C. L'ÉPINEUSE QUESTION DES PRÉROGATIVES JUDICIAIRES DES POLICES MUNICIPALES : POUR UNE EXTENSION LIMITÉE ET COHÉRENTE AVEC LEURS MISSIONS
Le durcissement du contexte sécuritaire et la montée en puissance de la délinquance du quotidien appellent également, pour la mission d'information, une extension limitée de leurs prérogatives répressives.
Une extension limitée seulement, car le fait de conférer aux polices municipales des missions de police judiciaire trop étendues conduirait à dénaturer profondément leur rôle, et ce à deux titres. Au plan opérationnel, la police judiciaire implique un travail d'enquête assorti de lourdes exigences procédurales, qui aurait pour effet de détourner les agents de la voie publique. Au plan politique, surtout, une telle évolution imposerait de les placer de façon accrue sous la direction du procureur de la République, en substitution du maire. Pour ces raisons, la mission, à l'instar de la grande majorité des élus et acteurs qu'elle a entendus, est fermement opposée au fait d'octroyer à des policiers municipaux le statut d'officier de police judiciaire (OPJ).
Pour autant, des pistes d'aménagements de leurs compétences existent, pour leur permettre de mieux réprimer certaines infractions du quotidien particulièrement préjudiciables à la tranquillité publique, et ainsi d'intervenir dans des domaines parfois délaissés, faute de moyens, par les forces nationales.
La possibilité de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles (AFD), largement demandée par les acteurs, paraît particulièrement opportune à cet égard. Cette faculté serait rigoureusement encadrée et cantonnée à un nombre restreint d'infractions caractéristiques de la délinquance du quotidien telles que, notamment, l'usage de stupéfiants, la vente à la sauvette et l'occupation illicite de halls d'immeuble.
Un ajustement du champ des infractions que les policiers municipaux et les gardes champêtres peuvent constater paraît également opportun, notamment dans le domaine de la sécurité routière. À titre d'exemple, il paraît légitime que les policiers municipaux soient en mesure de réprimer des faits de conduite sous l'influence de l'alcool.
De même, il convient d'élargir les possibilités pour les agents de procéder à des relevés d'identité, aujourd'hui extrêmement restreintes, car limitées aux infractions relevant de leur compétence. Le régime en vigueur, qui conduit à autoriser un policier municipal à relever l'identité d'une personne coupable de tapage nocturne, mais pas de l'auteur d'un crime ou d'un délit flagrant, n'est en effet guère satisfaisant.
Enfin les policiers municipaux doivent pouvoir bénéficier d'un accès plus étendu et gratuit aux fichiers de police liés à leurs missions, y compris en mobilité et le cas échéant selon des modalités adaptées à la sensibilité des informations qu'ils contiennent. Il en va, notamment, du système d'immatriculation des véhicules (SIV), du système national des permis de conduire (SNPC), du fichier des objets et des véhicules signalés (FOVeS), ou du fichier des véhicules assurés (FVA). Les informations contenues dans des fichiers tels que le traitement des antécédents judiciaires (TAJ), le fichier des personnes recherchées (FPR) ou encore le fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) paraissent en revanche trop sensibles pour autoriser un tel accès. Pour autant, une réflexion pourrait être menée en vue d'envisager un accès partiel et strictement encadré à une partie des informations contenues dans le FPR, cohérentes avec les missions des polices municipales (interdictions de séjour, disparitions de mineurs) ou encore dans le TAJ s'agissant du dispositif d'AFD (état de récidive).