II. UNE AMBITION NÉCESSAIRE : PERMETTRE À LA DÉCENTRALISATION DE JOUER PLUS EFFICACEMENT SON RÔLE DANS L'ADAPTATION DE LA FRANCE AUX ENJEUX DU PROCHAIN SIÈCLE.
A cette fin, trois conditions majeures paraissent devoir
être réunies :
- un préalable régulièrement souligné au cours des
auditions : la clarification des relations avec l'État ;
- mais aussi une adaptation des structures territoriales elles-mêmes aux
nouveaux défis de la société ;
- enfin, la recherche d'une meilleure adéquation des réponses aux
problèmes économiques.
A. LA CLARIFICATION DES RELATIONS AVEC L'ÉTAT APPARAÎT COMME UN PRÉALABLE INDISPENSABLE
Elle nécessite autant la définition d'un
véritable partenariat entre l'État et les collectivités
locales qu'une réforme ambitieuse des administrations de l'État.
M. Jean-Paul Delevoye a particulièrement insisté sur l'importance
du développement d'un tel partenariat entre les collectivités
locales et un Etat à l'autorité réaffirmée.
Evoquant l'évolution de certains Etats voisins qui comporte à ses
yeux le risque à terme d'une dislocation des Etats-nations, il a
estimé que l'Europe devrait se développer à partir d'une
synergie de nations organisées autour d'un Etat affirmant son
autorité dans le cadre d'un partenariat avec les collectivités
locales et que le modèle français de décentralisation
pourrait répondre à un tel objectif en assurant un maillage
efficace du territoire et en constituant un facteur de stabilité
démocratique.
1. Les conditions d'un véritable partenariat
La définition d'un partenariat entre l'État et les collectivités locales passe tout d'abord par un pacte de stabilité des ressources et des charges.
a) Pour un pacte de stabilité des ressources et des charges des collectivités locales
La loi de finances pour 1996 a défini un
pacte
triennal de stabilité financière
qui verra sa deuxième
année d'application en 1997.
Ainsi, son article 32 a prévu l'indexation sur le taux
prévisionnel d'évolution des prix, en 1996, 1997 et 1998, de la
masse constituée par les dotations suivantes : la dotation globale de
fonctionnement (DGF), la dotation spéciale pour le logement des
instituteurs (DSI), les dotations de l'État au fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et au fonds
national de péréquation (FNP), la dotation élu local, la
dotation globale d'équipement (DGE), la dotation générale
de décentralisation (DGD), la dotation de décentralisation pour
la formation professionnelle, la dotation générale de
décentralisation pour la Corse, la dotation départementale
d'équipement des collèges (DDEC), la dotation régionale
d'équipement scolaire (DRES) et la dotation de compensation de la taxe
professionnelle hors réduction pour embauche et investissement (DCTP
hors REI).
Ce
" pacte de stabilité financière "
a permis de
mettre fin aux modifications brutales des règles d'évolution des
concours de l'État opérées les années
précédentes et d'assurer aux collectivités locales une
indispensable stabilité d'évolution de leurs recettes.
M. Robert Pagès a cependant jugé insufisant le pacte de
stabilité des ressources tel qu'il a été établi sur
les bases actuelles.
Si son caractère protecteur pour les collectivités locales
représente indéniablement un apport positif, le pacte de
stabilité financière constitue néanmoins une approche
purement comptable dont le champ d'application se limite aux concours de
l'État aux collectivités, alors que celles-ci se voient imposer
des transferts de charges non compensés ainsi que des obligations
nouvelles résultant de l'application de la législation nationale
et des normes diverses, comme l'a montré le constat établi dans
la première partie du présent rapport. M. Jean-Paul Delevoye a
ainsi pu souligner que le pacte de stabilité financière ne
garantissait la stabilité des dépenses que pour l'Etat et non
pour les collectivités locales.
Aussi les insuffisances de ce pacte sont-elles apparues clairement au fil des
auditions du groupe de travail, M. Pierre-Rémy Houssin regrettant
notamment, au nom de l'APCG, qu'il n'ait pas été mené
à son terme alors que M. Philippe Valletoux, représentant du
Crédit local de France, le qualifiait de "
charte
octroyée
".
Il convient donc désormais d'étendre la portée du pacte
de stabilité aux charges des collectivités locales, ainsi que l'a
proposé M. Jean-Paul Delevoye
à l'occasion du
congrès annuel de l'Association des maires de France. La
négociation avec l'État des conditions d'une stabilisation des
charges apparaît en effet comme une
condition indispensable à
une maîtrise de la fiscalité locale
, car face à la
stagnation des dotations de l'État et à la multiplication des
charges, les collectivités sont aujourd'hui contraintes
d'accroître la pression fiscale locale.
Une telle stabilisation des charges requiert la
réalisation
d'études d'impact
préalables à toute décision
de l'État susceptible d'avoir des incidences financières pour les
collectivités locales. M. Charles Josselin, au nom de l'APCG, tout comme
M. Martin Malvy, au nom de l'APVF, ont ainsi exprimé le souhait, devant
le groupe de travail, d'une systématisation de ces études
d'impact afin d'évaluer précisément le coût de toute
mesure nouvelle pour les collectivités locales.
Sans doute -comme la commission des Lois en a exprimé le souhait lors de
l'examen du projet de loi de finances pour 1997 (cf. avis précité
de M. André Bohl sur les crédits de la décentralisation)-
la mise en oeuvre de cette stabilisation des charges impliquera-t-elle aussi
une adaptation des normes de sécurité, toujours plus nombreuses,
ainsi qu'un ajustement des dates butoirs initialement prévues pour
l'application de certaines réglementations motivées par le souci
de la protection de l'environnement, par exemple en matière de
traitement des déchets, en fonction des contraintes liées au
contexte économique et budgétaire.