quelle que soit la méthode choisie, ils doivent être proactifs.

M. Hervé Gillé. - Merci de ces propositions. Ces pratiques sont rendues plus visibles par leur inscription dans les projets d'établissement, notamment pour certains aspects prioritaires comme la lutte contre le harcèlement. Celle-ci repose aussi sur une écoute des médiations. On peut détecter des indices de souffrance via la médecine scolaire.

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - Voilà les onze communes qui ont pris la compétence : Antibes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Lyon, Nantes, Rennes, Grenoble, Paris, Strasbourg, Vénissieux et Villeurbanne.

La notion de projet d'établissement est importante. L'approche en matière de santé scolaire dépasse l'acte médical. Nous manquons aussi de psychologues pour éviter des tentatives de suicide ou le harcèlement scolaire, dont sont victimes 700 000 enfants. Cela montre l'urgence d'agir et l'étendue du champ d'intervention de la santé scolaire.

M. Bernard Delcros, président. - Je vous remercie de ce travail. Actuellement, nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux, et cela risque de ne pas s'arranger à l'avenir.

La délégation adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.

ANNEXE : ETUDE D'OPTIONS SUR LE TRANSFERT DE LA COMPÉTENCE « SANTÉ SCOLAIRE »

Sénat - Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation

Etude d'options sur le transfert de la compétence « santé scolaire »

Rapport final

25 novembre 2024

Sommaire

SYNTHÈSE 3

1. PÉRIMÈTRE ET MISE EN oeUVRE DE LA SANTÉ SCOLAIRE 5

1.1 CONTEXTE ET ENJEUX DE LA SANTÉ SCOLAIRE 5

2.1.1 CADRE ET RÔLE DE LA SANTÉ SCOLAIRE 5

2.1.2 LE PERSONNEL DE LA SANTÉ SCOLAIRE ET LEURS MISSIONS 6

2.1.3 DES DÉFIS MAJEURS POUR LA SANTÉ SCOLAIRE 7

2.2 ETAT DES LIEUX DES DIFFICULTÉS ACTUELLES DE LA SANTÉ SCOLAIRE 8

2.2.1 DES EFFORTS FINANCIERS QUI NE PERMETTENT PAS D'AMÉLIORER L'ATTRACTIVITÉ DES POSTES DU PERSONNELS DE SANTÉ 8

2.2.2 UN MANQUE DE VISIBILITÉ SUR LES ACTIVITÉS DES SERVICES DE SANTÉ SCOLAIRE ET DES DIFFICULTÉS EN MATIÈRE DE PILOTAGE 9

2.2.3 UNE NÉCESSITÉ DE CLARIFIER LE CADRE DE LA SANTÉ SCOLAIRE 10

2. ANALYSE DES OPTIONS D'ÉVOLUTION OU DE TRANSFERT DE COMPÉTENCE DE LA SANTÉ SCOLAIRE 13

2.1 MAINTIEN DE LA COMPÉTENCE AU NIVEAU DE L'ETAT, AVEC DES ÉVOLUTIONS ORGANISATIONNELLES 13

2.1.1 MAINTIEN DE LA COMPÉTENCE AU SEIN DU MINISTÈRE DE L'EDUCATION NATIONALE AVEC DES RÉFORMES 13

2.1.2 RÉORGANISATION SOUS TUTELLE DU MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DE LA PRÉVENTION OU UNE AGENCE DE SANTÉ PUBLIQUE (ARS) 14

2.2 TRANSFERT DE LA COMPÉTENCE AU NIVEAU DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, VERS UN PILOTAGE DÉCENTRALISÉ 16

2.2.1 TRANSFERT VERS LES DÉPARTEMENTS 16

2.2.2 TRANSFERT VERS LES RÉGIONS 17

2.2.3 TRANSFERT VERS LES EPCI - MÉTROPOLES 18

2.1.1 TRANSFERT VERS LES COMMUNES 19

2.1.2 DÉLÉGATION DE CERTAINES ACTIVITÉS PÉRIPHÉRIQUES À LA COMPÉTENCE « SANTÉ SCOLAIRE » À DES ASSOCIATIONS 20

3. ANALYSE JURIDIQUE PRÉLIMINAIRE DE L'HYPOTHÈSE D'UN TRANSFERT DE LA COMPÉTENCE MÉDECINE SCOLAIRE AUX DÉPARTEMENTS ET ÉTUDE D'AUTRES MÉCANISMES JURIDIQUES À DROIT CONSTANT 22

3.1 RAPPEL DES CRITÈRES D'UN TRANSFERT DE COMPÉTENCE VERS LES DÉPARTEMENTS ET PROBLÉMATIQUES JURIDIQUES ASSOCIÉES 22

3.1.1 RAPPEL DU CONTEXTE LÉGISLATIF ACTUEL 22

3.1.2 PROBLÉMATIQUES JURIDIQUES À ADRESSER CONCERNANT UN TRANSFERT DÉFINITIF DE LA COMPÉTENCE MÉDECINE SCOLAIRE AUX DÉPARTEMENTS 23

3.2 MÉCANISMES JURIDIQUES ALTERNATIFS À DROIT CONSTANT SUSCEPTIBLES D'APPORTER DES RÉPONSES PARTIELLES AUX DYSFONCTIONNEMENTS DE LA MÉDECINE SCOLAIRE 25

3.3 RECOMMANDATIONS ORGANISATIONNELLES 27

CONCLUSION 28

ANNEXES 30

SYNTHÈSE

La santé scolaire joue un rôle crucial dans le système éducatif français, en assurant le suivi et la promotion de la santé des élèves. La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 lui a conféré deux missions : favoriser la réussite scolaire et réduire les inégalités de santé. La santé scolaire inclut des actes de prévention, des visites médicales et des dépistages obligatoires, notamment à 6 et 12 ans, mais aussi toutes les actions destinées à promouvoir la santé et le bien-être des élèves.

Depuis 1945, la compétence « santé scolaire » est détenue par l'Etat. Contrairement à d'autres pays où elle est souvent sous la tutelle du ministère de la Santé, elle relève, en France, du ministère de l'Éducation nationale depuis 1991, Cette politique est élaborée en collaboration avec les autorités de santé publique et est régie par le Code de l'éducation et le Code de la santé publique. Les acteurs de la santé scolaire comprennent notamment les médecins, infirmiers, assistants sociaux et psychologues de l'Éducation nationale.

Cependant, la santé scolaire fait face à des défis majeurs, notamment une pénurie de personnel, avec 45% des postes de médecins scolaires vacants en 2022, et une répartition inégale des effectifs sur les territoires. La pandémie de Covid-19 a accentué les difficultés d'accès aux soins tout en mettant en lumière des besoins accrus en matière de prévention et de gestion des épidémies. En parallèle, les troubles psychiques chez les jeunes ont fortement augmenté, avec une progression alarmante des tentatives de suicide : +63 % chez les 10-14 ans et +42 % chez les 15-19 ans en 2022.

Malgré les efforts financiers de l'État, la santé scolaire reste confrontée à une faible attractivité des postes, des conditions de travail dégradées et une gestion à la fois complexe et cloisonnée. La centralisation administrative rigide et les interactions souvent compliquées entre les différents acteurs entravent son efficacité. En outre, le manque de coordination entre les services et l'absence d'un budget unifié compliquent la mise en oeuvre de politiques uniformes. Il est donc essentiel de repenser l'organisation de la santé scolaire.

Face aux nombreuses difficultés endémiques de la santé scolaire, un transfert de compétence pourrait être envisagé à différents échelons pour améliorer le pilotage et assurer une meilleure prise en charge des élèves. Une analyse comparative de ces options a donc été élaborée. Son objectif est d'évaluer et de comparer les différents scénarios d'évolutions organisationnelles et de transferts, dans le but d'identifier la solution la plus adaptée pour atteindre les objectifs suivants : garantir une équité d'accès aux soins pour les enfants, répondre aux nouveaux défis sanitaires et optimiser l'utilisation des ressources.

Le maintien de la compétence au niveau de l'État avec des évolutions organisationnelles peut se réaliser par des réformes au sein du ministère de l'Éducation nationale ou sous la tutelle du ministère de la Santé et des ARS. La première option inclut notamment la modernisation des pratiques et la revalorisation des métiers de la santé scolaire. Cela garantirait un pilotage uniforme et une approche intégrée santé-éducation, mais les ressources limitées et la difficulté à prendre en compte les spécificités locales demeuraient. La seconde option, sous la tutelle du ministère de la Santé et des ARS, améliorerait la coordination des acteurs de la santé publique et la prise en charge des élèves, mais pourrait entraîner une déconnexion avec le système éducatif et des disparités entre les ARS.

Par ailleurs, le transfert de la compétence de la santé scolaire aux collectivités territoriales pourrait s'opérer à plusieurs niveaux : Départements, EPCI/métropoles ou communes. Un transfert aux Départements favoriserait une meilleure continuité de services avec les services Départementaux de protection maternelle et infantile (ci-après « PMI »), tandis qu'un transfert aux EPCI/métropoles offrirait une proximité accrue avec les élèves et une plus grande flexibilité dans la gestion des ressources. Opter pour les communes permettrait d'ajuster les services aux spécificités locales et de stimuler l'innovation. Cependant, ces trois scénarios présentent le risque d'accentuer les inégalités d'accès aux soins en fonction des disparités locales. En parallèle, déléguer certaines activités périphériques à la compétence de santé scolaire à des associations permettrait d'exploiter leur expertise spécifique et renforcer les initiatives de prévention. Néanmoins, cela pourrait également engendrer une fragmentation des services et des difficultés de coordination.

Enfin, des rappels règlementaires de l'hypothèse du transfert de la compétence médecine scolaire aux Départements ont été développés. Il convient tout d'abord de rappeler que la proposition de loi adoptée par le Sénat envisage l'hypothèse d'un transfert expérimental de la compétence médecine scolaire aux seuls Départements volontaires et ce, pour une durée limitée. Cette expérimentation, qui entre dans le champ d'application de l'article 72 alinéa 4 de la Constitution, permettra de déroger à titre temporaire aux dispositions législatives et réglementaires relatives à la médecine scolaire.

Contrairement à un transfert expérimental, un tel transfert définitif de la compétence engendrerait de nombreuses problématiques juridiques. En effet, tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Il conviendra alors de déterminer les modalités de compensations financières accordées aux Départements. En outre, les missions transférées devront être précisément définies afin d'éviter des éventuels chevauchements de compétences entre les différents acteurs territoriaux (services Départementaux de la PMI, services municipaux de santé scolaire). De surcroît, la question du transfert de personnel de l'Etat vers les Départements devra être étudiée plus avant (mise à disposition, droit d'option). Enfin, les biens et les contrats devront également faire l'objet d'un transfert aux Départements pour que ces derniers puissent exercer dans de bonnes conditions cette nouvelle compétence.

Par ailleurs, les mécanismes juridiques à droit constant permettant, dans une moindre mesure, de répondre aux dysfonctionnements actuels rencontrés par l'Etat dans l'exercice de la compétence médecine scolaire, ont été également abordés, mais restent naturellement à approfondir dans le cadre d'une étude plus détaillée intégrant des éléments concrets. Premièrement, la création d'un groupement d'intérêt public (ci-après « GIP ») entre l'Etat et des collectivités territoriales serait une option afin de mettre en commun des différents moyens relatifs à la santé scolaire et ainsi permettre une meilleure allocation des ressources. Deuxièmement, la possibilité pour les agents publics de cumuler plusieurs emplois est un mécanisme prévu par les textes et qui pourrait permettre, sous réserve de respecter les conditions prévues par les textes, de rendre plus attractive la médecine scolaire. De plus, les mécanismes de convention de délégation de compétence, entre l'Etat et les collectivités, prévus par le code général des collectivités territoriales (ci-après « CGCT ») pourraient être davantage utilisés pour expérimenter des transferts de compétence. Enfin, des recommandations organisationnelles pourraient être envisagées pour renforcer la santé scolaire.

1. PÉRIMÈTRE ET MISE EN oeUVRE DE LA SANTÉ SCOLAIRE

1.1 CONTEXTE ET ENJEUX DE LA SANTÉ SCOLAIRE

En France, la santé scolaire s'implante au sein des écoles et établissements scolaires et repose sur un socle de mission diversifiées. Ses enjeux sont notamment accentués par des problématiques sanitaires croissantes et une pénurie de professionnels de santé.

Précision sémantique

La médecine scolaire se réfère principalement aux interventions médicales réalisées dans les établissements scolaires. Elle est exercée par des professionnels de santé comme les médecins et infirmiers qui assurent le suivi médical, les bilans de santé, la gestion des urgences et les dépistages.

Tandis que, la santé scolaire est un concept général qui englobe non seulement la médecine scolaire, mais aussi toutes les actions destinées à promouvoir la santé et le bien-être des élèves. Elle constitue un cadre élargi qui dépasse l'aspect strictement médical, intégrant des initiatives de promotion de la santé, de prévention, de soutien psychologique et d'amélioration des conditions de vie en milieu scolaire.

2.1.1 CADRE ET RÔLE DE LA SANTÉ SCOLAIRE

La santé scolaire joue un rôle fondamental dans le système éducatif, en assurant le suivi et la promotion de la santé des élèves. La loi du 8 juillet 2013 portant sur la refondation de l'école de la République lui a conféré deux missions majeures : favoriser la réussite scolaire des élèves et contribuer à réduire les inégalités en matière de santé.

La santé scolaire se traduit par des actes de prévention et d'information, des visites médicales ainsi que des dépistages obligatoires. Des visites médicales sont en particulier prévues aux âges de 6 ans et de 12 ans et permettent, le cas échéant, de détecter de manière précoce des maladies physiques ou psychiques ou encore des violences intrafamiliales.

En France, la politique de santé scolaire est centralisée depuis 1945 et relève du ministère de l'Éducation nationale depuis 1991, une spécificité soulignée par la Cour des comptes en 2011 comme étant distincte des modèles d'autres pays où la médecine scolaire est souvent sous la tutelle du ministère de la Santé, comme en Espagne, au Portugal ou au Royaume-Uni ou décentralisée comme en Allemagne.

Bien que la politique de santé scolaire relève aujourd'hui de la seule compétence du ministère de l'éducation, l'élaboration et la mise en oeuvre de cette politique ne se font pas de manière isolée vis-à-vis des autorités responsables en matière de santé publique. En effet, la politique de santé scolaire est un volet de la politique de santé de l'enfant, et la qualité de l'articulation d'ensemble est une condition de l'efficience de l'une et de l'autre.

Par conséquent, la santé scolaire est régie par le droit de l'éducation nationale et le droit de la santé publique. Les textes législatifs et réglementaires qui encadrent la santé scolaire incluent le Code de l'éducation, qui définit les missions de promotion de la santé en milieu scolaire, ainsi que le Code de la santé publique, qui précise les modalités de mise en oeuvre des actions de prévention et de suivi médical des élèves. Le champ de la mission de promotion de la santé à l'école, notion désignant la globalité de la politique de santé scolaire, est défini dans le code de l'éducation (art. L. 121-4-1).

2.1.2 LE PERSONNEL DE LA SANTÉ SCOLAIRE ET LEURS MISSIONS

Les acteurs dédiés à la promotion de la santé dans le milieu scolaire comprennent, les médecins de l'éducation nationale, les infirmiers de l'éducation nationale, les assistants de service social (ASS) et les psychologues de l'éducation nationale (psyEN). Les missions incombant aux personnels de santé sont, selon les cas, individuelles ou collectives.7(*)

Les médecins scolaires, institués par le décret du 27 novembre 1991, sont souvent issus de la médecine générale, de la santé publique ou de la pédiatrie. 8(*) Le médecin scolaire est un acteur clé, responsable des bilans de santé réguliers, du dépistage des troubles (comme les problèmes de vue, d'audition ou de développement), et de la mise en place de plans d'accompagnement personnalisé pour les élèves ayant des besoins particuliers. Il réalise notamment la visite médicale obligatoire lors de la 6ème année de l'enfant. De plus, il collabore également avec les équipes éducatives pour adapter l'environnement scolaire aux situations médicales spécifiques et intervient en cas de crise sanitaire. Ils sont affectés dans les directions Départementales des services de l'éducation nationale (DDSEN), et exercent leurs missions sur un secteur géographique comprenant plusieurs écoles, collèges et lycées.

Les infirmiers scolaires, relevant du corps créé par le décret du 9 mai 20129(*), sont souvent le premier contact des élèves pour les soins quotidiens. Ils prennent en charge les petites urgences médicales, fournissent les soins initiaux, suivent les élèves atteints de maladies chroniques et mènent des campagnes de prévention concernant la vaccination, l'hygiène et la nutrition. Ils réalisent notamment le bilan infirmier obligatoire lors de la 12ème année de l'enfant. De plus, ils jouent un rôle éducatif en informant les élèves sur des thèmes importants de santé publique tels que la sexualité ou la consommation de drogues. Ils travaillent principalement dans les écoles publiques et sur des postes multi-niveaux, connus sous le nom de postes « interdegrés ».

Les psychologues de l'Éducation nationale, formés à la suite du décret du 1er février 201710(*), combinent les fonctions des psychologues scolaires et des conseillers d'orientation-psychologues. Ils offrent un soutien psychologique et émotionnel, aident les élèves confrontés à des difficultés d'apprentissage, de harcèlement ou familiales, et collaborent avec les enseignants et les familles pour un accompagnement holistique.

En complément, les assistants sociaux scolaires, rattachés au corps des assistants de service social des administrations de l'État depuis le décret du 10 mai 2017, interviennent sur les problématiques sociales impactant la scolarité. Ils travaillent avec les familles et les institutions pour soutenir les élèves en situation de vulnérabilité, et sont affectés dans les structures académiques, couvrant un ou plusieurs établissements du second degré.

2.1.3 DES DÉFIS MAJEURS POUR LA SANTÉ SCOLAIRE

Les institutions et administrations en charge, comme la doctrine et les sociétés savantes, soulignent de façon constante l'intérêt et l'importance d'une politique précoce de santé.11(*) Bien que des ressources importantes soient allouées annuellement à la santé scolaire, cette dernière n'atteint pas ses objectifs et ne remplit pas pleinement ses missions.

En effet, le ministère de l'Éducation nationale fait face à une pénurie de personnels et notamment de médecins scolaires avec 45% des postes vacants en 202212(*). La répartition des effectifs des médecins scolaires sur le territoire est notamment très hétérogène et laisse certaines zones particulièrement sous-équipées, voire en situation de délaissement, avec plusieurs Départements n'ayant plus aucun médecin scolaire de secteur. Par exemple, au sein de l'académie de Créteil, 79 % des postes ne sont pas pourvus. Ce manque de médecins limite leur capacité à mener à bien toutes leurs missions et diminue la supervision des élèves.

En parallèle, les défis sanitaires contemporains, tels que la pandémie de Covid-19, ont accentué les difficultés d'accès aux soins, révélant des besoins croissants en matière de prévention, de gestion des épidémies, et d'hygiène dans les établissements scolaires. Les résultats de l'Observatoire de la vue en 2024 montrent notamment que les problèmes de vue s'accentuent, 48 % des parents signalent au moins un trouble visuel chez leur enfant, une augmentation de 7 points par rapport à 2023.

De plus, avant la crise sanitaire, des enquêtes indiquaient que 10 à 20 % des jeunes de 15 à 25 ans souffraient de troubles psychiques. Après la pandémie, les premières études sur l'évolution de la santé mentale pendant la pandémie (COVIPRED) ont montré une détérioration significative chez les jeunes.13(*) Les troubles dépressifs, en particulier chez les adolescents, ont doublé en prévalence, tout comme les troubles anxieux, y compris les phobies sociales et scolaires, exacerbés par les périodes alternées de confinement et de déconfinement. En 2022, les tentatives de suicide ont augmenté de 63% pour la tranche d'âge 10-14 ans, et de 42 % pour la tranche d'âge 15-19 ans.14(*) Les professionnels alertent ainsi sur l'augmentation des problématiques de santé mentale et soulignent le caractère massif des difficultés générées au sein même des établissements scolaires par les harcèlements « En France, le nombre d'enfants harcelés chaque année dans leur environnement scolaire est estimé à environ 700 000 ».15(*)

Face à ces enjeux, il apparait impératif de repenser l'organisation de la santé scolaire pour atteindre les objectifs suivants :

· Assurer une équité d'accès aux soins pour les enfants

· Répondre aux nouveaux enjeux sanitaires

· Optimiser l'utilisation des ressources

2.2 ETAT DES LIEUX DES DIFFICULTÉS ACTUELLES DE LA SANTÉ SCOLAIRE

I. Malgré son importance cruciale, la santé scolaire est souvent reléguée à un rôle secondaire et est confrontée à des difficultés endémiques16(*) comme l'ont mis en évidence de multiples rapports.

2.2.1 DES EFFORTS FINANCIERS QUI NE PERMETTENT PAS D'AMÉLIORER L'ATTRACTIVITÉ DES POSTES DU PERSONNELS DE SANTÉ

La sous-performance de la politique de santé scolaire résulte d'un manque de personnels malgré les efforts budgétaire soutenus de l'Etat. Les moyens alloués à cette politique ont été en constante augmentation, avec une progression de 5 % entre 2018 et 2022. En 2018, le budget dédié s'élevait à 1,24 milliard d'euros et a atteint 1,31 milliard d'euros en 202217(*). Toutefois, cette hausse budgétaire n'a pas suffi à combler les difficultés liées au recrutement de personnel.

Avec un plafond des emplois de médecins scolaires fixé à 1 504 équivalents temps plein (ETP) au 1er septembre 2022, seuls 818 ETP étaient occupés au 31 octobre de la même année, représentant une chute de plus de 28 % depuis 2013.18(*) Cette baisse s'accélère principalement en raison du vieillissement des médecins en poste et de la faible attractivité de la fonction, qui minore considérablement les flux de recrutement. La rémunération a notamment un impact conséquent sur le recrutement. Parmi les médecins des trois fonctions publiques, les médecins de l'éducation nationale sont positionnés comme les moins bien rémunérés. L'écart négatif est notamment marqué, pour chaque grade, entre les médecins de l'éducation nationale et les médecins territoriaux. Cet écart est principalement dû aux régimes de primes, bien que les grilles indiciaires soient comparables, à l'exception d'un échelon spécial supplémentaire au dernier grade pour les médecins de la fonction publique territoriale.

Par conséquent, la diminution progressive des effectifs des personnels de santé scolaire, et en particulier des médecins a conduit à des postes non pourvus dans certaines académies, à un taux d'encadrement dégradé, et à une charge de travail de plus en plus importante pour les personnels. En 2022, le taux d'encadrement s'établissait à 12 800 élèves par médecin et 1 303 élèves par infirmier.19(*) Selon la DGESCO, moins de 20 % des élèves ont bénéficié de la visite obligatoire de la sixième année, pourtant nécessaire pour détecter par exemple, de manière précoce, les éventuels troubles de l'apprentissage ou encore des troubles de la vue.

En parallèle, le nombre d'infirmiers avait augmenté de presque 40 % au cours de ces vingt dernières années en raison d'une augmentation du recrutement par contrat. Cependant, le nombre d'infirmiers se stabilise depuis 2019.

En ce qui concerne les psychologues de l'éducation nationale, l'effectif diminue considérablement depuis 2017 (les effectifs PSYEN s'élevaient à 7 566 ETP en 2017 contre 7048 ETP en 2021).20(*) Selon le rapport d'information du Sénat, depuis 2022, tous les postes ouverts aux concours ne sont pas pourvus, en particulier pour les psychologues de la spécialité EDA.21(*) Ces difficultés de recrutement découlent notamment d'un manque d'attractivité des métiers de la santé scolaire, en raison d'une rémunération insuffisante et de conditions de travail dégradées.

2.2.2 UN MANQUE DE VISIBILITÉ SUR LES ACTIVITÉS DES SERVICES DE SANTÉ SCOLAIRE ET DES DIFFICULTÉS EN MATIÈRE DE PILOTAGE

Malgré les efforts du ministère de l'Éducation, l'efficacité du pilotage de la santé scolaire rencontre de nombreuses difficultés notamment en termes de pilotage budgétaire. En effet, les moyens sont dispersés au sein de plusieurs programmes budgétaires, le programme 230 « Vie de l'élève », le programme 214 qui accueille, de façon non explicitée dans les projets annuels de performances, les médecins, infirmiers et assistants de services sociaux conseillers techniques ainsi que les programmes budgétaires 140 et 141 qui financent l'enseignement public du premier et du second degré. L'absence d'unité du cadre budgétaire altère donc la lisibilité et la traçabilité.

Le pilotage est également entravé par le manque de coordination entre les différents services de santé scolaire tant au premier qu'au second degrés. En effet, la gestion des services de la santé scolaire apparait très cloisonnée et présente des disparités notamment dans les dotations entre académies. Face à des missions obligatoires lourdes, la gestion des ressources humaines du personnel, très déconcentrée, est assurée en « silos », plutôt qu'en coopération. Les directives visant à établir des instances locales de coopération entre les professionnels sont appliquées de manière inégale, que ce soit au niveau des rectorats ou de l'administration centrale. Par exemple, la gestion locale des assistants de service social (ASS), PsyEN, infirmiers et médecins scolaires relève de différentes chaînes hiérarchiques et fonctionnelles.22(*) Cette organisation complexe et éclatée a donc des conséquences négatives pour l'unité d'action et de gestion.

Enfin, le manque d'unité d'action se retrouve également dans les systèmes d'information utilisés pour le suivi de la santé des élèves qui sont souvent dépassés et sous-utilisés par les professionnels de santé. Les logiciels utilisés par les infirmières scolaires (Lien) et par les médecins (Esculape) ne permettent pas de partage de l'information. De plus, le manque de coordination entre les différents professionnels sur les outils utilisés peut entraîner une saisie répétée des mêmes informations. Ce qui entraine des difficultés sur le recensement du taux de réalisation des dépistages obligatoires et dégrade la performance du pilotage. Ces difficultés sont notamment accentuées par le contexte de « grève statistique », au cours de laquelle une part significative du personnel de santé scolaire refuse de transmettre des statistiques sur leur activité. Les raisons invoquées par les personnels incluent principalement une charge de travail trop élevée, qui ne leur permet pas de consacrer du temps à la transmission de ces données. En conséquence, l'Éducation nationale ne possède pas les informations requises pour repérer et prioriser les élèves n'ayant pas bénéficié de dépistage. Ainsi, la continuité du parcours de santé n'est pas garantie par les systèmes d'information.

2.2.3 Une nécessité de clarifier le cadre de la santé scolaire

La gestion de la santé scolaire est confrontée à plusieurs problèmes de gouvernance qui limitent son efficacité. Sa rigidité administrative, due à un cadre centralisé, empêche une adaptation rapide des services aux besoins locaux spécifiques. De plus, la complexité des relations entre les différents acteurs, notamment entre l'État, les collectivités locales et les agences régionales de santé (ARS), entraîne un chevauchement des compétences, ce qui freine les initiatives locales visant à améliorer la santé scolaire.

Par ailleurs, l'absence de stratégie à long terme, claire et cohérente, entre ces acteurs aggrave la situation. Par exemple, les académies et Départements appliquent souvent des stratégies d'allocation des ressources qui diffèrent les unes des autres, compliquant la mise en oeuvre de politiques uniformes de prévention et de suivi au niveau national. Cette hétérogénéité rend difficile l'élaboration d'interventions efficaces et cohérentes, pourtant essentielles pour répondre aux enjeux de la santé publique au sein des établissements.

Les différents rôles des acteurs dans le domaine de la santé

Communes

Métropoles / EPCI

Départements

Régions

Associations (loi 1901)

· Compétence spécifique dans le champ sanitaire (11 communes délégataires de diverses missions de santé scolaire relevant de l'Etat23(*))

· Rôle dans la santé publique du fait de leur proximité avec le public

· Mise en oeuvre d'action de prévention et de promotion de la santé

· Pilote ou soutien des CLS

· Compétence établie en matière sociale et médico-sociale via la gestion de la PMI (articles L. 2112-1 et suivants du code de la santé publique)

· Compétences limitées : construction, reconstruction, aménagement, entretien et fonctionnement des lycées (article L. 4221-1-1 du code général des collectivités territoriales)

· Promotion de la santé et bien-être des élèves

Enfin, sur le plan juridique, les textes régissant la santé scolaire notamment le code de l'Education montrent souvent leurs limites : ils sont fréquemment inadaptés, soit en raison de leur obsolescence, soit parce qu'ils ne répondent pas pleinement aux défis actuels. Ces défis incluent des évolutions majeures comme la transformation des structures familiales, l'apparition de nouvelles substances addictives, la hausse de maladies émergentes, et une attention croissante à la santé mentale des jeunes (le suicide représente la deuxième cause de mortalité chez les jeunes de 10 à 25 ans après les accidents de la route24(*)). Un exemple concret de cette inadéquation est le Parcours Éducatif de Santé (PES), introduit par la circulaire n° 2016-008 du 28 janvier 2016, qui n'a fait l'objet d'aucune réforme significative. Depuis sa mise en place, il n'a pas été actualisé pour mieux prendre en compte les nouveaux besoins et les réalités changeantes de l'enfance et de l'adolescence.

Synthèse des difficultés actuelles de la santé scolaire

· Baisse conséquente des médecins scolaires depuis 2013

· Baisse du taux d'encadrement des élèves par les médecins

· Augmentation des inégalités d'accès aux soins entre les Départements

· Manque de coordination entre les différents services

· Manque de données statistiques

· Insuffisance de dispositifs adaptés pour la détection et la prise en charge des troubles de santé mentale chez les élèves.

· Cadre juridique obsolète

Face à ces nombreuses difficultés endémiques, un transfert de compétence de la santé scolaire pourrait être envisagé à travers plusieurs échelons afin d'améliorer le pilotage et d'assurer une prise en charge plus efficace des élèves.

Schéma des différentes options de réorganisation de la santé scolaire

Source : EY

Méthodologie d'analyse comparative des options d'évolutions ou de transfert de compétence

L'analyse comparative vise à évaluer et comparer les différentes options de transfert afin d'identifier la solution la plus appropriée pour atteindre les objectifs fixés :

1. Assurer une équité d'accès aux soins pour les enfants

2. Répondre aux nouveaux enjeux sanitaires

3. Optimiser l'utilisation des ressources

Cette approche comprend la définition des différentes options et l'analyse des forces et faiblesses de chacune. Cette analyse repose sur la grille de critères suivants :

2. ANALYSE DES OPTIONS D'ÉVOLUTION OU DE TRANSFERT DE COMPÉTENCE DE LA SANTÉ SCOLAIRE

2.1 MAINTIEN DE LA COMPÉTENCE AU NIVEAU DE L'ETAT, AVEC DES ÉVOLUTIONS ORGANISATIONNELLES

Le pilotage centralisé de la compétence de la santé scolaire doit permettre d'assurer une cohérence et une uniformité dans les politiques et les pratiques de santé scolaire, garantissant ainsi que tous les élèves bénéficient des mêmes soins.

2.1.1 MAINTIEN DE LA COMPÉTENCE AU SEIN DU MINISTÈRE DE L'EDUCATION NATIONALE AVEC DES RÉFORMES

Le ministère de l'Education nationale joue un rôle central dans la compétence de la santé scolaire, il définit les orientations nationales, il coordonne les actions de prévention et la promotion de la santé et gère les personnels de santé en milieu scolaire. Le rôle du ministère permet de garantir l'équité de traitement des enfants.

· Modalités

Pour maintenir la compétence de la santé scolaire, des réformes sont nécessaires afin de moderniser les pratiques, renforcer les ressources humaines et améliorer la coordination avec les autres acteurs de la santé et de l'éducation, au bénéfice des enfants. Ces réformes s'inscrivent notamment dans la continuité des assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant 2024 et notamment l'objectif numéro 4 : transformer la santé scolaire pour améliorer les politiques de prévention.25(*)

Il apparait nécessaire de revaloriser les métiers des professionnels de santé pour attirer et fidéliser les professionnels de santé. La rémunération des médecins de l'éducation nationale est la plus basse parmi les médecins des trois fonctions publiques26(*). En augmentant les grilles indiciaires, l'importance du rôle des médecins scolaires dans le suivi de la santé des élèves serait reconnue. Cette réforme rendrait le métier plus attractif, incitant davantage de médecins à choisir la médecine scolaire comme carrière.

De plus, la revalorisation passe également par des conditions de travail attractives et des formations continues adaptées aux enjeux contemporains telles que les formations sur les troubles du neurodéveloppement. De plus, l'attractivité des métiers pourrait être améliorée en autorisant les médecins de l'éducation nationale (MENJ), et en fonction des besoins, les infirmiers de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur (INFENES) et les psychologues de l'éducation nationale (PSYEN) à cumuler plus largement leur activité avec une activité hospitalière ou libérale.

Enfin, la mise en place de plateforme numérique pour centraliser les données de santé des élèves faciliterait leur suivi. L'amélioration nécessite ainsi d'assurer l'interopérabilité avec d'autres systèmes d'information et d'optimiser la collecte de données à travers des formulaires numériques.

· Forces et faiblesses

Ces réformes pourraient contribuer à un pilotage plus adapté, uniforme et réactif de la santé scolaire garantissant une équité d'accès aux soins aux élèves. Elles permettraient de conserver une approche intégrée où la santé des élèves est directement liée à leur parcours éducatif. Elles permettraient de préserver une approche intégrée, où la santé des élèves reste étroitement liée à leur parcours éducatif. En outre, elles renforceraient les moyens alloués, tout en permettant de développer de nouvelles offres de services adaptées aux besoins des élèves. Enfin, ces réformes faciliteraient la mise en place d'un outil centralisé pour la gestion des données de santé.

Néanmoins, cette configuration présenterait plusieurs inconvénients car le ministère de l'Éducation nationale dispose de ressources limitées pour financer et organiser les services de santé. Enfin, le pilotage uniforme ne permettrait pas de prendre en compte les spécificités locales.

2.1.2 RÉORGANISATION SOUS TUTELLE DU MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DE LA PRÉVENTION OU UNE AGENCE DE SANTÉ PUBLIQUE (ARS)

Bien que la santé scolaire soit placée sous la tutelle du ministère de l'Éducation nationale, le ministère de la Santé et les Agences Régionales de Sante (ci-après « ARS ») qui sont des établissements publics administratifs de l'Etat placés sous la tutelle du ministère de la Santé, jouent un rôle complémentaire et collaboratif pour assurer la santé des élèves. Le ministère de la Santé définit les politiques de santé publique, qui incluent la prévention, le dépistage et la promotion de la santé chez les jeunes, en partenariat avec le ministère de l'Éducation. En revanche, les ARS ont un rôle plus opérationnel et de terrain pour la médecine scolaire. Leur mission principale est de veiller à la protection et à la promotion de la santé sur l'ensemble du territoire régional, y compris au sein des établissements scolaires.

· Modalités

La réorganisation sous tutelle du ministère de la Santé implique une réorganisation des ressources humaines (personnel, formation statut) mais aussi une modification de ses politiques. Le Parcours Éducatif de Santé instauré en 2016, doit notamment répondre à une approche plus intégrée et mieux adaptée aux réalités sociales et environnementales.

De plus, il impliquerait une redéfinition des rôles et des missions des personnels de santé scolaire. A l'échelle régionale, les Agences Régionales de Santé (ARS) pourraient devenir les acteurs principaux du déploiement de la santé scolaire, en coordonnant les interventions sur le terrain et en veillant à l'adaptation des services aux spécificités locales. De plus, des pôles de santé scolaire pourraient être mis en place pour faciliter la gestion des soins médicaux, de la prévention et du suivi des élèves en collaboration avec les établissements scolaires.

Par ailleurs, « mettre en place un service sanitaire pour la médecine scolaire serait une avancée majeure pour renforcer la prévention et la promotion de la santé chez les jeunes » selon le syndicat national des médecins scolaires et universitaires.27(*) Ce service permettrait d'impliquer des étudiants en santé dans des actions concrètes au sein des établissements scolaires, en sensibilisant les élèves sur des thématiques essentielles comme la nutrition, l'activité physique, la santé mentale, et la prévention des addictions. Ce service a notamment été mis en place à Clermont Ferrand.

Comparaison internationale

En Angleterre, la médecine scolaire est essentiellement pilotée par le National Health Service, en collaboration avec les autorités locales, et repose principalement sur les services d'infirmières scolaires.

· Forces et faiblesses

Une réorganisation des modalités de la santé scolaire pourrait favoriser une meilleure coordination entre les différents acteurs de la santé publique, ainsi qu'une prise en charge plus complète et adaptée des enfants. Cette approche viserait à accroître l'efficacité des interventions en favorisant une intégration renforcée des services de santé et de prévention. Elle permettrait également d'instaurer un outil centralisé dédié à la gestion des données de santé.

Toutefois, un tel changement d'organisation comporte des risques. Il pourrait entraîner une déconnexion avec le système éducatif, notamment en réduisant les liens directs entre les professionnels de santé scolaire et les établissements scolaires, en particulier les enseignants. Cela risquerait de nuire à l'approche globale de l'élève, qui prend en compte à la fois ses besoins éducatifs et sanitaires. De plus, les disparités entre les ARS pourraient s'accentuer, aggravant ainsi les inégalités d'accès aux soins et aux services médicaux pour les élèves, selon les territoires.

Synthèse des forces et faiblesses des options au niveau de l'Etat

Source : Evaluation EY

La numérotation, de 1 à 5, permet d'évaluer dans quelle mesure les options évaluées répondent aux critères fixés. Le chiffre 1 correspond à la valeur ajoutée la plus faible aux regards à la situation existante, tandis que le chiffre 5 représente la valeur ajoutée la plus forte.

2.2 TRANSFERT DE LA COMPÉTENCE AU NIVEAU DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES, VERS UN PILOTAGE DÉCENTRALISÉ

Un pilotage décentralisé de la compétence de la santé scolaire présente de nombreux avantages. Il permet une adaptation plus fine des services de santé aux besoins spécifiques des communautés locales, en tenant compte des particularités démographiques, sociales et économiques. Cependant, ce dernier peut rencontrer des difficultés de ressources allouées.

2.2.1 TRANSFERT VERS LES DÉPARTEMENTS

Les Départements jouent un rôle majeur dans la santé publique auprès des enfants et des jeunes. Ils ont une compétence bien établie en matière sociale et médico-sociale, notamment via la gestion de la protection maternelle et infantile (ci-après « PMI ») 28(*)et de l'aide sociale à l'enfance29(*).

· Modalités

Plusieurs approches pourraient être envisagées pour le transfert de la compétence santé scolaire vers les Départements, un transfert total où l'ensemble des missions de santé scolaire serait directement assumé par les Départements. Cela inclut les bilans de santé, le suivi des enfants en situation de handicap, et les actions de prévention. Ou encore, un modèle de cogestion avec l'Etat, ou ce dernier conserverait des prérogatives sur les missions stratégiques (comme les campagnes nationales de prévention), tandis que les Départements assureraient les missions de terrain.

Le transfert de compétence pourrait s'établir par le biais de la PMI, qui assure déjà un suivi de santé pour les jeunes enfants et les actions de prévention précoce. Intégrer la médecine scolaire à ce service permettrait de créer un parcours de santé continu pour les enfants, du jeune âge jusqu'à l'adolescence. A Lyon, les actions de prévention en milieu scolaire sont menées en lien avec les services de la PMI, ce qui permet une approche intégrée entre la petite enfance et le milieu scolaire.

De plus, les Départements pourraient mutualiser les moyens avec d'autres services de santé et sociaux pour optimiser les interventions dans les écoles. Cela inclut des services de dépistage, de suivi des troubles de l'apprentissage, ou encore des actions de prévention contre les comportements à risque.

Enfin, les Départements, en ayant une vue d'ensemble sur les populations les plus vulnérables, pourraient réaliser une analyse des besoins en santé scolaire afin de prioriser les actions selon les zones (zones rurales, quartiers sensibles, etc.). Cela permettrait également de faciliter la mise en place d'une continuité d'outils numériques pour le suivi des enfants, en utilisant un outil unique et centralisé.

Selon un sondage réalisé en 2023 par Départements de France, sur 40 Départements interrogés, la moitié était prête à un transfert sous condition et l'autre moitié ne pouvait l'envisager. Parmi ces Départements, 8 sur 20 étaient disposés à prendre en charge l'ensemble de la médecine scolaire, y compris les lycées, et 12 étaient favorables à une prise en charge de la santé allant de la PMI jusqu'à la fin de la scolarité au collège.30(*) Cependant, Départements de France a indiqué que le contexte financier actuel avait modifié l'avis des Départements, les rendant globalement défavorables. Un transfert financier est essentiel pour couvrir les coûts actuels ou les surcoûts liés à l'harmonisation des rémunérations des médecins.

Comparaison internationale

En raison du système fédéral allemand, la médecine scolaire relève en partie du niveau fédéral (Bund) mais principalement des ministères de la Santé des Länder. La médecine scolaire est donc décentralisée et pilotée par les 16 Länder, avec une grande variabilité dans l'organisation et les services offerts. Toutefois, ce modèle a révélé ses limites lors de la crise sanitaire, les Départements ayant géré la situation de manière inégale, ce qui a accentué les disparités en matière de traitement sanitaire et scolaire.

· Forces et faiblesses

Le transfert de la compétence de la santé scolaire aux Départements pourrait présenter plusieurs avantages significatifs. En intégrant la santé scolaire avec les services de PMI, les Départements seraient en mesure de répondre plus efficacement aux besoins de santé des enfants et des adolescents de manière équitable. En réalisant un diagnostic des besoins de la population les Départements, la mise en place d'outil numérique centralisé pourrait être facilité. Ce transfert offrirait également une meilleure lisibilité et continuité de l'action, notamment en matière de prévention. En consolidant les efforts de prévention auprès des mineurs, il compléterait les actions déjà menées par les services Départementaux de PMI ainsi que ceux des services de l'aide sociale à l'enfance. En outre, cette réorganisation permettrait de créer des synergies entre les différents acteurs de la santé et de l'éducation au niveau local. Les professionnels de la médecine scolaire pourraient collaborer plus étroitement avec les travailleurs sociaux et les autres intervenants du secteur de l'enfance, favorisant ainsi une approche globale et intégrée de la santé des jeunes.

Cependant, ce transfert présente plusieurs défis, puisque les Départements disposent de ressources différentes, ce qui pourrait aggraver les disparités entre les territoires. Le transfert de la santé scolaire exigerait alors des ressources financières et humaines supplémentaires, notamment en réajustant les primes des médecins scolaires à celle des médecins de PMI. Les Départements devraient alors recevoir des compensations financières adéquates pour assurer un service de qualité. De plus, la pénurie de médecins étant généralisée, leur rattachement au ministère de l'Éducation nationale permet une répartition, bien que perfectible, qui serait encore moins assurée par un transfert aux collectivités. Des mutualisations et un travail en équipe pluridisciplinaire, déjà bien développés au sein des Départements, pourraient permettre de combler en partie la pénurie de la ressource médicale actuelle, mais cela resterait insuffisant au vu des manques à combler.

L'analyse juridique d'un tel transfert fait l'objet d'un développement en partie 3.1.

2.2.2 TRANSFERT VERS LES RÉGIONS

Le rôle des régions dans la santé scolaire est limité. Elles jouent un rôle complémentaire et de soutien sur certains aspects. Les régions peuvent contribuer à la formation des personnels éducatifs et de santé sur des thématiques spécifiques liées à la santé des élèves31(*). Les régions participent également à l'équipement des lycées32(*) en matériel de santé, comme des défibrillateurs ou du matériel pour les infirmeries scolaires, et, dans certains cas, elles financent des postes de personnels de santé dans le cadre de projets spécifiques au sein des lycées.

A cet effet, en raison de leurs compétences restreintes en matière de santé scolaire, les régions ne se considèrent pas concernées par un éventuel transfert.

2.2.3 TRANSFERT VERS LES EPCI - MÉTROPOLES

Les métropoles et les EPCI peuvent avoir un impact sur le domaine sanitaire, en matière de santé publique et de promotion de la santé au sens large. Cela inclut la mise en oeuvre d'actions de prévention et de promotion de la santé, par exemple à travers des campagnes d'information et des actions de sensibilisation. Ils peuvent, par exemple, piloter ou soutenir des Contrats Locaux de Santé (CLS)33(*), signés entre l'Agence Régionale de Santé (ARS) et les collectivités territoriales.34(*) Ces contrats permettent de développer des projets locaux de santé publique, y compris des actions destinées aux enfants et aux jeunes scolarisés.

· Modalités

Le transfert de compétence de la santé scolaire aux EPCI pourrait être envisagée, car ces structures regroupent plusieurs communes et favorisent la mutualisation des ressources. Cela permettrait d'avoir des équipes pluridisciplinaires avec des moyens partagés. A cet effet, les EPCI pourraient gérer les médecins scolaires, les infirmiers et les agents de santé en fonction des besoins des communes membres. Pour que ce transfert soit effectif, il serait nécessaire de redéfinir clairement les rôles et responsabilités de chaque acteur concerné. Ainsi, ce transfert de compétences renforcerait l'échelle locale la gestion des services de santé destinés aux élèves, permettant d'adapter de manière optimale les dispositifs de prévention, de dépistage et d'accompagnement aux besoins spécifiques de chaque territoire.

· Forces et faiblesses

Le transfert de la santé scolaire aux EPCI et métropoles permettrait une proximité avec les élèves. La gestion locale faciliterait également une réponse rapide aux urgences sanitaires dans les écoles. Les communes peuvent mobiliser des partenaires locaux pour des actions de santé. Cela permettrait une plus grande flexibilité dans l'allocation des ressources, selon les priorités locales pour assurer l'équité d'accès aux soins et l'adéquation de l'offre de soins et les besoins de la population locale.

Cependant, ce transfert pourrait représenter des défis et limites puisque les capacités des EPCI et métropoles varient fortement. Les EPCI avec des ressources limitées pourraient ne pas avoir les moyens suffisants pour offrir un service de qualité, ce qui pourrait créer des inégalités d'accès entre les territoires. Transférer la santé scolaire aux EPCI et métropoles nécessiterait une organisation rigoureuse pour coordonner les services entre les différentes écoles et les communes, ce qui pourrait poser des défis administratifs, notamment en milieu rural. Le transfert engendrerait également aux communes de recruter et former du personnel qualifié pour assurer les missions de santé scolaire. Enfin, les EPCI et métropoles ne disposent pas d'outils centralisés pour collecter et partager les données de santé des élèves. Ce qui rendrait difficile leur suivi.

2.1.1 TRANSFERT VERS LES COMMUNES

Les communes jouent un rôle en matière de santé publique, du fait de leur proximité avec le public. Etant plus proche des écoles, les communes peuvent adapter les services de santé scolaire aux réalités locales et répondre plus rapidement aux besoins des élèves. Les communes gèrent déjà plusieurs services en lien avec les jeunes et les familles (centres sociaux, services périscolaires, activités sportives), ce qui facilite la mise en place d'actions transversales.

D'après la Cour des comptes35(*), onze communes sont délégataires de diverses missions de santé scolaire relevant de l'Etat (Antibes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Lyon, Nantes, Rennes, Grenoble, Paris, Strasbourg, Vénissieux, Villeurbanne). Ces onze communes disposent d'un service municipal de santé scolaire (ci-après « SMSS ») intervenant sur un périmètre plus ou moins large. Grâce à cette délégation, elles peuvent répondre de manière plus efficace et ciblée aux enjeux de santé des jeunes dans leur territoire36(*).

· Modalités

Certaines communes françaises, comme Lyon, ont déjà mis en place des équipes médico-sociales avec une approche globale de l'enfant. Elle expérimente la gestion locale de certaines parties de la médecine scolaire, notamment dans le domaine de la santé mentale et de la prévention, en collaboration avec des établissements scolaires et des partenaires de santé publique. Cependant, la prise en charge par l'État a été évaluée à près de 40 euros par enfant et par an, mais l'État verse une subvention moyenne de 9,50 euros seulement aux onze communes volontaires. La part de l'Etat s'avère donc trop faible.37(*) La commune de Lyon a par exemple dépensé 4 millions pour le service médical et n'a perçu qu'un million d'euro de subventions de l'Etat.38(*)

Le transfert de compétence de la santé scolaire vers les communes nécessite de bénéficier d'une démarche collective structurée, comme en témoigne le projet de service mis en place à Lyon. Ce type de projet permettrait de favoriser la collaboration entre les différents acteurs de la santé scolaire et d'éviter les pratiques en silo, souvent source de fragmentation des services. La commune de Rennes, a mis en place des partenariats entre les services municipaux et les actions de prévention spécifiques, comme les dépistages. Par ailleurs, pour que cette pratique soit véritablement efficace, « Il est essentiel de donner une plus forte impulsion de l'État, en soutenant un volontarisme politique clair. » selon France Urbaine39(*). Un accompagnement renforcé pourrait inclure des ressources financières, des formations adaptées pour les professionnels de santé et la mise en place d'outils de suivi et d'évaluation.

Comparaison internationale

Le modèle suédois de médecine scolaire est souvent cité comme un exemple de réussite en matière de prise en charge de la santé des élèves. En Suède, la médecine scolaire est une compétence bien intégrée dans le système éducatif. La responsabilité de la médecine scolaire incombe aux municipalités. Chaque commune est chargée de fournir des services de santé scolaire à tous les élèves de son territoire, garantissant ainsi une couverture universelle.

· Forces et faiblesses

Ouvrir la compétence de la médecine scolaire à d'autres communes pourrait significativement améliorer la médecine scolaire en permettant une adaptation plus fine aux besoins locaux, une réactivité accrue et une meilleure utilisation des ressources. De plus, cette délégation favoriserait l'innovation et les partenariats locaux (hôpitaux, universités, associations...) afin de répondre aux nouveaux besoins des élèves. Elle permettrait également de réduire les inégalités territoriales et optimiser les ressources financières et humaines disponibles.

Cependant, le transfert de la compétence de la santé scolaire vers les communes présenterait certaines limites. En fonction des ressources disponibles dans chaque commune, ce transfert pourrait aggraver les inégalités d'accès aux services de santé scolaire, car les communes ne disposent pas toutes des mêmes moyens financiers, humains et infrastructurels. Certaines communes, en raison de leur taille ou de leurs priorités budgétaires, pourraient être en mesure de mettre en place des services de santé scolaire de qualité, avec des équipes médicales bien formées et des équipements adéquats. En revanche, d'autres communes, en particulier celles confrontées à des défis socio-économiques, pourraient peiner à garantir un accès équitable à ces services, notamment dans les quartiers prioritaires ou les zones moins bien dotées. Par ailleurs, les communes ne disposent pas d'outils centralisés pour collecter et partager les données de santé des élèves, ce qui rend difficile leur suivi.

2.1.2 DÉLÉGATION DE CERTAINES ACTIVITÉS PÉRIPHÉRIQUES À LA COMPÉTENCE « SANTÉ SCOLAIRE » À DES ASSOCIATIONS

Les associations peuvent jouer un rôle crucial dans la santé scolaire en contribuant de manière significative à la promotion de la santé et au bien-être des élèves. Elles sensibilisent et éduquent les jeunes sur divers aspects de la santé, offrant des services de soutien psychologique et social essentiels. En collaboration (notamment par le biais de délégations de service public) avec les Départements de santé scolaire, elles mettent en oeuvre des programmes de santé et mènent des initiatives spécifiques pour répondre aux besoins des élèves. Grâce à leurs expertises, elles renforcent l'impact des professionnels de santé scolaire.

· Modalités

La délégation de certaines compétences périphériques à la médecine scolaire aux associations peut être une option intéressante pour diversifier et enrichir les services de santé scolaire.

Afin de mettre en oeuvre ce transfert, il est essentiel d'identifier des associations partenaires ayant une expertise reconnue en santé scolaire, en prévention, ou en soins médicaux pour enfants et adolescents. Une fois les partenaires sélectionnés, il convient d'élaborer un cadre contractuel définissant les rôles et responsabilités de chaque partie, les objectifs, les modalités de financement, et les indicateurs de performance. Par exemple, Grenoble a établi un partenariat, avec l'association Solident afin d'améliorer l'accès aux soins dentaires pour les populations vulnérables. Le Planning Familial occupe également une place importante dans la santé scolaire en contribuant à l'éducation sexuelle, à la prévention des comportements à risque, et à la promotion de la santé reproductive et sexuelle des jeunes. Ses interventions permettent d'informer, de soutenir, et de protéger les élèves, tout en favorisant un climat scolaire respectueux et inclusif.

En parallèle, les communautés professionnelles territoriales de santé40(*) (ci-après « CPTS »), qui sont constituées sous la forme d'association composée de professionnels de santé pourraient jouer un rôle clé car elles permettent de créer du lien à l'échelle du territoire, entre les professionnels de santé et les établissements et le médico-social. En intégrant la compétence de la santé scolaire, les CPTS pourraient offrir plusieurs avantages. Tout d'abord, elles permettraient une meilleure adaptation des services de santé scolaire aux spécificités locales, en tenant compte des particularités de chaque territoire. Leur capacité à mobiliser des ressources supplémentaires et à innover dans les approches de santé renforcerait les services de santé scolaire, contribuant ainsi à un environnement scolaire plus sain et favorable au bien-être des élèves. De plus, elles faciliteraient la coordination entre les différents acteurs. Pour formaliser cette intégration, des accords et des conventions de partenariat entre les CPTS, les services de santé scolaire et les Départements concernés pourraient être mis en place.

· Forces et faiblesses

La délégation de certaines activités périphériques à la compétence de la santé scolaire aux associations permettrait de bénéficier de leur expertise spécifique et de leur souplesse organisationnelle, tout en renforçant les actions de prévention et de soutien. Leur expertise permettrait notamment de mieux répondre aux besoins de santé des élèves, en proposant des actions de prévention et de suivi adaptées aux réalités locales, qu'il s'agisse de problématiques liées aux addictions, à la santé mentale, ou à d'autres enjeux de santé publique. Par conséquent, les associations assureraient une équité d'accès aux soins.

Cependant, la multiplication des acteurs pourrait entraîner une fragmentation des services de santé scolaire, avec des approches et des standards différents selon les associations, ce qui peut nuire à la cohérence et à l'uniformité des interventions. La coordination entre les associations, les établissements scolaires, et les autorités locales peut être complexe et nécessiterait des efforts importants pour assurer une collaboration efficace. Par ailleurs, l'absence d'outils centralisés pour collecter et partager les données de santé des élèves compliquerait davantage cette coordination. Sans une centralisation des informations, il devient difficile d'évaluer globalement l'impact des actions menées, de suivre les évolutions de la santé des élèves.

Synthèse des forces et faiblesses des options au niveau territorial

Source : Evaluation EY

La numérotation, de 1 à 5, permet d'évaluer dans quelle mesure les options évaluées répondent aux critères fixés. Le chiffre 1 correspond à la valeur ajoutée la plus faible aux regards à la situation existante, tandis que le chiffre 5 représente la valeur ajoutée la plus forte.

3. ANALYSE JURIDIQUE PRÉLIMINAIRE DE L'HYPOTHÈSE D'UN TRANSFERT DE LA COMPÉTENCE MÉDECINE SCOLAIRE AUX DÉPARTEMENTS ET ÉTUDE D'AUTRES MÉCANISMES JURIDIQUES À DROIT CONSTANT

3.1 RAPPEL DES CRITÈRES D'UN TRANSFERT DE COMPÉTENCE VERS LES DÉPARTEMENTS ET PROBLÉMATIQUES JURIDIQUES ASSOCIÉES

Pour rappel, les développements qui suivent s'inscrivent dans une approche de rappels règlementaires et n'ont pas vocation à se substituer à une analyse juridique de fond de l'option d'un transfert de la compétence médecine scolaire aux Départements. Ils ont principalement pour objet d'adresser les interrogations juridiques soulevées par une telle hypothèse.

3.1.1 RAPPEL DU CONTEXTE LÉGISLATIF ACTUEL

La proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux Départements volontaires, n° 138, a été déposée devant l'Assemblée nationale le 23 juillet 2024.

Pour rappel, cette proposition de loi entre dans le cadre de l'expérimentation prévue par l'article 72 alinéa 4 de la Constitution41(*). Les articles LO1113-1 à LO1113-7 du CGCT (issus de la loi organique n° 2021-467 du 19 avril 2021) précisent les conditions de l'expérimentation visée à l'article 72 de la Constitution.

Parmi ces conditions, la loi doit définir l'objet de l'expérimentation, ainsi que sa durée, qui ne peut excéder cinq ans et mentionner les dispositions auxquelles il peut être dérogé. La loi précise également les catégories et les caractéristiques des collectivités territoriales autorisées à participer à l'expérimentation et les cas dans lesquels l'expérimentation peut être entreprise. Elle fixe le délai dans lequel les collectivités territoriales qui remplissent les conditions fixées prennent leur décision de participer à l'expérimentation42(*). Dans le cas présent, il ne semble pas que la proposition de loi indique les dispositions législatives auxquelles il est dérogé.

Le transfert de compétence dans le cadre de cette expérimentation, engendre des conséquences juridiques moins conséquentes qu'un transfert définitif de compétences.

En effet, la convention prévue par la proposition de loi conclue entre l'Etat et les Départements volontaires définira notamment les modalités de transfert de crédits correspondant au transfert de charges et les services ou parties de services relevant de l'Etat qui seront gratuitement mis à disposition des Départements volontaires.

Toutefois, si le transfert de la compétence médecine scolaire de l'Etat aux Départements devenait définitif, cela engendrerait des conséquences juridiques différentes dont les principales problématiques sont rappelées ci-dessous.

3.1.2 PROBLÉMATIQUES JURIDIQUES À ADRESSER CONCERNANT UN TRANSFERT DÉFINITIF DE LA COMPÉTENCE MÉDECINE SCOLAIRE AUX DÉPARTEMENTS

Par principe, un transfert définitif de compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales entraîne de nombreuses problématiques juridiques à prendre en compte notamment le transfert de ressources nécessaires à l'exercice normal de la compétence, une modification de la répartition des compétences entre les différents acteurs territoriaux, le transfert de personnel et mais également des biens et des contrats nécessaires à l'exercice de la compétence.

Tout d'abord, conformément à l'article 72-2 alinéa 4 de la Constitution, tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi43(*). Ce principe est codifié aux articles L. 1614-1 et suivants du CGCT. La Commission consultative sur l'évaluation des charges (ci-après « CCEC ») évalue et contrôle les compensations financières allouées en contrepartie des transferts de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales. Les futurs textes législatifs et règlementaires devront donc définir les modalités de compensations financières accordées aux Départements.

En outre, les futurs textes devront précisément définir les missions transférées aux Départements et dans quelle mesure, si cela est prévu, l'Etat restera en charge de certains aspects de la santé scolaire. De surcroît, comme nous l'avons développé précédemment, certaines communes sont délégataires de la compétence santé scolaire44(*). Elles disposent à ce titre, d'un service municipal de santé scolaire. Si demain l'Etat transférait sa compétence aux Départements, l'opportunité de conserver un tel mécanisme de délégation entre les Départements et ces communes devrait alors être réinterrogée pour assurer une cohérence d'ensemble du mécanisme. De la même façon, d'un point de vue organisationnel, il serait nécessaire de déterminer s'il est efficient de conserver séparément les services Départementaux en charge de la PMI et la santé scolaire, au bénéfice d'un seul et même service Départemental. Ces éléments seront essentiels pour éviter des enchevêtrements de compétences au sein d'un même territoire. En effet, les bilans de transfert de compétences mettent fréquemment en exergue le fait que, consécutivement au transfert, l'exercice de la compétence est finalement moins lisible.

De surcroît, le transfert de compétence emportera transfert de personnel de l'Etat vers les collectivités territoriales. A titre d'exemple, la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoyant notamment le transfert des certaines compétences de l'Etat aux collectivités territoriales comporte de nombreuses dispositions relatives au transfert de services ou parties de services (et notamment du personnel) qui participent à l'exercice des compétences transférées. En effet, cette loi envisage un droit d'option de deux ans à compter de l'entrée en vigueur des décrets fixant les transferts définitifs des services pour que les fonctionnaires exerçant leurs fonctions dans un service transféré à une collectivité territoriale optent soit pour le statut de fonctionnaire territorial, soit pour le maintien du statut de fonctionnaire de l'Etat45(*). Enfin, cette loi met en place une commission commune au Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale qui joue un rôle consultatif dans le suivi des transferts de personnels46(*).

Dans un rapport de 201047(*), le Sénat dresse un bilan des transferts de personnel de l'Etat vers les collectivités territoriales issus de la loi du 13 août 2004. Il précise notamment que le transfert de personnel de l'Etat vers les collectivités peut notamment engendrer une crainte des personnels de perdre les avantages liés à leur statut antérieur notamment la gestion par une pluralité de collectivités employeurs plutôt que par un employeur unique mais également des collectivités d'accueil vis-à-vis de la complexité du processus de transfert. Le Sénat relève toutefois que l'exercice du droit d'option a été massivement favorable à la fonction publique territoriale et qu'une amélioration des conditions matérielles des personnels avec une élévation de leur rémunération et l'accès à des avantages sociaux a été constatée.

Enfin, la loi précitée du 13 août 2004 vise également les articles L. 1321-1 à L. 1321-8 du CGCT relatifs à la mise à disposition de plein droit des biens meubles et immeubles utilisés, à la date du transfert, pour l'exercice de la compétence transférée. Dès lors, le transfert des dossiers nécessaires à la poursuite de la compétence santé scolaire devra également être envisagée ainsi que le matériel (par exemple le matériel médical, informatique, mobilier). En outre, les contrats (notamment les marchés publics et emprunts) devront être transférés aux collectivités nouvellement compétentes.

La loi transférant la compétence médecine scolaire de l'Etat vers les Départements devra donc envisager toutes les conséquences juridiques qui en découlent et prévoir l'intervention de décrets pour déterminer les modalités pratiques d'un tel transfert.

Synthèse des problématiques juridiques à lever dans le cadre d'un transfert définitif de la compétence « médecine scolaire » aux Départements

1. Transfert de ressources nécessaires à l'exercice de la compétence

2. Répartition des compétences entre les différents acteurs territoriaux

3. Transfert du personnel de l'Etat vers les Départements

4. Transfert des biens et des contrats nécessaires à l'exercice de la compétence

3.2 MÉCANISMES JURIDIQUES ALTERNATIFS À DROIT CONSTANT SUSCEPTIBLES D'APPORTER DES RÉPONSES PARTIELLES AUX DYSFONCTIONNEMENTS DE LA MÉDECINE SCOLAIRE

Face aux dysfonctionnements actuels de la santé scolaire, d'autres mécanismes juridiques à droit constant pourraient être envisagés.

Premièrement, la constitution d'un groupement d'intérêt public (ci-après « GIP ») pourrait être une option à étudier. Pour rappel, un GIP, au sens de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, est une personne morale de droit public dotée de l'autonomie administrative et financière. Il est constitué par convention approuvée par l'Etat soit entre plusieurs personnes morales de droit public soit entre l'une ou plusieurs d'entre elles et une ou plusieurs personnes morales de droit privé48(*). Le GIP peut être constitué pour une durée déterminée ou indéterminée49(*).

Les personnes morales de droit public et les personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public doivent détenir ensemble plus de la moitié du capital ou des voix dans les organes délibérants50(*).

Ces personnes y exercent ensemble des activités d'intérêt général à but non lucratif, en mettant en commun les moyens nécessaires à leur exercice51(*).

Le guide relatif aux GIP52(*) de la direction des affaires juridique du ministère des finances et des comptes publics précise que :

« Les GIP n'ont pas vocation à se voir confier la définition ou la mise en oeuvre d'une politique publique nationale. Tout au plus, peuvent-ils se voir confier une fonction d'appui ou de mise en place d'éléments d'une politique publique [...] La création d'un GIP y dérogeant nécessite dont l'intervention du législateur [...]. »

A titre d'illustration, il existe des GIP constitués de deux ou plusieurs établissements et services sociaux ou médico-sociaux, dotés de la personnalité morale, ou personnes morales gestionnaires de droit public ou de droit privé comportant au moins une personne morale de droit public53(*). Ils sont créés en vue de favoriser la coordination, la complémentarité et la garantie de la continuité des prises en charge et de l'accompagnement, notamment dans le cadre de réseaux sociaux ou médico-sociaux coordonnés54(*). Ces GIP peuvent être constitués notamment en vue de permettre à leurs membres d'exercer ensemble des activités dans les domaines de l'action sociale ou médico-sociale, de créer et de gérer des équipements ou des services d'intérêt commun ou des systèmes d'information nécessaires à leurs activité, de faciliter et d'encourager les actions concourant à l'amélioration de l'évaluation de l'activité de leurs membres et de la qualité de leurs prestations notamment par le développement et la diffusion de procédures, de références ou de recommandations de bonnes pratiques, en lien avec les travaux de la Haute Autorité de Santé et de définir ou proposer des actions de formation à destination des personnels de leurs membres55(*).

Ainsi, un GIP pourrait être constitué entre l'Etat et des Départements, voire également avec des communes et des associations afin que ces personnes mettent en commun tous les moyens utiles à l'exercice de la santé scolaire, la PMI ou des services municipaux de santé scolaire. Ces personnes pourraient conclure des contrats communs et avoir une meilleure visibilité sur l'allocation des moyens et des ressources disponibles.

Il conviendrait néanmoins de s'assurer que le GIP ne constitue pas un « transfert déguisé » de la compétence de l'Etat. A cet effet, il conviendra de déterminer l'objet du GIP comme un instrument de mutualisation et de facilitation de l'exercice de la compétence entre les différents acteurs concernés, mais sans que le GIP ne se substitue à l'Etat. On peut imaginer, à titre d'exemple à analyser plus avant, qu'un tel GIP constitué à un échelon territorial à déterminer facilite la communication entre les divers acteurs, mutualise l'information sur les ressources et les besoins en présence, etc.

Deuxièmement, et dans la perspective de rendre plus attractive la santé scolaire, et sous réserve de remplir les conditions requises par le code général de la fonction publique, il conviendrait d'investiguer les possibilités à droit constant permettant aux agents publics de la santé scolaire (médecins, infirmiers, psychologues...) de cumuler leur emploi avec une autre activité publique ou privée lucrative (voire libérale). Il convient toutefois de relever que le décret n° 73-418 du 27 mars 1973 relatif au statut particulier des médecins contractuels de santé scolaire semble limiter cette possibilité. En effet, celui-ci précise que les médecins scolaires ne peuvent exercer la médecine de clientèle ni être intéressés dans la gestion d'un établissement de soins ou attachés soit comme médecin habituel soit comme médecin contractuel consultant au service médical d'un organisme privé56(*).

Troisièmement, les conventions de délégations de compétence prévue par le CGCT57(*) sont des mécanismes permettant un partage expérimental de compétences entre plusieurs personnes publiques. A cet égard, sauf lorsque sont en cause des intérêts nationaux, l'Etat peut déléguer par convention à une collectivité territoriale ou à un EPCI à fiscalité propre qui en fait la demande l'exercice de certaines de ses compétences. Les compétences déléguées sont exercées au nom et pour le compte de l'Etat. Elles ne peuvent habiliter les collectivités territoriales et les établissements publics concernés à déroger à des règles du domaine de la loi ou du règlement.

La collectivité qui souhaite exercer une compétence déléguée par l'Etat soumet sa demande pour avis à la conférence territoriale de l'action publique. Lorsque la demande de délégation est acceptée, une convention définit notamment les objectifs à atteindre et les modalités de contrôle de l'Etat sur l'autorité délégataire et fixe des indicateurs de suivi. La convention détermine également le cadre financier dans lequel s'exercent la délégation, les moyens de fonctionnement et les services le cas échéant mis à la disposition de l'autorité délégataire58(*).

Il convient de noter que ces conventions de délégations de compétence ne peuvent excéder une durée de six ans59(*).

Ce mécanisme de délégation de compétence se distingue d'un transfert de compétence dans le sens où l'Etat n'est pas dessaisit de sa compétence.

Le rapport de l'Inspection générale de l'administration de mai 201760(*) relève que les délégations de compétences sont très peu utilisées, et seulement dans deux domaines pour l'Etat (culture et emploi). L'Inspection générale de l'administration explique cette faible utilisation notamment par « le cadre contraignant des délégations entre collectivités assimilé à une tutelle, la lourdeur et la longueur de la procédure, le sentiment que cet outil est une forme d'évitement, et à minima de retardement de transfert de compétences »61(*). Le rapport recense les conventions de délégations de compétences conclues entre l'Etat et différentes collectivités territoriales. A titre d'exemple, l'Etat a délégué une partie de ses compétences en matière de culture à la Région Bretagne62(*) ou dans les domaines de l'information jeunesse, de la mobilité internationale des jeunes et de la formation des bénévoles63(*).

Dans ce contexte, les Départements volontaires pourraient effectuer une demande à l'Etat afin que celui-ci leur délègue l'exercice de sa compétence relative à la santé scolaire sur leur territoire. Cette délégation permettrait alors d'avoir une première expérience en la matière et d'en tirer les conséquences pour l'avenir. Cependant la délégation de compétence est un processus au long cours avec de nombreuses étapes à respecter et un contrôle important de l'Etat.

Dans la continuité des mécanismes juridiques existants à droit constant, des évolutions organisationnelles supplémentaires notamment en matière de coordination entre les acteurs et d'outillage peuvent être envisagées sans préjuger d'éventuels transfert de compétence.

3.3 RECOMMANDATIONS ORGANISATIONNELLES

Différentes recommandations organisationnelles ont émergé au cours des échanges réalisés dans le cadre de cette étude. Elles sont présentées ci-après de manière succincte et s'inscrivent dans la continuité des travaux de l'IGAS et de la Cour des comptes. Ces recommandations amènent notamment à interroger l'organisation et les outils utilisés dans un souci de décloisonnement et de partage des informations et du suivi.

D'un point de vue organisationnel, il est essentiel de constituer des équipes pluridisciplinaires dédiées à la santé scolaire impliquant les infirmiers scolaires, les médecins, les psychologues et les assistants sociaux au sein des établissements scolaires afin de faciliter l'accès aux soins et la prise en charge globale de l'élève. De plus, l'amélioration de la coordination avec les acteurs externes est cruciale. Elle inclut la consolidation des partenariats avec les structures locales de santé publique, les associations spécialisées (santé mentale, prévention des addictions) et les services sociaux, afin de garantir des interventions ciblées et adaptées aux besoins spécifiques des élèves. Dans cette perspective, des diagnostics territoriaux pourraient être réalisés par l'ensemble des acteurs présents, en collaboration avec le conseil départemental et l'ensemble des partenaires, afin d'adapter la mise en oeuvre de la politique de la santé scolaire aux ressources des territoires. Enfin, l'élaboration de protocoles de gestion entre les professionnels de santé et les établissements scolaires pour gérer les bilans de santé, les campagnes de vaccination, les urgences médicales ainsi que les suivis psychologiques permettrait d'harmoniser les pratiques entre les établissements scolaires et d'assurer une réponse cohérente aux besoins des élèves.

En termes d'outillage, la création d'une plateforme numérique centralisée constitue une priorité. La mise en place d'une plateforme, sécurisée et respectant la confidentialité des données, permettrait de gérer le suivi des élèves, de planifier des bilans de santé et de suivre les campagnes de vaccination. À titre d'exemple, des outils comme Lien ou Esculape pourraient être mutualisés pour centraliser les informations et mettre en oeuvre une politique de prévention cohérente à l'échelle des établissements scolaires.

Par ailleurs, il est nécessaire de mettre en place des formations dédiées aux enseignants. Ces formations leur permettraient d'identifier des problématiques telles que les troubles alimentaires, les signes de harcèlement ou encore les symptômes de dépression. Les enseignants pourraient ainsi être aptes à orienter rapidement les élèves vers les professionnels compétents.

Synthèse des recommandations à investiguer

1. Créer des équipes pluridisciplinaires dédiées à la santé scolaire

2. Améliorer la coordination avec les acteurs externes

3. Réaliser des diagnostics territoriaux

4. Définir des protocoles de gestion entre les établissements et les professionnels de santé

5. Créer une plateforme numérique centralisée et sécurisée

6. Développer des formations destinées aux enseignants

CONCLUSION

La santé scolaire, bien que cruciale pour le bien-être des élèves, est confrontée à de nombreuses difficultés endémiques non résolues depuis plusieurs années. Ces dernières incluent notamment une forte pénurie de professionnels de la santé scolaire ainsi qu'une augmentation des défis sanitaires contemporains. Aussi, pour remédier à cette situation, plusieurs travaux ont été menés pour identifier des pistes d'actions possibles ; celles-ci, pouvant revêtir différentes formes.

En ce sens, plusieurs pistes de travail pourraient être envisagées, depuis le maintien de la compétence au niveau de l'État avec des réformes organisationnelles au sein du ministère de l'Éducation nationale, jusqu'à la réorganisation sous la tutelle du ministère de la Santé et des ARS. Par ailleurs, d'autres options pourraient inclure le transfert de la compétence de la santé scolaire aux collectivités territoriales ou la délégation de certaines activités complémentaire à la santé scolaire à des associations.

Néanmoins, il est important de relever que le transfert de compétence entraîne plusieurs conséquences juridiques qu'il conviendra d'étudier plus avant. En effet, tout transfert de compétence entraîne un transfert des ressources nécessaires à son exercice mais également une nouvelle répartition des compétences entre les différents acteurs territoriaux. De plus, le personnel rattaché à l'Etat pour l'exercice de la compétence relative à la santé scolaire devrait être transféré au bénéficiaire de ce transfert, ainsi que les biens et les contrats nécessaires à l'exercice de cette compétence. Enfin, les collectivités qui gèrent actuellement la santé scolaire par délégation pour le compte de l'Etat ont toutes sensiblement augmenté les budgets consacrés à cette activité par rapport aux sommes versées.

Par ailleurs, sous réserve d'une étude juridique plus approfondie, des mécanismes juridiques alternatifs à droit constant pourraient être mobilisés afin d'apporter des premières réponses aux enjeux de la santé scolaire. A ce titre, la création d'un GIP entre l'Etat et des collectivités territoriales ou des associations pour la mise en commun de moyens et de ressources nécessaires pourrait être une option à étudier, de même qu'il conviendrait d'investiguer davantage les possibilités offertes aux agents publics travaillant dans le domaine de la santé scolaire en matière de cumul d'emplois. De plus, des conventions de délégations de compétence pourraient être conclues entre l'Etat et les collectivités territoriales ou EPCI. Enfin, des évolutions organisationnelles pourraient être envisagées pour renforcer la mise en oeuvre d'une politique coordonnée de santé scolaire sans alourdir les processus administratifs ou législatifs existants.

ANNEXES

Annexe 1. Personnes interrogées dans le cadre des entretiens

Nom

Fonction

Organisme

Marc Pelletier

Sous-directeur de l'action éducative

Direction Générale de l'enseignement scolaire

Jean Hubac

Chef du service de l'accompagnement des politiques éducatives

Direction Générale de l'enseignement scolaire

Stéphanie Léger

Adjointe au maire de Lyon (Education)

France Urbaine

Pierre-André Juven

Adjoint au maire de Grenoble (Santé)

France Urbaine

Jean Deysson

Conseiller France Urbaine

France Urbaine

Marion Taniou

Conseillère solidarités cohésion sociale

France Urbaine

Etienne Jaufour

Vice-président du Réseau des Villes Santé OMS

France Urbaine

Bernard Shmeltz

Directeur général DF

Départements de France

Eric Bellamy

Directeur délégué Solidarité, santé, travail

Départements de France

Paul-Etienne Kauffmann

Conseiller éducation, jeunesse, culture, patrimoine, tourisme, sport

Départements de France

Laurette Le Discot

Conseillère enfance - social

Départements de France

Gwenaelle Durand

Secrétaire Générale SNIES - infirmière

Syndicat National des Infirmiers Éducateurs de Santé (SNIES)

Pierre Suesser

Co-président du SNMPMI - Médecin

Syndicat national des Médecins de PMI (SNMPMI)

Jocelyne Grousset

Co Secrétaire générale SNMSU - Médecin

Syndicat national des médecins scolaires et universitaires (SNMSU)

Annexe 2. Sources documentaires

Rapports :

· Rapport au Parlement sur le devenir de la médecine scolaire et sur la politique de santé scolaire, IGAS / IGESR, juin 2022

· Rapport Sénat n°414, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur la proposition de loi visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires, rapporteur François Bonhomme, mars 2024

· Rapport information n°1228, déposé en application de l'article 146 du règlement, par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur la médecine scolaire et la santé à l'école, n° 1228, déposé le jeudi 11 mai 2023, Assemblée Nationale, mai 2023

· Rapport « Santé mentale des enfants : le droit au bien-être », Défenseur des droits, 2021

· Rapport de la Cour des comptes, « Les médecins et les personnels de santé scolaire », avril 2020

· Rapport d'information n° 117 du Sénat fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur le bilan des transferts de personnels vers les collectivités territoriales par les sénateurs MM. Eric Doligé et Claude Jeannerot, novembre 2010

Autres documents :

· Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, dossier de presse, Cabinet de Frédéric Valletoux, Ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, mai 2024

· Enquête flash santé, Départements de France, juin 2023

· Mission flash sur le rôle de la médecine scolaire dans la lutte contre le harcèlement scolaire, Communication de Mmes Soumya Bourouaha et Virginie Lanlo, mai 2024

· Questionnaire DGESCO - Proposition de loi visant à expérimenter le transfert de la compétence « médecine scolaire » aux départements volontaires, François Bonhomme, Audition du bureau de la santé et de l'action sociale de la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO), février 2024

· Question orale n°0254S - 15ème législature, JO Sénat, novembre 2023

Annexe 3. Glossaire

Acronyme

Définition

ARS

Agence régionale de santé

CGCT

Code général des collectivités territoriales

CCEC

Commission consultative sur l'évaluation des charges

CPTS

Communautés professionnelles territoriales de santé

CLS

Contrats Locaux de Santé

DGESCO

Direction générale de l'enseignement scolaire

EDA

Éducation, développement et apprentissage

ETP

Équivalents temps plein

EPCI

Établissement public de coopération intercommunale

GIP

Groupement d'intérêt public

INFENES

Infirmier de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur

MENJ

Médecin de l'éducation nationale

PES

Parcours Éducatif de Santé

PMI

Protection maternelle et infantile

PSYEN

Psychologue de l'éducation nationale

SMSS

Service municipal de santé scolaire


* 1 Rapport d'information n° 289 (2022-2023) de Mme Françoise Gatel et M. Rémy Pointereau, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, déposé le 26 janvier 2023 ; https://www.senat.fr/rap/r22-289/r22-289.html

* 2 Rapport d'information n° 289 (2022-2023) de Mme Françoise Gatel et M. Rémy Pointereau, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, déposé le 26 janvier 2023 ; https://www.senat.fr/rap/r22-289/r22-289.html

* 3 À l'initiative du président Gérard Larcher, le Bureau du Sénat, par une décision du 12 novembre 2014, a confié à la délégation aux collectivités territoriales la mission de simplifier les normes applicables aux collectivités territoriales. Cette mission est plus particulièrement exercée par notre collègue Rémy Pointereau, premier vice-président délégué, chargé de la simplification des normes.

* 4 Voir en annexe le compte rendu de la réunion de la délégation du 12 décembre 2024.

* 5 À cet égard, l'association des départements de France (DF) a adopté, le 16 octobre 2024, une résolution visant à alerter sur la situation financière des départements.

* 6 Une autre piste a été évoquée par le cabinet d'étude : la création de groupements d'intérêt public (GIP). Ces structures permettent à divers acteurs de mettre des ressources en commun et de coordonner leur action à l'échelle d'un territoire. Cette piste est intéressante mais sa principale limite est l'ajout d'une structure supplémentaire au paysage institutionnel.

* 7 La circulaire de 1991 utilise les termes d'« actions de portée générale » et d' « actions sélectives ».

* 8 Décret n° 91-1195 du 27 novembre 1991 portant dispositions statutaires applicables au corps des médecins de l'éducation nationale et à l'emploi de médecin de l'éducation nationale - conseiller technique.

* 9 Décret n° 2012-762 du 9 mai 2012 portant dispositions statutaires communes aux corps d'infirmiers de catégorie A des administrations de l'État.

* 10 Décret n° 2017-1051 du 10 mai 2017 portant statut particulier du corps interministériel des assistants de service social des administrations de l'État.

* 11 Rapport au Parlement sur le devenir de la médecine scolaire et sur la politique de santé scolaire - IGAS, 2022

* 12 Rapport Sénat n°414, Sénat, mars 2024

* 13 Rapport information n°1228, Assemblée Nationale, mai 2023

* 14 Etude DREES, 2024

* 15 « Santé mentale des enfants : le droit au bien-être », Défenseur des droits, rapport 2021

* 16 Rapport de la Cour des comptes, Les médecins et les personnels de santé scolaire, mai 2020

* 17 Rapport information n°1228, Assemblée Nationale, mai 2023

* 18 Rapport Sénat n°414, Sénat, mars 2024

* 19 Rapport information n°1228, Assemblée Nationale, mai 2023

* 20 Rapport information n°1228, Assemblée Nationale, mai 2023

* 21 EDA : Education, développement et apprentissage

* 22 Rapport de la Cour des comptes, Les médecins et les personnels de santé scolaire, mai 2020

* 23 Rapport de la Cour des comptes « les médecins et les personnels de santé scolaires » d'avril 2020

* 24 Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, Ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, mai 2024

* 25 Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, Ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, mai 2024

* 26 Le rapport de l'IGAS N°2022-074R précise notamment que la grille indiciaire des médecins scolaires est nettement moins favorable que celle des médecins inspecteurs de santé publique.

* 27 Entretien avec le syndicat national des médecins scolaires et universitaires, réalisé par EY

* 28 Articles L. 2112-1 à L. 2112-10 et articles R. 2112-1 à R. 2112-21 du code de la santé publique

* 29 Article L. 221-1 à L. 221-9 du code de l'action sociale et des familles

* 30 Enquête flash santé de Départements de France, juin 2023

* 31 Article L. 4383-3 du code de la santé publique

* 32 Article L. 4221-1-1 du CGCT

* 33 Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009

* 34 Article L1434-17 du Code de la santé publique

* 35 Rapport de la Cour des comptes « les médecins et les personnels de santé scolaires » d'avril 2020

* 36 Par exemple, la Cour des comptes relève que le taux de réalisation de la visite de 6ème année est beaucoup plus élevé dans ces communes

* 37 Question orale n°0254S - 15ème législature, JO Sénat, novembre 2023

* 38 Entretien avec France urbaine, réalisé par EY, 2024

* 39 Entretien avec France urbaine, réalisé par EY, 2024

* 40 Article L. 1432-12 à L. 1434-13 du Code de la santé publique

* 41 « Dans les conditions prévues par la loi organique, et sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnellement garanti, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l'a prévu, déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences. »

* 42 Article LO1113-1 du CGCT

* 43 Article 72-2 alinéa 4 de la Constitution

* 44 Antibes Juan-les-Pins, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Grenoble, Lyon, Nantes, Paris, Rennes, Strasbourg, Vénissieux et Villeurbanne

* 45 Article 109 de la loi n° 2004-809 du 14 août 2024 relative aux libertés et responsabilités locales

* 46 Article 113 de la loi n° 2004-809 du 14 août 2024 relative aux libertés et responsabilités locales

* 47 Rapport d'information n° 117 du Sénat fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur le bilan des transferts de personnels vers les collectivités territoriales par les sénateurs MM. Eric Doligé et Claude Jeannerot - 18 novembre 2010

* 48 Article 98 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit

* 49 Article 99 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit

* 50 Article 103 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit

* 51 Ibidem

* 52 Fiche n°1 - La création d'un GIP (août 2019) - Direction des affaires juridiques

* 53 Article R. 312-194-1 du code de l'action sociale et des familles

* 54 Article L. 312-7 du code de l'action sociale et des familles

* 55 Article R. 312-194-4 du code de l'action sociale et des familles

* 56 Article 2 du décret n° 73-418 du 27 mars 1973 relatif au statut particulier des médecins contractuels de santé scolaire

* 57 Article L. 1111-8-1 du CGCT issu de la loi du 27 janvier 2014 (loi MAPTAM)

* 58 Article R. 1111-1-1 du CGCT

* 59 Ibidem

* 60 Rapport « Délégation de compétences et conférence territoriale d'action publique, de nouveaux outils au service de la coopération territoriale » - Inspection général de l'administration n° 16119-R de mai 2017 de M. Bruno Acar et M. Patrick Reix

* 61 Ibidem

* 62 Décret n° 2015-1918 du 30 décembre 2015 portant délégation de compétences du ministère de la culture et de la communication à la région Bretagne

* 63 Décret n° 2021-1697 du 17 décembre 2021 portant délégation de compétences du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports à la région Bretagne

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