PREMIÈRE PARTIE
LE CONSTAT : LA SÉCURITE SANITAIRE DE TOUS
LES BIENS MÉDICAUX ET PRODUITS ALIMENTAIRES N'EST PAS GARANTIE, ET LA
FONCTION DE VEILLE SANITAIRE N'EST PAS CONVENABLEMENT ASSURÉE
Bien qu'améliorée depuis le début des
années quatre-vingt-dix, l'organisation de la sécurité
sanitaire des biens de santé et des produits alimentaires ainsi que la
veille sanitaire présentent des lacunes auxquelles il convient de
remédier sans délai.
La sécurité sanitaire requiert l'exercice de trois missions : le
contrôle des produits, l'évaluation des actes
thérapeutiques et la veille sanitaire.
Dans le présent rapport, nous n'évoquerons, en ce qui concerne la
sécurité sanitaire, que celle des biens de santé (produits
et matériels), à l'exclusion de celle des actes. La
sécurité sanitaire des actes requiert, notamment, une
évaluation et un contrôle des pratiques thérapeutiques et
diagnostiques, qui sont prévus par les ordonnances du 24 avril 1996,
avec la création de l'Agence nationale d'accréditation et
d'évaluation en santé ; cette évaluation et ce
contrôle n'entrent pas dans le champ de la réflexion de la mission.
I. LES RÉFORMES DU DÉBUT DES ANNÉES 1990 : CRÉATION DE NOUVELLES INSTITUTIONS CHARGÉES DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE POUR CERTAINS BIENS MÉDICAUX
Depuis le début des années 1990 s'est
opérée une progressive prise de conscience des
éléments constitutifs d'une politique de sécurité
sanitaire des biens de santé.
Cette prise de conscience, consécutive à des situations de crise,
a conduit à plusieurs réformes de l'administration sanitaire.
A la suite du drame du sang contaminé et de diverses crises concernant
le monde des greffes, l'Etat s'est réformé afin de
réorganiser les procédures d'autorisation et de contrôle de
certains produits thérapeutiques.
Il a ainsi mis en place des institutions -Agence française du sang,
Agence du médicament, Etablissement français des greffes-
susceptibles de satisfaire plusieurs critères : autonomie,
spécialité, suffisance des moyens financiers et humains.
A. UN PRINCIPE D'AUTONOMIE ET DE RESPONSABILITÉ
L'affaire du sang contaminé avait montré les
limites d'une organisation sanitaire ministérielle au sein de laquelle
la dilution des compétences et la multiplicité des intervenants
faisaient que l'on ne pouvait véritablement identifier le lieu de
décision et de responsabilité.
C'est pourquoi, lorsque l'Etat a choisi de réformer l'administration
sanitaire au début des années 1990, il a choisi le statut
d'établissement public pour l'Agence française du sang, l'Agence
du médicament et l'Etablissement français des greffes. Ce statut,
qui illustre le principe de la décentralisation fonctionnelle, permet de
bien identifier l'autorité décisionnaire qui agit au nom de
l'Etat. Au bout du compte, c'est cependant l'Etat qui est responsable et le
ministre chargé de la santé demeure politiquement responsable.
Ainsi, l'article L. 567-4 du code de la santé publique dispose que
" le directeur général de l'Agence du médicament
prend au nom de l'Etat les décisions qui relèvent de la
compétence de l'Agence ". Le même article précise que
les décisions du directeur " ne sont susceptibles d'aucun recours
hiérarchique ". Le ministre peut seulement, en cas de menace grave
pour la santé publique, demander une " seconde
délibération " au directeur. Bien entendu, et il en serait
probablement ainsi en cas de menace grave pour la santé publique, le
Gouvernement peut révoquer le directeur qui est nommé par
décret en Conseil des ministres.
En ce qui concerne l'Agence française du sang, l'article L. 667-7 du
code de la santé publique indique que les décisions relatives aux
agréments d'établissements de transfusion sanguine et de leurs
directeurs ainsi que les autorisations d'importation et d'exportation de
produits sanguins labiles sont prises par le président de l'agence.
Enfin, les articles L. 673-8 et R. 673-8-1 prévoient que
l'Etablissement français des greffes est notamment chargé de la
gestion de la liste nationale des personnes en attente de greffe d'organe ou de
tissus et de l'attribution des greffons, qu'ils aient été ou non
prélevés sur le territoire national, ainsi que de la coordination
des activités de prélèvement et de greffe.