B. LE CAS DE LA RUSSIE
Au-delà même du rôle de la BERD, l'importance intrinsèque de la transition économique en Russie a conduit votre rapporteur à estimer utile de rassembler ici quelques données sur l'évolution de la situation économique russe qui donne encore lieu à des appréciations contrastées, les investisseurs privés étrangers -et notamment français- semblant encore réticents à s'engager sur ce marché malgré les encouragements qui leur sont prodigués et la volonté politique de soutien à l'économie russe affichée par la plupart des gouvernements et les institutions financières internationales- particulièrement avant les dernières élections présidentielles en Russie ...
1. Une situation économique très préoccupante malgré des acquis incontestables
La Russie a incontestablement accompli
des progrès
sur la voie de l'instauration d'une économie de marché et de
la transition économique. Des signes de meilleure stabilité
économique ont été enregistrés depuis 1995 :
- le principal acquis de cette politique de stabilisation demeure
la
maîtrise de l'inflation
; grâce à des politiques de taux
de change et d'émission rigoureuses, le taux d'inflation a
été continûment réduit : plus de 800 % en 1993, 215
% en 1994, 130 % en 1995 et, selon certaines prévisions, environ 25 % en
1996 ;
- les résultats du
commerce extérieur
continuent
également d'être honorables avec un excédent de 13,6
milliards de dollars pour le premier semestre 1996, malgré certains
signes de fléchissement par rapport à 1995 (25 milliards
d'écus d'excédent).
Les tendances macroéconomiques globales demeurent néanmoins,
à bien des égards, négatives et font apparaître
trois motifs de préoccupation majeurs.
- En premier lieu,
la récession
de ces dernières
années
n'a pas été surmontée
. Contrairement
aux prévisions optimistes -qui ont dû être
révisées à la baisse- qui prévoyaient une
croissance de plus de 2 % pour 1996, le PIB russe a connu une nouvelle chute,
évaluée à 6 % pour les huit premiers mois de
l'année. Certains experts voient dans cette évolution un
rôle accru de l'économie informelle au détriment de
l'économie officielle.
Des améliorations constatées en 1995 dans certains secteurs
clés, qui auraient pu tirer l'économie russe vers une croissance
positive, ont connu une nouvelle dégradation (industries
pétrolières, chimiques et métallurgiques notamment). De la
même manière, les investissements restent très insuffisants
pour constituer un facteur de croissance à moyen terme et ont connu une
nouvelle chute, de l'ordre de 10 %, au cours du premier semestre 1996.
- La
crise budgétaire et fiscale
constitue un autre
élément essentiel de la persistance des difficultés
économiques de la Russie. Alors que la situation s'était
sensiblement améliorée en 1995 -le
déficit
budgétaire
passant de 6 % à 4 % du PIB-, ce déficit
s'est à nouveau accru au premier semestre 1996 pour atteindre 6,6 % du
PIB et les prévisions pour l'ensemble de l'année ne sont
guère meilleures.
Cette situation a pour cause principale
une collecte fiscale
très
insuffisante et très inférieure aux objectifs. Les recettes
fiscales n'ont ainsi atteint que 13 % du PIB en 1995 et pourraient être
encore plus faibles (12 % du PIB) en 1996. La situation est de surcroît
aggravée par la priorité donnée au paiement des
arriérés de salaires, conduisant le gouvernement à
emprunter sur le marché intérieur au détriment de la
relance des investissements.
- La
situation sociale
-qui est la dernière traduction, la plus
préoccupante par ses conséquences potentielles, des
difficultés actuelles- est en effet caractérisée par la
persistance des
impayés de salaires.
Ces retards de paiement, ou leur absence totale, s'élevaient à 30
ou 40 milliards de roubles fin septembre 1996 et constituent l'un des
problèmes les plus pressants, dans l'armée, dans le secteur
d'Etat, mais aussi dans les entreprises.
Le
chômage
, pour sa part, continue de s'aggraver de façon
régulière : 7,1 % en 1994, 8,2 % en 1995 et 9,1 % en août
1996 selon la définition du Bureau international du travail. Ce taux de
chômage reste pourtant relativement faible au regard de la chute de la
production, ce qui illustre le faible niveau de restructuration du secteur
productif.
Au total, selon le ministère du travail russe, plus de 20 % de la
population -soit plus de 30 millions de Russes- disposent aujourd'hui de
revenus inférieurs au seuil minimum de subsistance.